B. L'AVENIR DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE
1. Au plan institutionnel, la préparation du scrutin d'autodétermination de 1998
a) Une application satisfaisante de la loi référendaire du 9 novembre 1988
L'ensemble du dispositif institutionnel prévu par la
loi référendaire du 9 novembre 1988 fonctionne de
façon satisfaisante.
La décentralisation institutionnelle résultant de la
création des trois provinces permet une meilleure répartition des
responsabilités et une meilleure prise en compte des besoins de la
population.
Le rééquilibrage économique, social et culturel
s'opère progressivement grâce aux mesures et dispositifs
prévus dans la loi référendaire. Il s'agit notamment des
dispositions relatives aux budgets du territoire et des provinces et actions
des établissements publics d'Etat : agence de développement rural
et d'aménagement foncier, institut de formation des personnels
administratifs, agence de développement de la culture canaque, institut
calédonien de participation ainsi que des contrats de
développement et du contrat de ville pour Nouméa.
La loi référendaire précise, dans son article 2, qu'entre
le 1er mars et le 31 décembre 1998, les populations
intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront
appelées à se prononcer par un scrutin
d'autodétermination, conformément aux dispositions de
l'article 53 de la Constitution, sur le maintien du territoire dans la
République ou sur son accession à l'indépendance.
b) L'état des discussions sur l'avenir du territoire
Si de fréquents contacts se sont poursuivis entre le
Gouvernement et les deux partenaires des accords de Matignon, la reprise des
discussions sur l'avenir institutionnel du territoire se heurte à un
préalable posé par le FLNKS. Ce préalable porte sur
l'accès aux ressources minières nécessaires à
l'alimentation du projet d'usine métallurgique de transformation du
nickel en province nord présenté par la société
minière du sud Pacifique (SMS), société d'extraction
minière appartenant à la province nord, et Falconbridge (groupe
canadien, deuxième producteur mondial de nickel).
Le Gouvernement a affirmé l'importance qu'il attache à la
réalisation de l'usine métallurgique en province nord au titre du
rééquilibrage. Il a chargé M. Philippe Essig d'une
mission pour évaluer les perspectives économiques et
industrielles de ce projet et faciliter l'aboutissement des discussions entre
les sociétés Eramet-SLN, SMSP et Falconbridge en entendant les
parties et en proposant, si nécessaire, les voies d'un accord
équilibré. M. Philippe Essig, qui s'est rendu en
Nouvelle-Calédonie du 23 au 30 août 1997, a remis ses
premières conclusions au Premier ministre le 20 septembre dernier.
Sa mission, qui a jugé crédible le projet défendu par le
FLNKS, a été prolongée d'un mois pour examiner les
conditions techniques et financières d'accès à la
ressource.
Par ailleurs, M. Philippe Essig a été chargé de
conduire une réflexion globale sur la valorisation des ressources
minières du territoire. Il devra remettre ses conclusions pour la fin de
l'année 1997.
2. L'activité économique est, dans l'ensemble, restée bien orientée en 1996
a) Les principaux indicateurs socio-économiques
Le nouveau recensement général de la population
du territoire fait état de 196.836 habitants au
16 avril 1996. Les résultats ont été
officialisés par le décret n° 96-1084 du 11
décembre 1996.
La population du territoire croît de 19,9 % depuis le recensement de
1989, ce qui représente une croissance annuelle de 2,6 %,
légèrement supérieure à celle de la période
précédente (2,1 % par an de 1983 à 1989).
Le rôle économique du Grand Nouméa s'affirme, puisqu'il
regroupe 60,4 % de la population néo-calédonienne avec un
accroissement de 21,8 % par rapport à 1989.
Le recensement permet de faire le point sur l'équilibre
démographique des différentes communautés vivant sur le
territoire.
1988 |
1989 |
1996 |
||||
Effectifs |
% |
Effectifs |
% |
Effectifs |
% |
|
Européenne |
53.974 |
37,1 |
55.085 |
33,6 |
67.151 |
34,1 |
Indonésienne |
5.319 |
3,7 |
5.191 |
3,2 |
5.003 |
2,5 |
Mélanésienne |
61.870 |
42,6 |
73.598 |
44,8 |
86.788 |
44,1 |
Ni Vanuatu |
1.212 |
0,8 |
1.683 |
1 |
2.244 |
1,1 |
Tahitienne |
5.570 |
3,8 |
4.750 |
2,9 |
5.171 |
2,6 |
Vietnamienne |
2.381 |
1,6 |
2.461 |
1,5 |
2.822 |
1,4 |
Wallisienne |
12.174 |
8,4 |
14.186 |
8,6 |
17.763 |
9 |
Autre et non déclarée |
2.868 |
2 |
7.219 |
4,4 |
9.894 |
5 |
TOTAL |
145.368 |
100 |
164.173 |
100 |
196.836 |
100 |
Sources : INSEE/ITSEE
La commune mélanésienne, la plus nombreuse (44,1 %),
croît de 2,4 % en rythme annuel. Elle est peu affectée par
les migrations extérieures et sa croissance vient principalement de
l'excédent des naissances sur les décès. Toutefois, sa
part dans la population totale a diminué en raison de la baisse de la
natalité et de la hausse du flux migratoire. Cette population reste
très jeune (47,2 % de la population a moins de 20 ans),
même si cette jeunesse s'atténue un peu.
Le rythme d'accroissement annuel moyen de la communauté
européenne s'est accéléré (+ 2,9 %). Les
Européens représentent désormais 34,1 % de la
population néocalédonienne contre 33,6 % en 1989. La
population européenne vieillit, mais à un rythme plus lent que
précédemment, la base de sa pyramide des âgées
s'est, en effet, légèrement élargie. Il convient de noter
que 30,8 % des Européens ont moins de 20 ans.
Le marché de l'emploi s'est maintenu dans un état stationnaire
depuis trois ans :
- le nombre des emplois déclarés à la CAFAT (Caisse
de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de
prévoyance des travailleurs de Nouvelle-Calédonie) plafonne
autour de 44.000 depuis trois ans, pour s'établir à 44.832
en 1996 ;
- le nombre des demandeurs d'emploi-non-satisfaits, qui avait
plafonné à 5.000 en 1989 et 1990, a progressé ces
dernières années pour atteindre environ 7.500 en 1996, mais en
diminution de 0,5 % par rapport à 1995. Ce signe encourageant ne
doit pas masquer la diminution de près de 14 % des offres d'emploi.
Cette baisse traduit les difficultés de l'économie
néo-calédonienne à générer de nouveaux
emplois. Outre les problèmes conjoncturels, le plus préoccupant
semble être l'inadéquation qualitative, quantitative et
géographique entre l'offre et la demande. De plus, le nombre de
demandeurs d'emploi " réel " est certainement supérieur
du fait que de nombreuses personnes ne font pas appel à l'Agence pour
l'emploi dans leur recherche d'emploi.
La hausse des importations associée à la légère
baisse des exportations dégrade encore le solde la balance commerciale
qui affiche un déficit de 42.862 millions de francs CFP pour
l'exercice 1996. En conséquence, le taux de couverture des importations
par les exportations diminue pour s'établir à 54 % contre
59 % précédemment.
BALANCE COMMERCIALE DES BIENS
(en millions de francs CFP)
1992 |
1993 (1) |
1994 (1) |
1995 (1) |
1996 |
Variations
|
|
Importations |
89 160 |
87 951 |
87 307 |
86 894 |
93 087 |
+ 7,1 % |
Exportations |
40 200 |
39 653 |
42 088 |
51 251 |
50 225 |
- 2,0 % |
Déficit commercial |
- 48 960 |
- 48 298 |
- 45 219 |
- 35 643 |
- 42 862 |
+ 20,3 % |
Taux de couverture (importations/ exportations) |
45 % |
45 % |
48 % |
59 % |
54 % |
Source : ITSEE et Service des mines
(1) Chiffres rectifiés
Le déficit commercial avec la France métropolitaine reste
particulièrement important (- 24,6 milliards de francs CP) :
il représente 57,5 % du déficit global, soit 16 points
de plus que la part de marché de la métropole en
Nouvelle-Calédonie. Le territoire est aussi très nettement
déficitaire vis-à-vis de ses voisins australien
(- 8,4 milliards de francs CFP) et néo-zélandais
(- 6,1 milliards de francs CFP). Seuls les échanges avec le
Japon sont significativement excédentaires (+ 8,5 milliards de
francs CFP).
b) Une activité économique globalement soutenue en 1996
Après les années de redressement entre 1987 et
1989 -marquées notamment par le retour à la paix civile, les
effets de la loi référendaire et une reprise de l'ensemble des
activités économiques sur le territoire (cette reprise ayant
été favorisée par l'envolée des cours du nickel
pendant dix-huit mois)- la Nouvelle-Calédonie a connu, de 1990
à 1994, une période de croissance ralentie marquée par une
chute des cours du nickel consécutive au ralentissement
économique des pays industrialisés.
Les années 1995 et 1996 ont été plutôt favorables,
avec une augmentation des activités liées au nickel et un
environnement politique marqué par la recherche d'une solution
consensuelle pour l'échéance de 1998.
Au cours des trois dernières années, le nickel a
représenté en moyenne 93,5 % des exportation du territoire.
Avec 12,3 % de la production mondiale et 20 % des réserves
identifiées en 1995, il constitue un atout majeur pour le
développement du territoire. En contrepartie, l'économie locale
est extrêmement dépendante de son exploitation qui est,
elle-même, tributaire des fluctuations du marché mondial. Par
rapport aux pays concurrents (Canada, Russie, Indonésie...), la
Nouvelle-Calédonie est handicapée par des coûts de
production (énergie, main-d'oeuvre...) relativement élevés.
EXPORTATION DE MATTES ET DE FERRONICKELS (EN MÉTAL
CONTENU)
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
|
Quantité (t) |
45.841 |
41.289 |
39.991 |
47.771 |
49.538 |
51.894 |
53.768 |
Valeur (MF CFP) |
35.677 |
32.781 |
26.117 |
27.830 |
31.193 |
35.271 |
35.059 |
En 1991 et 1992, le secteur du tourisme avait subi les
conséquences, d'une part du conflit du Golfe qui avait affecté la
venue des touristes japonais et, d'autre part, de la récession des
économies australienne et néo-zélandaise.
L'année 1993 a marqué un certain retour à la croissance,
mais c'est surtout l'année 1994 qui a
bénéficié des effets positifs, d'une part, des projets
d'extension des capacités hôtelières et, d'autre part, de
l'ouverture de la desserte aérienne du territoire à la
concurrence (Air Outre-Mer et Corsair).
En 1995, la hausse de fréquentation a été faible
(+ 1,5 %), en raison des conséquences négatives de la
reprise des essais nucléaires sur la venue de touristes en provenance
d'Australie ou de Nouvelle-Zélande et malgré une progression
forte de la clientèle en provenance de la France métropolitaine
(+ 17 %).
L'arrêt des essais nucléaires a permis de relancer la venue des
touristes (+ 54 % par rapport au 1er semestre 1996, de sorte que
le chiffre record de fréquentation connu en 1984 (91.512 touristes)
a toutes les chances d'être dépassé en 1997.
Le secteur du bâtiment et des travaux publics traverse une
période délicate et quelques entreprises montrent
d'évidents signes de faiblesse (difficultés de trésorerie,
licenciements économiques et même cessation d'activité). Le
secteur est notamment affecté par la contraction de la demande publique
qui n'est pas relayée par les opérateurs privés. Le
secteur est également confronté à des problèmes
structurels provenant à la fois des conditions de concurrence et
d'exercice de la profession et à sa situation financière
caractérisée par une insuffisance de fonds propres.
Pour l'année 1997, le volume des travaux prévu en appels d'offres
est en augmentation. Concernant le bâtiment, près de la
moitié touche l'habitat social, priorité affichée par les
pouvoirs publics. Les opérations concernant les travaux publics et les
constructions industrielles, à quelques exceptions près, sont
d'un faible montant.
Un plan de relance du bâtiment, élaboré par
l'exécutif, a été mis en place dans le courant de
l'année 1997. Il prévoit notamment un investissement
cumulé de 12,9 milliards de francs CFP sur trois ans, dont
7,5 milliards de francs seraient à la charge du Territoire et
5,4 milliards de francs à la charge de l'Etat. Ces nouveaux
investissements devraient permettre la création de 430 emplois par
an, au lieu des 850 suppressions d'emplois attendus si aucune mesure n'est
prise. Le texte prévoit également l'instauration d'une couverture
sociale obligatoire pour les travailleurs indépendants.