III. UNE GESTION IMMOBILIÈRE ENCORE INSUFFISAMMENT ÉVALUÉE
A. LA MESURE DE LA PERFORMANCE ASSOCIÉE AUX CESSIONS
1. Une mesure restreinte
Comme l'a souligné à de nombreuses reprises votre rapporteure spéciale, une politique immobilière digne de ce nom ne peut se borner à la réalisation de ventes patrimoniales, serait-ce dans les meilleures conditions possibles pour les intérêts financiers de l'Etat. Les cessions ne doivent pas constituer un objectif « final », mais seulement l'un des vecteurs d'une gestion cohérente ; le but véritable est la rationalisation des coûts et des implantations. À ce titre, l'évaluation des économies d'exploitation et des améliorations de fonctionnement s'avère essentielle.
Pour 2009, la performance du programme 722 relatif aux dépenses immobilières effectuées à partir du compte « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat » 340 ( * ) a été mesurée par seulement trois indicateurs . Deux d'entre eux se rapportent à l'objectif d'« optimiser le parc immobilier de l'Etat », le troisième à l'objectif d'« améliorer la qualité des évaluations domaniales ». Ces indicateurs, outre qu'ils ne mesurent pas tant l'efficacité de la gestion budgétaire que celle du service France Domaine, n'apportent qu'une vision très limitée des performances obtenues par la gestion immobilière de l'Etat .
Aussi, votre rapporteure spéciale renouvelle 341 ( * ) ses préconisations en faveur d'un renforcement de ce dispositif . Plus généralement, elle rappelle la nécessité pour l'Etat de mettre en place ou de renforcer les outils de suivi et d'évaluation de nature à optimiser la gestion de son parc immobilier 342 ( * ) .
2. Des résultats faiblement significatifs
Seuls 37 % des immeubles recensés comme cessibles à la fin de l'année 2008 ont été vendus en 2009 , contre une prévision de 60 % dans le PAP. La crise économique et financière a retardé ou empêché une partie des ventes prévues, mais la surévaluation des objectifs en la matière (cf. supra ) a pris sa part de responsabilité dans le résultat.
Ce dernier, toutefois, se révèle un peu meilleur qu'en 2008, où seulement 30 % des immeubles recensés comme cessibles à la fin de l'année 2007 avaient été vendus. La rapidité de réalisation des ventes a été favorisée par les cessions pratiquées en faveur de collectivités territoriales , notamment dans le cadre de l'exercice, par les communes, du droit de priorité qu'elles détiennent sur le fondement de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement.
L e prix moyen des cessions d'un montant supérieur à deux millions d'euros n'a été supérieur que de 0,8 % aux estimations domaniales, pour une prévision de 0,9 %.
Ce résultat, cependant, ne rend qu'imparfaitement compte de la qualité des évaluations . D'une part, l'indicateur retenu ne vise que les ventes d'un montant supérieur à deux millions d'euros, soit 22 opérations en 2009. D'autre part, pour cet exercice, plus des deux tiers des ventes importantes ont résulté de cessions de gré à gré.
En outre, l'exercice du droit de priorité des communes exerce un effet baissier sur les prix de ventes, car cette procédure impose un prix égal à la valeur domaniale du bien en cause, voire inférieur à cette valeur, du fait d'une décote, dans le cas où l'opération tend à permettre la construction de logements sociaux.
Enfin, les opérations de « remploi » des produits de cessions immobilières d'un montant supérieur à cinq millions d'euros ont donné lieu à un ratio moyen d'occupation des locaux à hauteur de 12,3 m2 par agent, soit légèrement plus que la norme de 12 m2 que l'Etat s'est fixée. Toutefois, là encore, la nature de l'indicateur rend ce résultat peu significatif des performances réelles .
En premier lieu, ne sont prises en considération que les opérations d'un montant supérieur à cinq millions d'euros, qui font l'objet d'une procédure d'autorisation spécifique par le ministre chargé du domaine. Or il est vraisemblable que ce sont précisément les autres cas qui se trouvent les moins fortement soumis à l'exigence de performance immobilière.
En second lieu, le ministère de la défense et, pour les biens situés à l'étranger, le ministère des affaires étrangères et européennes sont dispensés de suivre cette procédure. La vision offerte par l'indicateur se révèle donc très partielle.
De fait, les informations plus générales communiquées par le ministère du budget, des comptes publics et la réforme de l'Etat mentionnent un ratio d'occupation moyen de l'ordre de 15 m2 par agent pour les administrations centrales et de 18 à 20 m2 dans les services déconcentrés . Les efforts déployés à cet égard ont permis de réduire de 46.300 m 2 en 2009, et de 133.200 m 2 entre 2006 et 2009, la surface totale occupée par les ministères.
* 340 Le programme 721, concernant la contribution des recettes de cessions immobilières au désendettement de l'Etat, se trouve dépourvu d'objectif. Bien qu'elle soit contraire à la lettre de l'article 7 de la LOLF, cette situation n'encourt pas de critique eu égard aux caractéristiques particulières du programme : la performance, en termes de désendettement, se mesure au montant même des produits affectés. L'année 2009, à cet égard, comme exposé ci-dessus, a marqué un net recul par rapport aux exercices antérieurs.
* 341 Cf. sa contribution au rapport n° 542 (2008-2009) sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2008.
* 342 Il s'agit d'améliorer l'inventaire et la valorisation du patrimoine de l'Etat et de ses opérateurs, de mettre en oeuvre un suivi des baux et des besoins d'entretien, de développer les outils de pilotage de cette gestion... Votre rapporteure spéciale, à l'occasion de l'examen du PLF pour 2010, a présenté une synthèse des « chantiers » en cours, ou à ouvrir, pour la constitution d'un dispositif plus efficient : cf. le rapport précité n° 101 (2009-2010), tome III, annexe 14 et, en ce qui concerne spécifiquement l'Etat locataire, le rapport d'information n° 510 (2008-2009). Dans cette perspective, elle constate avec satisfaction, en annexe au RAP pour 2009 de la mission « Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat », la présence de la liste des biens les plus importants acquis ou pris à bail par l'Etat ou ses opérateurs pendant l'exercice, conformément aux dispositions de la LFI pour 2010 introduites à son initiative.