TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES ET DE COORDINATION
Article 30 et 31
Exécution de la peine d'une
personne condamnée
à un suivi socio-judiciaire dans les
territoires d'outre-mer et à Mayotte
Ces articles ont pour objet d'insérer au sein du code
de procédure pénale des articles 873-1 et 902 du code de
procédure pénale, afin de prévoir que, dans les TOM (futur
article 873-1) ou à Mayotte (futur article 902), la personne
condamnée à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction
de soin exécutera sa peine privative de liberté, si elle doit en
subir une, dans un établissement pénitentiaire permettant de lui
assurer un suivi médical et psychologique adapté.
Une telle précision est apparue nécessaire dans la mesure
où l'article 718 du code de procédure pénale, qui
prévoit l'incarcération des délinquants sexuels dans un
tel établissement, n'est applicable ni dans les TOM ni dans la
collectivité territoriale de Mayotte.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 30 bis
Mention au casier judiciaire de la
condamnation
à une peine de suivi socio-judiciaire
Cet article, inséré par l'Assemblée
nationale à l'initiative du Gouvernement, vise à compléter
l'article 133-16 du code pénal, relatif aux effets de la
réhabilitation de plein droit.
En vertu de l'article 133-13 dudit code, le point de départ du
délai ouvrant droit à réhabilitation court à
compter de l'exécution de l'emprisonnement. Or, compte tenu, d'une part,
du délai de réhabilitation et, d'autre part, de la durée
possible du suivi socio-judiciaire ou de la peine d'interdiction d'exercer une
activité impliquant un contact avec des mineurs, la
réhabilitation pourrait être acquise alors que le condamné
serait toujours soumis au suivi socio-judiciaire ou à ladite peine
complémentaire. Comme la réhabilitation a notamment pour effet
d'effacer la condamnation du casier judiciaire, les employeurs potentiels
pourraient embaucher une personne sans savoir qu'elle est frappée de
l'interdiction d'exercer l'emploi à laquelle on la destine. Pour
reprendre l'exemple donné par Mme Guigou devant l'Assemblée
nationale, un centre de loisirs désireux d'engager un éducateur
pour des mineurs peut être amené, sans le savoir, à
recruter une personne qui aura été condamnée pour
infractions sexuelles, puisque le bulletin n° 3 de son casier
judiciaire portera la mention " néant ".
L'article 30
bis
précise donc que, lorsque la personne
réhabilitée a été condamnée au suivi
socio-judiciaire ou à la peine d'exercer une activité
professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec
des mineurs, la réhabilitation ne produit ses effets qu'à la fin
de la mesure.
De même, il complète l'article 777 du code de
procédure pénale afin de préciser que le bulletin
n° 3 comprendra, pendant la durée de la mesure, les
décisions prononçant le suivi socio-judiciaire ou la peine
d'interdiction d'exercer une activité impliquant un contact habituel
avec des mineurs.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 31 bis
Réparation du dommage
causé à un mineur victime
de violences ou d'atteintes
sexuelles
Cet article, inséré par l'Assemblée
nationale à l'initiative de sa commission des Lois, tend à
introduire au sein du code civil un article 388-3 afin de préciser
que, lorsqu'un dommage est causé par des tortures, des actes de
barbarie, des violences ou des atteintes sexuelles contre un mineur, il est
tenu compte de l'âge de celui-ci pour évaluer la gravité du
préjudice subi et fixer sa réparation.
Votre commission s'interroge sur l'opportunité d'une telle
précision qui lui paraît aller de soi. Elle pourrait même
être source de difficulté en induisant un raisonnement
a
contrario
selon lequel l'âge de la victime ne serait pas pris en
compte lorsque le dommage ne résulterait pas d'une atteinte sexuelle.
C'est pourquoi votre commission a adopté un
amendement
tendant
à supprimer l'article 31
bis
.
Article 31 ter
Allongement de la prescription de
l'action
en responsabilité civile pour les dommages
causés
à un mineur résultant de violences ou
d'agressions sexuelles
Cet article, inséré par l'Assemblée
nationale à l'initiative de sa commission des Lois, a pour objet de
compléter l'article 2270-1 du code civil.
En sa rédaction actuelle, cette dernière disposition
énonce que les actions en responsabilité civile
extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la
manifestation du dommage ou de son aggravation.
L'article 31
ter
propose une exception à cette
règle en portant à vingt ans ce délai lorsque le
dommage est causé par des tortures, des actes de barbarie, des violences
ou des agressions sexuelles contre un mineur.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 31 quater
Preuve de la
vérité des faits diffamatoires
lorsqu'ils sont constitutifs
d'infractions sexuelles
Cet article, inséré par l'Assemblée
nationale à l'initiative de sa commission des Lois, a pour objet de
modifier l'article 35 de la loi du 29 juillet 1981 sur la
liberté de la presse en ses dispositions relatives à la preuve de
la vérité des faits diffamatoires.
En sa rédaction actuelle, cet article 35 prévoit trois
hypothèses dans lesquelles la vérité des faits
diffamatoires,
l'exceptio veritatis
, ne peut être prouvée :
a) lorsque l'imputation concerne la vie privée de la personne ;
b) lorsque l'imputation se réfère à des faits qui
remontent à plus de dix années ;
c) lorsque l'imputation se réfère à un fait constituant
une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu
à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la
révision.
Le présent article 31
quater
prévoit une
exception à cette triple exception : la vérité des
faits diffamatoires pourrait toujours être prouvée, même
dans ces hypothèses, s'agissant d'agressions ou d'atteintes sexuelles
contre un mineur.
A l'Assemblée nationale, Mme Frédérique Bredin a
précisé que "
ces dispositions permettraient
d'éviter qu'une victime d'infraction sexuelle faisant publiquement
état de sévices subis, alors même que les faits remontent
à plus de dix ans ou sont couverts par la prescription, ne soit
condamnée pour diffamation
".
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 31 quinquies
Peines ne pouvant être
prononcées contre les mineurs
Cet article reprend l'article 20 du projet de loi
initial, que l'Assemblée nationale a opportunément
préféré, eu égard à son contenu, placer dans
le titre III, relatif aux dispositions diverses. Il modifie
l'article 20-4 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative
à l'enfance délinquante qui énumère les peines ne
pouvant être prononcées à l'encontre d'un mineur.
En sa rédaction actuelle, cet article 20-4 vise les articles
prévoyant lesdites peines.
Le présent article 31
quinquies
a pour simple objet de
substituer à cette énumération par renvoi une
énumération descriptive des peines en question. Il n'apporte donc
aucune modification de fond.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 31 sexies
Possibilité de saisir en
douane les objets
comportant des images pédophiles
Cet article, inséré par l'Assemblée
nationale à l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, a pour objet de
compléter l'article 38 du code des douanes afin de permettre aux
agents des douanes de saisir les objets comportant des images ou des
représentations de mineur à caractère pornographique.
Votre commission l'a adopté
sans modification
.
Article 32
Information du chef d'un
établissement scolaire
des audiences de jugement des infractions
commises
dans son établissement
Cet article a pour objet d'imposer au ministère public
d'aviser le chef d'un établissement scolaire de la date et de l'objet de
l'audience de jugement d'un crime ou d'un délit lorsque cette
infraction :
- a été commise dans l'enceinte de son établissement
- ou a concerné, aux abords immédiats de l'établissement,
un élève de celui-ci ou un membre de son personnel.
Cet avis est adressé par lettre recommandée dix jours au
moins avant la date de l'audience ou, en cas de comparution immédiate,
"
dans les meilleurs délai et par tout moyen
".
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 32 bis
Condition de sortie d'un
établissement psychiatrique
d'une personne pénalement
irresponsable
Cet article a pour objet de réécrire
l'article L. 348-1 du code de la santé publique relatif aux
conditions de sortie de l'établissement psychiatrique dans lequel a
été internée d'office une personne ayant
bénéficié d'un non-lieu, d'une relaxe ou d'un acquittement
pour démence et jugée susceptible de compromettre l'ordre public
ou la sûreté des personnes.
En sa rédaction actuelle, cet article L. 348-1 subordonne
cette sortie à deux décisions conformes résultant de deux
examens psychiatriques réalisés séparément par deux
psychiatres n'appartenant pas à l'établissement.
Le présent article 32
bis
propose de substituer
à cette procédure l'exigence d'un avis conforme d'une commission
composée de deux médecins, dont un psychiatre n'appartenant pas
à l'établissement, et d'un magistrat désigné par
le premier président de la cour d'appel.
Cette commission, dont les délibérations sont secrètes,
entend l'intéressé ou son représentant, assisté,
s'il le souhaite, d'un avocat, ainsi que le médecin traitant. Elle fait
procéder à toutes expertises qu'elle juge nécessaires.
L'Assemblée nationale a précisé que la voix du magistrat
serait prépondérante en cas de partage des voix.
Cet article 32
bis
a donné lieu à des
réactions forts différentes de la part des personnes entendues
par votre commission ou votre rapporteur :
- certaines ont, à l'instar du Dr Lacour, constaté que ces
dispositions allaient à l'encontre des propositions formulées
récemment par le groupe national d'évaluation de la loi du
27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes
hospitalisées en raison de troubles mentaux, présidé par
Mme Hélène Strohl, inspecteur général des
affaires sociales. Selon les informations fournies à votre rapporteur,
Mme Strohl juge "
peu fondé en droit
" le fait
de
"
faire dépendre la levée d'une mesure d'hospitalisation
contrainte de l'avis d'un magistrat, en conservant le pouvoir de
décision du préfet, alors qu'après avoir
bénéficié de l'application de l'article 122-1 du code
pénal, les poursuites sont abandonnées et la personne
bénéficie d'un non-lieu. La compétence judiciaire ne
s'explique pas, dès lors que la procédure judiciaire est
close
" ;
- d'autres personnes, notamment Mme le Professeur Cartier et les
représentants des associations de victimes entendues par votre
rapporteur, ont estimé utile que la justice ait un droit de regard sur
la sortie des personnes internées en service psychiatrique après
avoir été déclarées irresponsables
pénalement. Mme Elisabeth Guigou a, pour sa part,
déclaré devant l'Assemblée nationale que "
faire
dépendre de l'avis d'une commission toute décision de
levée de l'hospitalisation d'office d'une personne
déclarée pénalement irresponsable constituera une garantie
supplémentaire
". Quant à M. Bernard Kouchner,
secrétaire d'Etat à la santé, il a approuvé
"
les explications
" données par Mme Guigou.
L'examen de cet article 32
bis
relève, par son objet,
de la compétence de votre commission des affaires sociales, qui a
désigné M. Jacques Bimbenet comme rapporteur pour avis de ce
projet de loi. Ainsi qu'il a été indiqué dans
l'exposé général du présent rapport, votre
commission souhaite, avant de se prononcer sur le fond, recueillir les
observations de notre collègue.
C'est pourquoi elle a réservé sa position sur cet article.
Article additionnel après l'article 32
bis
Diffusion de messages pornographiques ou pédophiles
par un
service de communication audiovisuelle
Après l'article 32
bis
, votre commission vous
propose un
amendement
tendant à insérer un article
additionnel afin de compléter l'article 15 de la loi du 30 septembre
1986 relative à la liberté de communication.
En sa rédaction actuelle, cet article 15 comprend un alinéa
unique en vertu duquel "
le Conseil supérieur de l'audiovisuel
veille à la protection de l'enfance et de l'adolescence dans la
programmation des émissions diffusées par un service de
communication audiovisuelle
. "
Ainsi qu'il a été indiqué dans l'exposé
général du présent rapport, votre commission souhaite
édicter au sein de cet article des dispositions permettant d'informer
les offreurs de sites Internet des infractions commises par leurs
cocontractants consistant en la diffusion de messages à caractère
pornographique ou pédophile (articles 227-23 et 227-24 du code
pénal).
Il vous est donc proposé, sur le modèle de l'article 78 de ladite
loi, applicable en cas d'infraction aux règles d'émission, de
confier à des agents habilités et assermentés du CSA le
droit de constater les infractions prévues par les articles 227-23 et
227-24 du code pénal. Leurs procès-verbaux seraient transmis dans
les cinq jours au procureur de la République. Une copie de chaque
procès-verbal serait adressée au président du CSA, au
dirigeant du service de communication coupable de l'infraction ainsi
qu'à l'offreur du site. Informé de la commission d'infractions
par son cocontractant, celui-ci devrait alors, sous peine de complicité,
mettre fin au contrat.
Article 33
Coordination
Cet article a pour simple objet d'opérer une
coordination en abrogeant l'article 87-1 du code de procédure
pénale, relatif à la désignation d'un administrateur
ad
hoc
, qui relèvera désormais, en vertu de l'article 19 du
projet de loi, de l'article 706-51 du code de procédure
pénale.
Votre commission a adopté cet amendement
sans modification.
Article 34
Application de la loi aux TOM et à
Mayotte
Cet article a pour objet de rendre la loi applicable dans les
TOM et dans la collectivité territoriale de Mayotte.
Il précise toutefois que l'article 21, qui modifie le code de la
sécurité sociale, n'y est pas applicable, ledit code n'ayant pas
lui-même été étendu aux TOM et à Mayotte.
L'attention de votre rapporteur a été attirée par notre
excellent collègue Daniel Millaud sur les difficultés
susceptibles d'être posées pour l'application de la loi en
outre-mer.
Tout d'abord, si le projet de loi précise bien que le coût
budgétaire des médecins coordonnateurs sera à la charge de
l'Etat, il est silencieux sur le remboursement des soins dispensés par
le médecin traitant. Ceux-ci devraient donc être à la
charge des territoires.
En deuxième lieu, compte tenu notamment des particularités du
territoire de la Polynésie française (étendue du
territoire, grand comme l'Europe, non-usage du français par de nombreux
condamnés polynésiens, ce qui nécessiteraient des experts
comprenant et parlant le tahitien...), M. Millaud s'est inquiété
de la possibilité d'appliquer effectivement la loi dans les TOM. Cette
préoccupation fort légitime rejoint celle plus
générale de votre commission sur les moyens de mettre en oeuvre
la réforme, point sur lequel votre rapporteur ne manquera pas
d'interroger une nouvelle fois le Gouvernement lors de la séance
publique.
On observera par ailleurs que le présent article 34 étend
aux TOM des articles du code de la santé publique (ceux relatifs aux
médecins coordonnateurs) alors même que ledit code n'est pas
applicable dans ces territoires. Interrogé sur ce point par votre
rapporteur, les services de la Chancellerie lui ont répondu :
"
La non applicabilité de l'ensemble du code de la santé
publique ne signifie pas que les dispositions qui y sont
intégrées par le législateur ne doivent pas s'appliquer
aux TOM, cette question dépendant de la nature des dispositions
considérées, et non de leur insertion, purement formelle, dans un
code ou dans un autre
". Aussi a-t-il été fait observer
que certaines parties dudit code était déjà applicables
dans les TOM, notamment les dispositions relatives aux stupéfiants.
En revanche, les dispositions concernant la levée des internements
psychiatriques résultant de l'article 32
bis
relèvent bien de la compétence des territoires. Elles ne doivent
donc pas y être étendues. Il en va de même pour
l'article 31
sexies
, qui modifie une disposition non
détachable du code des douanes, lequel n'est pas non plus applicable
dans les TOM. C'est pourquoi votre commission a adopté un
amendement
excluant ces deux articles de l'extension aux TOM.
Elle a adopté le présent article 34 ainsi modifié.