B. CONFORTER L'INDÉPENDANCE DES RÉDACTIONS
1. Donner une meilleure visibilité aux comités d'éthique
Institués par la loi « Bloche » du 14 novembre 2016, les Comités relatifs à l'honnêteté, à l'indépendance et au pluralisme de l'information et des programmes (CHIPIP) sont chargés, au sein des médias audiovisuels, de faire respecter les grands principes éthiques et déontologiques. Composés de personnalités indépendantes, ils peuvent se saisir ou être saisis par toute personne.
Les CHIPIP ont fait l'objet de plusieurs analyses, notamment par la commission d'enquête du Sénat sur la concentration des médias4(*) ou par la mission d'évaluation de l'Assemblée nationale sur la loi du 14 novembre 20165(*). Ces différents travaux déplorent leur faible visibilité ainsi que l'inégalité dans les saisines entre les différents groupes de médias.
L'article 3 de la proposition de loi vise à les rendre plus visibles, en particulier en mettant en place un mécanisme de saisine facilement accessible et en rendant publics l'ensemble de leurs avis. Un membre du comité assisterait de plus aux réunions du conseil d'administration.
2. Des chartes de déontologie rénovées
La loi du 14 novembre 2016 a rendu obligatoire la rédaction de chartes déontologiques dans les titres de presse écrite et audiovisuelle. Elle permet de guider les journalistes dans l'exercice de leurs missions, notamment au regard de leurs prérogatives spécifiques comme les clauses de cession ou de conscience.
Ces chartes demeurent cependant encore trop peu utilisées, quand elles ont été rédigées. De plus, elles souffrent d'une absence de visibilité en interne comme vis-à-vis de l'extérieur.
L'article 4 de la proposition de loi a donc pour objet, d'une part, de donner à ces chartes une base de référence, en prenant comme fondement les trois grands textes du journalisme que sont la Charte d'éthique professionnelle des journalistes de 1918, remaniée en 1938 et 2011, la Déclaration des droits et devoirs des journalistes, dite « Déclaration de Munich » de 1971, enfin la Charte d'éthique mondiale des journalistes de la Fédération internationale des journalistes, adoptée en 2019 à Tunis, d'autre part, de mettre en place un contrôle de la conformité des chartes à ces grands principes exercé par le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM).
3. Création d'un droit d'agrément des rédactions
La loi du 29 juillet 1881 a consacré la liberté de la presse en France. Cependant, si les journalistes bénéficient de garanties spécifiques, les entreprises de presse n'en demeurent pas moins des entités économiques au sein desquelles s'exerce le pouvoir des actionnaires.
Plusieurs affaires récentes ont mis en lumière la faculté d'un actionnaire à faire évoluer de manière significative la ligne éditoriale d'un titre suite à un rachat. À cette occasion, une partie de la profession de journalistes a exprimé le souhait d'une association plus directe des rédactions à la gestion des titres, en promouvant l'idée d'un « droit d'agrément » des journalistes pour le directeur de rédaction.
L'article 6 vise ainsi à asseoir ce droit dans la loi du 29 juillet 1881, dans la presse écrite et audiovisuelle. Le directeur de la rédaction serait ainsi proposé par l'actionnaire et devrait recueillir l'accord de 60 % d'au moins la moitié des membres de la rédaction.
* 4 https://www.senat.fr/travaux-parlementaires/structures-temporaires/commissions-denquete/commissions-denquete/commission-denquete-concentration-des-medias-en-france.html#:~:text=Le%20S%C3%A9nat%20a%20cr%C3%A9%C3%A9%20une%20commission%20d'enqu%C3%AAte
* 5 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/organes/commissions-permanentes/affaires-culturelles/missions-de-la-commission/me-pluralisme-independance-liberte-medias