1.2. DE MULTIPLES APPLICATIONS

La génomique, la bioinformatique, les biopuces et la chimie combinatoire vont offrir des possibilités thérapeutiques remarquables selon des approches très diverses : la sélection de cibles d'intérêt pour la mise au point de médicaments traditionnels, la thérapie génique, les vaccins, la pharmacogénomiques, le diagnostic moléculaire et la production de protéines thérapeutiques.

1.2.1. L'UTILISATION POUR LA RECHERCHE PHARMACEUTIQUE DES CIBLES ISSUES DE LA GÉNOMIQUE

L'efficacité d'un criblage est directement liée à la pertinence de la cible choisie. On comprend aisément, que tester les réactions de milliers de molécules sur des produits biologiques non impliqués dans des processus pathogènes n'offre aucun intérêt. Le choix des cibles est donc essentiel et l'apport de la génomique est considérable. La génomique permet de mieux connaître les bases moléculaires des maladies.

1.2.1.1. La connaissance du génome humain

Les informations issues de l'analyse systématique du génome humain vont permettre d'identifier les gènes liés à certaines maladies et leur fonction biologique via leurs produits : les protéines.

" Les gènes deviennent la voie royale pour découvrir des médicaments : connaître la séquence d'un gène, en déduire la structure de la protéine qu'il code, c'est identifier autant de cibles biologiques, autant de sites d'interventions sur lesquelles ces médicaments pourront agir.

Sur les milliers de maladies connues, seules une centaine (au plus 150) représentent un enjeu majeur de santé publique et nécessitent un traitement (ou une amélioration du traitement). La majorité de ces maladies, comme le cancer, l'hypertension, l'athérosclérose ou certains (troubles mentaux, ont un déterminisme génétique multifactoriel.

En estimant que le nombre de gènes impliqués dans de telles maladies oscille entre 5 et 10 (ce qui est généralement admis), on voit que le nombre de gènes liés à une pathologie se situe entre 500 et 1 000. Si l'on considère que ces gènes et leurs produits interagissent avec 3 à 10 autres produits, qui sont autant de sites d'intervention potentiels, on aboutit à un total de 3 000 à 10 000 cibles d'intérêt pour des médicaments. Or, c'est précisément le nombre de sites moléculaires qui sont susceptibles, d'ici six ans, d'émerger du décryptage du génome humain !

Autrement dit, c'est par au moins un facteur 10 que l'on peut espérer pouvoir, en quelques années, multiplier le nombre de cibles actuellement exploitées (417 seulement, rappelons-le) ! Sans compter que la plupart des cibles fournies par la génomique (comme des récepteurs nucléaires, l'ADN ou les canaux ioniques) sont peu explorées aujourd'hui dans le processus de mise au point des médicaments. "
27( * )

La création de cibles issues de la génomique passe généralement par la création d'ADN complémentaires (ADNc). En effet, les ARN messagers (ARNm), ces copies d'ADN, porteuses de l'information nécessaire pour fabriquer les protéines correspondant aux gènes, pourraient être analysés et conservés pour fournir en temps utile des protéines cibles. Mais ce sont des molécules très fragiles. On utilise une astuce technique : à partir des ARNm, on synthétise, en jouant sur la complémentarité des bases nucléotidiques des ADN complémentaires (ADNc), copies stables des ARNm, offrant l'intérêt majeur de pouvoir être stockées, copiées et séquencées.

Ces ADN permettent, lorsque l'on veut effectuer un criblage précis, de produire les protéines codées par les gènes correspondants, afin de tester les molécules : il s'agit principalement de protéines spécifiques comme des enzymes et des récepteurs, cibles privilégiés pour la recherche pharmaceutique.

1.2.1.2. La connaissance des génomes bactériens

La connaissance des génomes bactériens permet également de cribler des familles de molécules de type antibactérien et des vaccins.

Un exemple de cibles potentielles pour de nouveaux antibactériens permettant de contourner les phénomènes de résistance aux antibiotiques : le blocage du processus de réplication de l'ADN bactérien, déduit de la connaissance du génome d' Escherichia coli .

" Autre piste, le processus de réplication de l'ADN bactérien offre aussi des cibles intéressantes. Chez Escherichia coli, par exemple, plus de trente protéines sont impliquées dans la réplication de l'ADN. La mutation des gènes codant ces protéines entraîne généralement un blocage de la réplication, suivi d'un arrêt de la croissance et souvent de la mort bactérienne. D'autre part, la machinerie de réplication est similaire chez la plupart des bactéries. De ce fait, un inhibiteur de la réplication a toutes les chances d'avoir un spectre d'activité large. A l'heure actuelle une famille d'antibactériens, les quinolones, a pour cible les topo-isomérases, enzymes impliquées dans les changements de conformation de l'ADN. Mais on connaît maintenant une vingtaine d'enzymes (polymérase III holo-enzyme et ses sous unités, ou encore DnaA, DnaB et DnaC...) qui interviennent dans la phase initiale de réplication de 1'ADN : ce sont autant de cibles potentielles pour de nouveaux agents antibactérien. " 28( * )

Depuis le premier séquençage d'un génome bactérien, celui d' Haemophilus influenzae en 1995, de nombreux autre ont été totalement séquencés ou vont l'être prochainement. Certains chercheurs estiment que les génomes de la majorité des bactéries pathogènes pour l'homme seront séquencés au début des années 2000. Il est certain qu'un génome bactérien correctement reconstitué et annoté apporte de nouvelles cibles permettant le criblage, soit de nouveaux produits antibactériens, soit de vaccins (ainsi que cela est exposé au chapitre 1.2.3., notamment en ce qui concerne les génomes d' Helicobacter Pylori et de Mycobacterium tuberculosis ).

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