b) Des instruments financiers
L'Union européenne devrait consacrer, en 2009, 11,186 milliards d'euros au domaine « Emploi et affaires sociales », soit 8,3 % des crédits accordés, loin derrière les dépenses agricoles (56,165 milliards d'euros).
À cette somme, il convient néanmoins d'ajouter une partie des crédits accordés au titre de la politique de cohésion . Réformée à l'occasion des perspectives financières 2007-2013, la politique de cohésion se décline désormais en trois objectifs : un objectif « Convergence », qui vise à apporter une aide à la croissance et à la création d'emplois dans les régions les moins développées de l'Union ; un objectif « Compétitivité et emploi » qui est conçu pour aider les États membres les plus riches à faire face aux évolutions économiques et sociales, à la mondialisation et à la transition vers la société de la connaissance ; et un objectif « Coopération territoriale » destiné à stimuler le coopération transfrontalière principalement dans les domaines économique et environnemental. La politique de cohésion, par le biais de ses deux premiers objectifs, participe donc pleinement à la politique sociale de l'Union européenne. Elle est dotée d'un budget de 307,6 milliards d'euros pour la période 2007-2013, dont 81,7 % iront à l'objectif « Convergence », 15,8 % à l'objectif « Compétitivité et emploi » et les 2,5 % restants à l'objectif « Coopération territoriale. La politique de cohésion est financée par le biais de trois fonds : le FEDER, le fonds social européen et le fonds de cohésion.
Consacré à l'emploi et à la formation professionnelle, le fonds social européen est sans doute le fonds qui joue aujourd'hui le plus grand rôle dans la mise en oeuvre de la politique sociale européenne. Il intervient à la fois dans le cadre de l'objectif « Convergence » et de l'objectif « Compétitivité et emploi ». Créé dès 1957, il était à l'origine destiné à appuyer la mobilité géographique et professionnelle des travailleurs. Face à la montée du chômage, son rôle a cependant évolué au fil du temps et il constitue aujourd'hui le principal instrument financier de la stratégie européenne pour l'emploi. A ce titre, il apporte un concours financier aux actions et aux dispositifs mis en place dans les États membres dans plusieurs domaines : l'adaptation des travailleurs et des entreprises ; l'accès à l'emploi des demandeurs d'emploi, des personnes inactives, des femmes et des migrants ; l'intégration sociale des personnes défavorisées et la lutte contre la discrimination sur le marché du travail ; l'amélioration des compétences ; la réforme des systèmes éducatifs et la mise en réseau des établissements d'enseignements supérieur, des centres de recherche et de technologie et des entreprises. Le fonds est doté de 75 milliards d'euros pour la période 2007-2013, dont plus de 5 milliards devraient être attribués à la France. Toutefois, l'attribution des crédits par le fonds est régi par un certain nombre de principes, au premier rang desquels ceux du cofinancement et de l'additionnalité. Les crédits ne peuvent se substituer aux efforts financiers nationaux - qu'ils soient réalisés par l'État, les conseils régionaux ou généraux, les communes ou les chambres consulaires - mais viennent simplement compléter ce financement.
Les projets cofinancés en France par le
fonds social européen
En France, c'est le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi qui est chargé, de la gestion du fonds social européen. Au niveau régional, cette gestion est dévolue aux préfets de région. En décembre 2008, près de 2 500 projets avaient déjà été retenus, dans le cadre du programme « Compétitivité et emploi 2007-2013 », pour bénéficier d'un cofinancement par le fonds social européen. Ces projets, qui visent à soutenir l'emploi, la formation et l'insertion professionnelle, peuvent être classés en plusieurs catégories, en fonction des objectifs qu'ils poursuivent : - le développement de services spécifiques d'emploi, de formation et de soutien dans le contexte des restructurations sectorielles ; - l'aide au travail indépendant et à la création d'entreprise ; - la modernisation et le renforcement des institutions du marché du travail ; - la mise en oeuvre de mesures actives et préventives sur le marché de l'emploi ; - la mise en place de parcours d'insertion et de retour à l'emploi pour les personnes défavorisées ; - l'introduction de mesures pour améliorer l'accès à l'emploi et renforcer la participation durable des femmes au marché du travail ; - le développement de systèmes d'apprentissage tout au long de la vie dans les entreprises ainsi que la mise en place de formations et de services aux employés ; - l'élaboration, l'introduction et la mise en oeuvre de réformes dans les systèmes d'éducation et de formation ; - l'adoption de mesures pour renforcer la participation dans l'éducation et la formation tout au long de la vie - et la promotion de partenariats, de pactes et d'initiatives par la mise en réseau des acteurs concernés. Les projets sélectionnés émanent tant du secteur public que du secteur privé. Parmi les acteurs publics, on compte ainsi l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE), l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) ou les groupements d'établissements publics locaux d'enseignement (GRETA). Au niveau local, les missions locales, comme les collectivités territoriales (communes, communautés d'agglomérations, conseil général, conseil régional) sont à l'origine de nombreuses initiatives. Le secteur privé est également porteur de nombreux projets sélectionnés, qu'il s'agisse des syndicats (CGPME), d'entreprises - notamment de PME - qui mettent en oeuvre des actions de formation, ou des associations se consacrant à l'emploi ou à l'insertion des personnes en difficulté. |
L'Union européenne dispose d'autres instruments financiers en matière sociale. Le programme Progress , programme communautaire pour l'emploi et la solidarité sociale, permet également à l'Union de soutenir financièrement la promotion des actions de formation et de retour à l'emploi dans les États membres, ainsi que des projets innovants de lutte contre la discrimination dans le monde du travail. Instrument effectif de la méthode ouverte de coordination, il est notamment censé favoriser l'échange de bonnes pratiques entre États membres. Doté de 657,6 millions d'euros pour la période 2007-2013, ses crédits sont répartis en cinq sections : emploi, protection et inclusion sociales, conditions de travail, diversité et lutte contre les discriminations et égalité entre les femmes et les hommes.
Le fonds européen d'ajustement à la mondialisation , est peut-être, quant à lui, le plus emblématique en ces temps de crise. Créé en décembre 2006, il apporte une aide aux travailleurs venant de perdre leur emploi au sein de secteurs économiques bouleversés par la modification des structures du commerce mondial résultant de la mondialisation, dès lors que ces licenciements ont des incidences négatives importantes sur l'économie régionale ou locale. Le fonds correspond à un véritable changement de stratégie de la Commission à l'égard de la globalisation. Celle-ci n'était envisagée jusque là que comme une opportunité en termes de croissance et de création d'emploi alors que les restructurations dans les secteurs les moins compétitifs qu'elle entraîne étaient, jusqu'alors, relativisées. L'augmentation de ces dernières ont contribué à une forme de prise de conscience de la part de la Commission, doublée d'une responsabilisation : l'Union européenne étant compétente pour mener les négociations relatives au commerce extérieur et à l'ouverture concomitante des frontières, il apparaissait logique qu'elle prenne en charge une partie des effets négatifs des politiques qu'elle contribue à mettre en oeuvre. Il convient de noter que, loin d'être une spécificité européenne, le fonds européen d'ajustement à la mondialisation s'inspire directement du Trade Adjustment Assistance Program , créé aux États-Unis en 1962 afin de pallier les effets engendrés par l'adoption du Trade expansion act. Sur les vingt-cinq dernières années, ce sont deux millions de travailleurs américains qui ont bénéficié du soutien de ce programme doté annuellement d'environ 1,2 milliard de dollars.
Doté de 500 millions d'euros pour la période 2007-2013 et permettant un cofinancement communautaire à hauteur de 50 %, ce fonds a jusqu'ici été sous-utilisé en raison de conditions d'octroi et d'utilisation par trop drastiques :
- la complexité du mécanisme de financement : les États doivent faire l'avance des fonds et sont remboursés a posteriori sans avoir la garantie de l'éligibilité du dossier qu'ils présentent au moment où ils font l'avance ;
- le caractère relativement strict des critères de déclenchement du fonds : le cofinancement n'est possible qu'à la condition que 1 000 salariés soient licenciés, soit dans une grande entreprise et ses sous-traitants dans un État membre, soit dans des PME opérant dans un même secteur au sein d'une région déterminée ;
- la difficulté à démontrer le lien avec la mondialisation et la valeur ajoutée du Fonds par rapport aux mécanismes nationaux.
Montants accordés depuis la création du fonds
Année |
Pays |
Secteur concerné |
Montant accordé |
2007 |
France |
Automobile |
3 816 820 € |
2007 |
Finlande |
Télécoms |
2 028 538 € |
2007 |
Allemagne |
Télécoms |
12 766 155 € |
2008 |
Portugal |
Automobile |
2 425 675 € |
2008 |
Malte |
Textile |
681 207 € |
2008 |
Lituanie |
Textile |
298 944 € |
2008 |
Espagne |
Automobile |
10 478 778 € |
2008 |
Italie |
Textile |
35 158 075 € |
2009 |
Espagne |
Automobile |
2 694 300 € |
Deux ans après la création du fonds, dans le contexte actuel d'une crise économique et financière à l'échelle mondiale, la Commission a proposé une réforme de son règlement en vue d'assouplir ses conditions d'intervention. Quatre modifications notables ont ainsi été apportées :
- dérogeant à la nécessité de démontrer un lien avec la mondialisation, le fonds pourra désormais être mobilisé pour faciliter la reconversion des salariés licenciés en raisons de restructurations induites par la crise ;
- l'abaissement des seuils d'intervention à 500 personnes licenciées ;
- la possibilité d'utiliser désormais la subvention sur vingt-quatre mois contre douze auparavant ;
- la possibilité laissée au fonds de cofinancer à 60 % les opérations, contre 50 % aujourd'hui.