Article 78 bis
Lutte contre
l'illettrisme
I.
Texte adopté par l'Assemblée nationale
L'article 12 du projet de loi d'orientation vise à inscrire la lutte
contre l'illettrisme dans le code du travail et institue à cette fin un
nouvel article L. 900-6.
L'article 12 dispose ainsi que la lutte contre l'illettrisme fait partie de
l'éducation permanente, que les actions de lutte contre l'illettrisme
sont des actions de formation au sens de l'article L. 900-2 du code du travail,
c'est-à-dire que l'ensemble de la réglementation relative
à la formation professionnelle continue (actions de préformation,
d'adaptation, de promotion, de prévention, de conversion, de
perfectionnement au bilan de compétences) sera donc applicable aux
actions de lutte contre l'illettrisme.
Il offre enfin la possibilité aux entreprises de plus de neuf
salariés d'imputer les dépenses consacrées aux actions de
lutte contre l'illettrisme sur le montant de leurs contributions obligatoires
au financement de la formation professionnelle.
L'Assemblée nationale a adopté un nouvel article 78 bis
définissant la lutte contre l'illettrisme comme une mission prioritaire
du service public de l'éducation et y associant les autres services
publics.
II. Position de la commission
Votre commission ne pouvait que regretter que le projet de loi initial consacre
à la lutte contre l'illettrisme une seule disposition se limitant
à la remise à niveau des adultes, alors que la prévention
dès l'enfance et la sensibilisation des familles doivent constituer,
à l'évidence, les priorités de la lutte contre
l'illettrisme.
Les estimations les plus crédibles évaluent entre 10 et 20 %
la proportion des élèves entrant en sixième qui
rencontrent des difficultés de compréhension devant la lecture et
une étude de 1997 de l'INSEE établit que 10 % des jeunes
hommes d'une classe d'âge ont des problèmes de base en ce domaine.
Selon une autre étude de 1996 fondée sur les tests de lecture du
service national, le bilan de l'illettrisme s'établirait ainsi :
18,5 % des appelés se situeraient en-deçà du seuil de
la lecture d'un texte approfondi et, parmi cette population non
diplômée, 6 % des jeunes n'auraient pas accès à
l'écrit, 8 % ne sauraient lire que des mots isolés,
14 % que des phrases isolées et 22 % ne seraient capables que
d'une lecture superficielle de textes.
Dans le même sens, chargé d'une mission sur ce thème par le
Président de la République, M. Alain Bentolila évalue
à 10 % les élèves de CM2 en profonde détresse
et dénonce l'absence de politique cohérente contre l'illettrisme,
en relevant l'incapacité du système scolaire à
récupérer les élèves en grande difficulté.
En dépit d'initiatives pédagogiques récentes prises depuis
1990, et réaffirmées dans les nouveaux programmes pour
l'école primaire en 1995, de la création d'un observatoire
national de la lecture, ce constat sévère reste fondé.
Estimant que l'école joue évidemment un rôle prioritaire
dans la lutte contre l'illettrisme, votre commission souhaiterait obtenir des
précisions du gouvernement sur les nouvelles orientations qui avaient
été annoncées l'an dernier en faveur de la lecture
(initiation en maternelle, dépistage des élèves à
partir d'évaluations périodiques, définition
d'itinéraires individualisés, approche plus ludique de
l'apprentissage de la lecture), et sur les résultats du colloque
consacré aux inégalités devant la lecture qui devait
être organisé au début de 1998.
Sous réserve de ces observations, la commission a émis un avis
favorable à l'adoption de cet article.