b) Comment renforcer le rôle des organisations de producteurs et des organismes interprofessionels ?

Les pouvoirs publics souhaitent donner du poids aux producteurs en les incitant à se regrouper. Comment ? Par le droit et par les moyens financiers.

La piste juridique : l'adaptation du droit de la concurrence.

Un groupe d'expert à haut niveau (GHN) créé le 5 octobre 2009 à la suite de la crise du secteur laitier, a rendu ses conclusions en juin 2010. Il préconise notamment plusieurs adaptations des règles de la concurrence au profit des organisations de producteurs de lait (32 ( * )) . L'idée est d'autoriser des regroupements de producteurs à hauteur de 3 % voire 5 % du marché de référence. Or, dans une économie ouverte, le marché de référence est le marché européen. De telle sorte que des regroupements de producteurs seraient possibles au niveau de tout l'Ouest de la France incluant par exemple la Bretagne et la Normandie. Des producteurs ainsi constitués auraient une force et un pouvoir qu'ils n'ont pas aujourd'hui. Notre assemblée a adopté une résolution approuvant largement ces propositions

En France, l'objectif serait d'encourager l'organisation des producteurs, au moins dans certains secteurs vulnérables avec des agriculteurs éclatés en milliers d'exploitations. Car il est bien évident que ces soutiens n'ont aucun sens dans des secteurs déjà très organisés comme le sucre ou les céréales. Trois pistes peuvent être évoquées.

La piste contractuelle : la contractualisation.

Cette idée, développée en France, a déjà été présentée à de nombreuses reprises au Sénat. Les relations entre producteurs de matières premières et industriels fabricants peuvent être formalisées par contrat. Un contrat type pourrait être proposé au niveau communautaire portant sur les prix, les quantités et la durée. Chaque profession organisée comme il est dit ci-dessus pourrait alors décliner ce contrat type au vu de ses spécificités régionales. La contractualisation doit donner un peu de visibilité, au moins à court ou moyen terme et permettre à l'agriculteur de mieux ajuster ses coûts à ses revenus. L'État serait garant et non gérant de ces contrats.

L'incitation budgétaire : la prime aux regroupements professionnels.

L'évolution du cadre juridique est une première réponse pour autoriser les producteurs à se regrouper. Mais il faut aussi envisager des mesures d'encouragement pour surmonter les réticences naturelles des professionnels. L'idée d'une incitation financière vient alors à l'esprit.

Le groupe de travail propose de valoriser les agriculteurs qui sont dans une démarche de regroupement professionnel sous la forme d'aides additionnelles aux revenus. On notera que l'OCM fruits et légumes (33 ( * )) du 26 septembre 2007 favorise d'ores et déjà l'organisation des producteurs. Des fonds communautaires peuvent leur être spécifiquement accordés (34 ( * )) pour, par exemple, approfondir la prévention et la gestion des crises, planifier et mettre en valeur la production ... Pourquoi ne pas étendre ces facilités à d'autres secteurs ?

Le groupe de travail est bien conscient que cette proposition n'est pas généralisable. Certains secteurs sont très fortement structurés - le sucre, par exemple, les céréales aussi - et n'ont pas besoin de cette aide additionnelle pour obtenir un résultat qu'ils ont déjà depuis 20 ans ! En revanche, les milliers d'éleveurs des secteurs laitier et de l'élevage sont désarmés dans les négociations de prix. Comment les encourager à se regrouper ? Cette proposition les concerne.

Cette proposition n'est pas non plus généralisable à tous les États membres car ce regroupement professionnel est soit déjà réalisé (Pays-Bas...), soit inenvisageable à court terme (comme en Pologne, où toute forme de collectivisation suscite de vives appréhensions). C'est pourquoi il faut laisser une marge d'appréciation aux États qui peuvent être intéressés à soutenir telle ou telle priorité, au profit des agriculteurs.

Étendre les compétences des organisations interprofessionnelles

Les organisations interprofessionnelles sont souvent vues d'un mauvais oeil par les institutions européennes. La suspicion d'ententes illégales plane. Pourtant, c'est un outil indispensable pour des filières fragiles et de plus en plus intégrées. Le principe de réalité s'impose parfois comme dans le secteur des fruits et légumes. L'OCM reconnaît aux organisations interprofessionnelles de ce secteur un éventail de missions beaucoup plus large que dans les autres secteurs.

Le groupe de travail estime que la réforme de la PAC devrait étendre à d'autres filières les facilités offertes aujourd'hui aux fruits et légumes.


* (32) Voir la communication de M. Jean Bizet devant la commission des affaires européennes du mardi 29 juin 2010 et la résolution n° 157 du Sénat du 16 juillet 2010.

* (33) Règlement du Conseil n° 1182/2007 du 26 septembre 2007.

* (34) L'article 103 de l'OCM unique prévoit des dispositions analogues dans le secteur de l'huile d'olive et des olives de table.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page