III. FAIBLESSE DU DOLLAR ET AIDES INDIRECTES MASSIVES À BOEING : DES HANDICAPS POUR AIRBUS
A. LE NIVEAU ACTUEL DU DOLLAR PÉNALISE AIRBUS
Les difficultés actuelles de l'avionneur européen ne sont pas seulement dues à sa structure capitalistique rigide et à sa gouvernance bicéphale. Airbus est actuellement affecté par la faiblesse du dollar au regard de l'euro, avec un euro à 1,35 dollars 37 ( * ) . Le dollar étant la monnaie de facturation dans l'aéronautique, l'entreprise doit supporter ces surcoûts monétaires dans la concurrence avec l'américain Boeing. Car, si les carnets de commande sont pleins, ils se traduisent en réalité par des marges très faibles en raison des coûts liés au change.
Airbus est extrêmement dépendant des taux de change, puisque l'entreprise vend 100 % de ses produits en dollars et que 50 % de ses coûts sont en euros, à la différence de Boeing pour qui 90 % des coûts sont en dollars. Quand le dollar baisse de 10 cents, Airbus perd 1,2 milliard d'euros de recettes . Or depuis 2001, date de lancement de l'A380, le dollar a perdu 40 % de sa valeur. En six ans, la perte de compétitivité liée à la baisse du dollar par rapport à l'euro est donc de 20 % 38 ( * ) . Aucune entreprise, aussi performante soit-elle ne peut durablement supporter une telle dégradation de sa compétitivité. Si cette situation devait se prolonger et même s'amplifier, l'externalisation pourrait devenir inévitable, dans la mesure où elle permet de déplacer les centres de coûts vers la zone dollar. Une telle perspective est-elle acceptable pour l'Europe ?
B. LES AIDES INDIRECTES VERSÉES À BOEING CONSTITUENT UNE DISTORSION DE CONCURRENCE
Airbus doit faire face aux subventions massives dont bénéficie son concurrent Boeing . Celles-ci sont tantôt directes (aides du Pentagone aux programmes militaires de recherche) ou indirectes par l'intermédiaire des sous-traitants eux-mêmes subventionnés. Cela crée un déséquilibre supplémentaire en défaveur d'Airbus dont le système « d'avances remboursables » est beaucoup plus transparent 39 ( * ) . Par ailleurs, les prêts reçus par Airbus sont progressivement remboursés, à la différence des subventions publiques perçues par son concurrent américain.
Vos rapporteurs tiennent à souligner que les subventions fédérales versées à Boeing à travers les crédits de recherche et de développement de la NASA et du Pentagone (ministère de la Défense) permettent non seulement de transférer des dépenses engagées par l'avionneur américain en matière de recherche mais aussi de bénéficier de transferts de technologie gratuits du militaire vers le civil. Boeing bénéficie également des capacités technologiques de ses sous-traitants japonais dans la fabrication des ailes. C'est pourquoi Airbus pourrait légitimement prétendre à bénéficier d'un support public équivalent. Actuellement l'avionneur ne reçoit que 53 millions d'euros d'aides des gouvernements européens et de la Commission européenne, ce qui apparaît dérisoire en comparaison des 800 millions de dollars 40 ( * ) (environ 600 millions d'euros) d'aides reçues par Boeing chaque année 41 ( * ) .
* 37 Au 22 juin 2007, un euro vaut 1,347 dollars.
* 38 Dans la mesure où ce ne sont que 50 % des coûts qui sont en euros.
* 39 Ce qui ne l'empêche d'ailleurs pas d'être attaqué par les Etat-Unis devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
* 40 Uniquement pour la branche civile.
* 41 Le groupe Boeing ayant bien d'autres activités que la production d'avions de ligne, ces chiffres ne peuvent être rapprochés directement. Le rapport réel n'est donc pas de un à douze, mais de un à six, ce qui reste considérable.