EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité le 5 février 2008 la proposition de loi relative aux conditions de commercialisation et d'utilisation de certains engins motorisés. Ce texte est issu de deux propositions de loi présentées respectivement par :
- MM. Patrice Calméjane, Gérard Gaudron, Sébastien Huyghe 1 ( * ) et Jean-Philippe Maurer (proposition de loi n° 632 relative aux conditions de commercialisation et d'utilisation de certains engins motorisés) ;
- Mme Elisabeth Guigou et plusieurs de ses collègues du groupe socialiste (proposition de loi n° 371 visant au contrôle de la vente et de l'utilisation des mini-quads, mini-motos et engins assimilables).
La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale reprend pour l'essentiel la proposition de loi n° 632 augmentée de certaines dispositions de la proposition de loi n° 371.
Comportant deux articles, ce texte vise pour l'essentiel à encadrer la commercialisation ainsi que l'utilisation des mini-motos et mini-quads. En effet, bien que ces engins motorisés existent depuis de nombreuses années, on assiste depuis deux ans à l'arrivée sur le marché grand public de modèles à bas prix. Un véritable engouement a ainsi été suscité pour ce type d'engins conçus pour un usage ludique et qui pour la plupart ne sont pas autorisés à circuler sur la voie publique.
Or, beaucoup d'utilisateurs, notamment des mineurs, en font un usage inadapté et illégal mettant en danger leur propre sécurité ainsi que celle des tiers. L'arrivée de modèles à prix très bas 2 ( * ) , souvent vendus par Internet sans aucune information et parfois livrés en kit, rend encore plus nécessaire l'adoption de règles plus strictes quant à la commercialisation et l'utilisation de ces engins au statut juridique particulier.
I. UN PHÉNOMÈNE RÉCENT ET MAL MAÎTRISÉ, À L'ORIGINE DE RISQUES ET DE NUISANCES
A. UN MARCHÉ ÉCLATÉ EN PLEIN ESSOR
1. Un succès grandissant
Dans un avis du 26 mai 2007, la commission de sécurité des consommateurs 3 ( * ) constate l'explosion des ventes de mini-motos. En France, le parc serait constitué aujourd'hui d'environ 40.000 mini-motos. Le nombre de quads serait lui estimé à 10.000.
Ce phénomène n'est pas propre à la France. Ainsi, au Royaume-Uni, selon la Motor Cycle Industry Association, la vente de mini-motos serait passée de 10.000 unités en 2003 à 100.000 unités en 2005.
Toutefois, l'évaluation exacte du phénomène reste difficile, la vente de ces engins n'étant pas réglementée comme l'est celle des véhicules admis à circuler sur la voie publique. La croissance des ventes par Internet auprès de fournisseurs situés à l'étranger complique encore ce travail d'évaluation.
2. Typologie des mini-motos et des quads
Les termes de « mini-motos » et de « quads » sont génériques et recouvrent des catégories de machines très différentes selon l'usage auquel elles sont destinées. Certains modèles répondent aux normes exigées pour circuler sur la voie publique. C'est le cas notamment de certains modèles de motocyclettes ou de cyclomoteurs dont la taille a été rabaissée et de quads. Toutefois, pour la plupart, ces engins ont pour finalités la pratique de loisir (notamment en tout terrain), la compétition sportive, ou un usage ludique sur un terrain privé.
La commission de sécurité des consommateurs ainsi que le ministère de l'intérieur 4 ( * ) ont élaboré une typologie de ces engins (voir l'encadré ci-dessous).
TYPOLOGIE DES MOTOS DE PETITE TAILLE,
1. Modèles de motos de petite taille et de mini-motos - Les « peewee » Terme communément utilisé pour désigner les petites motos de cross d'apprentissage destinées aux enfants. D'une cylindrée de 50 à 80 cm3, elles sont équipées d'un certain nombre de dispositifs de sécurité (protège chaîne, transmission par cardan, embrayage automatique, vitesse modulable de 25 à 50 km/h). - Les « pit bikes » et les « pocket bikes » de compétition La cylindrée de ces machines destinées à des adultes amateurs de moto est comprise entre 35 à 49 cm3. A noter que ces engins sont devenus une véritable catégorie sportive avec création de fédérations et organisation de compétitions. - Les « dirt bikes » et autres motos tout terrain Selon leurs constructeurs, ces engins sont destinés à des enfants, des adolescents ou de jeunes adultes. Contrairement aux « peewee », elles ne sont pas équipées de dispositifs de sécurité. Leur hauteur de selle est comprise entre 50 et 60 cm, leur hauteur de guidon entre 60 et 70 cm. Leur motorisation est comprise entre 50 et 110 cm3. - Les « pocket bikes » Répliques des « pocket bikes » de compétition, mais de qualité et aux performances inférieures, ces engins ont un moteur d'une cylindrée d'environ 49 cm3. La hauteur de leur selle est comprise entre 30 et 40 cm, celle de leur guidon est de 50 cm environ. - Les « routières » Elles regroupent des engins divers tels des « mini-customs », « mini-choppers », « mini-scooters », « miniside-cars ». Certaines peuvent être homologuées sous l'appellation commerciale « mini-moto routière » et se rattachent à la catégorie des cyclomoteurs au sens du code de la route. La plupart d'entre elles ne sont cependant pas homologuées et ne peuvent circuler sur la route, contrairement à ce que pourrait laisser supposer leur équipement (pneus route, éclairage, avertisseur ...). 2. Modèles de quadricycles à moteur - Quadricycles légers à moteur D'une cylindrée qui ne peut excéder 50 cm3 et dont la puissance est inférieure ou égale à 4 kilowatts, ces véhicules ont une vitesse maximale par construction limitée à 45 km/h. Leur poids à vide ne dépasse pas 350 kilogrammes et la charge utile n'excède pas 200 kilogrammes. - Quadricycles lourds à moteur D'une cylindrée supérieure à 50 cm3, ces véhicules ont un moteur d'une puissance maximale nette inférieure ou égale à 15 kilowatts. Leur poids à vide n'excède pas 550 kilogrammes, pour ceux qui sont affectés au transport de marchandises, et 400 kilogrammes, pour ceux qui sont destinés au transport de personnes. |
3. Une commercialisation anarchique
Comme le relève la commission de sécurité des consommateurs, un certain nombre d'opérateurs nouveaux sont apparus sur le marché. L'avis de la CSC relève ainsi qu'« en plus des fabricants et assembleurs chinois, coréens ou taïwanais qui produisent des mini-motos à partir de licences dont ils possèdent légalement les droits d'exploitation ou par copie d'engins existants, interviennent des importateurs de biens d'équipement généralistes, des sociétés d'importations créées ad hoc, voire même des particuliers sans raison commerciale ».
Entendue par votre rapporteur, Mme Muriel Grisot, conseillère technique à la CSC, estime que les concessionnaires et accessoiristes de moto assurent une bonne information des consommateurs et ne commercialisent que des engins présentant des conditions satisfaisantes de sécurité.
Il n'en va pas de même pour les engins distribués par des grandes surfaces généralistes ou à l'occasion de foires ou fêtes forraines. Mais surtout, Mme Muriel Grisot a fait part de son inquiétude à propos de la vente par Internet d'engins à bas prix de faible qualité. Ces sites basés à l'étranger, notamment en Espagne, ne sont parfois créés que pour écouler un stock d'engins arrivés par conteneur. Une fois les engins vendus, le site disparaît. Les vendeurs s'inscrivent aussi sur des sites d'enchères en ligne.
* 1 Rapporteur des deux propositions de loi au nom de la commission des lois.
* 2 Quelques centaines d'euros pour certains.
* 3 La CSC est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 21 juillet 1983 relative à la sécurité des consommateurs. Elle recense les accidents et les risques de la vie courante et émet des avis sur tous types de produits ou de services présentant des risques.
* 4 Circulaire du 22 octobre 2007. NOR : INT/D/07/00104/C.