B. QUINZE ANNÉES DE RECHERCHES, D'ÉTUDES ET D'ÉVALUATIONS
1. Les résultats obtenus
Les recherches et les études menées sur chacun des trois axes ont mobilisé 2,5 milliards d'euros 14 ( * ) émanant pour l'essentiel des producteurs de déchets eux-mêmes. Les résultats obtenus confortent les trois options identifiées en 1991.
a) La transmutation doit attendre la quatrième génération de réacteurs
Les travaux ont été menés sous la direction du CEA essentiellement dans le réacteur Phénix et l'installation Atalante situés à Marcoule. Ils ont permis d'aboutir à deux avancées essentielles.
D'une part, la séparation des actinides mineurs (tels que l'américium et le curium) est possible pour 99,9 % d'entre eux, ce qui permettra de réduire par 100 la toxicité après 500 ans des déchets restants. En revanche, les produits de fission (tels que le césium, l'iode et le technétium) ne se prêtent pas, pour des raisons techniques, au processus de transmutation.
D'autre part, la faisabilité scientifique de la transmutation est démontrée, mais les données permettant la fabrication de réacteurs transmuteurs ne devraient être disponibles que vers 2015.
Quant à la réalisation de ces opérations à l'échelle industrielle, elle prendra un retard important par rapport à ce que pouvait espérer le législateur de 1991. La France disposait alors du surgénérateur Superphoenix, instrument tout indiqué pour réaliser la transmutation mais la décision de sa fermeture a été prise par le Premier ministre en juin 1997.
La mise en oeuvre opérationnelle de la transmutation repose donc désormais sur l'installation des futurs réacteurs à neutrons rapides, dits de quatrième génération, confirmée par la loi d'orientation sur l'énergie de 2005 15 ( * ) et attendue à l'horizon 2040 16 ( * ) .
b) Les perspectives de création d'un centre de stockage se précisent
L'ANDRA, chargée des recherches sur l'axe 2, a étudié la faisabilité du stockage en milieu granitique et en milieu argileux.
Les analyses sur le granit se sont faites en l'absence d'un site spécifique d'études, mais à partir de coopérations sur des sites étrangers, d'une part, 17 ( * ) et, d'autre part, sur la base de l'analyse de 78 zones granitiques de 20 km 2 dans le Massif central et le Massif armoricain. Ils ont notamment permis de valider la pertinence d'un principe d'architecture adapté à cette roche. A ce stade, l'ANDRA s'interroge toujours sur les possibilités de trouver un site présentant des blocs de granit sain de taille suffisante en dehors du réseau de fractures.
Bien plus avancées sont les recherches menées en terrain argileux, dans le laboratoire suisse Mont Terri et surtout dans le Callovo-oxfordien 18 ( * ) de Bure, en limite des départements de la Meuse et de la Haute-Marne 19 ( * ) . Sur ce dernier site, les forages ont commencé en 1994 et le laboratoire situé à 445 mètres sous terre a été autorisé par décret en mars 2000. Si le laboratoire de Bure n'est pas encore entièrement équipé ni même aménagé, il a toutefois permis d'obtenir plusieurs résultats quant à la stabilité de la roche et à la remontée des radionucléides vers les nappes phréatiques et vers l'environnement sur une très longue période 20 ( * ) .
A ce stade, l'ANDRA conclut de ces travaux que le principe de la faisabilité du stockage réversible dans la zone entourant l'actuel laboratoire 21 ( * ) en couche argileuse paraît acquis.
LE STOCKAGE : A LA FOIS DEFINITIF ET REVERSIBLE A la différence de l'entreposage, le stockage doit être conçu pour être éventuellement définitif. S'agissant de déchets à haute activité et à vie longue, cela signifie qu'il doit pouvoir contenir la radioactivité pendant des centaines de millions d'années. Mais ceci n'exclut nullement qu'il puisse offrir aussi la possibilité de retirer les colis de déchets au cas où les générations futures le souhaiteraient, c'est-à-dire qu'il soit réversible. Sur la base des travaux du laboratoire de Bure, l'ANDRA met à l'étude la possibilité, établie en principe, de garantir la réversibilité d'un centre de stockage pendant 300 ans dans des conditions de sûreté optimales. Une optimisation est en effet à réaliser entre la réversibilité et la sûreté, dans la mesure où, dans l'absolu, l'installation la plus sûre est celle définitivement fermée. |
* 14 Soient 810 millions d'euros (M€) pour l'axe 1, 1.007 M€ pour l'axe 2 et 672 M€ pour l'axe 3.
* 15 Loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005.
* 16 En janvier 2006, le Président de la République a toutefois annoncé un objectif de mise en place d'un réacteur expérimental autour de 2020.
* 17 Ces expérimentations se sont déroulées dans les laboratoires d'Aspö (Suède), de Grimsel (Suisse), du lac du Bonnet (Canada) ainsi que sur le site d'Olkiluoto (Finlande).
* 18 Couche d'argilite vieille de 155 millions d'années.
* 19 Cf. la carte située en annexe du présent rapport.
* 20 Un million d'années.
* 21 La « zone de transposition » de 200 km2 autour du laboratoire.