III. PRÉSENTATION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 1999
A. PRÉSENTATION GÉNÉRALE
A titre liminaire, il faut noter que des modifications de nomenclature budgétaire sont intervenues depuis l'an dernier. Désormais, ce projet de budget compte 44 chapitres au lieu des 57 de 1998. Cette réduction du nombre de chapitres s'explique par la constitution de dotations par grandes actions.
1. Un budget en baisse apparente de 6 %
Le
budget de l'agriculture et de la pêche n'a pas été
présenté comme prioritaire par le Gouvernement, qui
privilégie dans le budget général pour 1999 : la
justice, la sécurité et la lutte contre l'exclusion.
Atteignant
33,55 milliards de francs en 1999
(soit
2,4 %
des
crédits des budgets civils
16(
*
)
), le budget de l'agriculture et de
la pêche
diminue de 6 %
par rapport à 1998, affichant
la
plus forte baisse tous fascicules budgétaires confondus.
Cette diminution s'explique par la
réduction de 2,9 milliards de
francs de la subvention d'équilibre accordée au BAPSA
. En
effet, les recettes de ce budget annexe issues de la TVA et de la compensation
démographique devraient fortement augmenter en 1999, permettant la
réduction du montant de la subvention d'équilibre
17(
*
)
.
Hors subvention d'équilibre et participation de l'Etat au financement de
l'allocation aux adultes handicapés (AAH), le budget de l'agriculture
s'établit à
28,2 milliards de francs
, en
augmentation
de 3 %
par rapport à 1998.
2. Evolution des crédits par titre
Le
budget de l'agriculture et de la pêche est un budget principalement
tourné vers
l'intervention
(titre IV) :
67 % des
crédits
(dépenses ordinaires et crédits de paiement)
lui sont consacrés.
Compte tenu de la suppression prévue de 100 emplois en 1999,
les
effectifs budgétaires
du ministère s'élèvent
à 30 237 personnes, en baisse de - 0,33 % par rapport à 1998.
Votre rapporteur tient à rappeler que les services du ministère
et de ses établissements publics sont largement
délocalisés en province : 8 % seulement des agents
concernés travaillent à Paris intra muros, 5 % dans la petite
couronne et 87 % en province. Le mouvement de délocalisation se poursuit
avec notamment la concrétisation de la délocalisation du Centre
national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles
(CNASEA) à Limoges qui devrait constituer, en dépit des
difficultés rencontrées en 1998, une priorité du
ministère pour l'année 1999.
Le tableau ci-après appelle les remarques générales
suivantes :
1-
les moyens des services
(titre III)
augmentent de
+ 4,99
%
du fait de l'augmentation des charges de personnel (en dépit de la
suppression de 100 emplois) et des crédits de fonctionnement ;
2-
les dépenses d'intervention
(titre IV)
baissent de plus
de 10 %
en raison de la diminution de l'action sociale (diminution de la
subvention au BAPSA et participation nulle de l'Etat à la garantie
contre les calamités agricoles) ; en revanche l'action
économique (+ 3,21 %) et surtout l'action éducative (+ 6,77
%) voient leurs crédits augmenter ;
3- les dépenses en capital
(crédits de paiement)
diminuent de 7,80 % : la plupart des chapitres diminuent, à
l'exception des crédits de deux chapitres qui augmentent
(investissements réalisés par l'Etat pour l'enseignement
technique agricole public et subventions d'investissements accordées
à la recherche).
Montants des crédits par titre et évolution |
||||
(en millions de francs) |
Crédits votés pour 1998 |
Crédits demandés
|
Évolution
|
|
Dépenses ordinaires (DO)
Titre III -
Moyens des services
Total
DO
Titre V -
Investissements exécutés par l'Etat
Total CP |
9744,10
|
10230,65
|
+ 4,99 %
|
|
Total DO + CP |
35688,19 |
33546,75 |
- 6,00 % |
|
Autorisations de programme (AP)
Titre V -
Investissements exécutés par l'Etat
Total AP |
80,90
|
86,90
|
+ 7,42 %
|
Source : projet de loi de finances pour 1999.
B. QUELQUES DONNÉES DE COMPARAISON EUROPÉENNE
A la demande de votre rapporteur, les services du ministère lui ont fourni des éléments concernant les budgets de l'agriculture de trois de nos principaux partenaires européens : le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Italie.
1. Le budget du ministère de l'agriculture au Royaume-Uni
Ce
budget se présente en deux parties :
1- les dépenses de l'office d'intervention et les aides PAC qui
représentent entre 2/3 et 3/4 du budget global. En 1998, ces
dépenses se sont établies à 25 milliards de francs.
2- les dépenses résultant de la seule politique du Gouvernement
qui s'élèvent en 1998 à 7,4 milliards de francs.
Au total, le budget global s'est donc établi autour de
32,4
milliards de francs
, en baisse en 1999 pour deux raisons principales :
- diminution du soutien lié à la crise de l'encéphalite
spongiforme bovine ;
- volonté de diminuer le montant global du budget de
l'agriculture.
2. Le budget du ministère fédéral de l'agriculture en Allemagne
Ce
budget, qui représente
2,5 % du total des ministères en
1998
s'établit à
39 milliards de francs de
crédits
. Il comprend trois parties :
1- une première partie (
78 %
du budget) qui regroupe
essentiellement la
politique sociale agricole (68 %
), la détaxe
carburant agricole (7 %), la pêche (0,6 %), les organisations
internationales (0,5 %), les matières premières renouvelables
(0,4 %).
Cette partie augmente de + 1,2 % en 1999 (+ 20 % pour la pêche et + 9 %
pour l'assurance).
2- une deuxième partie (
15 %
du budget) est consacrée
au programme d'action commune Etat fédéral - Länder,
établi pour trois ans, avec pour objet l'amélioration des
structures agricoles et la protection du littoral. Il correspond à un
co-financement moyen de 60 % des dépenses engagées par les
Länder.
Cette partie, qui avait baissé de plus de 20 % en 1998, augmente de 5
% pour 1999.
3- une troisième partie (
7,5 %
du budget) regroupe les
crédits pour l'organisation nationale de marché (2,4 %), les
services ministériels et instituts de recherche fédéraux
(4,9 %) ainsi que les mesures d'urgence.
3. Le budget du ministère de l'agriculture en Italie
Ce
budget ne représente qu'une très faible part des crédits
nationaux alloués à l'agriculture en raison d'
une large
délégation de compétences donnée aux
régions
.
Le budget de ce ministère, hors fonctionnement, s'élève en
1998 à environ
10,7 milliards de francs
. Il est prévu
qu'il diminue en 1999 à 9,9 milliards de francs et en 2000 à 7,4
milliards de francs.
Il se compose de quatre grands types de dépenses :
1- les dépenses qui requièrent une disposition
législative (58 %) ;
2- un chapitre d'interventions et aides diverses (35 %) ;
3- un chapitre d'investissement (5 %) ;
4- un chapitre de financement annuel au titre des lois pluriannuelles (4 %).
C. PRINCIPALES PRIORITÉS DU BUDGET 1999
Pour son
budget 1999, le ministre a énoncé
quatre priorités
,
qui sont en cohérence avec celles affichées dans le cadre du
projet de
loi d'orientation agricole
dont ce budget devrait
permettre la mise en oeuvre.
Elles demeurent toutefois des priorités " classiques ",
où l'on retrouve globalement les priorités annoncées pour
1998
18(
*
)
.
Votre commission tient à rappeler que sa position sur le budget du
ministère de l'agriculture et de la pêche pour 1999 qui comprend
de nombreuses dispositions budgétaires en relation avec le projet de loi
d'orientation agricole, ne préjuge en rien des positions qui seront
prises par le Sénat sur ce texte en janvier prochain.
1. Le financement des contrats territoriaux d'exploitation (CTE)
Mesure
phare du projet de loi d'orientation agricole adopté en première
lecture à l'Assemblée nationale, les CTE sont
destinés :
- " à rémunérer les exploitants pour les services non
marchands qu'ils rendent à la collectivité en matière de
préservation et d'amélioration de l'environnement naturel,
- et à appuyer l'orientation des exploitations vers des modes de
production favorables à l'emploi, à l'équilibre des
activités sur les territoires et à la qualité des
produits ".
Une ligne budgétaire spécifique
19(
*
)
leur est consacrée avec
le
" fonds de financement des CTE "
doté de
300
millions de francs pour 1999, auxquels devraient s'ajouter 150 millions de
francs de crédits européens (en cofinancement pour les CTE qui
s'inscriront dans les actions éligibles aux fonds structurels), soit un
total de
450 millions de francs
pour la première année.
Par ailleurs, les services du ministère indiquent que le CTE
" constituera une priorité lors de la préparation des
contrats de Plan Etat - régions qui couvriront la période
2000-2006 ".
Pour les 2/3 de la dotation escomptée (
300 millions de francs
inscrits au budget du ministère
), l'abondement de ce fonds de
financement en 1999 est opéré par
redéploiement de
crédits existants
. En effet,
1- 140 millions de francs proviennent du fonds de gestion de l'espace rural
(FGER) qui disparaîtra ;
2- 45 millions de francs, des dotations affectées aux opérations
groupées d'aménagement foncier (OGAF) ;
3- 100 millions de francs, des crédits des offices ;
4- et 15 millions de francs, du fonds d'installation en agriculture (FIA).
Evolution des différentes lignes budgétaires
concernées
(en millions de francs) |
LFI 98 |
projet de loi de finances 99 |
% 99/98 |
CTE |
0 |
300 |
- |
OGAF |
45,23 |
0 |
- 100 % |
Offices |
3 059 |
2 959 |
- 3,3 % |
FIA |
160 |
145 |
- 9,4 % |
FGER |
140 |
0 |
- 100 % |
Source : Ministère de l'agriculture et de la
pêche.
Compte tenu des délais d'adoption de la loi d'orientation agricole, les
CTE ne commenceraient à être mis en place qu'au cours du second
semestre 1999. En outre, le dispositif ne devrait prendre sa pleine ampleur
qu'à l'issue de la réforme de la politique agricole commune (PAC)
qui devrait permettre de financer les CTE qui s'inscriront dans les actions
éligibles aux fonds structurels par la voie du produit de la modulation
des aides PAC.
ð Votre commission tient à souligner que
le financement
du
dernier tiers (150 millions de francs d'aides PAC) par des aides communautaires
demeure aléatoire
: le projet de réforme de la PAC,
qui fait l'objet de négociations difficiles, constituera un enjeu
décisif pour le financement de ces contrats.
2. La formation et l'installation
a) Enseignement, formation et recherche (+ 6 %)
Les
crédits demandés pour l'enseignement, la formation et la
recherche en 1999 s'établissent à
6,86 milliards de francs
en dépenses ordinaires, en
augmentation de 6 %
par rapport
à 1998. L'année 1998 avait déjà connu une hausse de
ces crédits de + 4,9 %.
• Les crédits consacrés à
l'enseignement agricole
public et privé
s'établissent à 3,84 milliards de
francs, en augmentation de + 6,4 %.
180 emplois (dont 115 emplois d'enseignants) seront créés dans
le secteur de l'enseignement public pour accompagner l'augmentation des
effectifs d'étudiants dans l'enseignement agricole. En outre, 1000
emplois jeunes sont prévus.
Le fonds social lycéen, créé en 1998 et destiné aux
élèves issus de familles défavorisées, voit ses
crédits passer de 7 à 10 millions de francs, en augmentation de +
43 % pour 1999. Les bourses sont également revalorisées de
l'ordre de 4 %.
• Les crédits publics consacrés à la
recherche
dans les secteurs agricole et agro-industriel
s'élèvent en 1999 à 5.042 millions de francs, en hausse de
2 % par rapport à 1998. L'essentiel de cette dotation va aux grands
établissements publics de recherche.
Votre commission se félicite de la mise en place le 18 septembre
dernier d'un comité de coordination des sciences du vivant,
destiné à coordonner les actions de neuf organismes de recherche
(dont l'INRA
20(
*
)
, le
CEMAGREF
21(
*
)
, l'IFREMER
22(
*
)
et le CIRAD
23(
*
)
).
b) Installation des jeunes
L'objectif
fixé par le ministère
est
de 10
000 installations aidées
de jeunes agriculteurs en 1999
24(
*
)
.
ð Pourtant l'effort budgétaire ne semble pas à la
hauteur de cette annonce. En effet les deux principales lignes
budgétaires ne semblent pas être des lignes prioritaires :
1- les crédits de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) sont
simplement reconduits à 645 millions de francs ;
2- le fonds d'installation en agriculture (FIA) créé en 1998
qui s'établit en 1999 à 145 millions de francs, a perdu
près de 10 % de ses crédits, 15 millions de francs étant
redéployés vers le fonds de financement des contrats territoriaux
d'exploitation ;
3. La sécurité et la qualité alimentaires
La crise de la vache folle et le développement de la culture des plantes transgéniques ont imposé un effort accru dans le domaine de la sécurité et de la qualité alimentaires. Les crédits dans ce domaine augmentent ainsi de 10,5 % en 1999.
a) L'agence française de la sécurité sanitaire des aliments (AFSSA)
En mai
1997, un rapport de notre collègue Claude Huriet, intitulé
" Renforcer la sécurité sanitaire en France " avait
dénoncé la mauvaise mesure des risques alimentaires. Ce rapport
est à l'origine de la
loi du 1
er
juillet 1998
instituant
l'agence française de la sécurité sanitaire
des aliments
, établissement public placé sous la triple
tutelle des ministres de la Santé, de l'Economie et de l'Agriculture et
dont les missions concernent l'évaluation scientifique des risques dans
le domaine alimentaire.
Cette nouvelle agence devrait fonctionner à partir de 1999. 50 emplois
sont créés et une dotation de 35 millions de francs est
prévue (dont 1/3 à la charge du ministère de l'agriculture
et de la pêche, soit 11,7 millions de francs).
En outre, les moyens
du Centre national d'études
vétérinaires et alimentaires
(CNEVA, 201 millions de francs
en 1999), appelé à s'intégrer dans l'agence et à
être géré par elle, sont revalorisés de 5 %.
ð Le nouvel ensemble disposera globalement d'une enveloppe de moyens de
près de 210 millions de francs.
b) Les services déconcentrés
Dans le
cadre de la mise en place du service public de l'équarrissage, 40 postes
sont créés et les moyens des services vétérinaires
sont en augmentation de 14,6 %, à 50 millions de francs.
Le contrôle des plantes transgéniques (la biovigilance)
bénéficie de la création de 45 postes et d'une
augmentation de plus de 50 % des moyens qui lui sont consacrés (53
millions de francs).
c) La promotion des signes de qualité
Les
crédits affectés à la promotion des signes de
qualité sont majorés de 16 % (soit 19 millions de francs) et ceux
de l'Institut national des appellations d'origine (INAO) de 6 %, à 76
millions de francs
25(
*
)
.
Il faut noter que la promotion de la qualité est constitue l'un des
grands thèmes du projet de loi d'orientation agricole.
Evolution de différentes lignes budgétaires
concernées
(en millions de francs) |
LFI 98 |
PLF 99 |
% 99/98 |
Protection et contrôle sanitaire des végétaux |
35 |
53,45 |
52,7 % |
Lutte contre les maladies des animaux |
278,6 |
285 |
2,3 % |
CNEVA 26( * ) |
168,1 |
178,02 |
5,9 % |
AFSSA 27( * ) |
0 |
11,7 |
- |
Promotion de la qualité |
88,4 |
95 |
7,5 % |
Sélection animale et identification des animaux |
106,2 |
124 |
16,8 % |
TOTAL |
676,3 |
747,17 |
10,5 % |
Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche.
4. La revalorisation des retraites
Cette orientation trouve sa traduction dans le projet de BAPSA pour 1999 28( * ) .