Art. 36
(Art. L. 816-1 et L. 821-9 du code de la
sécurité sociale)
Suppression de la condition de
nationalité pour le bénéfice du minimum vieillesse et de
l'allocation aux adultes handicapés (AAH)
I. Le dispositif proposé
L'article 36 du projet de loi insère dans le code de la
sécurité sociale deux articles L. 816-1 et L. 821-9 qui
suppriment la condition de nationalité pour bénéficier
respectivement du minimum vieillesse et de l'allocation aux adultes
handicapés (AAH).
Le minimum vieillesse et l'AAH sont généralement
désignés sous le terme de minima sociaux car ils visent à
garantir un revenu minimum aux personnes disposant de très faibles
ressources.
La création de ces minima sociaux s'est faite par étapes, au fur
et à mesure du développement de la protection sociale et du
développement - ou de la reconnaissance par les pouvoirs publics - de
phénomènes de pauvreté. Il s'agissait chaque fois de
remédier aux failles des systèmes pour les personnes ne pouvant
prétendre aux prestations d'assurance sociale existantes (allocations de
chômage, pensions de retraite...) ou ayant des droits trop
faibles
4(
*
)
.
Premiers minima mis en place, le minimum vieillesse, le minimum
invalidité ou l'allocation aux adultes handicapés s'adressent aux
personnes âgées, invalides ou handicapées. Ces prestations
sociales garantissent un revenu minimum à des populations situées
hors du marché classique de l'emploi et se trouvant dans
l'incapacité durable de tirer du travail des ressources suffisantes.
L'article L. 816-1 nouveau inséré dans le code de la
sécurité sociale par le I de l'article 36 du projet de loi fait
bénéficier du titre I
er
du livre VIII du code de la
sécurité sociale les
" personnes de nationalité
étrangère titulaires d'un des titres de séjour ou
documents justifiant la régularité de leur séjour en
France ".
Ce titre rassemble l'ensemble des prestations non contributives de vieillesse
constitutives du minimum vieillesse. Le
minimum vieillesse
est en effet
un terme générique regroupant un ensemble de prestations
garantissant un revenu minimum aux personnes âgées :
l'allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS), l'allocation aux
vieux travailleurs non salariés (AVTNS), l'allocation aux mères
de famille, l'allocation spéciale de vieillesse (ASV), la majoration de
pension au titre de l'article L. 814-2, l'allocation supplémentaire
du Fonds de solidarité vieillesse.
Ces prestations sont prises en charge, en application des dispositions de
l'article L. 135-2 du code de la sécurité sociale, par le Fonds
de solidarité vieillesse (FSV).
L'incidence de la suppression de la condition de nationalité pour
l'attribution du minimum vieillesse entraîne l'attribution de certaines
prestations non contributives aux ressortissants étrangers
résidant en France.
A l'exception de la majoration au titre de l'article L. 814-2, ces
prestations sont en effet actuellement versées sous condition de
nationalité : pour en bénéficier, la personne doit
aujourd'hui être de nationalité française ou ressortissant
d'un Etat membre de l'Union européenne ou de l'Espace économique
européen, ou encore d'un pays lié avec la France par une
convention de réciprocité
5(
*
)
.
Or les conventions bilatérales de sécurité sociale
prévoyant expressément une ou plusieurs de ces prestations sont
relativement rares.
Ces conventions diffèrent selon les types d'allocations qui composent le
minimum vieillesse et prévoient, dans de nombreux cas, une durée
minimale de résidence sur le territoire français (voir tableaux
ci-après) que le postulant doit être en mesure d'attester au moyen
de documents adéquats.
Le droit existant est donc d'une singulière complexité. Dans la
pratique, il convient de distinguer, dans les prestations non contributives
versées aux personnes âgées :
-
l'allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS) et
l'allocation aux vieux travailleurs non salariés (AVTNS),
en
extinction depuis 1974, attribuées aux personnes de nationalité
française, aux ressortissants des pays ayant été
placés sous la souveraineté ou la tutelle de la France avant
1962, ainsi qu'aux pays ayant conclu des accords en matière d'AVTS ; le
versement de la prestation est subordonné à la résidence
en France, sauf pour les ressortissants des anciens territoires de la
République ;
-
l'allocation aux mères de famille
de plus de cinq enfants
de nationalité française, attribuée dans les mêmes
conditions de nationalité que l'AVTS ; la requérante doit
résider, au moment de la demande, sur le territoire métropolitain
;
-
l'allocation spéciale vieillesse de l'article L. 814-1
,
versée aux personnes ne bénéficiant d'aucun avantage de
vieillesse de base de nationalité française, aux ressortissants
de pays ayant conclu des conventions internationales de
réciprocité avec la France, sous condition de résidence
sur le territoire métropolitain ou dans les DOM ;
-
la
majoration de l'article L. 814-2
qui, à la
différence de l'allocation de l'article L. 814-1, vient compléter
un avantage contributif pour le porter au plafond de l'AVTS ; cette allocation
est versée sans condition de nationalité ni de résidence,
autre que celles relatives à l'attribution des droits
consécutifs, résultant de l'article L. 311-7 du code de la
sécurité sociale ;
-
l'allocation supplémentaire de l'article L. 815-2
(ex
Fonds national de solidarité)
et l'allocation de l'article L.
815-3
, qui constituent le deuxième étage du minimum
vieillesse et qui sont actuellement attribuées aux personnes de
nationalité française et aux ressortissants de certains pays
signataires d'accords avec la France, comportant des dispositions relatives
à ces prestations ; ces allocations sont, depuis le 1er juin 1992,
attribuées exclusivement sur le territoire métropolitain ou dans
les DOM.
CONDITIONS DE NATIONALITÉ ET DE RÉSIDENCE POUR
LE BÉNÉFICE DES PRESTATIONS NON CONTRIBUTIVES VERSÉES
AUX PERSONNES ÂGÉES
Titre premier du livre VIII |
Montant annuel |
Nationalité |
Résidence |
AVTS et AVTNS
|
17.336 F
|
France, pays de la Communauté avant 1962 et pays ayant conclu un accord avec la France, relatif à l'AVTS |
Territoire métropolitain sauf l'Algérie, Tunisie, Mauritanie, Maroc, Madagascar, Togo, Niger, Benin, Mali, Cap Vert et Congo |
Allocation aux mères de
famille
|
17.336 F
|
France, pays de la Communauté avant 1962 et pays ayant conclu un accord avec la France, relatif à l'AVTS |
Territoire métropolitain au moment de la demande |
Allocation spéciale L. 814-1 |
17.336 F
|
France et pays ayant conclu une convention internationale de réciprocité avec la France |
Métropole ou DOM |
Majoration L. 814-2 |
17.336 F
|
Pas de condition de nationalité, mais complément de droit contributif |
Pas de condition de résidence |
Allocation L. 815-2 (ex. FNS) et L. 815-3 |
24.315
F
|
France et pays ayant conclu un accord avec la France, relatif à l'allocation supplémentaire |
Métropole ou DOM |
PAYS AYANT SIGNÉ DES CONVENTIONS PERMETTANT À
LEURS RESSORTISSANTS DE BÉNÉFICIER DE L'ALLOCATION
SPÉCIALE DE VIEILLESSE ET DE L'ALLOCATION SUPPLÉMENTAIRE
Pays |
Allocation spéciale vieillesse |
Allocation supplémentaire |
Durée de résidence |
Bénin, Congo, Gabon, Madagascar, Mali, Sénégal, Togo |
· |
· |
Pas de durée de résidence requise |
Allemagne, Belgique, Espagne, Grèce, Italie, Irlande, Luxembourg, Portugal, Canada |
· |
· |
15 ans depuis l'âge de 20 ans dont 5 ans ininterrompus à la date de la demande |
Chypre, Islande, Pologne, Turquie |
· |
· |
15 ans depuis l'âge de 20 ans dont 5 ans ininterrompus à la date de la demande |
Andorre |
· |
· |
15 ans ininterrompus à la date de la demande |
Suisse |
· |
· |
15 ans dont 1 an ininterrompu à la date de la demande |
Suède |
· |
|
10 ans depuis l'âge de 20 ans, dont 5 ans ininterrompus à la date de la demande |
Pays-Bas |
· |
· |
10 ans depuis l'âge de 20 ans, dont 5 ans ininterrompus à la date de la demande |
Danemark, Royaume-Uni |
· |
· |
5 ans de résidence ininterrompus précédant la date de la demande |
Norvège |
· |
· |
5 ans de résidence ininterrompus précédant la date de la demande |
L'article L. 821-9 nouveau inséré dans le
code de la sécurité sociale par le II de l'article 36 du projet
de loi fait bénéficier du titre II du livre VIII du code de la
sécurité sociale les
" personnes de nationalité
étrangère titulaires d'un des titres de séjour ou
documents justifiant la régularité de leur séjour en
France ".
Ce titre est entièrement consacré à l'
allocation aux
adultes handicapés
. Créée par la loi du 30 juin 1975,
l'allocation aux adultes handicapés constitue un réel revenu
minimum garanti destinée aux personnes souffrant d'un handicap.
Réservée aux plus démunis, elle est fonction des
ressources.
Pour en bénéficier aujourd'hui, la personne doit remplir les
mêmes conditions de nationalité que pour la plupart des
composantes du minimum vieillesse : être de nationalité
française ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne
ou de l'Espace économique européen, ou encore d'un pays
lié avec la France par une convention de réciprocité en la
matière.
A ce jour, il n'existe aucune convention de réciprocité
concernant l'AAH.
L'AAH est versée par la branche famille de la sécurité
sociale mais son financement incombe à l'Etat qui rembourse son montant
à la Caisse nationale d'allocations familiales l'année suivante.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II. La position de votre commission
1. La suppression de la condition de nationalité pour
l'accès au minimum vieillesse et à l'AAH, prestations non
contributives, répond au souci de mettre en conformité le droit
français avec la jurisprudence communautaire
L'article 36 soulève
un problème juridique très
complexe : celui de l'accès aux prestations sociales non
contributives des étrangers non communautaires résidant en
France.
S'agissant de ces prestations, les ressortissants d'Etats membres de la
Communauté européenne ont vu leur situation définitivement
et positivement réglée depuis la modification du règlement
n° 1408/71. Ils bénéficient d'un régime
caractérisé par l'absence de discrimination avec les nationaux
d'une part
6(
*
)
; d'autre
part, les prestations sociales non contributives font partie du champ
d'application matériel de la législation communautaire
7(
*
)
.
Les étrangers non communautaires n'ont aujourd'hui pas droit aux
prestations sociales non contributives que sont les différentes
composantes du minimum vieillesse et l'AAH, sauf convention internationale de
réciprocité.
Depuis 1991,
cette situation est en contradiction avec la jurisprudence
constante de la Cour de justice des Communautés européennes qui
estime qu'en matière de protection sociale, le traitement
réservé aux ressortissants des Etats avec lesquels la
Communauté européenne a conclu des accords de coopération
ou d'association (pays du Maghreb, Turquie, certains pays d'Europe centrale et
orientale...) doit être le même que celui réservé aux
nationaux
. La Cour de justice des Communautés européennes
interprète ainsi de façon très large et consacre
l'applicabilité directe du principe d'égalité de
traitement en matière de sécurité sociale.
La Cour de justice des Communautés européennes estime par
conséquent qu'il n'y a pas lieu de priver du bénéfice des
prestations non contributives, donc du minimum vieillesse et de l'AAH, les
ressortissants des pays ayant signé un accord de coopération ou
d'association avec la Communauté européenne
Depuis l'arrêt Mazari rendu par la Cour de Cassation le 7 mai 1991,
la
jurisprudence communautaire est aujourd'hui strictement appliquée par
les tribunaux français et les caisses de sécurité sociale
qui refusent, sur le fondement du droit en vigueur, le versement aux
étrangers couverts par un accord communautaire du minimum vieillesse et
de l'allocation aux adultes handicapés, se voient
systématiquement condamnées.
La situation est donc particulièrement inconfortable pour les caisses de
sécurité sociale : celles-ci, se réfugiant
derrière la loi française, refusent généralement de
prendre acte des effets du droit communautaire sur le droit interne lorsque les
demandeurs sont des ressortissants d'Etats tiers liés à la
Communauté européenne par un accord de coopération. Les
demandeurs saisissent alors la justice pour obtenir le versement de ces
prestations. Les organismes de sécurité sociale, dès lors
qu'il y a contestation d'un refus d'octroi, se désistent en effet le
plus souvent de toute instance et attribuent la prestation à
l'intéressé.
La confrontation entre droit national et droit communautaire nourrit donc un
contentieux important. Dans son rapport
8(
*
)
, M. Patrick Weil juge par
conséquent que la suppression de la condition de nationalité pour
l'AAH et le minimum vieillesse déchargerait d'un contentieux inutile les
organismes de sécurité sociale et les juridictions
spécialisées du contentieux de la sécurité sociale.
En outre, la Commission a fait condamner en manquement la République
française à deux reprises pour avoir maintenu dans l'article
L. 815-5 du code de la sécurité sociale la condition de
réciprocité (CJCE, 12 juillet 1990,
Commission c/
République française
, aff. C-236/88 ; CJCE 11 juin
1991,
Commission c/ République française
, aff. C-307/89).
En supprimant la condition de nationalité, l'article 36 du projet met
donc fin à un imbroglio juridique et assure la conformité du
droit français au droit communautaire.
On remarquera toutefois que
le texte proposé par le Gouvernement va
plus loin que ce qui est strictement exigé par la jurisprudence
communautaire
. Les étrangers qui ne sont pas ressortissants d'un
Etat lié à l'Union européenne par un accord de
coopération ou qui ne relèvent pas d'une convention de
réciprocité n'ont aujourd'hui aucun moyen de
bénéficier des prestations non contributives. Or, la
rédaction choisie par le Gouvernement étend le
bénéfice de ces prestations à tout étranger, qu'il
soit ressortissant d'un Etat lié à l'Union européenne par
un accord de coopération ou non.
Cette rédaction apparaît inspirée par la jurisprudence du
Conseil constitutionnel qui s'oppose à ce qu'il soit établi une
distinction entre étrangers couverts par un accord international et
autres étrangers en situation régulière. Dans sa
décision n° 89-269 DC du 22 janvier 1990, examinant des
dispositions réformant le Fonds national de solidarité, le
Conseil constitutionnel avait décidé que
" l'exclusion
des étrangers résidant régulièrement en France du
bénéfice de l'allocation supplémentaire, dès lors
qu'ils ne peuvent se prévaloir d'engagements internationaux ou de
règlements pris sur leur fondement, méconnaît le principe
d'égalité ".
Votre commission estime par conséquent qu'il convient de ne pas
s'opposer à la suppression de la condition de nationalité pour
l'accès aux prestations non contributives.
Au-delà des aspects juridiques que soulève cette question,
votre commission n'est en outre pas insensible au problème
posé par les populations de nationalité étrangère
qui ne peuvent aujourd'hui bénéficier du minimum vieillesse et de
l'AAH alors qu'elles sont en droit de bénéficier du revenu
minimum d'insertion.
Faute d'un cadre plus adapté, ces personnes âgées et
handicapées deviennent allocataires du RMI et bénéficient
alors d'un dispositif qui -du fait de son volet insertion- n'est manifestement
pas adapté à leur situation. Les acteurs de l'insertion se voient
ainsi contraints de passer des contrats d'insertion avec des personnes
âgées pour qui cette notion n'a guère de signification. Une
situation identique prévaut pour les bénéficiaires
handicapés du RMI.
Il s'agit là manifestement d'un détournement de la
finalité du RMI puisque ces bénéficiaires n'ont pas
vocation à quitter le dispositif.
2. Le coût financier de cette mesure semble cependant
important et n'a pas fait l'objet d'une évaluation rigoureuse
On rappellera au préalable que le coût financier des mesures
proposées n'a pas été intégré dans la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998, alors que celles-ci
entreront vraisemblablement en vigueur avant l'été 1998
. Si
l'évaluation précise des nouvelles dépenses induites
était peut-être difficile, le Gouvernement aurait toutefois pu
indiquer au Parlement que l'équilibre de la sécurité
sociale pour 1998 serait marginalement affecté par l'effet des mesures
contenues dans ce projet de loi. Cela n'a pas été le cas.
En ce qui concerne le minimum vieillesse, le coût de la suppression de la
condition de nationalité est évalué par l'étude
d'impact annexée au projet de loi entre "
182 et 588 millions de
francs selon les hypothèses, sur la base d'un montant moyen d'allocation
de 14.700 F par personne et d'un nombre de bénéficiaires se
situant entre 124.000 et 160.000
". Ces chiffres quelque peu
surprenants -la multiplication donne une fourchette comprise entre 1,82
milliard et 2,35 milliards de francs- ont été affinés dans
le rapport de l'Assemblée nationale
9(
*
)
qui table sur 32.000
bénéficiaires,
soit un coût total de 470 millions de
francs
(32.000 * 14.700 francs).
L'étude d'impact avance également que le coût net de cette
mesure "
serait au maximum de 300 millions de
francs
",
l'extension du minimum vieillesse ayant en effet pour contrepartie de faire
sortir du dispositif du RMI un certain nombre de personnes de
nationalité étrangère.
On soulignera néanmoins qu'une telle opération s'apparente
à un
transfert de charges
entre le budget de l'Etat, qui a
à sa charge le RMI, et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV),
qui finance le minimum vieillesse, et constitue d'une certaine façon une
opération de débudgétisation
.
Le FSV anticipe de son côté un surcoût de près de 500
millions de francs en année pleine et de 200 millions de francs en 1998,
compte tenu de la probable entrée en vigueur tardive de la loi.
S'agissant de la suppression de la condition de nationalité pour l'AAH,
le coût brut est évalué par l'étude d'impact
"
entre
520 et 638 millions de francs
" et le
coût net, par le même effet sur le RMI, "
entre
215
et 264 millions de francs
". Il s'agit là d'un simple
transfert financier entre deux prestations à la charge du budget de
l'Etat. Les chiffres figurant dans le rapport de l'Assemblée nationale
font état d'un coût brut de 640 millions de francs, produit du
nombre attendu d'allocataires (18.515) et du montant moyen annuel de la
prestation (34.473 francs).
Ces chiffres ne coïncident toutefois pas avec ceux évalués
par la CNAF qui prévoit, quant à elle, un surcoût de 260
millions de francs pour l'AAH.
Les chiffres avancés par le Gouvernement et par le rapporteur de
l'Assemblée nationale sont donc à examiner avec une certaine
prudence. Les évaluations financières auraient
mérité sans doute d'être plus rigoureuses.
3. La suppression de la condition de nationalité pour
bénéficier du minimum vieillesse et de l'AAH doit s'accompagner
d'un alignement sur les conditions d'accès au revenu minimum
d'insertion
S'il paraît difficile de s'opposer à la suppression de la
condition de nationalité, on remarquera toutefois que
cette mesure ne
s'accompagne d'aucun garde-fou propre à limiter les risques de
dérives et d'abus et susceptible d'éviter les incitations
à l'immigration.
En effet, dans la rédaction actuelle du texte,
tout étranger
titulaire d'un titre de séjour pourrait bénéficier,
dès son arrivée sur le sol français, du minimum vieillesse
et de l'AAH. Votre commission juge que ceci n'est pas acceptable.
Votre commission vous propose donc
d'aligner le régime du minimum
vieillesse et de l'AAH sur celui qui prévaut aujourd'hui pour le
bénéfice du revenu minimum d'insertion
.
En exigeant, pour le bénéfice du minimum vieillesse et de l'AAH
les titres de séjour demandés pour le RMI,
on instaure
de
facto
, dans la plupart des cas, une condition de durée de
résidence régulière et ininterrompue de trois ans pour
l'obtention de ces prestations non contributives.
L'introduction, pour le bénéfice du minimum vieillesse et de
l'AAH, des critères qui prévalent aujourd'hui pour l'obtention
par les personnes de nationalité étrangère du RMI
présenterait
un triple avantage
.
Tout d'abord, elle permettrait de
limiter sensiblement les risques que
pourrait susciter une législation trop généreuse tout en
réglant le problème des étrangers présents depuis
un certain temps sur notre territoire.
De plus, elle
limiterait le coût de ces mesures
, et
particulièrement leur coût futur.
Enfin,
cette rédaction simplifierait considérablement
l'état du droit existant
en instituant, s'agissant des personnes de
nationalité étrangère, exactement les mêmes
conditions d'accès pour les trois minima sociaux que sont le RMI, le
minimum vieillesse et l'AAH.
En outre, dans la mesure où beaucoup des bénéficiaires
potentiels de ces mesures sont déjà bénéficiaires
du RMI, il apparaît particulièrement judicieux de s'inspirer
très exactement des conditions exigées pour le
bénéfice de cette allocation.
On ajoutera que l'alignement sur les conditions d'obtention du RMI
représentera une simplification en termes de gestion administrative pour
les caisses d'allocations familiales qui gèrent à la fois le RMI
et l'AAH.
Les étrangers peuvent aujourd'hui prétendre à l'allocation
du RMI sous réserve de règles spécifiques qui visent
à s'assurer qu'ils ont vocation à s'insérer dans la
communauté nationale. En application de l'article 8 de la loi
n° 88-1088 du 1
er
décembre 1988 relative au revenu
minimum d'insertion, dont le texte figure en annexe, l'étranger
demandeur de l'allocation de RMI doit être titulaire d'un des titres de
séjour suivant en cours de validité ou d'un des documents
prévus ci-après :
· carte de résident,
· carte de résident privilégié,
· carte de séjour de la CEE valable cinq ou dix ans et
portant la mention " Toutes activités professionnelles en vertu du
Règlement 1612/68 article 10 ",
· carte de séjour temporaire portant mention d'une
activité professionnelle, accompagnée d'un document établi
par la préfecture attestant une résidence ininterrompue d'au
moins trois ans en France et quelle que soit la situation du demandeur à
l'égard du chômage,
· certification de résidence de ressortissant
algérien valable un an portant mention d'une activité
professionnelle, accompagné d'un document établi par la
préfecture attestant une résidence ininterrompue d'au moins trois
années en France,
· passeport monégasque revêtu du visa d'autorisation
du Conseil général de France à Monaco,
· titre d'identité d'Andorran délivré par le
préfet des Pyrénées orientales,
· récépissé de demande de renouvellement d'un
des titres de séjour ci-dessus accompagné, le cas
échéant, du document établi par la préfecture.
En application du premier alinéa de l'article 14 de l'ordonnance du
2 novembre 1945, dont le texte figure en annexe du présent rapport,
la carte de résident peut être obtenue à l'issue d'une
durée de résidence non interrompue en France d'au moins trois
ans, conforme aux lois et règlements en vigueur.
Elle peut également être obtenue de plein droit dans un certain
nombre de cas (conjoints, parents, enfants de Français...) prévus
à l'article 15 de ladite ordonnance, qui figure également en
annexe.
Le choix de la rédaction retenue par votre commission à
l'article 36 correspond à un alignement absolu sur les conditions
d'accès au RMI : minimum vieillesse, AAH et RMI auraient
désormais des régimes parfaitement identiques.
Enfin, il paraît nécessaire de préserver les droits issus
des conventions internationales de réciprocité en
précisant que ces nouvelles règles sont s'appliqueront
" en l'absence de convention de réciprocité ".
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.