b) Les orientations proposées

Chaque territoire doit établir ses propres priorités. La répartition actuelle du deuxième pilier autour des trois grands axes compétitivité/environnement et paysages, qualité de vie et diversification des activités n'est pas totalement convaincante. « Le développement rural a moins besoin d'axes que de préciser des enjeux » :

- accompagner l'activité de production agricole

Il y a de la place pour deux agricultures différentes : une agriculture qui vise les marchés européens et mondiaux, et une agriculture de proximité, tout aussi utile, qui vise l'excellence sur des marchés plus petits.

Il y a probablement deux voies pour retrouver des revenus décents : la voie de la compétitivité prix qui passe par des aménagements, des restructurations, des conditions d'emploi, des allégements de coûts, la valorisation des sous produits, etc. Mais il y a une autre voie connexe qui est celle de la compétitivité produit (par opposition à la compétitivité prix). Faire de la production agricole autre chose qu'un produit agricole de base. Le faire remonter dans la filière, le faire gagner en valeur ajoutée. Faire en sorte qu'un agriculteur ne soit pas seulement un producteur de matières premières comme il a tendance à se considérer, mais comme un acteur à part entière et même le plus important, le premier échelon d'une filière qui crée de la valeur ajoutée. A charge pour lui de remonter dans la filière et de créer de la valeur ajoutée à son profit au lieu de la laisser aux autres.

Une modification, presque une conversion, qui suppose aussi un changement de mentalité car elle rompt avec une tradition ancestrale de production. Cette conversion peut suivre des quantités d'initiatives : agriculture biologique, relance de productions locales, politiques de qualité, par la voie des AOP/IGP ou des indications locales qui ont parfois autant d'impact que les AOP établies, élaboration de produits finis transformés, voire marketing adapté au goût du moment... Il y a quelques réussites exemplaires dans le secteurs des fruits et légumes : Florette, passé en quelques années de maraîcher à leader mondial des salades en sachet, ou bien la Bonotte, la pomme de terre de Noirmoutier dont la première récolte a été vendue près de 500 € le kilo.... Beaucoup de producteurs ont suivi cette voie, tels les producteurs des Pyrénées orientales qui produisent des « rougettes », des tomates cueillies à point et non plus de simples tomates... Chaque région a ses talents. Grâce à sa diversité, la France a des atouts exceptionnels. De la Manche jusqu'aux départements d'outre mer, en passant par la Bourgogne, le Morbihan et la Corrèze bien entendu....

Certes, de telles actions ne sont pas reproductibles partout mais certains exploitants pourraient échapper à la course à la baisse des coûts s'ils savaient mieux se vendre. « Aujourd'hui,  les agriculteurs ont moins besoin d'acheter des tracteurs que de recruter un responsable de ventes aux grandes surfaces qui saura, simplement, vendre ce qu'ils savent produire ». Ces initiatives doivent être encouragées et le territoire est évidemment l'échelon le mieux placé pour cela.

- travailler avec l'aval

Il faut aider les agriculteurs à travailler en synergie avec leur environnement économique et social, c'est-à-dire, d'abord, avec les industries agro alimentaires et surtout avec les consommateurs, individuels ou professionels. Cette relation de proximité est un potentiel de richesse considérable.

Lors du débat sur la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, plusieurs sénateurs ont évoqué la possibilité de favoriser les achats de proximité : faire en sorte que les cantines scolaires, d'hôpitaux, de lycées, puissent dans une certaine mesure privilégier les ressources locales. Il serait en effet paradoxal qu'un grand groupe mondial de la restauration rapide puisse se positionner comme un acteur du développement local en choisissant des approvisionnements locaux ( think global, act local ) et que les élus chargés du développement local soient contraints, par des règles inadaptées de marchés publics, de s'approvisionner à 2.000 km. La réforme de la PAC est une occasion de faire avancer la réflexion sur ce point.

- valoriser les effets de l'agriculture sur l'environnement

Les « biens publics » déjà évoqués doivent être identifiés, valorisés au niveau des territoires. La liste est longue et s'ajustera nécessairement avec les années. Certaines mesures sont d'ores et déjà admises : le respect des bonnes conditions d'exploitation des terres, la protection des eaux, la biodiversité... D'autres volets émergent notamment le rôle de l'agriculture dans la captation du carbone, la réduction des besoins en énergie non seulement par d'adaptation des modes de production, mais aussi par valorisation des sous-produits de l'agriculture comme la méthanisation ou les biocarburants de deuxième génération. Le groupe de travail fait le pari que toutes ces actions seront mieux valorisées au niveau territorial que par un verdissement du premier pilier.

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