3. Vers une remise en cause insidieuse du choix nucléaire ?
C'est au
cours du deuxième semestre 1998 que devrait être
adopté un premier décret de mise à l'arrêt
définitif de Superphénix, visant les opérations de
déchargement du coeur usé et de vidange du sodium.
D'ici un an et demi environ, cette décision s'avérera
irréversible :
le coeur aura été
déchargé ; une partie des équipes aura
été dispersée et mobilisée sur d'autres projets.
Cette décision ne risque-t-elle pas de constituer le premier pas vers
une remise en cause plus fondamentale du dispositif nucléaire civil
français ? Les écologistes n'ont-ils pas déjà
déclaré qu'ils ne s'arrêteraient pas là ?
Certes, le Gouvernement a annoncé que la France remplirait "
les
engagements pris à la Conférence de Kyoto, tout en stabilisant le
nucléaire
"
50(
*
)
. Mais que recouvre cette notion de
" stabilisation " ?
D'aucuns craignent que derrière la décision d'arrêter
Superphénix se dissimule la volonté de certains de remettre en
cause le retraitement et, à terme, d'arrêter le programme
nucléaire français.
Cette inquiétude est d'ailleurs partagée à
l'étranger. C'est ainsi que les interlocuteurs tant chinois que japonais
ont fait part de leurs interrogations à votre commission d'enquête
sur les causes et conséquences réelles de cette décision.
Celle-ci pourrait avoir un impact négatif sur les exportations de notre
industrie nucléaire à l'étranger.
Cette crainte vient d'ailleurs de se trouver confirmée par la
récente déclaration du ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement, Mme Dominique Voynet
51(
*
)
, selon laquelle "
Le sens
de l'accord Verts/95 est d'offrir des marges de manoeuvre pour qu'en 2005,
lorsqu'il faudra décider du remplacement de vieilles centrales, on
puisse décider de s'en passer ".
Les attaques permanentes contre le centre de retraitement de la COGEMA,
à La Hague, n'illustrent-elles d'ailleurs pas ce risque ? Prenons
garde à l'impact des discours des " marchands de peur ".
Prenons garde également à ne pas inquiéter indûment
l'opinion publique, alors que l'on sait bien que l'avenir de l'énergie
nucléaire et de notre technologie -non seulement en France, mais aussi
à l'étranger- pourrait être condamné si elle lui
devenait défavorable.
Une telle situation serait très dommageable quand on sait que la
planète devra nécessairement avoir recours à cette
énergie à plus ou moins long terme.