II. UNE SIXIÈME RÉFORME DU RÉGIME DE L'ORDONNANCE DE PROTECTON DEPUIS SA CRÉATION EN 2010 AFIN DE RENFORCER LA SÉCURITÉ DES VICTIMES, Y COMPRIS EN CAS D'EXTRÊME URGENCE

La proposition de loi, qui constituerait la sixième réforme du dispositif des ordonnances de protection en quatorze ans, comporte trois articles. Les deux mesures de l'article 1er visent à étendre temporellement la protection des victimes de violences intrafamiliales. L'article 2, qui instaure une peine pénale en cas de violation des mesures prononcées dans le cadre d'une ordonnance provisoire de protection immédiate, et l'article 3, qui prévoit l'application du texte en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, complètent ces mesures.

A. LE DOUBLEMENT DE LA DURÉE DE L'ORDONNANCE DE PROTECTION

Le 1° de l'article 1er de la proposition de loi étend la durée des mesures de l'ordonnance de protection à douze mois, contre six mois en l'état du droit. Il s'agirait d'une durée maximale, la faculté du juge de fixer une durée inférieure n'étant pas restreinte par la présente proposition de loi. L'auteure de la proposition de loi justifie cette mesure par le souhait de permettre aux personnes qui ne sont pas mariées et qui n'ont pas d'enfants de bénéficier d'un temps plus long pour organiser leur séparation.

Cette extension serait en effet applicable à toutes les ordonnances de protection, sans distinction selon le régime marital de la victime présumée ou la présence d'enfants. En revanche, la proposition de loi ne modifie pas les conditions de prolongement de la durée d'une ordonnance de protection. L'état du droit serait donc maintenu : ce nouveau délai de douze mois ne pourrait être prolongé qu'en cas de demande relative à l'exercice de l'autorité parentale d'une demande en divorce ou en séparation de corps.

B. LA CRÉATION D'UNE ORDONNANCE PROVISOIRE DE PROTECTION IMMÉDIATE

Inspiré de la recommandation n° 33 du rapport « Plan rouge VIF » d'Émilie Chandler et de Dominique Vérien, publié en mai 2023, le 2° de l'article 1er de la proposition de loi constitue la mesure la plus novatrice du texte, à savoir la création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate. Elle vise à assurer une meilleure protection des victimes dans le court temps qui sépare la saisine du juge aux affaires familiales et sa décision sur l'ordonnance de protection, lors duquel le danger peut être prégnant.

Tel que proposé dans le texte transmis au Sénat, cette ordonnance provisoire de protection immédiate serait délivrée par le juge aux affaires familiales, sur saisine du procureur de la République mais avec l'accord de la victime présumée, en parallèle d'une demande de délivrance d'une ordonnance de protection « classique ».

Le juge disposerait d'un délai de vingt-quatre heures pour se prononcer, au vu des seuls éléments joints à la requête, c'est-à-dire sans avoir entendu la partie défenderesse. L'ordonnance provisoire pourrait être délivrée si le juge estime « qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger grave et immédiat auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés ». Le juge pourrait alors ordonner quatre des onze mesures qui peuvent être édictées dans le cadre d'une ordonnance de protection :

- interdire à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées par le juge, ainsi que d'entrer en relation avec elles ;

- interdire à la partie défenderesse de se rendre dans certains lieux spécialement désignés par le juge ;

- interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme ;

- ordonner à la partie défenderesse de remettre au service de police ou de gendarmerie les armes dont elle est détentrice.

Ces mesures seraient valables jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales sur la demande d'ordonnance de protection, soit pendant une durée d'environ six jours.

Conformément à l'article 2 de la proposition de loi, la violation de ces mesures constituerait un délit puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende.

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