III. ASSURER LA COMPLÉMENTARITÉ DES ÉQUIPEMENTS ET DES SERVICES
A. LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT
Le
projet de loi initial était marqué par une vision trop
exclusivement centrée sur les services, qui se traduisait par la
création de schémas de services collectifs. Ceux-ci ne prenaient,
pas assez en compte, le problème posé par le manque
d'équipements dans un certain nombre de régions. En effet, le
projet de loi postulait que l'équipement du territoire était
quasiment réalisé.
Une telle affirmation ne peut, à l'évidence, recueillir
l'assentiment de votre commission spéciale. Celle-ci constate d'ailleurs
que des députés appartenant à tous les groupes politiques
ont, après le
Conseil économique et social
, fait part
d'une préoccupation analogue. En conséquence, même s'il est
indispensable de mieux utiliser l'existant avant d'investir -ce qui va de soi-
il n'est pas envisageable de condamner les parties les moins
équipées du territoire à la stagnation dès lors que
d'autres, mieux dotées, verraient leurs besoins d'ores et
déjà satisfaits.
Les travaux et les auditions auxquelles a procédé votre
commission spéciale ont montré qu'en matière
d'équipements de transport, cette question était
particulièrement d'actualité. Un certain nombre de grands
équipements destinés à mieux insérer notre
territoire dans les flux d'échanges européens demeurent
indispensables. Il en va ainsi, notamment, du franchissement des Alpes et des
Pyrénées et des investissements de capacité dans le
domaine ferroviaire qui sont en particulier destinés à faire
sauter les noeuds saturés tels que le contournement de Paris, de
Bordeaux, de Chambéry ou de Nîmes-Montpellier. Il faut noter
qu'aujourd'hui la France est à l'écart des corridors
européens.
En matière autoroutière, la même constatation s'impose.
Votre commission d'enquête sur les grandes infrastructures
d'aménagement du territoire avait d'ailleurs montré, voici un an,
que par rapport à l'Europe du Nord ou avec l'Allemagne, la France
était loin d'être suréquipée en matière
autoroutière. Il reste donc toujours d'actualité de constater,
comme le faisait votre commission spéciale dans le rapport
intitulé
Fleuve, Rail, Routes : pour des choix nationaux ouverts
sur l'Europe
que "
le postulat désenclavement égale
développement économique n'a rien perdu de sa
validité ".
Les travaux de votre commission spéciale ont également
montré les limites de la coopération de l'Etat et des
collectivités locales s'agissant de la construction d'autoroutes et de
routes nationales. Il est clair qu'un certain nombre de travaux de construction
de liaisons autoroutières ou routières sont bloqués ou
ralentis par le manque de moyens financiers émanant de l'Etat. Or, dans
un certain nombre de cas spécifiques, les collectivités
territoriales seraient disposées à faire un effort
supplémentaire afin de mener à bien la réalisation de ces
investissements.
Sans préjuger de la solution technique a apporter à ce difficile
problème, votre commission spéciale considère que l'Etat
doit proposer aux collectivités territoriales en question une palette de
solutions techniques et financières de nature à leur permettre
d'intervenir plus efficacement. C'est ainsi qu'il serait utile d'engager une
réflexion approfondie sur l'éventualité de faciliter
l'attribution de la maîtrise d'ouvrage déléguée aux
collectivités désireuses de mener à bien ces travaux. De
même, il serait nécessaire d'envisager de rendre éligible
au fonds de compensation de la TVA les dépenses des collectivités
locales au titre des fonds de concours contribuant à la
réalisation de tels investissements. Il serait enfin souhaitable de leur
permettre de mettre en oeuvre les formes de péages ou de concession
propres à permettre le financement des ouvrages, et de souscrire des
emprunts sur de longues échéances, afin de profiter de taux
d'intérêt particulièrement peu élevés.
D'un point de vue général, votre commission spéciale juge
souhaitable de faire figurer le terme " d'équipements " aux
côtés de celui de " services " dans les schémas
directeurs, afin de traduire leur vocation à concilier l'offre et la
demande.
B. LES INFRASTRUCTURES DE TÉLÉCOMMUNICATIONS
S'agissant du schéma directeur d'équipements et
de
services de l'information et de la communication, votre commission
spéciale, qui vous propose d'y apporter trois amendements (voir supra,
commentaire de l'article 15), souhaite revenir un instant sur la question
-cruciale aux yeux de votre Haute Assemblée-
de la couverture
territoriale par la téléphonie mobile
.
En 1996, lors de la discussion de la loi n°96-659 de réglementation
des télécommunications, votre Haute Assemblée, à
l'initiative de la Commission des Affaires économiques, avait
souhaité renforcer la contribution de ce secteur d'activité -et
notamment de la téléphonie mobile- à l'aménagement
du territoire.
Le Sénat, s'il avait soutenu le principe d'une exemption partielle du
financement du service universel pour les opérateurs de
téléphonie mobile, instaurée par l'Assemblée
nationale, l'avait toutefois subordonnée, à l'initiative de votre
rapporteur, rapporteur du projet de loi, à un engagement de leur part
d'un accroissement de leur zone de couverture.
Le Sénat avait aussi introduit, à l'initiative de votre
rapporteur, une disposition demandant un rapport au Gouvernement sur la
couverture du territoire -et non seulement de la population- par les
réseaux de téléphonie mobile, et détaillant les
moyens nécessaires à la couverture des zones peu peuplées.
Ce rapport, qui vient d'être remis au Parlement
10(
*
)
, et dont le contenu est
détaillé sous le commentaire de l'article 15 du
présent projet de loi, formule des propositions intéressantes
pour permettre la couverture des zones (10% du territoire et 1,4 % de la
population) qui ne sont, au sens du rapport, pas susceptibles d'être
couvertes, à court terme, par le seul jeu du marché.
Ces propositions ont été examinées avec la plus grande
attention par votre commission spéciale
.
Toutefois, compte tenu tant de leur coût que de la mise en service
prochaine des services de communication personnelle par satellite, sans
" zone d'ombre territoriale ", et conformément à
l'avis, en la matière, de la CSSPPT
11(
*
)
, votre commission spéciale a
considéré que ces propositions pourraient trouver une traduction
législative plus appropriée dans le cadre du
" rendez-vous " fixé au Parlement, au moins une fois tous les
quatre ans et donc d'ici à 2000, par la loi de réglementation des
télécommunications.
Ce délai aura permis de faire le bilan de l'apport à la
couverture du territoire des technologies satellitaires, qui dépendra,
en grande partie, de la tarification mise en place par les opérateurs
satellitaires.