d) Apprendre à gérer le risque

Même réduite, la volatilité ne disparaîtra pas. Cela implique que les agriculteurs apprennent à gérer ce risque prix et à l'intégrer dans leur modèle économique. Plusieurs leviers existent. La future PAC devra soutenir ou accompagner leur utilisation.

Les assurances. Elles sont de plusieurs types. Compte tenu de l'ampleur de la volatilité, la création d'une assurance-revenu semble hors de portée. Son coût serait exorbitant.

En revanche, les assurances peuvent être étendues aux aléas climatiques et sanitaires. Le bilan de santé de la PAC en 2008 autorise déjà les États membres à employer des fonds communautaires pour soutenir ces instruments via l'article 68 du règlement des aides directes. Les règles de l'OMC permettent un soutien public à la condition que la perte de récolte soit au moins de 30 % et que l'assurance ne couvre que 70 % de la perte. La future PAC devra amplifier l'effort tout en veillant au caractère concurrentiel du marché de l'assurance récolte pour éviter une captation de l'aide publique par les assureurs.

Les marchés à terme. Composante des marchés financiers, les marchés à terme sur les produits agricoles sont souvent accusés d'avoir amplifié la volatilité des prix du fait de la spéculation. Si le débat reste ouvert sur la part de responsabilité des marchés à terme, une chose est néanmoins certaine, y compris pour leurs partisans : ces marchés n'ont pas pour effet de réduire la volatilité.

Ils ont en revanche deux avantages : celui d'être un indicateur de l'évolution des cours à l'horizon de un ou deux ans  et celui de permettre aux producteurs de se couvrir à court terme contre le risque prix. Ils peuvent sécuriser en partie aussi bien le prix de vente de la récolte que le coût de certains intrants, par exemple l'alimentation animale ou les engrais, afin d'être sûr que le prix de vente couvre bien les coûts de revient et, bien sûr, le revenu de l'agriculteur.

Ces stratégies élémentaires dans la plupart des secteurs économiques, notamment l'industrie, ne sont pas assez répandues dans l'agriculture.

Quel rôle la PAC pourrait-elle jouer ?

Il ne lui revient pas de décréter la création d'un marché à terme. Chaque place est libre de vouloir créer un marché à terme sur tel ou tel sous-jacent ( 30 ( * ) ). Au demeurant, toutes les productions ne s'y prêtent pas. La création d'un marché à terme peut en effet échouer si les conditions nécessaires à son développement ne sont pas réunies (marché large, produit fongible et non périssable, multitude d'opérateurs, besoin de couverture fort...). Les marchés à terme ne sont donc pas une solution pour toutes les filières agricoles. Pour fonctionner, un marché à terme doit avoir de la profondeur, au risque sinon pour les opérateurs de ne pas pouvoir dénouer leurs positions.

Il ne lui revient pas non plus de réglementer ces marchés. Ceci relève de la politique plus générale de régulation des marchés financiers, en particulier des marchés dérivés de gré à gré (31 ( * )) . En revanche, la réforme de la PAC devra inclure un volet « formation des agriculteurs ». L'utilisation des marchés à terme est complexe et onéreuse. L'échelon pertinent de formation reste à préciser (l'exploitation, les organisations de producteurs...), mais il est certain que la PAC ne peut pas faire l'impasse sur l'enjeu de la formation des agriculteurs à la nouvelle économie agricole. Cela dépasse d'ailleurs la question des marchés à terme. C'est l'ensemble de la gestion micro-économique d'une exploitation qui doit être optimisée.

Dans un environnement instable, la formation des agriculteurs doit donner les clefs pour s'adapter en permanence.

Favoriser l'épargne de précaution. Les bonnes années, s'il y en a, doivent servir à passer le cap des mauvaises années. Sans anticiper le débat sur des aides directes contracycliques ou la création de fonds mutuels, votre groupe de travail estime qu'une adaptation de la fiscalité et de la comptabilité agricole suffirait déjà à améliorer les choses. En effet, M. Philippe Chalmin a relevé que la comptabilité agricole n'autorisait pas les exploitants à provisionner dans les comptes le risque de fluctuation des cours. Il n'est donc pas possible d'inscrire des provisions les bonnes années, ce qui pousse des exploitants à consommer les revenus supplémentaires. Il paraît nécessaire d'obtenir une modification du plan comptable agricole pour permettre de thésauriser les bonnes années afin d'assumer les baisses de prix, les mauvaises. La spécificité des marchés agricoles justifierait cette dérogation.


* (30) Le blé, l'orge, la poudre de lait...

* (31) Sur cet aspect, le groupe de travail renvoie aux travaux précités du groupe de réflexion sur l'avenir de l'agriculture.

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