III. UN DISPOSITIF SOUPLE ET PROGRESSIF VISANT À REDONNER CONFIANCE AUX SOIGNANTS
A. UNE RÉPONSE À UNE ATTENTE DES SOIGNANTS
Par cette proposition de loi, la commission entend afficher un horizon de rétablissement d'effectifs suffisants au lit des patients afin de diminuer la charge des soignants aujourd'hui épuisés et restaurer des conditions d'exercice décentes pour les personnels hospitaliers.
Par l'établissement de ratios qualitatifs, le texte se présente comme un engagement de moyens visant à rassurer les soignants . La commission partage ainsi l'intention des auteurs : envoyer le message d'une volonté politique claire de renforcement des équipes , appelant les soignants à ne pas quitter l'hôpital et, pour certains, à y revenir.
B. UN DISPOSITIF SOUPLE QUI N'OBÈRE PAS LE FONCTIONNEMENT DES SERVICES HOSPITALIERS
1. Un référentiel de qualité établi par la Haute Autorité de santé
La proposition de loi prévoit d'ajouter aux missions de la Haute Autorité de santé la définition, pour chaque spécialité et type d'activité de soin hospitalier et en tenant compte de la charge de soins associée, un ratio minimal de soignants, par lit ouvert ou par nombre de passages pour les activités ambulatoires, de nature à garantir la qualité et la sécurité des soins . L'indépendance de l'autorité et ses missions existantes en matière de qualité des soins et de certification des établissements de santé justifient ce choix.
Le travail demandé à la HAS, très large, nécessitera la constitution de groupes de travail en son sein afin de consulter tant les sociétés savantes que les conseils professionnels et valoriser une approche « de terrain » aux prises avec les réalités des établissements.
2. Une distinction des types de ratios normatifs
La commission, à l'initiative de sa rapporteure, a précisé l'articulation juridique des ratios créés avec les ratios sécuritaires existants. Le code de la santé publique serait ainsi modifié pour distinguer les ratios de sécurité existants des ratios de qualité créés.
• Sur la base des recommandations de la HAS, le Gouvernement devra ainsi établir un ratio minimal de soignants par lit ouvert ou par nombre de passages pour les activités ambulatoires. Afin de prévoir une révision régulière de ces ratios, une période de validité maximale de cinq années est inscrite.
• Les ratios créés sont établis en vue de garantir la qualité des soins et des conditions d'exercice et tiennent compte de la charge de soins associée aux activités.
Ratios sécuritaires comme qualitatifs seront définis par décret. Conçus comme des standards souples ou « fourchettes » , les ratios qualitatifs pourront aussi être établis en appréciant les particularités propres aux spécialisations ou à la taille des établissements .
3. Une appropriation souple laissée aux établissements
• Les ratios définis ont particulièrement vocation à s'appliquer aux établissements du service public hospitalier , soit principalement les hôpitaux publics et les établissements de santé privés d'intérêt collectif. C'est à ces derniers que le dispositif proposé applique des mesures d'application concrète de mise en oeuvre.
Afin de respecter l'organisation autonome des établissements et préserver le rôle des directeurs des soins et cadres coordinateurs , la commission, par l'amendement de la rapporteure, a souhaité prévoir un rôle d'appropriation des ratios qualitatifs par les commissions médicales d'établissement (CME) et commissions des soins infirmiers , de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) ou les instances analogues dans les établissements privés.
Celles-ci seraient chargées d' approuver le schéma d'organisation des soins au regard des ratios qualitatifs définis . Cette appropriation « locale » permet en outre de tenir compte de la typologie de patients accueillis dans l'établissement ou encore de contraintes matérielles ou architecturales.
4. Une nécessité de suivi et d'information des tutelles
La commission a souhaité prévoir un mécanisme « d'alerte » : la constatation d'une incapacité à respecter les ratios qualitatifs au-delà d'une durée de trois jours conduit à un signalement au directeur général de l'agence régionale de santé.
Si le non-respect du ratio qualitatif n'entraîne pas, contrairement au ratio sécuritaire, de « fermeture de lit » ou de réduction obligatoire du capacitaire, cette obligation d'information de l'ARS répond à deux objectifs :
- assurer une connaissance en temps réel de la situation des hôpitaux par les ARS qui sont leur tutelle et souligner la responsabilité de celles-ci en matière de qualité et de continuité des soins sur le territoire ;
- permettre un réel suivi documenté des difficultés rencontrées et ainsi mieux identifier les besoins auxquels une réponse doit être apportée en termes d'organisation ou de recrutements.