2.1.2. LES ORIENTATIONS DE LA RECHERCHE
Le 1 er juin 1999, les priorités de la recherche française ont été fixées par le deuxième Comité interministériel de la recherche scientifique et technologique (CIRST). Elles vont dans un sens favorable aux sciences du vivant : le relevé des conclusions du CIRST, précise que " Dès 1999, quatre domaines d'actions feront l'objet d'un développement immédiat : la génomique et la " post-génomique ", les technologies appliquées à la médecine, les sciences du cerveau et de la cognition, la lutte contre les maladies infectieuses " .
RÉCAPITULATIF DES ACTIONS PRIORITAIRES LANCÉES
EN
1999
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Les actions concertées incitatives (ACI) : elles permettent l'élaboration de programmes de recherche destinés notamment à favoriser l'émergence de disciplines nouvelles et la formation de spécialistes dans ces domaines, à encourager des partenariats public/privé et à assurer un soutien à certaines politiques publiques. |
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Les réseaux de recherches technologiques (RT) : ils associent des acteurs de la recherche publique et des industriels, à partir de l'identification des besoins, sur des projets porteurs de croissance et de création d'emploi. |
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Sciences du vivant (395 MF) :
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80 MF
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Sciences de l'information et de la communication (175
MF) :
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80 MF
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Sciences humaines et sociales (85 MF) :
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20 MF
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Sciences de la planète et de l'environnement (45
MF) :
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10 MF
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Énergie (20 MF) :
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20 MF |
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Génie civil, architecture, urbanisme et transports
(75
MF) :
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65 MF
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Aéronautique (10 MF)
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Source : AFP Sciences n° 1189. 3 juin 1999. |
De plus,
le Ministre de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la
Technologie a confirmé, en septembre 1999, que la biologie constituait
une priorité de la recherche française et que : " la
génomique [...] recevra plus de 2 milliards de francs sur trois
ans "
72(
*
)
.
Mais les organismes publics de recherche doivent participer encore plus qu'ils
ne le font au développement des sciences de la vie. L'enveloppe
consacrée à celles-ci par le CNRS est de 300 millions de
francs, dont 15 millions de francs pour le programme Génome lors de
sa création, puis 20 millions de francs pour l'année
suivante. Pour 1999, au CNRS, le budget des sciences de la vie est, certes, en
progrès de 10 % ; mais il faudrait que cette tendance
s'amplifie. Le Professeur Pierre CHAMBON conseille de répartir autrement
ce budget pour prendre en compte l'évolution de la science et le
développement considérable de certains secteurs, tout
particulièrement celui de la biologie. Il rappelle qu'aux
États-Unis, en dix ans, le budget de la biologie et de la
biomédecine a plus que doublé en dollars constants
73(
*
)
.
2.1.2.1. Affiner la connaissance de l'ADN et de ses " produits ", les protéines
2.1.2.1.1. Les " non-gènes " du génome
L'ADN est composé d'environ trois milliards de paires de bases (A , G, C, T) mais moins de 10 % seulement de ces bases constituent les séquences nommées gènes, que les cellules utilisent pour synthétiser des protéines.
La régulation génétique
Certaines des séquences non porteuses de gènes
gouvernent des fonctions essentielles, telles l'activation ou l'inhibition de
gènes. En effet, toutes les protéines codées par les
gènes ne sont pas synthétisées uniformément et en
quantité similaire quels que soient l'instant ou le lieu de l'organisme
considéré. Certaines protéines ne sont
synthétisées que dans certains types de cellules comme les
cellules musculaires ou les cellules nerveuses. D'autres ne sont produites
qu'à certains moment du cycle cellulaire.
Ceci s'explique par la présence, sur la chaîne d'ADN de sites qui
sont soit promoteurs soit répresseurs et qui régulent
l'activité du gène c'est-à-dire la production de
protéines.
Il est essentiel que les chercheurs se penchent sur l'étude de ces sites
car il pourrait être plus aisé d'agir sur eux plutôt que sur
les gènes pour moduler l'expression des protéines et donc soigner
les maladies.
L'intérêt de cette approche est tel que des firmes s'y
intéressent déjà. La société Genset a
déjà procédé au clonage de séquences de
régulation. La société Genelabs en Californie travaille
sur le développement de petites molécules pharmaceutiques pouvant
agir au niveau de ces séquences régulatrices en activant ou
désactivant la séquence codante : ces molécules se
lieraient directement à des séquences spécifiques de l'ADN
en s'y incrustant. Elle a déjà sélectionné environ
700 séquences spécifiques d'ADN qui peuvent donner lieu
à la découverte de nouvelles molécules pharmaceutiques.
Les microsatellites
Certaines régions de l'ADN non-codant sont composées de microsatellites, courtes séquences répétitives d'une combinaison particulière des quatre bases de l'ADN (par exemple : ATTCAGATTCAGATTCAG). Les généticiens leur ont récemment découvert un rôle important et de nombreuses fonctions : leur nature répétitive les rend particulièrement sujets à des augmentations ou des réductions de longueur qui ont parfois de lourdes conséquences pour l'organisme. Chez certaines bactéries pathogènes, une variation du nombre de répétitions favorise l'apparition de nouvelles propriétés et la survie en cas de modifications de l'environnement. Chez l'être humain aussi, certains microsatellites ont vraisemblablement des effets importants ; leur nombre peut atteindre 100 000 dans le génome. Actuellement les seules fonctions connues des microsatellites humains sont négatives (ils sont notamment à l'origine de maladies neurologiques). En attendant de trouver des moyens d'action sur ces microsatellites, les chercheurs devraient étudier attentivement les possibilités de les utiliser dans le domaine du diagnostic précoce.
DÉPISTER LE CANCER
" Les microsatellites amélioreront
bientôt le
dépistage précoce du cancer. On détecte aujourd'hui
jusqu'à une seule cellule cancéreuse parmi
10 000 cellules normales en recherchant des mutations de
gènes, tels les gènes p53 et ras (certaines formes de ces
gènes prédisposent au cancer). Toutefois, ces mutations ne se
produisent pas dans tous les cancers, ni même dans tous les cancers d'un
même type.
Les microsatellites fournissent une autre méthode de dépistage
précoce du cancer, car la fréquence d'augmentation ou de
réduction des microsatellites est bien plus importante dans certaines
cellules cancéreuses que dans les cellules normales. De telles
modifications, qui portent souvent sur de nombreux microsatellites
différents, sont facilement délectables. Cette méthode
permet aujourd'hui de déceler une cellule cancéreuse parmi
environ 500 cellules normales.
Les modifications des microsatellites dans les cellules cancéreuses
furent découvertes en 1993 par Manuel PERUCHO, de l'Institut de
recherches biologiques de La Jolla, en Californie. Étudiant la forme
héréditaire d'un cancer du côlon, il observa que la
longueur des microsatellites de cellules cancéreuses était
différente de celles des cellules normales du même patient. On a
ensuite montré qu'une des anomalies qui provoquait ces modifications se
situe dans un gène codant une enzyme responsable de la correction de la
longueur des microsatellites. La perte du gène fonctionnel augmenterait
vraisemblablement la probabilité de rencontrer des erreurs non
corrigées.
Enfin, Richard BOLAND, de l'Université de San Diego, et d'autres
généticiens ont inséré un chromosome humain porteur
d'un gène normal de réparation de l'ADN dans des cellules
cancéreuses cultivées en laboratoire. Ils ont observé que
le gène introduit ralentissait la fréquence de mutation des
microsatellites des cellules cancéreuses.
Toutefois, les souris génétiquement modifiées
nommées
"knock-out "
ne possèdent pas le gène
codant l'une des principales protéines de réparation; elles ne
vivent que peu de temps et présentent de nombreux types de cancers.
Pourtant les mutations de leurs microsatellites ne sont plus fréquentes
dans aucune de leurs cellules cancéreuses. L'instabilité des
microsatellites semble être plus un symptôme que la cause du
cancer. Ces changements ne formeraient qu'une partie des nombreuses
modifications génétiques qui se produisent en cascade dans tout
le génome d'une cellule, lors du processus de cancérisation.
Néanmoins, cette association est suffisamment fréquente pour que
l'instabilité des microsatellites fournisse aux médecins un
nouvel outil de dépistage. Des essais cliniques concluants de
dépistage précoce, à l'aide de microsatellites, ont
été d'abord effectués pour des cancers colorectaux et pour
des cancers de la vessie. Ils sont aujourd'hui utilisés pour de nombreux
autres types de cancers. Cependant, ces tests ne sont encore utilisés
que dans des recherches. On espère qu'ils serviront aussi à
déterminer le type de cancer dont souffrent les malades. "
(74( * ))
2.1.2.1.2. La protéomique
L'intérêt principal de l'acquisition de nouvelles
connaissances sur les génomes est de permettre de mieux cerner la
formation des protéines, leur fonction et leur structure. Cette
étude des protéines, la protéomique, doit être
réalisée au fur et à mesure des progrès de la
génomique.
" La recherche académique doit prendre le relais de l'industrie.
Cette décennie a connu des progrès scientifiques inimaginables,
mais il y a sûrement trop d'entreprises qui s'occupent de cartographier
le génome humain et pas assez qui s'intéressent au fonctionnement
de la cellule. "
75(
*
)
Mieux comprendre l'épissage
Épissage, un terme peut-être inapproprié,
est la
traduction du mot anglais
" splicing "
. Il désigne un
processus génétique un peu complexe. Au niveau du gène,
l'information génétique est fragmentée en segments d'ADN
appelés exons, que l'on retrouve au niveau de l'ARN messager,
séparés par des segments d'ADN sans correspondance dans l'ARN
messager, les introns. Au début de la transcription de l'ADN, l'ARN
prémessager subit une série de modifications qui conduisent
à la mise bout à bout des exons et à l'élimination
des introns. Ce processus est appelé épissage ; il n'est pas
figé et n'aboutit pas toujours au même résultat. Suivant la
façon dont les exons se réorganisent (certains sont parfois
éliminés), les ARN messagers sont différents, alors qu'ils
sont issus de la même séquence d'ADN. Un gène peut coder
une protéine différente de celle à laquelle l'information
génétique de base devrait donner naissance. Des
dysfonctionnements de l'épissage peuvent avoir des conséquences
pathologiques.
Cette connaissance qualitative et non plus quantitative des gènes doit
être approfondie, car elle présente de véritables
opportunités thérapeutiques. En France, la société
privée ExonHit Therapeutics travaille sur ce sujet en collaboration avec
l'Institut de Génétique, Biologie moléculaire et
cellulaire (Strasbourg), l'Hôpital Paul Strauss (Strasbourg)
l'hôpital Cochin-Port-Royal (Paris) et le Centre de Pathologies
infectieuses et immunologiques (Tours).
Connaître les fonctions, les interactions et les structures des protéines
La
connaissance des séquences génétiques permettra, à
terme, d'établir un classement fonctionnel des protéines (les
protéines régulatrices, celles qui sont douées de
propriétés enzymatiques, celles qui transportent les ions, etc.).
Toutefois, cette approche classique a ses limites. Les chercheurs regroupent
les gènes et les protéines correspondantes en classes
fonctionnelles en se fondant sur les similitudes observées dans les
séquences de leur ADN. Cependant l'on constate aujourd'hui que des
gènes de séquences apparemment différentes peuvent coder
pour des protéines ayant des structures tridimensionnelles et des
fonctions très similaires. De plus l'approche génomique, dans la
majorité des cas, permet d'établir la structure primaire,
" linéaire ", des protéines mais pas de prédire,
à partir d'une seule séquence, la structure bidimensionnelle
d'une protéine. Or, la connaissance de cette structure dans l'espace est
indispensable pour comprendre la fonction de la protéine au niveau
atomique et étudier, par exemple les serrures physiologiques où
pourrait entrer les clés que sont les molécules
thérapeutiques.
Ce constat amène à émettre quelques recommandations en
matière de recherche :
- Il conviendrait de tenir compte de la nouvelle stratégie
élaborée par les chercheurs américains ; ils ont
constaté la quasi-impossibilité d'établir les structures
tridimensionnelles des protéines correspondant à l'ensemble des
gènes dont on a déjà déchiffré les
séquences. Ils ont alors décidé
76(
*
)
de déterminer les structures
d'un échantillonnage des protéines qui soient
représentatives de tous les types de structures trouvées dans la
nature, de manière à disposer de références
générales pour l'ensemble des protéines existants. La
connaissance de ces structures " chefs de file ", améliorerait
les programmes informatiques permettant de prédire la structure et la
fonction des autres protéines à partir des séquences de
leurs gènes.
- Il faut investir dans des programmes de bio-informatique permettant des
comparaisons fines entre les structures des diverses protéines, sachant
que ces comparaisons peuvent donner une idée des fonctions de ces
protéines.
- Il faut également, au niveau de la recherche fondamentale
étudier la voie de la cristallographie à haut débit. Les
biopuces permettent d'assigner une fonction biochimique aux
protéines ; celles-ci peuvent être
synthétisées, purifiées puis cristallisées. La
cristallographie à haut débit permet ensuite d'obtenir les
structures des protéines en trois dimensions.
- Il convient de s'intéresser aux interactions des protéines
pour connaître les fonctions de ces dernières. On peut citer en ce
domaine la stratégie développée par la
société française Hybrigenics, créée en 1997
grâce à une participation financière de l'Institut Pasteur.
Elle vise à établir le réseau des interactions entre les
protéines grâce à des techniques d'hybridation et de
criblage : à partir d'une protéine
" appât ", elle crible rapidement l'ensemble des
protéines " proies ". Elle se base pour cela sur des
méthodes laboratoires, dites du " double-hybride " et du
" triple-hybride ".
- Il est indispensable de développer la recherche en biologie
structurale. Notre pays souffre en ce domaine d'un retard grave. Or, la
génomique et la bio-informatique ne donneront les résultats
thérapeutiques attendus qu'en restant liées en permanence aux
données de la biologie structurale, notamment à la conformation
spatiale des protéines.
2.1.2.2. Les biopuces en France
Il faut
confirmer l'orientation de la recherche française vers les biopuces,
compte tenu de leurs multiples applications, de la nécessité
d'améliorer leurs performances et de l'attitude du principal producteur,
Affymetrix. Cette firme ne fabrique pas des puces à la demande mais
collabore à des projets scientifiques seulement lorsqu'ils lui
paraissent intéressants. À cette politique de restriction des
thèmes de recherche, Affymetrix ajoute une protection jalouse de
certains brevets, notamment celui qui protège sa capacité
à mettre plus de 400 séquences d'ADN par centimètre
carré de surface. Pour contourner ce brevet, certaines
sociétés développent des biopuces utilisant des surfaces
constituées de microcuvettes. Pour Ron LONG, un dirigeant du groupe
anglo-suédois Amersham Pharmacia, évoquant ce domaine
précis,
" la protection de la propriété
intellectuelle va être un véritable champ de mines "
.
Outre la nécessité de s'affranchir de la tutelles d'Affymetrix,
celle de perfectionner les biopuces doit guider les chercheurs et les firmes
française. Ces perfectionnements concernent plusieurs domaines.
De la synthèse ex situ à la synthèse in situ
-
L'amélioration de la synthèse
ex situ
des sondes d'ADN
destinées à être fixées sur les biopuces est l'objet
de recherches menées, dans le cadre du programme génome du CNRS
par une équipe strasbourgeoise et par un groupe réunissant des
chercheurs du laboratoire de biologie de l'École supérieure de
Physique et de Chimie industrielles de la ville de Paris, de l'École
normale supérieure et de l'Institut Curie.
- La synthèse
in situ
des sondes, qui représente la
solution d'avenir est actuellement étudiée dans le cadre du
projet ROSA intégré au programme Génome du CNRS et
piloté par l'École centrale de Lyon. D'après Francis
GALIBERT, responsable du programme Génome,
" le but de ce projet
est de développer une méthode de fabrication de puces avec des
milliers d'oligonucléotides, conçues selon la demande, en
utilisant la chimie classique, qui permet de synthétiser des
oligonucléotides de grande longueur. Le
problème est alors
essentiellement un problème de fluidique, c'est-à-dire
d'adressage de réactifs et de chimie de surface "
.
Cette approche est également celle de la petite firme américaine
Protogene : tout en menant leurs recherches de façon autonome, les
équipes françaises doivent impérativement maintenir les
contrats de collaboration avec cette société.
Après avoir, il y a quelques années, développé avec
la société CIS Bio International un procédé
original (MICAM, brevet 1993) de fixation des sondes par électrolyse
permettant la fabrication de puces de très haute résolution, le
CEA a également décidé récemment d'investir dans la
synthèse
in situ
. Les chercheurs grenoblois du LETI-CEA, dans le
cadre du programme AMIGO, s'attachent à faire évoluer la
technologie des biopuces dans trois domaines.
Dans l'approche issue de la microfluidique, une première
évolution concerne les façons de déposer les gouttes,
c'est-à-dire la dispense du liquide par des procédés issus
des techniques de jet d'encre. Le LETI-CEA utilise des dispenseurs de type
piézo-électrique.
La seconde évolution concerne la préparation du
substrat : la surface de la biopuce n'est plus plate mais
constituée d'un substrat structuré offrant une succession de
cuvettes gravées dans du silicium et préparées pour
recevoir les microgouttes.
La troisième évolution consiste à utiliser les
robots de dispense non plus pour déposer des sondes
précédemment synthétisées, mais des réactifs
chimiques permettant de construire les sondes oligonucléiques
directement sur le substrat,
in situ
. Quatre tête de
dépôt sont utilisées, distribuant sélectivement les
bases A, T, C ou G.
La détection des hybrides
Elle
permet de repérer avec quelles sondes se sont appariés les brins
d'ADN mis au contact de la biopuce, c'est-à-dire ceux qui ont la
séquence complémentaire. D'une manière
générale, la détection des hybrides se fait grâce au
marquage préalable des sondes à l'aide de produits fluorescents.
Les progrès à réaliser dans ce domaine consistent à
supprimer l'étape du marquage et de procéder à une lecture
directe de l'hybridation simplifiant ainsi la réalisation du diagnostic
et abaissant son coût.
- Dans le cadre du programme ROSA, l'École centrale de Lyon a
développé un concept nouveau dans lequel l'hybridation est
détectée par mesure des variations des charges électriques
provoquées par la formation d'hybrides.
" En utilisant comme récepteur de simples brins d'acides
nucléiques, et en faisant des mesures systématiques à
toutes les étapes de l'élaboration de la structure EDS,
(Électrolyte/Diélectrique/Semi-conducteur) nous avons
montré que l'hybridation de brins d'ADN induit un effet de champ dans la
structure semi-conductrice sous-jacente. Le potentiel de bandes plates du
semi-conducteur est ainsi lié à la répartition des charges
de surface, qui varie avec l'hybridation.
S'appuyant sur ces résultats, l'élaboration d'un biocapteur
détectant directement l'hybridation d'ADN est donc envisageable en
utilisant un biorécepteur constitué de brins simples d'ADN, et un
transducteur capable de détecter des variations de charges
électriques par effet de champ, à savoir par exemple, une
structure FET (Fiel Effect Transistor ou transistor à effet de champ).
Un prototype de biocapteur d'acides nucléiques appelé GenFET
permettant la détection directe et
in situ
de séquences
d'ADN a été élaboré "
77(
*
)
.
- Quant aux chercheurs du Département de recherche fondamentale sur
la matière condensée du CEA, ils ont choisi d'utiliser, pour
détecter les hybrides, les variations de poids de la biopuce. En effet,
lorsqu'il s'hybride, l'ADN testé ajoute sa masse sur la puce. Mais il
n'existe pas de balance suffisamment précise à l'échelle
de la puce ! Les systèmes les plus précis du monde, les
microbalances à quartz, peuvent peser environ 1 nanogramme, soit un
milliardième de gramme, l'équivalent de 100 millions de
brins d'ADN. Les chercheurs ont donc élaboré un détecteur
comportant 100 millions de brins identiques où pourront s'hybrider
les séquences d'ADN testées, qui joue en même temps le
rôle de balance.
Il leur reste maintenant à miniaturiser l'ensemble afin que plusieurs
détecteurs de ce type puissent être mis sur le même support
et permettent de tester plusieurs séquences d'ADN différentes.
Cette technique n'en est qu'à ses débuts et doit être
perfectionnée. Outre son intérêt intrinsèque, elle
suggère deux réflexions.
- la recherche bénéficie toujours des dialogues et des
collaborations entre des chercheurs d'horizons différents (en
l'occurrence, recherche fondamentale sur la matière condensée et
biologie...) ;
- il est indispensable d'encourager et de soutenir financièrement
les chercheurs français essayant de trouver des technologies innovantes
et originales de fabrication et de " lecture " des biopuces.