TITRE II
DISPOSITIONS AYANT POUR OBJET DE PRÉVENIR
ET DE
RÉPRIMER LES INFRACTIONS SEXUELLES,
LES ATTEINTES À LA
DIGNITÉ DE LA PERSONNE
HUMAINE ET DE PROTÉGER
LES MINEURS
VICTIMES
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE
PÉNAL
Article 7
(art. 222-33 du code
pénal)
Définition du délit de harcèlement
sexuel
Cet article tend à compléter la
définition du délit de harcèlement sexuel figurant
à l'article 223-33 du code pénal en ajoutant à l'usage
d'ordres, menaces ou contraintes l'exercice de "
pressions de toute
nature
", par une personne abusant de sa position d'autorité en
vue d'obtenir des faveurs sexuelles.
Dans sa rédaction actuelle issue des travaux préparatoires du
nouveau code pénal, l'article 222-33 sanctionne "
le fait de
harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but
d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de
l'autorité que lui confèrent ses fonctions
". Les peines
prévues pour ce délit sont de un an d'emprisonnement et
100 000 F d'amende.
La loi n° 92-1179 du 2 novembre 1992 relative à l'abus
d'autorité en matière sexuelle dans les relations de travail a
par ailleurs introduit dans le code du travail et le statut de la fonction
publique des dispositions tendant à réprimer les comportements de
harcèlement sexuel dans le monde du travail.
Ainsi, l'article L. 122-46 du code du travail interdit-il de sanctionner ou de
licencier un salarié au motif qu'il aurait subi ou refusé de
subir des agissements de harcèlement d'un employeur ou plus
généralement de toute personne abusant de l'autorité que
lui confèrent ses fonctions, ou encore au motif qu'il aurait
témoigné de ces agissements. Le salarié ayant
procédé à de tels agissements est passible de sanctions
disciplinaires, en application de l'article L. 122-47 du même code.
En outre, l'article L. 123-1 de ce code prévoit qu'aucune
mesure intéressant la vie professionnelle du salarié, notamment
en matière d'embauche, ne peut être décidée en
prenant en considération de tels agissements.
Des dispositions analogues sont d'autre part décalquées dans le
statut général de la fonction publique.
En effet, l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant
droits et obligations des fonctionnaires prévoit notamment qu'aucune
mesure ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en
prenant en considération les agissements de harcèlement d'un
supérieur hiérarchique ou de toute personne abusant de
l'autorité que lui confèrent ses sanctions. Tout agent ayant
procédé à de tels agissements est par ailleurs passible de
sanctions disciplinaires, conformément aux dispositions du même
article.
La définition retenue par l'article L. 122-46 du code du travail et
l'article 6 du titre premier du statut général de la fonction
publique pour les "
agissements de harcèlement
"
diffère cependant quelque peu de celle figurant à l'article
222-33 du code pénal. Il s'agit en effet des agissements d'une personne
abusant de sa position d'autorité qui "
a donné des
ordres, proféré des menaces, imposé des contraintes ou
exercé des pressions de toute nature
" sur un salarié
(ou un fonctionnaire) dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle.
L'article 7 du présent projet de loi, adopté sans modification
par l'Assemblée nationale, propose d'harmoniser la définition
pénale du harcèlement sexuel avec celle du code du travail en
adoptant une rédaction similaire.
La rédaction proposée aurait donc pour résultat
d'introduire dans la définition du délit de harcèlement
sexuel la notion de "
pressions de toute nature
".
Cette notion de "
pressions de toute nature
"
apparaît
cependant peu précise et risque de s'avérer difficile à
caractériser.
Lors des travaux préparatoires du nouveau code pénal, le
Sénat, suivant les propositions de sa commission des Lois, avait
d'ailleurs retenu pour la définition du délit de
harcèlement sexuel une définition faisant disparaître le
terme de pressions qui figurait dans le texte de l'Assemblée nationale
et c'est une rédaction proche de celle du Sénat qui avait
finalement été retenue en commission mixte paritaire.
Au surplus, l'article 225-2 du code pénal, qui punit de
deux ans d'emprisonnement et de 200.000 F d'amende une discrimination
consistant "
à subordonner une offre d'emploi à une
condition fondée sur l'un des éléments visés
à l'article 225-1
"
,
parmi lesquels figure
"
toute distinction opérée entre les personnes
physiques à raison de ... leur sexe
", permet
déjà de sanctionner pénalement le fait de subordonner une
embauche à des faveurs sexuelles, qui ne constitue pas à
proprement parler une menace ou une contrainte.
Votre commission vous propose donc d'en rester à la définition
actuelle du délit de harcèlement sexuel et d'adopter un
amendement de suppression
de cet article.
Article 8
(art. 222-45 du code pénal)
Peine
complémentaire d'interdiction d'exercer une activité
impliquant un contact avec les mineurs
Cet article, adopté sans modification par
l'Assemblée nationale, tend à instituer une nouvelle peine
complémentaire applicable aux personnes physiques reconnues coupables de
certaines infractions : l'interdiction d'exercer, à titre
définitif ou temporaire (pour une durée de 10 ans au plus), une
activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact
habituel avec les mineurs.
Cette nouvelle peine complémentaire est destinée à
être encourue par les personnes physiques ayant commis une des
infractions définies par les sections 1, 3 et 4 du chapitre II du titre
II du Livre deuxième du code pénal, à savoir :
- les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne
(tortures et actes de barbarie, violences, menaces) ;
- les agressions sexuelles (viol, autres agressions sexuelles,
harcèlement sexuel) ;
- le trafic de stupéfiants.
Elle vient compléter la liste des peines complémentaires
déjà prévues par l'article 222-45 du code pénal
pour les coupables de ces infractions, qui comprend actuellement :
- l'interdiction des droits civiques, civils et de famille ;
- ainsi que l'interdiction d'exercer une fonction publique.
Les personnes condamnées pour ces infractions peuvent également
se voir infliger les peines complémentaires
énumérées par l'article 222-44 du code pénal :
- l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans
l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a
été commise ;
- l'interdiction de détention ou de port d'armes ;
- la suspension ou l'annulation du permis de conduire ;
- enfin, la confiscation de véhicules, d'armes ou encore de la chose qui
a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de
la chose qui en est le produit.
La nouvelle peine complémentaire ajoutée à cet
éventail par l'article 8 du projet de loi est destinée
à protéger les mineurs contre des récidives
éventuelles de la part d'auteurs d'infractions particulièrement
graves déjà commises à l'encontre de mineurs, telles que
des tortures et des actes de barbarie ou des viols.
Cette peine complémentaire tendant à prévenir tout contact
habituel avec les mineurs est par ailleurs prévue par l'article 16 du
projet de loi pour les auteurs d'atteintes aux mineurs et à la famille.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 9
(art. 225-7, 227-22 et 227-26 du code
pénal)
Utilisation d'un réseau de
télécommunications
pour commettre les délits de
proxénétisme, de corruption de mineur
ou d'atteinte sexuelle
sur mineur sans violence
Cet article tend à faire de l'utilisation d'un
réseau de télécommunications (comme par exemple le
réseau Internet ou le Minitel) une circonstance aggravante de certains
délits.
· Le
paragraphe I
a ainsi pour objet de compléter les
circonstances aggravantes du délit de proxénétisme
énumérées à l'article 225-7 du code pénal en
y ajoutant l'utilisation d'un réseau de télécommunications
"
pour la diffusion de messages à destination d'un public non
déterminé
", cette formulation permettant d'exclure les
correspondances purement privées. Le proxénétisme
organisé par l'intermédiaire d'un tel réseau serait alors
réprimé de 10 ans d'emprisonnement et 10 millions de francs
d'amende au lieu de 5 ans d'emprisonnement et 1 million de francs d'amende
actuellement.
· Le
paragraphe II
tend à faire de l'utilisation d'un
réseau de télécommunications pour entrer en contact avec
un mineur, dans les mêmes conditions que celles définies au
paragraphe I (diffusion de messages à destination d'un public non
déterminé) une circonstance aggravante du délit de
corruption de mineur défini à l'article 227-22 du code
pénal.
Dans cette hypothèse, les peines encourues seraient portées de 5
ans d'emprisonnement et 500 000 F d'amende à 7 ans d'emprisonnement et
700 000 francs d'amende.
· Le
paragraphe III
est destiné à compléter
l'énumération par l'article 227-26 du code pénal des
circonstances aggravantes du délit d'atteintes sexuelle sans violence,
contrainte, menace ou surprise à l'égard d'un mineur de quinze
ans, en y ajoutant l'utilisation d'un réseau de
télécommunications pour entrer en contact avec le mineur, dans
les mêmes conditions que celles prévues au paragraphe II. Ce
délit serait dans cette circonstance puni de 10 ans d'emprisonnement et
1 million de francs d'amende alors qu'à l'heure actuelle il n'est
sanctionné que de deux ans d'emprisonnement et 200 000 francs d'amende
1(
*
)
.
A l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a
complété l'article 9 du projet de loi en faisant également
de l'utilisation d'un réseau de télécommunications, dans
les mêmes conditions, une circonstance aggravante de trois autres
délits :
- le viol, dont les circonstances aggravantes sont
énumérées à l'article 222-24 du code
pénal et qui serait alors puni de vingt ans de réclusion
criminelle contre quinze actuellement (
paragraphe I A
) ;
- les agressions sexuelles autres que le viol, dont les circonstances
aggravantes sont énumérées à l'article 222-28 du
code pénal et qui seraient alors réprimées de sept ans
d'emprisonnement et 700 000 francs d'amende au lieu de cinq ans
d'emprisonnement et 500 000 francs d'amende dans le droit actuel (
paragraphe
I B
) ;
- la diffusion d'une image de mineur à caractère pornographique,
délit défini à l'article 227-23 du code pénal et
pour lequel les peines encourues seraient portées de un an
d'emprisonnement et 300 000 francs d'amende à trois ans d'emprisonnement
et 500 000 francs d'amende
2(
*
)
(
paragraphe II bis
).
S'agissant de ce dernier délit, l'Assemblée nationale a entendu
sanctionner la diffusion par l'intermédiaire d'un réseau de
télécommunications, non seulement de l'image mais
également de la représentation du mineur, afin notamment de
réprimer la diffusion éventuelle d'images virtuelles à
caractère pornographique.
Les dispositions ainsi prévues par l'article 9 du projet de loi ont
pour objet de permettre de réprimer plus efficacement qu'actuellement le
développement de l'utilisation d'Internet ou du Minitel pour
l'organisation de réseaux de proxénétisme ou de
pédophilie.
Votre commission estime cependant que l'ajout de cette nouvelle circonstance
aggravante ne se justifie dans le cadre du présent projet de loi que
dans la mesure où elle permet de renforcer la protection des mineurs.
Elle vous propose donc par un
amendement
de limiter le champ
d'application de cette nouvelle circonstance aggravante aux infractions
concernant des mineurs.
Votre commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.
Article 10
(art. 225-16-1, 225-16-2 et 225-16-3
nouveaux
du code pénal)
Création d'un délit de
bizutage
Afin de lutter contre certaines pratiques répréhensibles de " bizutage " imposées à des élèves ou étudiants par d'autres élèves ou étudiants plus anciens, cet article tend, par l'insertion dans le code pénal d'une section intitulée " Des atteintes à la dignité de la personne commises en milieu scolaire ou éducatif ", à créer un nouveau délit spécifique de bizutage destiné à sanctionner toutes les formes de bizutage portant atteinte à la dignité de la personne humaine, qui serait puni de six mois d'emprisonnement et de 50 000 F d'amende.
*
Selon la définition du verbe " bizuter "
figurant dans le Dictionnaire de l'Académie française, le
bizutage consiste à "
soumettre de nouveaux élèves
à des brimades, sous prétexte d'initiation
".
Reposant sur des traditions souvent fort anciennes qui trouvent leur origine au
Moyen-Age, les pratiques de " bizutage " imposées aux
nouveaux
étudiants par des étudiants plus anciens dans certains
établissements d'enseignement -notamment au sein des grandes
écoles, des facultés de médecine et de pharmacie et des
classes préparatoires aux grandes écoles- donnent
fréquemment lieu à des excès et des débordements
(humiliations, actes dégradants, voire atteintes sexuelles...).
Des pratiques dégradantes et aliénantes ont notamment
été dénoncées dans un rapport du Comité
national d'évaluation sur l'" usinage " mis en oeuvre à
l'Ecole nationale des arts et métiers (ENSAM) et dans un
livre-témoignage écrit par une ancienne élève de
classe préparatoire
3(
*
)
.
Par ailleurs, les médias se sont récemment fait l'écho
à plusieurs reprises de séances de bizutage violentes ou à
connotation sexuelle marquée dans divers lycées ou
établissements.
*
Ces pratiques reposant sur des traditions souvent solides
subsistent bien que le bizutage soit officiellement interdit depuis 1928 par
différentes circulaires émanant des ministres successifs de
l'Education nationale.
La dernière en date a été diffusée à
l'initiative de Mme Ségolène Royal, ministre
délégué chargé de l'enseignement scolaire, à
l'issue d'une table ronde tenue en septembre dernier avec le
" Comité national contre le bizutage ".
Cette circulaire rappelle notamment les différentes
sanctions
pénales et disciplinaires
qui permettent actuellement de
réprimer certaines formes répréhensibles de bizutage.
D'ores et déjà, le code pénal actuel comporte de
nombreuses infractions susceptibles d'être retenues pour sanctionner
certaines pratiques de bizutage, parmi lesquelles on peut notamment relever :
- les violences simples ou aggravées (correspondant aux coups et
blessures volontaires de l'ancien code pénal) : art. 222-7 à
222-14 ;
- le viol et les autres agressions sexuelles : art. 222-23 à
222-31 ;
- les menaces : art. 227-17 et 227-18 ;
- la mise en danger d'autrui : art. 223-1 (oublié dans la
circulaire) ;
- l'administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à
l'intégrité physique ou psychique d'autrui : art.
222-15 ;
- les destructions, dégradations ou détériorations de
biens : art. 322-1 et 322-2 ;
- l'organisation de manifestations non autorisées ou la participation
à des attroupements susceptibles de troubler l'ordre public :
art. 431-3, 431-4 et 431-9...
Différents textes permettent par ailleurs aux autorités
compétentes d'engager des poursuites disciplinaires à
l'égard des auteurs de faits de bizutage :
- pour l'enseignement supérieur, le décret n° 85-827 du 31
juillet 1985 relatif à l'ordre dans les enceintes et locaux
universitaires et le décret n° 92-657 du 13 juillet 1992
relatif à la procédure disciplinaire dans les
établissements publics d'enseignement supérieur ;
- pour l'enseignement secondaire, le décret n° 85-1348 du
18 décembre 1985 relatif aux procédures disciplinaires dans
les collèges, lycées et établissements d'éducation
spéciale.
En outre, en ce qui concerne les
obligations s'imposant aux
témoins
(personnels éducatifs par exemple), il n'est
pas inutile de rappeler que le code pénal sanctionne la non-assistance
à personne en danger (art. 223-6) et la non-dénonciation d'un
crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets,
ou encore d'empêcher la récidive (art. 434-1).
S'agissant plus particulièrement des fonctionnaires, ils sont
également tenus, en application de l'article 40 du code de
procédure pénale, d'informer le procureur de la République
de tout crime ou délit dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de
leurs fonctions.
Lors de son audition devant la commission, M. Gérard Devis, proviseur du
Lycée Pothier d'Orléans, a à cet égard
précisé qu'en cas de faits répréhensibles de
bizutage, il avait la possibilité d'intervenir sur le plan disciplinaire
par des sanctions allant du simple avertissement à l'exclusion
temporaire ou définitive après passage devant le conseil de
discipline, et le cas échéant d'avertir le Procureur de la
République.
*
Nonobstant le large éventail des sanctions existantes,
les auteurs du projet de loi ont jugé nécessaire la
définition d'un nouveau délit inséré dans le code
pénal (
art. 225-16-1 nouveau
) qui a pour objet de sanctionner, en
dehors des violences, menaces ou atteintes sexuelles déjà
réprimées par le code pénal, des faits de bizutage portant
atteinte à la dignité de la personne humaine.
Cette infraction punie de 6 mois d'emprisonnement et de 50 000 francs
d'amende
4(
*
)
est définie,
dans la rédaction initiale du projet de loi, comme "
le fait
pour un élève ou un étudiant, d'imposer à un autre
élève ou étudiant en exerçant des contraintes ou
des pressions de toute nature, des actes, des attitudes ou des comportements
contraires à la dignité de la personne humaine, lors de
manifestation ou de réunion en milieu scolaire ou
éducatif
".
L'Assemblée nationale a considéré cette définition
trop restrictive et, suivant la proposition de sa commission des Lois, l'a
étendue aux milieux sportif et associatif en retenant la
rédaction suivante : "
le fait pour une personne de faire subir
à une autre personne, par des contraintes ou des pressions de toute
nature, des actes ou comportements portant atteinte à la dignité
de la personne humaine lors de manifestations ou de réunions
liées aux milieux scolaire, éducatif, sportif ou
associatif
".
En outre, l'Assemblée nationale a souhaité que puisse être
mise en cause la responsabilité des associations d'anciens
élèves et des établissements d'enseignement qui
cautionnent fréquemment les pratiques de bizutage.
A cette fin, elle a inséré dans le projet de loi, sur la
proposition de sa commission des Lois, un nouvel article du code pénal
(
art. 225-16-
3
nouveau)
instituant la
responsabilité pénale des personnes morales
en cas de
délit de bizutage.
Les sanctions encourues seraient les suivantes :
- l'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du
code pénal (quintuple du taux prévu pour les personnes physiques)
;
- la fermeture définitive ou provisoire (pour une durée de 5 ans
au plus) de l'établissement ayant servi à commettre les faits
incriminés ainsi que l'affichage ou la diffusion de la décision
prononcée (peines mentionnées aux 4° et 9° de l'article
131-39 du code pénal).
*
Tout en approuvant le souci des auteurs du projet de loi de
réprimer plus efficacement certains abus déplorables
constatés au cours de séances de bizutage, votre commission des
Lois s'est cependant interrogée sur la nécessité de
créer un nouveau délit pour sanctionner les formes
répréhensibles de bizutage.
Elle a en effet constaté que les infractions déjà
prévues par le code pénal, notamment les violences et les
agressions sexuelles, apparaissaient suffisantes pour permettre de sanctionner
ces agissements, ainsi que l'ont souligné plusieurs des personnes
entendues, en particulier Mme Marie-Elisabeth Cartier.
En particulier, les violences sont sanctionnées de trois ans
d'emprisonnement et 300.000 F d'amende, même lorsqu'elles n'ont
entraîné aucune incapacité de travail, lorsqu'elles sont
commises "
par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur
ou de complice
" ou "
avec
préméditation
" (art. 222-13, 8° et 9° du code
pénal). Il convient à cet égard de souligner que
l'interprétation jurisprudentielle de la notion de violences permet de
réprimer celles qui, sans atteindre matériellement la personne
qui en est la victime, sont cependant de nature à provoquer un choc
émotif.
De plus, selon les termes mêmes de la circulaire diffusée dans les
établissements à l'initiative de Mme Ségolène
Royal, ministre chargé de l'enseignement scolaire, "
le
consentement de la victime ou le caractère "ludique" de l'acte,
souvent
invoqué par les adeptes du bizutage, ne peuvent à
l'évidence être retenus dès lors que l'élève
ou l'étudiant est contraint par le groupe, par les anciens, par la
tradition à se " plier " à une pratique ".
Ce constat a d'ailleurs été également effectué par
le Conseil d'Etat qui, selon les informations diffusées par la presse, a
fait observer dans son avis sur le projet de loi que "
les
dispositions
actuelles du code pénal permettent de réprimer ceux de ces
excès qui entrent dans la qualification de violences, menaces ou
atteintes sexuelles
" et que "
l'objectif poursuivi
devrait
pouvoir être atteint en engageant des poursuites contre les bizuteurs et
non pas en créant une nouvelle incrimination difficile à
appliquer par le juge pénal
".
D'autre part, la définition retenue pour le nouveau délit risque
de rendre celui-ci difficile à caractériser car elle
nécessite une appréciation subjective de la part du juge dans la
mesure où l'atteinte à la dignité de la personne humaine
n'est pas précisément définie.
En effet, l'atteinte à la dignité de la personne humaine n'est
pas réprimée en tant que telle par le code pénal,
même si il existe déjà des infractions dont la
définition fait appel à cette notion, comme par exemple le fait
de soumettre une personne à des conditions de travail ou
d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine (art. 225-14)
ou encore la diffusion de messages "
à caractère violent
ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la
dignité humaine
" (art. 227-24).
On peut en outre s'interroger sur la limitation à certains milieux
particuliers de la répression envisagée de l'atteinte à la
dignité humaine qui constitue une incrimination grave, ainsi que sur
l'insuffisance relative de la sanction de six mois d'emprisonnement
prévue. L'incrimination nouvelle risquerait dans certains cas d'aboutir
à une répression moindre, dans la mesure où certains faits
susceptibles d'être commis dans le cadre d'un bizutage sont d'ores et
déjà punis de peines supérieures.
Au surplus, le texte proposé, de par son caractère vague et
" comportemental ", pourrait être dangereusement
détourné de son objet initial.
Par ailleurs, on peut également s'interroger sur la pertinence de la
disposition introduite par l'Assemblée nationale pour prévoir la
responsabilité pénale des personnes morales pour délit de
bizutage. En effet, suivant le principe posé à l'article 121-2 du
code pénal, les personnes morales sont responsables des
"
infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou
représentants
".
Or, le bizutage peut-il être considéré comme ayant
été commis pour le compte d'une association d'anciens
élèves ou d'un établissement d'enseignement par ses
organes ou représentants?
*
Pour l'ensemble des raisons qui viennent d'être exposées, votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 10 du présent projet de loi.
Article 11
(art. 226-14 du code
pénal)
Levée du secret professionnel
Cet article, adopté sans modification par
l'Assemblée nationale, tend à préciser explicitement que
les atteintes sexuelles font partie des sévices qui peuvent être
dénoncés aux autorités judiciaires, médicales ou
administratives, par dérogation à la règle du secret
professionnel, lorsqu'ils ont été infligés à un
mineur de quinze ans ou à une personne particulièrement
vulnérable.
Dans le droit actuel, l'article 226-13 du code pénal sanctionne d'un an
d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende la violation du secret
professionnel, mais l'article 226-14 du même code prévoit
certaines exceptions à la règle du secret.
Ainsi, hormis les autres cas où la loi impose ou autorise la
révélation du secret, la règle du secret professionnel est
levée :
- d'une manière générale, à l'égard de
quiconque révèle aux autorités judiciaires,
médicales ou administratives des sévices ou privations
infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne
particulièrement vulnérable ;
- et, s'agissant plus particulièrement des médecins, à
l'égard de ceux d'entre eux qui, avec l'accord de la victime, portent
à la connaissance du procureur de la République des
sévices permettant de présumer des violences sexuelles.
Afin de faire apparaître clairement la possibilité pour les
assistantes sociales ou les enseignants, par exemple, de dénoncer des
atteintes sexuelles commises, même sans violence, à l'égard
de mineurs âgés de moins de quinze ans, l'article 11 du projet de
loi propose de mentionner explicitement les atteintes sexuelles parmi les
" sévices " qui peuvent être
révélés aux autorités sans porter atteinte au
secret professionnel.
Votre commission des Lois vous propose de compléter cet article par un
amendement
tendant à préciser, par cohérence avec
la modification de l'article 226-14 du code pénal concernant la
levée du secret professionnel, que l'obligation de dénonciation
de mauvais traitements ou privations infligés à un mineur de
quinze ans, prévue par l'article 434-3 du code pénal, s'applique
également en cas d'atteintes sexuelles.
Votre commission a adopté le présent article 11 ainsi
modifié.
Article 12
(art. 227-18, 227-18-1, 227-19, 227-21 et
227-22 du code pénal)
Aggravation des sanctions de certaines
infractions commises
en milieu scolaire à l'égard de
mineurs
Cet article tend à faire une circonstance aggravante de
certaines infractions commises à l'égard des mineurs le fait
d'avoir commis l'infraction "
à l'intérieur d'un
établissement scolaire ou, à l'occasion des entrées ou des
sorties des élèves, aux abords immédiats d'un tel
établissement
".
Les infractions visées font toutes partie des infractions
définies dans la section V du chapitre VII du titre II du Livre
deuxième du code pénal, intitulée " De la mise en
péril des mineurs ".
Il s'agit plus précisément des délits suivants :
- le délit de provocation d'un mineur à l'usage de
stupéfiants (art. 227-18) pour lequel les sanctions seraient
portées à 7 ans d'emprisonnement et un million de francs d'amende
(au lieu de 5 ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende) ;
- le délit de provocation d'un mineur au trafic de stupéfiants
(art. 227-18-1) pour lequel les peines seraient élevées
à 10 ans d'emprisonnement et 2 millions de francs d'amende (au lieu de 7
ans d'emprisonnement et un million de francs d'amende) ;
- le délit de provocation d'un mineur à l'alcoolisme (art.
227-19), qui serait désormais sanctionné de 3 ans
d'emprisonnement et 500 000 F d'amende (au lieu de 2 ans d'emprisonnement
et 300 000 F d'amende) ;
- le délit de provocation d'un mineur à la commission de crimes
ou de délits (art. 227-21), qui serait désormais puni de 7 ans
d'emprisonnement et un million de francs d'amende (au lieu de 5 ans
d'emprisonnement et un million de francs d'amende) ;
- enfin, le délit de corruption de mineur (art. 227-22), anciennement
dénommé délit d'excitation de mineur à la
débauche, pour lequel les sanctions seraient portées à 7
ans d'emprisonnement et 700 000 F d'amende (au lieu de 5 ans d'emprisonnement
et 500 000 F d'amende).
Dans le souci de renforcer la lutte contre la délinquance en milieu
scolaire dont on déplore aujourd'hui le développement, l'article
12 du projet de loi propose donc d'aggraver la répression de l'ensemble
de ces infractions lorsqu'elles sont commises à l'intérieur ou
à proximité immédiate d'un établissement scolaire.
L'Assemblée nationale a adopté cet article après l'avoir
modifié de deux amendements d'ordre rédactionnel.
Afin de réprimer plus efficacement la violence en milieu scolaire, votre
commission vous propose de compléter cet article par un
amendement
tendant à aggraver les peines applicables en cas de violences
commises à l'intérieur ou à proximité d'un
établissement scolaire ou éducatif, en ajoutant une nouvelle
circonstance aggravante aux articles 222-12 (violences ayant
entraîné une incapacité de travail de plus de huit jours)
et 222-13 (violences ayant entraîné une incapacité de
travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ayant
entraîné aucune incapacité de travail) du code
pénal. Cet amendement reprend ainsi une suggestion formulée par
M. Yvon Tallec au cours de son audition devant la commission.
Elle vous propose également un
amendement
rédactionnel.
Votre commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 12
(art.
227-23 du code pénal)
Répression de la diffusion d'une
représentation
pornographique de mineur
Après l'article 12, votre commission vous propose
d'insérer un article additionnel tendant à réprimer la
diffusion de représentations de mineurs à caractère
pornographique (par exemple des images virtuelles) en visant à l'article
227-23 du code pénal, non seulement l'image pornographique, mais
également la " représentation " pornographique d'un
mineur.
Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d'enregistrer ou de transmettre une
représentation d'un mineur présentant un caractère
pornographique, ou encore de la diffuser par quelque moyen que ce soit, serait
ainsi sanctionné de un an d'emprisonnement et 300.000 F d'amende.
On notera que l'Assemblée nationale a déjà prévu,
à l'article 9, à titre de circonstance aggravante, la sanction de
la diffusion d'une représentation pornographique de mineur lorsqu'elle
est opérée par l'intermédiaire d'un réseau de
télécommunications. Il convient donc d'incriminer la diffusion
d'une représentation pornographique de mineur d'une manière
générale et non dans cette seule circonstance aggravante.
A cette fin, votre commission vous propose d'adopter
un amendement
tendant à insérer un article additionnel.
Article 13
(art. 227-25 du code
pénal)
Aggravation des peines en cas d'atteinte sexuelle
sur un
mineur de quinze ans
Cet article, adopté sans modification par
l'Assemblée nationale, tend à porter de 2 à 5 ans
d'emprisonnement et de 200 000 F à 500 000 F
d'amende les peines encourues pour les atteintes sexuelles sur un mineur de
quinze ans commises "
sans violence, contrainte, menace ni
surprise
".
Dans le droit actuel, ces atteintes sont punies par l'article 227-25 du code
pénal de 2 ans d'emprisonnement et 200 000 F d'amende, peines qui sont
élevées par l'article 227-26 à 10 ans d'emprisonnement et
un million de francs d'amende en cas de circonstances aggravantes (inceste,
infraction commise par une personne ayant autorité sur la victime ou
abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, infraction
commise par plusieurs personnes ou encore infraction accompagnée du
versement d'une rémunération).
On notera que dans l'ancien code pénal, l'attentat à la pudeur
sans violence ni contrainte ni surprise sur un mineur de quinze ans
était puni d'un emprisonnement de 3 à 5 ans et d'une amende de 6
000 à 60 000 F (art. 331, 1er alinéa).
L'aggravation des sanctions des atteintes sexuelles sans violence sur un mineur
de 15 ans proposée par l'article 13 du projet de loi est, selon
l'exposé des motifs, "
justifiée à la fois par la
gravité de ces agissements et par le fait qu'en cas de circonstances
aggravantes les peines sont portées à 10 ans
d'emprisonnement et un million de francs d'amende
".
Les peines retenues par le projet de loi : 5 ans d'emprisonnement et 500 000 F
d'amende, correspondent à celles qui avaient été
adoptées par le Sénat pour ces infractions au moment de la
discussion du nouveau code pénal, suivant les propositions de votre
rapporteur et de votre commission des Lois.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 14
(art. 222-22, 227-26 et 227-27 du code
pénal)
Répression des infractions sexuelles commises à
l'étranger
Afin d'améliorer la répression de ce qu'il est
convenu d'appeler le " tourisme sexuel ", cet article tend à
étendre l'application de la loi pénale française à
l'ensemble des crimes et délits à caractère sexuel commis
à l'étranger contre des mineurs par des Français ou des
personnes résidant habituellement en France.
A cet égard, il n'est pas inutile de rappeler les principes suivant
lesquels le droit pénal français est ou non applicable à
des infractions commises à l'étranger.
Selon l'article 113-6 du code pénal, la loi pénale
française est applicable à tout crime commis par un
Français hors du territoire de la République, mais elle n'est
applicable aux délits commis par des Français hors du territoire
de la République que "
si les faits sont punis par la
législation du pays où ils ont été
commis
" (principe dit de la double incrimination).
Par ailleurs, l'article 113-7 prévoit que lorsque la victime est de
nationalité française, la loi pénale française est
applicable à tout crime et à tout délit puni
d'emprisonnement commis par un Français ou par un étranger hors
du territoire de la République.
Dans tous les cas, la poursuite des délits est cependant
subordonnée à la requête du ministère public et
à une plainte de la victime ou une dénonciation officielle par
l'autorité du pays concerné, conformément à
l'article 113-8.
A l'heure actuelle, une seule exception a été prévue
à l'application de ces règles générales. Elle
concerne la prostitution enfantine à l'étranger et est issue de
la loi n° 94-84 du 1er février 1994 qui a
complété l'article 227-26 du code pénal afin de rendre la
loi pénale française applicable aux atteintes sexuelles sans
violence commises à l'étranger sur un mineur de quinze ans
lorsqu'elles s'accompagnent du versement d'une rémunération.
En ce qui concerne les autres pays européens, ainsi que l'indique
l'étude précitée du service des affaires
européennes du Sénat, nombre d'entre eux ont depuis le
début des années 90, adopté des clauses
d'extraterritorialité. C'est notamment le cas de l'Allemagne, de
l'Autriche, de la Belgique et de l'Italie, qui peuvent poursuivre leurs
ressortissants qui se sont rendus coupables d'abus sur des mineurs à
l'étranger, quel que soit le pays où l'infraction a
été commise.
Par ailleurs, le Conseil de l'Union européenne a récemment
adopté une action commune déjà présentée
dans le présent rapport, par laquelle les Etats membres se sont
engagés à prévoir une compétence extraterritoriale
à l'égard des faits d'"
exploitation sexuelle
"
d'enfants commis à l'étranger par leurs nationaux et leurs
résidents à titre habituel.
L'article 14 du projet de loi s'inscrit dans le cadre de cette action commune
en étendant l'applicabilité de la loi pénale
française à l'ensemble des atteintes sexuelles sur des mineurs
commises par des Français à l'étranger.
· Ainsi, le
paragraphe I
de cet article prévoit-il, par
une modification de l'article 222-22 du code pénal, de rendre la loi
pénale française applicable à toute agression sexuelle
contre un mineur
5(
*
)
commise
à l'étranger par un Français ou une personne
résidant habituellement sur le territoire français :
- même si les faits ne sont pas punis par la législation du pays
où ils ont été commis, par dérogation à
l'article 113-6 précité ;
- et sans exiger une plainte préalable de la victime ou une
dénonciation officielle des faits par les autorités du pays, par
exception aux dispositions de l'article 113-8 précité.
· Le
paragraphe II
de l'article 14 du projet de loi tend pour sa
part à supprimer la disposition actuelle de l'article 227-26 du code
pénal qui a été analysée plus haut, dans la mesure
où le contenu en est repris dans une disposition plus
générale insérée par le
paragraphe III.
· Enfin, ce dernier paragraphe a pour objet d'étendre
l'applicabilité de la loi pénale française, dans les
mêmes conditions que celles prévues au paragraphe I, pour un
certain nombre d'infractions commises à l'étranger par des
Français ou des personnes résidant habituellement en France.
Les infractions ainsi visées sont les suivantes :
- le délit de corruption de mineur (art. 227-22 du code pénal) ;
- l'enregistrement ou la diffusion d'une image de mineur présentant un
caractère pornographique (art. 227-23) ;
- et les atteintes sexuelles sans violence contre des mineurs (art. 227-25
à 227-27).
Votre commission approuve la répression du " tourisme
sexuel "
prévue par le projet de loi.
Après avoir entendu les observations formulées sur ce point par
Mme Marie-Elisabeth Cartier et M. Philippe Jeannin, elle a cependant
estimé que l'extension de l'applicabilité de la loi pénale
française à certains crimes et délits à
caractère sexuel commis à l'étranger contre des mineurs
par "
des personnes résidant habituellement en
France
"
risquait de susciter des difficultés d'application.
En effet, il n'existe pas de définition pénale de la notion de
résidence habituelle en France et les règles
générales concernant l'application de la loi pénale
française pour des crimes ou des délits commis à
l'étranger (art. 113-6 et 113-7 du code pénal) ne font pas un
sort particulier aux "
personnes résidant habituellement en
France
".
Votre commission vous propose donc d'adopter un
amendement
tendant
à limiter la portée de l'article 14 aux seuls ressortissants
français en supprimant la mention des résidents habituels.
Elle a adopté l'article 14 ainsi modifié.
Article 15
Responsabilité pénale des
personnes morales en cas
d'infractions mettant en péril des
mineurs
Cet article a pour objet d'insérer dans le code
pénal un article 227-28-1 afin de permettre de déclarer les
personnes morales responsables pénalement des infractions
suivantes :
- provocation d'un mineur à l'usage ou au trafic de stupéfiants,
à la consommation habituelle ou excessive de boissons alcooliques,
à la mendicité ou à commettre habituellement des crimes et
des délits ;
- corruption de mineur ;
- enregistrement, en vue de sa diffusion, de l'image pornographique d'un
mineur ;
- diffusion d'un message violent ou pornographique susceptible d'être
perçu par un mineur ;
- atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans.
Les peines encourues par les personnes morales condamnées pour l'une de
ces infractions sont :
- l'amende, dont le taux peut atteindre cinq fois celui de l'amende
prévu pour les personnes physiques ;
- l'interdiction d'exercer l'activité à l'occasion de l'exercice
de laquelle l'infraction a été commise ;
- le placement sous surveillance judiciaire pour cinq ans au plus ;
- la fermeture d'un ou plusieurs établissements ;
- l'exclusion des marchés publics ;
- l'interdiction, pour cinq ans au plus, d'émettre des
chèques ;
- la confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction ou
qui en est le produit ;
- la diffusion de la décision de condamnation.
Par ailleurs, en cas d'atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans
accompagnée du versement d'une rémunération, la personne
morale encourt la dissolution.
Votre commission constate que, malgré le caractère exceptionnel
que devait revêtir, dans l'esprit du législateur du nouveau code
pénal, la responsabilité pénale des personnes morales, la
représentation nationale est encore une fois appelée à
étendre celle-ci à de nouvelles infractions. Toutefois, compte
tenu de la gravité desdites infractions, elle a adopté le
présent article
sans modification
.
Article 16
Peines complémentaires applicables
aux personnes
physiques coupables d'atteintes aux mineurs
ou à la
famille
Cet article a pour objet de compléter
l'article 227-29 du code pénal, relatif aux peines
complémentaires encourues par les personnes physiques coupables
d'atteintes aux mineurs ou à la famille afin d'y ajouter :
- la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée
à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;
- l'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou
bénévole impliquant un contact habituel avec les mineurs.
Votre commission a adopté cet article
sans modification
.
Article 17
Responsabilité pénale des
personnes morales en cas
d'association de malfaiteurs
Cet article a pour objet d'insérer dans le code
pénal un article 450-4 afin de permettre de déclarer les
personnes morales pénalement responsables de l'infraction d'association
de malfaiteurs.
Cette disposition va donc bien au-delà de l'objet du présent
projet de loi. Toutefois, comme le précise l'exposé des motifs,
cet article 17 sera notamment applicable aux agences de voyage proposant
du tourisme sexuel.
Ainsi, constatant que cet article n'était pas dépourvu de lien
avec le projet de loi et pouvait présenter une certaine utilité
dans la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants, votre commission l'a
adopté
sans modification
.
CHAPITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE
DE
PROCÉDURE PÉNALE ET CONCERNANT
LA PROTECTION DES
VICTIMES
Article 18A et 18
Recevabilité de la
constitution de partie civile
de certaines associations
· L'article 18A, inséré par
l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois, a
pour objet de modifier l'article 2-2 du code de procédure
pénale.
En sa rédaction actuelle, ledit article 2-2 permet aux associations
ayant pour objet statutaire de lutter contre les violences sexuelles d'exercer
les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions :
meurtre ou assassinat, tortures ou violences, agressions ou atteintes
sexuelles... Toutefois, la recevabilité de cette action est
subordonnée à l'accord de la victime ou, si celle-ci est mineure,
du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant
légal.
Dans son rapport écrit, Mme Frédérique Bredin juge
contestable la nécessaire intervention du représentant du
mineur : "
en effet, (il) peut, par opposition
d'intérêt -notamment en cas d'inceste- ou même simple
désintérêt, refuser son accord
".
L'article 18A du projet de loi limite donc l'intervention du
représentant légal du mineur à l'hypothèse
où celui-ci n'est pas en état de donner son accord.
· Le paragraphe I de l'article 18 vise à modifier l'article
2-3 du code de procédure pénale afin d'étendre aux
associations dont l'objet statutaire est la défense des mineurs victimes
d'atteintes sexuelles la faculté d'exercer les droits reconnus à
la partie civile (lorsque l'action publique a été mise en
mouvement par le ministère public ou la partie lésée) en
ce qui concerne certaines infractions : violences aggravées, viol
aggravé, agression sexuelle sur un mineur de quinze ans ou une personne
vulnérable, corruption de mineur...
· Le paragraphe II, inséré par l'Assemblée
nationale, introduit dans le code de procédure pénale un
article 2-16 afin de permettre aux associations familiales
déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits
d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne
"
les faits portant atteinte à la dignité de la personne
ou mettant en péril les mineurs
". Toutefois, sauf lorsque la
victime n'est pas désignée, la recevabilité de cette
action est subordonnée à l'accord de la victime ou, si celle-ci
est mineure, à celui du titulaire de l'exercice de l'autorité
parentale ou du représentant légal à condition qu'il ne
soit pas impliqué dans les faits incriminés.
En vertu de l'adage selon lequel "
nul ne plaide par
procureur
", votre commission juge souhaitable d'éviter de
multiplier outre mesure la constitution de partie civile des associations. Par
ailleurs, M. Alain Boulay, au nom des parents d'enfants victimes, a mis en
garde contre les risques de dérives, estimant que l'action des
associations devait à tout le moins être subordonnée
à l'accord de la victime.
Votre commission, qui constate que l'article 18A a pour simple objet de
subordonner l'action des associations à l'accord du mineur lorsqu'il est
en état de le donner, a donc adopté cet article
sans
modification
.
En revanche, et comme l'avait notamment souhaité
Mme le professeur Cartier, elle vous soumet un
amendement
tendant à supprimer le paragraphe II de l'article 18, qu'elle
a adopté ainsi modifié.
Article 18 bis et 18 ter
Délai de prescription
de l'action publique pour
certains crimes ou délits commis contre les
mineurs
Ces articles ont pour objet de modifier les articles 7
et
8 du code de procédure pénale, relatifs à la prescription
de l'action publique en matière criminelle et correctionnelle, en leurs
dispositions spécifiques aux infractions contre les mineurs.
En l'état actuel du droit, le délai de prescription de l'action
publique pour un crime ou un délit commis sur un mineur ne commence
à courir qu'à compter de la majorité lorsque l'auteur de
l'infraction est un ascendant ou a autorité sur le mineur. Le code de
procédure pénale énonce donc, pour les atteintes aux
mineurs, une dérogation que l'on peut présenter comme
générale
in rem
(car concernant tout crime et tout
délit) et spéciale
in personam
(car concernant les seules
personnes ayant autorité sur le mineur).
Les articles 18
bis
et 18
ter
confèrent désormais
à la dérogation concernant la prescription de l'action publique
pour une infraction sur un mineur un caractère spécial
in
rem
et général
in personam
:
- spéciale
in rem
puisque seules certaines infractions seraient
désormais concernées par ce point de départ du
délai de prescription à compter de la majorité de la
victime : les tortures ou actes de barbarie, les violences, le viol, les
agressions sexuelles, le proxénétisme, la corruption de mineur et
les atteintes sexuelles ;
- générale
in personam
, puisque ce point de départ
spécifique du délai de prescription s'appliquerait quel que soit
l'auteur de l'infraction et non plus si celui-ci a autorité sur la
victime.
Par ailleurs, pour deux délits, le délai de prescription de
l'action publique est porté de trois à dix ans. Il s'agit :
- des agressions sexuelles commises par une personne ayant autorité sur
le mineur ou par plusieurs personnes (article 222-30 du code
pénal) ;
- des atteintes sexuelles sur un mineur de moins de quinze
ans (article 227-26 du code pénal).
Votre commission approuve dans leur principe les modifications proposées
s'agissant du point de départ du délai de prescription de
l'action publique. Il lui semble en effet justifié de ne pas distinguer
selon que l'auteur des faits a ou n'a pas autorité sur le mineur et ce
d'autant plus que, pour beaucoup d'enfants, tout adulte a en fait une certaine
autorité. De même, il lui paraît opportun d'établir
une distinction entre les infractions concernées par ce point de
départ spécifique, lequel, à l'expérience, ne
paraît pas avoir de véritables justifications pour certains
délits, notamment lorsque ceux-ci sont involontaires (et ne constituent
donc pas par hypothèse des actes de maltraitance).
Néanmoins, elle s'interroge sur la distinction faite entre les crimes,
et en particulier sur l'exclusion du report du délai à la
majorité de la victime en cas de meurtre ou d'assassinat (ou
plutôt de tentative). Il lui semble en effet que la tentative de meurtre
est aussi traumatisante pour un enfant qu'un autre crime et l'est souvent
davantage que certaines délits dont pourtant le délai de
prescription pourrait être plus long. Ainsi, en cas de tentative de
meurtre sur un enfant de sept ans, la prescription serait acquise dix ans plus
tard alors que, pour une atteinte sexuelle, elle le serait trois ans
après sa majorité, soit quatorze ans plus tard (voire
vingt-et-un ans plus tard si, comme le propose l'article 18
ter
, le
délai de prescription des atteintes sexuelles était porté
de trois à dix ans)
Ces considérations ont conduit votre commission à adopter
à l'article 18
bis
un
amendement
selon lequel,
pour tout crime contre un mineur, le délai de prescription de l'action
publique courrait à compter de la majorité de la victime.
Votre commission a en revanche émis de plus fortes objections sur le
second volet du dispositif proposé, à savoir l'allongement de
trois à dix ans du délai de prescription des délits
sexuels. Lors de son audition, M. Philippe Jeannin, procureur de la
République à Meaux, avait d'ailleurs indiqué que rien ne
justifiait véritablement une telle durée pour ces infractions.
Par ailleurs, l'alignement de la procédure des délits sur celle
des crimes conduirait à terme à vider de sa substance la
distinction entre la procédure criminelle et la procédure
correctionnelle. Ce serait à tout le moins un précédent
qui ouvrirait la porte à d'autres dérogations et constituerait
une atteinte à la cohérence du nouveau code pénal.
C'est pourquoi votre commission vous propose à
l'article 18
ter
un
amendement
ayant pour objet de
supprimer le délai de prescription de dix ans prévu pour
certains délits.
Elle a adopté les articles 18
bis
et 18
ter
modifiés par les amendements ci-dessus présentés ainsi que
par un simple
amendement
de précision.
Articles 18 quater et 18 quinquies
Décisions de
classement sans suite
Ces articles insérés par l'Assemblée
nationale à l'initiative de sa commission des Lois, ont pour objet de
modifier l'article 40 du code de procédure pénale en ses
dispositions relatives aux décisions de classement sans suite.
· L'article 18
quater
prévoit que, en cas de
décision de classement, l'information du plaignant et, si elle est
identifiée, de la victime s'effectuera par écrit.
· L'article 18
quinquies
impose la motivation des
décisions de classement sans suite lorsqu'elles concernent certaines
infractions commises contre un mineur à savoir :
- le viol et les autres agressions sexuelles, y compris l'exhibition ;
- la corruption de mineur ;
- la diffusion de l'image pornographique d'un mineur ;
- la diffusion d'un message à caractère violent ou pornographique
susceptible d'être perçu par un mineur ;
- les atteintes sexuelles.
Votre commission comprend le souci de l'Assemblée nationale d'assurer
une meilleure information des plaignants en cas de décision de
classement sans suite.
Les articles 18
quater
et 18
quinquies
soulèvent toutefois
une question d'ordre général, qui ne concerne pas les seules
infractions sexuelles, même si la seconde de ces dispositions ne visent
que ces dernières.
Au demeurant, on observera que les infractions visées par l'article 18
quinquies
pouvant donner lieu à constitution de partie civile, la
décision de classement ne fait en rien obstacle à la mise en
mouvement de l'action publique par la victime ou ses ayants-droit.
Ainsi, considérant que l'information du plaignant en cas de
décisions de classement sans suite relève d'une démarche
plus générale (la motivation ayant d'ailleurs été
proposée par la commission de réflexion sur la justice
présidée par M. Pierre Truche), votre commission ne souhaite pas
anticiper la réflexion d'ensemble sur le statut du parquet. C'est
pourquoi elle a adopté deux
amendements
tendant à
supprimer ces articles.
Article 19
Protection des mineurs victimes
Cet article a pour objet d'insérer dans le livre IV du
code de procédure pénale, relatif aux procédures
particulières, un titre XIX, composé des nouveaux
articles 706-47 à 706-54 et intitulé "
de la
procédure applicable aux infractions de nature sexuelle et du statut des
mineurs victimes
".
·
L'article 706-47 a pour simple objet de renvoyer aux
articles 7 et 8 du code de procédure pénale pour le calcul
du délai de prescription de l'action publique
pour les crimes et
délits contre les mineurs.
Votre commission vous propose un
amendement
tendant à supprimer
cette disposition qui lui paraît inutile et en outre
rédigée de manière ambiguë : en effet, en
indiquant que le délai de prescription est fixé par lesdits
articles 7 et 8 "
lorsque la victime est
mineure
", cet
article 706-47 laisse accroire que ces articles 7 et 8 ne concernent pas
également les majeurs.
·
L'article 706-48 impose avant tout jugement sur le fond une
expertise médicale des auteurs d'infractions sexuelles
.
Cette expertise doit avoir lieu en cas :
- de meurtre ou assassinat d'un mineur précédé ou
accompagné de viol ou d'acte de barbarie. On observera, dans ce cas, que
l'expertise n'est éxigée que si la victime est mineure alors que,
selon l'article 1
er
bis
, le suivi socio-judiciaire est
encouru même si la victime est ou était majeure ;
- de viol ou d'agression sexuelle, y compris l'exhibition, quel que soit
l'âge de la victime ;
- de corruption de mineur ;
- de diffusion de l'image pornographique d'un mineur ;
- de diffusion d'un message violent ou pornographique susceptible d'être
perçu par un mineur ;
- d'atteinte sexuelle.
Cette expertise peut être ordonnée dès le stade de
l'enquête par le procureur de la République. L'expert doit
être interrogé sur l'opportunité d'une injonction de soins
dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire. Votre commission a adopté un
amendement
déplaçant cette précision afin de
souligner que l'expert doit être interrogé même si
l'expertise est réalisée à un autre stade que celui de
l'enquête.
L'expertise est ensuite communiquée à l'administration
pénitentiaire en cas de condamnation à une peine
d'emprisonnement, "
afin de faciliter le suivi médical et
psychologique en détention
". Votre commission a adopté
un
amendement
substituant la notion de peine privative de liberté
à celle d'emprisonnement afin de tenir compte du fait que l'auteur de
l'infraction pourra également être condamné à une
peine de réclusion.
· Après l'article 706-48, votre commission vous propose un
amendement
insérant un article 706-48-1 afin de prévoir
que tout mineur victime d'une infraction sexuelle sera assisté d'un
avocat lors de la procédure (choisi par lui, son représentant
légal ou le bâtonnier) et ce dès le début de
l'enquête. La rédaction proposée s'inspire de celle de
l'article 4-1 de l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance
délinquante.
·
L'article 706-49 prévoit l'expertise
médico-psychologique des mineurs victimes d'une infraction sexuelle
.
Cette expertise, qui concerne les infractions énumérées au
futur article 706-48 est destinée "
à
apprécier la nature et l'importance du préjudice subi et à
établir si celui-ci rend nécessaire des traitements ou des soins
appropriés
". Elle peut être ordonnée dès
le stade de l'enquête par le procureur de la République.
Le juge d'instruction peut cependant, par ordonnance motivée,
décider qu'il n'y a pas lieu de prescrire cette expertise. Afin de
réparer un oubli, lié au fait que, en cas de comparution
immédiate, le juge d'instruction ne serait par hypothèse pas
appelé à intervenir, votre commission a adopté un
amendement
étendant au président du tribunal la
possibilité de décider qu'une expertise n'est pas
nécessaire.
·
L'article 706-50 traite des conséquences de l'ouverture
d'une enquête pour infraction sexuelle sur la procédure
d'assistance éducative dont peut faire l'objet le mineur victime d'une
infraction sexuelle
.
Si, au début de l'enquête, le mineur ne fait pas
déjà l'objet d'une procédure d'assistance
éducative, le procureur de la République apprécie
l'opportunité d'en requérir l'ouverture auprès du juge des
enfants.
Si, au début de l'enquête, le juge des enfants est
déjà saisi, le procureur de la République ou le juge
d'instruction l'informe sans délai de l'existence d'une procédure
concernant le mineur victime.
En toute hypothèse, dès lors qu'une procédure d'assistance
éducative a été ouverte, le procureur de la
République ou le juge d'instruction communique au juge des enfants
toutes pièces utiles afin de lui permettre de s'assurer que le mineur
fait l'objet de soins justifiés par son état.
Votre commission a adopté un
amendement
tendant à
réécrire cet article afin de le purger des précisions qui
ne lui paraissent pas utiles.
·
Les articles 706-51 et 706-51-1 permettent la désignation
d'un administrateur
ad hoc
chargé d'assister le mineur
victime
.
En l'état actuel du droit, régi par l'article 87-1 du code
de procédure pénale, la faculté de désigner un
administrateur
ad hoc
est ouverte au juge d'instruction
"
saisi
de fait commis volontairement à l'encontre d'un enfant mineur par les
titulaires de l'exercice de l'autorité parentale ou par l'un d'entre
eux
". Cet administrateur exerce, s'il y a lieu au nom de
l'enfant,
les droit reconnus à la partie civile.
L'article 87-1, également applicable à la juridiction de
jugement, impose par ailleurs au juge, en cas de constitution de partie civile,
de désigner un avocat d'office pour le mineur s'il n'en a pas
déjà été choisi un.
La désignation d'un administrateur est donc actuellement facultative et
limitée à des hypothèses bien précises : les
faits commis volontairement par les titulaires de l'autorité parentale.
Afin de remédier à la possible insuffisante prise en compte des
intérêts du mineur par ses représentants légaux
alors même que ceux-ci n'auraient pas commis l'infraction, le projet de
loi prévoit de rendre obligatoire la désignation d'un
administrateur
ad hoc
dès lors que deux conditions sont
réunies :
- les faits ont été commis volontairement (condition
déjà prévue aujourd'hui). Ainsi,
la désignation
d'un administrateur
ad hoc
pourrait intervenir pour toute infraction
quel qu'en soit l'auteur, à l'exclusion de celles commises par
imprudence ou négligence
;
- la protection du mineur n'est pas complètement assurée par ses
représentants légaux ou par l'un d'entre eux.
Le texte proposé pour l'article 706-51-1 précise que le
"
mandataire
"
ad hoc
est désigné soit
parmi les proches de l'enfant, soit sur une liste de personnalités
présentées par les associations agréées pour la
défense de l'enfance, les associations de défense des victimes ou
par le conseil général. Un décret fixe les
modalités de constitution de ces listes, de l'agrément des
personnes qui y figurent et, s'il y a lieu, de leur rémunération.
Ainsi qu'il a été indiqué dans l'exposé
général du présent rapport, votre commission estime
souhaitable de préciser, d'une part, que l'administrateur
ad hoc
pourra être désigné dès le stade de l'enquête
et, d'autre part, qu'il devra assurer la protection des intérêts
du mineur dans leur ensemble et non seulement exercer les droits de la partie
civile. Aussi a-t-elle adopté un
amendement
à cette fin
à l'article 706-51.
Elle vous propose par ailleurs un
amendement
tendant à supprimer
l'article 706-51-1, les modalités de désignation de
l'administrateur ad hoc ne lui paraissant pas relever du domaine de la loi.
·
Les articles 706-52 à 706-54 sont relatifs aux auditions et
confrontations des mineurs victimes d'une infraction sexuelle
.
Selon l'exposé des motifs, l'un des objectifs du projet de loi consiste
à "
éviter le traumatisme résultant
d'interrogatoires répétés
".
Aussi l'article 706-52 précise-t-il que le juge d'instruction ne
procède aux auditions et confrontations des mineurs victimes d'une
infraction sexuelle que lorsque ces actes sont "
strictement
nécessaires à la manifestation de la
vérité
".
Dans le même esprit, l'article 706-53 dispose que l'audition lors de
l'enquête ou de l'information du mineur victime d'une telle infraction
fait "
autant que possible
" l'objet d'un
enregistrement
audiovisuel. Toutefois, le mineur ou, s'il n'est pas en état de le
faire, son représentant légal doit donner son consentement.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit que,
sous cette réserve, l'enregistrement doit être autorisé par
le procureur de la République ou par le juge d'instruction. Il
précise cependant que le refus doit être motivé, semblant
par là-même conférer un pouvoir d'appréciation au
magistrat compétent.
Le procureur de la République, le juge d'instruction ou l'officier de
police judiciaire peuvent requérir toute personne qualifiée pour
procéder à cet enregistrement. En vertu de l'article 60 du
code de procédure pénale, auquel renvoie l'article 706-53,
cette personne prête serment par écrit d'apporter son concours
à la justice en son honneur et en sa conscience. Elle est, en tant que
personne concourant à la procédure, tenue au secret de
l'enquête et de l'instruction.
Une copie des enregistrements est établie aux fins d'en faciliter la
consultation au cours de la procédure.
Les copies sont inventoriées et versées au dossier. Les originaux
sont placés sous scellés et fermés.
Sur décision du juge d'instruction ou de la juridiction de jugement, les
enregistrements peuvent être visionnés au cours de la
procédure et être consultés par les experts. Cette
consultation peut être faite à partir de la copie. Mais la
consultation à partir de l'original est de droit si une partie le
demande ; les scellés sont alors ouverts par la juridiction.
A l'initiative de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a
prévu que les copies des enregistrements pouvaient être
visionnées par les avocats des parties au palais de justice.
L'article 706-54 prévoit que les auditions ou confrontations d'un
mineur victime d'une infraction sexuelle sont réalisées, sur
décision du procureur de la République ou du juge d'instruction,
en présence d'un psychologue ou d'un médecin spécialiste
de l'enfance ou d'un membre de la famille du mineur ou de l'administrateur
ad hoc
ou d'une personne mandatée par le juge des enfants.
Votre commission approuve dans son principe la possibilité de
procéder à l'enregistrement de la déposition d'un mineur
victime d'infraction sexuelle afin d'éviter autant que faire se peut les
conséquences traumatisantes des dépositions
répétées.
Il convient toutefois d'éviter, comme l'a notamment souhaité
Mme Christiane Berkani, juge d'instruction à Paris, de
conférer un caractère automatique à cet enregistrement.
Par ailleurs, il est fondamental d'éviter que l'enregistrement ne
conduise à figer les choses en faisant irrémédiablement
obstacle à toute nouvelle audition de l'enfant. Une telle
interprétation serait lourde de conséquences pour les droits de
la défense (car il convient de pouvoir contester une affabulation de
l'enfant, qui n'est pas à exclure) ou pour l'enfant lui-même (qui
pourrait se trouver totalement inhibé lors de l'enregistrement). A cette
fin, votre commission vous propose deux amendements.
- Le premier
amendement
complète l'article 706-52 afin de
préciser que la nécessité de l'audition du mineur
s'appréciera indépendamment de la réalisation d'un
enregistrement.
- Le second
amendement
réécrit l'article 706-53 afin
d'y apporter les compléments suivants :
- l'enregistrement ne pourra être utilisé qu'au cours de
l'instruction. Il serait notamment incompatible avec le principe de
l'oralité des débats criminels de pouvoir l'utiliser devant la
cour d'assises ;
- que seules les parties, leurs avocats ou les experts pourront visionner les
enregistrements ou leurs copies et ce en présence du juge d'instruction
ou (notamment si les demandes tendant à les visionner se multiplient,
faisant ainsi peser une charge de travail excessive sur ce magistrat) d'un
greffier. Cette précision lui paraît constituer un gage
supplémentaire de respect de la confidentialité de
l'enregistrement ;
- une transcription de l'enregistrement sera effectuée, laquelle rendra
donc inutile la réalisation d'une copie. Cette transcription sera
versée au dossier ;
- la publication de l'enregistrement (même après le procès)
sera sanctionnée d'un an d'emprisonnement et de 100.000 F
d'amende ;
- l'enregistrement sera détruit à l'issue d'un délai de
cinq ans à compter de l'extinction de l'action publique
(condamnation, acquittement, prescription...).
*
Votre commission a adopté le présent article 19 modifié par les amendements ci-dessus présentés.
Articles 19 bis et 19 ter
Réductions de peine
susceptibles
d'être accordées aux auteurs d'infractions
sexuelles
Ces articles, insérés par l'Assemblée
nationale, ont tous deux pour objet de modifier l'avant-dernier alinéa
de l'article 722 du code de procédure pénale.
En sa rédaction actuelle, cette dernière disposition impose une
expertise psychiatrique préalable pour les aménagements de peine
dont pourraient bénéficier les personnes condamnées pour
meurtre ou assassinat d'un mineur de quinze ans accompagné de viol ou
d'actes de barbarie ou pour une infraction sexuelle. Toutefois, cette expertise
n'est pas exigée pour les réductions de peines et les
autorisations de sortie sous escorte.
L'article 19
bis
précise que, parmi les
réductions de peines, seules celles n'entraînant pas de
libération immédiate ne nécessiteront pas une expertise.
A contrario
, une expertise sera nécessaire pour les
réductions de peine entraînant une libération
immédiate c'est-à-dire pour celles accordées lors de la
dernière année de l'incarcération. Votre rapporteur
s'interroge sur l'opportunité de cet article qui, selon les informations
fournies par M. Faucher, correspondrait à un surplus de 2 à
3.000 expertises par an pour un résultat pour le moins
limité puisque, au pire, elles allongeraient la détention de
quelques mois. Au surplus, en vertu du futur article 763-6 du code de
procédure pénale (article 5 du projet de loi), le condamné
fera en tout état de cause l'objet d'une expertise avant sa
libération s'il est assujetti à une obligation de soins.
L'article 19
ter
étend l'obligation de l'expertise
à tous les meurtres ou assassinats avec viol ou actes de barbarie commis
contre des mineurs, quel que soit leur âge.
Votre commission a adopté un
amendement
de suppression de
l'article 19
bis
. Elle a en revanche adopté l'article 19
ter
sans modification.
Article 20
Peines ne pouvant être
prononcées contre un mineur
Cet article a été supprimé par
l'Assemblée nationale qui en a repris le dispositif au sein de
l'article 31
quinquies
.
Votre commission vous propose de
maintenir cette suppression
.
Article 21
Prise en charge par l'Etat des soins
dispensés
aux mineurs victimes d'infractions sexuelles
Cet article a pour objet de compléter
l'article L.322-3 du code de la sécurité sociale afin de
permettre la prise en charge par l'Etat des soins dispensés au mineur de
moins de quinze ans victimes :
- d'un viol ou d'une autre agression sexuelle, y compris
l'exhibitionnisme ;
- de corruption de mineur ;
- de la diffusion de son image présentant un caractère
pornographique ;
- de la diffusion d'un message violent ou pornographique ;
- d'une atteinte sexuelle.
Ainsi qu'il a été indiqué dans l'exposé
général du présent rapport, votre commission vous propose
un
amendement
tendant à étendre à tous les mineurs
victimes de ces infractions (et non seulement à ceux âgés
de moins de quinze ans) la prise en charge de ces soins par
l'assurance-maladie.
Elle a adopté cet article ainsi modifié.