UNE ASSOCIATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À AMÉLIORER
EN EUROPE
Les collectivités territoriales sont insuffisamment associées à la mise en oeuvre du plan d'investissement. Certes, la Commission européenne reconnaît leur importance, mais n'a pas prévu une stratégie spécifique pour les impliquer.
Pourtant, le Comité des régions de l'Union européenne, dans l'avis sur le plan d'investissement qu'il a rendu le 16 avril 2015, sur le rapport de M. Claude Gewerc, président du conseil régional de Picardie, appelait à une association étroite des collectivités locales et régionales à la mise en oeuvre du plan d'investissement grâce à l'ouverture des instances de gouvernance du FEIS à ces autorités, à l'élaboration avec elles des critères de sélection des projets éligibles et au suivi du plan. Un double objectif était recherché : d'une part, la mise en cohérence des stratégies d'investissement locales avec les objectifs du FEIS et, d'autre part, la prise en compte des projets de petite taille dont la réalisation permet aussi de lutter contre les disparités territoriales.
Cette insuffisante association des collectivités territoriales se retrouve sur différents aspects , qu'il s'agisse des plateformes d'investissement ou de la création de la plateforme européenne de conseil en investissement et du portail européen de projets d'investissement, pour lesquels les instances locales ne disposent pas d'informations. Elle pourrait avoir des répercussions concrètes, précisément parce que les plateformes d'investissement permettraient de regrouper les petits projets portés par les collectivités territoriales et parce que la plateforme de conseil et le portail ont pour objet d'apporter des informations et une assistance technique sur le montage des projets et donc de faciliter leur réalisation.
Les instances de gouvernance du FEIS - son comité de pilotage et son comité d'investissement - pourraient elles aussi contribuer à mieux associer les collectivités territoriales, en particulier dans l'élaboration des lignes directrices d'investissement qui doivent préciser les critères de sélection des projets et dans la mise en oeuvre et le suivi du plan d'investissement, à la fois en consultant, même de façon informelle, les collectivités territoriales et en coopérant avec le Comité des régions de l'Union européenne.
Concernant les plateformes d'investissement, il semble qu'il y ait encore des difficultés pour les structurer . Leur nouveauté conduit en effet la BEI à revisiter en profondeur leur incidence sur sa politique prudentielle de risque. C'est un sujet crucial, car elles constituent un maillon essentiel de la réussite du plan. Ces plateformes sont en effet susceptibles de créer un effet de levier significatif, et surtout de remédier aux carences du marché qui affectent les projets d'infrastructures petites et moyennes. Des discussions sont en cours avec la Commission européenne afin de négocier des assouplissements ou des adaptations techniques aux modalités d'utilisation du FEIS. Vos rapporteurs ne peuvent qu'appeler à leur aboutissement rapide !
EN FRANCE
En France, le plan d'investissement ne figure pas au centre des préoccupations des collectivités territoriales. Les régions en particulier sont certes en contact régulier avec la BEI, mais elles l'étaient avant le « Plan Juncker » et ne perçoivent pas nécessairement la valeur ajoutée de ce plan. Afin d'assurer la cohérence entre leurs stratégies d'investissement et les objectifs du FEIS, les collectivités territoriales auraient sans doute intérêt à s'approprier davantage le plan .
Pour ce faire, elles doivent pouvoir s'appuyer sur des relais capables d'informer et d'agir au plus près des territoires . La complexité nouvelle que constitue la participation à des projets ne doit pas être un frein à leur émergence si on veut que le plan d'investissement réussisse.
Sur le plan national, l'État, au niveau central et déconcentré, doit assurer une mission d'information et d'accompagnement des acteurs locaux, publics et privés, pour faire émerger des projets de qualité, éligibles au FEIS. En particulier, il pourrait aider à agréger des projets pour constituer des programmes dotés d'une taille critique.
Plus particulièrement, le Commissariat général à l'investissement est chargé de la cartographie et du recensement des projets, ainsi que d'une partie de leur suivi opérationnel, en lien avec les porteurs de projets et les équipes du bureau français de la BEI. Il dispose d'un rôle de conseil et d'orientation, même s'il n'est nullement un point de passage obligé pour les projets qui sont présentés par les porteurs de projet à la BEI. Il peut s'appuyer sur le réseau constitué par les préfectures.
En outre, la Caisse des dépôts et consignations demeure l'interlocuteur naturel des autorités territoriales en matière d'investissement . Elle peut concourir à examiner ensemble l'ingénierie technique et financière de projet la plus propice à l'orientation des opérations éligibles au FEIS. Elle mobilise à cet effet ses capacités financières et techniques pour aider via son réseau régional, les collectivités locales à faire émerger des projets de développement des territoires.
Il faut souligner que le groupe Caisse des dépôts (qui comprend la Caisse des dépôts et consignation et BPI France) entend jouer un rôle clé au service de la relance de l'investissement dans le cadre du « Plan Juncker ». C'est à ce titre qu'il s'est structuré dès le premier trimestre 2015 pour optimiser sa capacité d'intervention. Il veut jouer le rôle de principale interface opérationnelle de la BEI pour les projets sur le territoire français , dans le cadre des accords de partenariat conclus depuis 2013 avec celle-ci.
Son réseau des directions régionales se mobilise en relation avec les collectivités locales et les acteurs du territoire concernés, tout comme ses filiales. Il joue ainsi un rôle majeur dans la sélection et la mise en forme des projets potentiellement éligibles. Évidemment, son intérêt portera en priorité sur les opérations rentrant dans ses objectifs stratégiques d'investissement. Un Comité interne d'orientation des projets créé en avril 2015 réunit l'ensemble des directions et filiales porteurs de projets potentiellement éligibles. Ce dispositif vise à fluidifier, coordonner et surtout accélérer la transmission des projets aux instances délibératives de la BEI. La Caisse des dépôts ne soumet au FEIS que les projets auxquels elle participe, c'est-à-dire auxquels elle apporte un co-investissement avisé (dette, fonds propres, garantie) et/ou une expertise financière technique, et qui lui paraissent potentiellement éligible. BPI France dispose de sa propre filière de traitement des projets initiés par les entreprises.
Le récent accord que la Caisse des dépôts vient de signer avec la BEI pourrait s'avérer déterminant pour une plus grande implication des collectivités territoriales, notamment les plus petites. Il porte sur un montant total de 2 milliards d'euros d'investissements et vise directement des projets de petite et moyenne taille , dont le montant est inférieur à 25 millions d'euros, et qui favorisent la transition énergétique et écologique . Il améliore ainsi l'accès au financement à long terme. En pratique, il vise l'efficacité énergétique des bâtiments, les réseaux d'eau et d'assainissement, les logements sociaux ou encore divers projets pour limiter les effets du changement climatique.