2. Un effet d'annonce
Les
mesures annoncées par le gouvernement pour lutter contre l'exclusion
grâce à un accès plus large aux pratiques sportives et
culturelles -à l'exception de la disposition prévue par l'article
78 du projet de loi permettant une modulation des tarifs des services publics
administratifs à caractère facultatif- figurent, non pas dans le
projet de loi d'orientation soumis au Parlement mais parmi les mesures
d'accompagnement présentées dans le document intitulé
" programme de prévention et de lutte contre les exclusions ".
Votre rapporteur, s'il regrette la modestie des dispositions du projet de loi
d'orientation soulignera néanmoins que la réussite des actions
à vocation sociale dans le domaine culturel relève souvent plus
de la mobilisation des équipes des établissements culturels et de
l'existence de projets susceptibles d'emporter l'adhésion du public que
d'une démarche générale et obligatoire. Il en va de
même dans le domaine du sport ou des loisirs.
Les mesures relevant du volet culturel du programme gouvernemental de lutte
contre les exclusions bénéficieraient d'une dotation de
125 millions de francs sur les années 1998 à 2000.
L'ensemble de cette enveloppe est constituée de crédits
déconcentrés relevant du chapitre 43.30.30
" interventions culturelles déconcentrées,
développement culturel, enseignement et formation ". La plus grande
partie (soit 90 millions de francs sur trois ans) devrait être
consacrée à la mise en oeuvre de programmes d'action
concertés pour l'accès aux pratiques artistiques et culturelles.
Elle correspondrait principalement aux surcoûts que représenteront
pour les structures culturelles les actions de lutte contre l'exclusion.
En ce qui concerne la promotion de l'égalité des chances par le
sport et les loisirs, le coût des mesures annoncées
s'élèverait, pour les années 1999 et 2000 à
280 millions de francs, 266 bénéficiant au ministère
de la jeunesse et des sports.
Les mesures présentées par le gouvernement ne sont guère
novatrices.
Celles prises au titre de la généralisation de l'accès
à la culture visent, d'une part, à développer des actions
d'insertion axées sur la pratique culturelle (programmes d'action
concertés, création d'emplois de médiateurs culturels) et,
d'autre part, à prévoir que les établissements culturels
prennent au titre de leurs missions de service public l'engagement de lutter
contre les exclusions.
Les premières qui recourent notamment aux possibilités offertes
par la loi sur les emplois jeunes ne méritent guère de longs
développements. Votre rapporteur relèvera seulement qu'il n'aura
pas fallu attendre ce projet de loi pour que des programmes concertés
d'action culturelle soient élaborés par l'Etat ou plus
généralement par les collectivités locales.
En revanche, votre rapporteur soulignera l'opportunité de la seconde
tout en indiquant que la circulaire d'emplois des crédits
déconcentrés adressée au début de l'année
aux directions régionales des affaires culturelles par le
ministère de la culture la prévoyait d'ores et
déjà, ce qui peut laisser songeur sur la valeur accordée
à la norme législative.
Une telle mesure tend à généraliser les initiatives prises
tant par des grands établissements publics culturels nationaux que par
des structures locales. S'agissant pour la plupart de structures
financées dans leur quasi-totalité par des fonds publics, il est
légitime que leurs activités prennent en compte la
nécessité de s'ouvrir à tous les publics, cet
impératif ne devant pas seulement se traduire par des politiques
tarifaires favorables. Outre les effets de seuil attachés par nature
à ce type de modulation sociale, ces dernières supposent que les
publics en soient informés et puissent se trouver à
proximité d'un établissement culturel afin d'éviter que
seul le public averti en bénéficie.
L'ouverture des établissements culturels aux publics
défavorisés ou plus simplement différents de celui des
habitués suppose des actions plus volontaristes. Les opérations
conduites en ce domaine par l'Orchestre de Lille sont, à ce titre,
exemplaires. Votre rapporteur souligne que la généralisation de
ces expériences suppose de combattre beaucoup d'a priori, qu'il s'agisse
de ceux du public ou de ceux des établissements culturels.
Votre commission a adopté un amendement modifiant la rédaction de
l'article 74 afin de préciser de manière plus explicite que la
lutte contre les exclusions constitue une obligation pour les
établissements culturels financés par l'Etat. A ce titre, elle
sera particulièrement attentive aux modalités selon lesquelles
cette obligation sera formulée dans la charte du service public,
actuellement en cours de préparation au sein du ministère de la
culture, dont l'objet est de définir les missions de service public des
établissements subventionnés.
En ce qui concerne l'accès aux loisirs et à la pratique sportive,
les mesures annoncées apparaissent pour la plupart comme la poursuite ou
le développement à une échelle plus large d'actions
déjà anciennes : prise en charge par l'Etat du coût
des formations BAFA (brevet d'aptitude à la fonction d'animateur) et
BAFD (brevet d'aptitude à la fonction de directeur),
élargissement du bénéfice du ticket-sport, harmonisation
des conditions de délivrance des bons-vacances. Certaines mesures
s'inspirent de mécanismes existants comme le coupon-sport destiné
à réduire le coût de l'adhésion à une
association sportive qui n'est guère éloigné des
chèques loisirs mis en place en 1995 ou des aides aux petits clubs
déjà pratiquées.