Article 63
Institution de chartes départementales
pour la
prévention des expulsions
Cet
article a pour objet de généraliser à l'ensemble des
départements, dans un délai de deux ans, certaines
opérations menées à titre expérimental dans
quelques départements, en particulier le Pas-de-Calais. Les chartes
départementales auraient notamment pour objet d'informer les personnes
en difficulté de mieux connaître leurs droits et obligations, en
particulier le dispositif d'aide du Fonds de solidarité pour le logement
(FSL), et de faciliter la connaissance de ces ménages menacés
d'expulsion, par les services sociaux.
Cette généralisation s'inscrit dans un dispositif national avec
la conclusion, le 13 mars 1997, entre le ministère du logement et la
Chambre nationale des huissiers de justice, d'une charte pour
l'amélioration de la prévention des expulsions.
Lors des débats à l'Assemblée nationale, le
secrétaire d'Etat au logement a indiqué qu'une circulaire avait
été adressée aux préfets dès le
15 octobre 1997 pour leur demander "
de mettre cette charte en
chantier le plus rapidement possible ".
Votre commission des Lois vous propose d'adopter conforme l'article
63.
Article 63 bis (nouveau)
Attribution d'un nouveau
logement
aux locataires ne respectant pas l'obligation
d'usage paisible
des locaux
Cet
article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée
nationale à l'initiative de sa commission spéciale, tente de
remédier à certains comportements, occasionnant de graves
troubles du voisinage constatés en particulier dans le parc social, en
imaginant un mécanisme d'attribution d'un nouveau logement par le
bailleur, ce nouveau logement étant supposé mieux adapté
à la situation familiale du locataire et de nature à
éviter les nuisances pour le voisinage.
•
Le paragraphe I de l'article 63 bis
insère un
article L. 442-6-4 nouveau dans le code de la construction et de
l'habitation pour prévoir que, lorsque le locataire ne se conforme pas
à l'obligation qui lui incombe
" d'user paisiblement des locaux
loués suivant la destination qui leur a été donnée
par le contrat de location "
(article 7 b de la loi n° 89-462 du
6 juillet 1989), il peut lui être attribué un nouveau logement
correspondant à ses besoins et à ses possibilités.
Il précise que lorsque le transfert est intervenu, la résiliation
du bail ne peut être demandée au juge par le bailleur.
Le rapporteur de l'Assemblée nationale a indiqué avoir
transposé au cas de trouble du voisinage celui de la sous-occupation du
logement prévu par l'article L. 442-4 du code de la construction et de
l'habitation. Cet article, issu de la loi n° 96-162 du 4 mars 1996,
dispose qu'
" en cas de sous-occupation du logement, il peut être
attribué au locataire un nouveau logement correspondant à ses
besoins ".
Bien que destiné à remédier à de réels
problèmes, ce dispositif soulève d'épineuses questions
auxquelles votre commission des Lois vous propose de répondre par
un
amendement
tendant à la réécriture du paragraphe I de
l'article 63 bis.
En effet, et en premier lieu, le cas de nouvelle attribution de logement pour
cause de sous-occupation du premier logement n'est pas assimilable à la
situation où la mutation s'avère nécessaire du fait des
troubles de voisinage perpétrés par le locataire : si la
sous-occupation répond à des données objectives
(superficie ou nombre de pièces visés en rapport avec le nombre
de membres de la famille), la qualification des agissements comme étant
constitutifs de troubles graves du voisinage est beaucoup plus subjective et
suppose une appréciation in concreto. Or, dans le mécanisme
proposé par l'Assemblée nationale, le bailleur est juge et partie
: partie au contrat, il peut en modifier unilatéralement un
élément essentiel, à savoir la désignation du bien
loué, en fonction de l'appréciation qu'il fait de la situation,
de l'importance du trouble perpétré.
Une telle prérogative permettant la mutation d'office, pour efficace
qu'elle soit, peut paraître attentatoire aux droits du locataire ainsi
qu'au principe de la liberté contractuelle. Il semble qu'une garantie
fasse défaut : l'intervention du juge.
En outre, l'impossibilité légale résultant de la seconde
phrase de demander au juge la résiliation du bail dès lors que le
transfert d'un logement vers l'autre aura eu lieu, paraît bien
singulière. D'un point de vue juridique, la modification d'un
élément aussi essentiel du contrat de location que le bien
occupé induit la naissance d'un nouveau bail comme cela est par ailleurs
le cas, aux termes d'une jurisprudence constante, en matière de
renouvellement du bail : dès lors, priver le bailleur de la
possibilité de demander la résiliation judiciaire du bail n'a
plus d'objet si le dispositif vise le premier bail, ou va à l'encontre
de ce qui est souhaitable s'il s'agit du second bail. En effet, dans cette
dernière hypothèse, cela reviendrait à priver le bailleur
de tout recours, quels que soient les motifs de résiliation susceptibles
d'être invoqués (non-paiement du loyer ou des charges, non respect
de l'obligation d'user paisiblement des locaux, défaut d'assurance
obligatoire...). Cela serait également de nature à encourager les
locataires malveillants, à l'abri de leur nouveau bail.
Il convient donc de substituer à ce dispositif un mécanisme
permettant l'attribution d'un logement en cas de troubles de voisinage, sous
contrôle du juge : c'est ce que propose l'
amendement
de votre
commission des Lois qui, par ailleurs, tend à instaurer une
procédure de résiliation de plein droit du nouveau bail lorsque
les troubles de voisinage sont réitérés par le locataire
attributaire du nouveau logement. Elle vous propose en outre de corriger une
erreur d'insertion résultant du texte de l'Assemblée nationale en
plaçant ces dispositions sous un article L. 442-4-1 dans le code de la
construction et de l'habitation, et de procéder aux coordinations
nécessaires aux paragraphes II et III de l'article 63 bis.
•
Le paragraphe II de l'article 63 bis
tend à
compléter le dernier alinéa de l'article L. 613-1 du code de
la construction et de l'habitation pour exclure du bénéfice des
délais de grâce susceptibles d'être accordés par le
juge lorsque le relogement des personnes expulsées ne peut avoir lieu
dans des conditions normales, les locataires qui refusent l'offre de
relogement qui leur est faite par le bailleur sur le fondement de l'article
L. 442-4-1 du code de la construction et de l'habitation,
c'est-à-dire en cas de non respect de l'obligation d'user paisiblement
des locaux.
•
Le paragraphe III de l'article 63 bis
modifie le premier
alinéa de l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991
précitée pour permettre au juge de réduire ou de supprimer
le délai de deux mois qui doit en principe séparer la
décision d'expulsion de sa mise en oeuvre, à l'encontre des
locataires qui, n'ayant pas respecté l'obligation d'user paisiblement
des locaux qu'ils occupent, refusent de surcroît le nouveau logement qui
leur est attribué par le bailleur sur le fondement de l'article 442-4-1
du code de la construction et de l'habitation.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 63 bis ainsi
modifié.