EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER - DISPOSITIONS RELATIVES AUX CERTIFICATS D'OBTENTION
VÉGÉTALE
Section 1
-
Dispositions modifiant et complétant le code de la
propriété intellectuelle
Article 1er (Article L. 611-17 du code de la
propriété intellectuelle)
Extension de l'exclusion du
régime du brevet à l'ensemble des variétés
végétales
Cet article étend l'exclusion de la brevetabilité à l'ensemble des obtentions végétales.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle interdit la brevetabilité des obtentions végétales d'un genre ou d'une espèce bénéficiant du régime de protection institué par les dispositions dudit code. Il en résulte que les obtentions végétales n'étant pas soumises au régime du COV peuvent potentiellement être brevetées.
Le deuxième alinéa de l'article 623-4 du même code prévoit que des décrets en Conseil d'Etat rendent progressivement applicables le régime du COV aux différentes espèces végétales en fonction de l'évolution des connaissances scientifiques et des moyens de contrôle.
Le décret n° 95-1407 du 28 décembre 1995, codifié à l'article R. 623-55 dudit code, édicte que « des certificats d'obtention végétale peuvent être délivrés (...) pour toute variété appartenant à une espèce du règne végétal ».
La rédaction combinée de ces différents articles peut prêter à confusion en laissant à penser que certaines variétés végétales restent, par nature, exclues du régime du COV, ce qui n'est pas le cas.
Les dispositions du projet de loi
L'article 1 er du projet de loi tend donc à clarifier ce point, en précisant que le système du brevet ne peut s'appliquer à aucune obtention végétale, toutes les variétés d'obtention végétale pouvant potentiellement faire l'objet d'un COV.
Il s'aligne ainsi sur le contenu des articles 3 de la convention UPOV de 1991 et du règlement (CE) n° 2100/94 précité.
Pour ce faire, il modifie l' article L. 611-17 du code la propriété intellectuelle, qui prévoit l'exclusion de la brevetabilité pour certains types d'inventions, afin d'ajouter l'ensemble des obtentions végétales à la liste des inventions faisant l'objet d'une telle interdiction.
Les propositions de votre commission
L'article 17 de la loi du 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique a inséré dans le code de la propriété intellectuelle un article L. 611-19 excluant déjà de la brevetabilité « les races animales ainsi que les procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux ou d'animaux » .
Par conséquent, l'article 1er du projet de loi n'a plus d'utilité. Aussi, votre rapporteur vous propose d'adopter un amendement tendant à supprimer cet article.
Votre commission vous demande d'adopter l'amendement de suppression de cet article qu'elle vous présente. |
Article 2 (Article L. 623-1 du code de la propriété
intellectuelle)
Définition de la « variété
végétale »
Cet article introduit la définition de « variété végétale ».
Le droit en vigueur
Il existe actuellement deux sources juridiques de définition de la variété en droit français :
- d'une part, l'article R. 661-26 du code rural, résultant de la transposition de la directive 68/193 du 9 avril 1998 concernant la commercialisation des matériels de multiplication végétative de la vigne ;
- d'autre part, l'article 5-1 du règlement (CE) 2100/94 du 17 juillet 1994 précité.
Aucune disposition législative ne pose donc une définition générale de la variété dans notre droit national.
Les dispositions du projet de loi
L'article 2 du projet de loi tend à remédier à cette carence en modifiant l' article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle, qui définit en l'état les conditions auxquelles une variété peut être appelée « obtention végétale » et faire l'objet d'une protection juridique. Il s'inspire directement de la définition de la variété que donne l'article 1 er de la convention UPOV de 1991 et l'article 5 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.
Il prévoit ainsi qu'une variété correspond à un ensemble végétal d'un taxon botanique du rang le plus bas connu. Le taxon constitue une unité présentant des caractéristiques communes au sein d'un ensemble plus vaste 26 ( * ) .
Afin de constituer une variété à part entière, cet ensemble végétal du taxon le plus bas connu doit satisfaire à plusieurs critères :
- être défini par l'expression des caractères résultant d'un certain génotype 27 ( * ) ou d'une certaine combinaison de génotypes ;
- se distinguer de tout autre ensemble végétal par l'expression d'au moins un desdits caractères ;
- être considéré comme une entité
du fait de son aptitude à être reproduit conforme.
Les propositions de votre commission
Cette définition de la variété, en tout point conforme aux prévisions du droit international et communautaire, est indispensable à la bonne mise en oeuvre du système UPOV.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 3 (Articles L. 623-2, L. 623-3 et L. 623-12 du code de la
propriété intellectuelle)
Conditions auxquelles des
variétés peuvent faire l'objet de certificats d'obtention
végétale
Cet article définit les conditions auxquelles les variétés peuvent faire l'objet de COV.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle, modifié par l'article 2 du projet de loi, définit les conditions auxquelles une variété est appelée « obtention végétale » et bénéficie de la protection du régime juridique y étant associé. Quatre éléments sont ainsi pris en compte : la nouveauté, l'originalité, l'homogénéité et la stabilité.
Les dispositions du projet de loi
Le I de l'article 3 du projet de loi tend à modifier l' article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle, qui prévoit en l'état la non brevetabilité des obtentions végétales d'un genre ou d'une espèce bénéficiant du régime de protection institué par les dispositions du même code, afin de reprendre et adapter ces quatre éléments :
- pour ce qui est de la nouveauté , il est précisé qu'elle peut résulter, soit d'une création, soit d'une découverte, comme c'est déjà prévu. Cependant, il est mentionné que cette découverte doit nécessairement s'accompagner d'un développement. Il s'agit ainsi d'interdire l'attribution d'un COV suite à la simple appropriation d'une ressource génétique naturelle qui serait restée inexploitée. La protection d'une telle ressource par un COV suppose en effet un réel travail de sélection conservatrice par un sélectionneur, et non la seule découverte d'une variété inconnue ;
- en ce qui concerne l' originalité , il est indiqué que la variété doit se distinguer de toute autre variété dont l'existence est notoirement connue à la date du dépôt de la demande. Sont donc supprimées, par rapport à l'actuelle législation, les dispositions indiquant qu'une telle distinction peut résulter d'un caractère important, précis et peu fluctuant, ou de plusieurs caractères dont la combinaison est de nature à qualifier la nouveauté ;
- s'agissant de l' homogénéité , il est précisé que la variété doit être suffisamment uniforme dans ses caractères pertinents. Il est ajouté, par rapport à l'état actuel du droit, que cette uniformité est appréciée sous réserve de la variation prévisible de la variété compte tenu de sa reproduction sexuée ou de sa multiplication végétative ;
- enfin, pour ce qui est de la stabilité , il est prévu que la variété doit être identique à sa définition initiale à la suite de ses reproductions ou multiplications successives ou, en cas de cycle particulier de reproduction ou de multiplication, à la fin de chaque cycle.
Ces quatre critères ne sont en réalité que la reprise -sous une forme simplifiée- de ceux prévus à la fois dans la convention UPOV de 1991 (aux articles 1 et 5 à 9) et dans le règlement (CE) n° 2100/94 précité (aux articles 5 à 10).
Le II de cet article procède à la coordination rendue nécessaire par le fait que la définition des conditions d'obtention d'un COV est transférée de l'article L. 623-1 à l'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle. Ainsi, il substitue la référence à l'article L. 623-2 à celle dudit article L. 623-1 dans les articles L. 623-3 et L. 623-12 du même code, où il est actuellement fait référence aux conditions à satisfaire pour obtenir un COV.
Les propositions de votre commission
Cette définition des conditions auxquelles les variétés peuvent faire l'objet de COV, conforme aux prescriptions du droit international comme à celles du droit communautaire, est entièrement cohérente.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 4 (Article L. 623-4 du code de la propriété
intellectuelle)
Droit exclusif des obtenteurs
Cet article actualise les dispositions relatives aux droits des obtenteurs, c'est-à-dire aux droits qu'ont les sélectionneurs sur les variétés qu'ils ont mises au point.
Le droit en vigueur
Le premier alinéa de l'actuel article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit la possibilité pour toute obtention végétale de faire l'objet d'un titre appelé « certificat d'obtention végétale » conférant à son titulaire un certain nombre de droits exclusifs :
- produire l'obtention ;
- l'introduire sur le territoire ;
- la vendre ou l'offrir en vente entièrement ou partiellement.
Le second alinéa renvoie à des décrets la détermination progressive des espèces végétales auxquelles s'appliquent ces dispositions, ainsi que les éléments de la plante sur laquelle portent les droits de l'obtenteur.
Les dispositions du projet de loi
L'article 4 du projet de loi réécrit entièrement l' article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle, afin de mieux préciser les droits de l'obtenteur, leur portée et leurs limites, en prenant en compte la convention UPOV et la réglementation communautaire.
Le 1° reprend et complète l'actuel premier alinéa de l'article L. 623-4 précité. Ainsi, les droits que confère le COV aux obtenteurs sont étendus :
- à la reproduction de l'obtention ;
- à son conditionnement aux fins de reproduction ou de multiplication ;
- à toute forme de vente ou commercialisation ;
- à l'exportation et à l'importation ;
- ainsi qu'à la détention à l'une des fins précitées.
Les 2°, 3° et 4° prévoient divers cas d'extension des droits du titulaire du COV.
L'actuel second alinéa relatif aux décrets fixant des listes d'espèces est supprimé. Il est remplacé par un 2° qui synthétise les 2° et 3° de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 afin de prévoir, lorsque l'autorisation des obtenteurs n'a pas été requise pour reproduire leurs variétés, l'extension de leur droit exclusif :
- au produit de la récolte, y compris aux plantes entières et aux parties de plantes ;
- aux produits fabriqués directement à partir du produit de récolte de la variété protégée.
Le 3° prévoit l'extension du droit exclusif du titulaire aux variétés proches ou essentiellement dérivées des siennes, en reprenant les distinctions opérées à cet égard par le 5 de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 et par le 5 de l'article 13 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.
Il est ainsi indiqué que ce droit s'étend :
- aux variétés ne se distinguant pas nettement de la variété protégée au sens de l'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle, tel que modifié par l'article 3 du projet de loi. On sait que le 1° de cet article exige d'une variété qu'elle réponde à un critère d'originalité pour bénéficier du statut d'obtention végétale protégée ;
- aux variétés dont la production nécessite l'emploi répété de la variété protégée.
Le 4° introduit l'importante notion de « variété essentiellement dérivée », à laquelle il étend le droit exclusif du titulaire, reprenant ainsi le b du 5 de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 et le 6 de l'article 13 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.
Dans son premier alinéa , il pose le principe de l'extension du droit exclusif du titulaire d'un COV portant sur une variété initiale aux variétés essentiellement dérivées de cette variété initiale.
La notion de « variété essentiellement dérivée » a été introduite par le 5 de l'article 14 de la convention UPOV révisée en 1991. Elle y est définie comme une variété issue d'une variété préexistante qu'elle modifie sur un caractère à déterminisme génétique simple (couleur, résistance à une maladie ou à un insecte ...). Le patrimoine génétique de la variété initiale n'est donc que faiblement modifié, les caractères phénotypiques 28 ( * ) de la variété essentiellement dérivée y étant identiques, à l'exception du caractère modifié.
L'objet de cet article est de se prémunir contre les pratiques par lesquelles des sélectionneurs ne modifieraient que très marginalement une variété afin de s'en approprier le droit exclusif : dans ce cas, le sélectionneur ayant mis au point la variété d'origine conserve le bénéfice de la protection y étant liée, y compris sur la variété essentiellement dérivée.
Les quatre autres alinéas définissent la notion de « variété essentiellement dérivée d'une autre variété dite initiale ». En est constitutive la variété qui :
- est principalement dérivée de la variété initiale, ou d'une variété qui est elle-même principalement dérivée de la variété initiale ;
- se distingue nettement de la variété initiale au sens de l'article L. 623-2 ;
- est conforme à la variété initiale dans l'expression des caractères essentiels résultant du génotype ou de la combinaison de génotypes de la variété initiale, sauf en ce qui concerne les différences résultant de la dérivation.
Les propositions de votre commission
Cet article actualise très utilement les droits de l'obtenteur au regard de nos engagements internationaux et communautaires. Il les complète également en reprenant les trois cas d'extension y étant prévus, et plus particulièrement celui ayant trait aux « variétés essentiellement dérivées », qui permet de prévenir les appropriations indues d'un premier travail de sélection.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 5 (Article L. 623-4-1 [nouveau] du code la propriété
intellectuelle)
Limites du droit exclusif de l'obtenteur
Cet article prévoit le champ non couvert par les droits de l'obtenteur.
Le droit en vigueur
Le droit positif ne contient pas actuellement de dispositions de ce type. Elles ont en effet été introduites par la convention UPOV de 1991 pour prendre en compte les progrès scientifiques et techniques en matière de procédés d'obtention et d'échanges commerciaux transcontinentaux.
Les dispositions du projet de loi
Reprenant donc les articles 15 et 16 de la convention UPOV de 1991, ainsi que les mêmes articles du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 5 du projet de loi précise les cas de dérogation et d'épuisement des droits de l'obtenteur. Il crée à cette fin un article L. 623-4-1 au sein du code de la propriété intellectuelle.
Dans son 1° , il prévoit que le droit du titulaire ne s'étend pas à certains actes qui, dans le système du brevet, requerraient l'autorisation du détenteur des droits, voire l'acquittement de droits à son profit. Sont ainsi autorisés :
- les actes accomplis à titre privé à des fins non professionnelles. Il s'agit de permettre l'utilisation de la variété et la multiplication des semences à des fins non commerciales ou dans un cadre privé ou familial, comme c'est le cas par exemple des jardiniers amateurs ;
- les actes accomplis à titre expérimental, sans intention de mettre au point une nouvelle variété qui serait protégée et susceptible de faire l'objet d'une commercialisation ;
- les actes accomplis aux fins de la création d'une nouvelle variété et les actes visés au 1° de l'article L. 623-4 portant sur cette nouvelle variété, à moins que les dispositions des 3° et 4° de cet article soient applicables.
Est ici visé le très important principe dit d'« exception de l'obtenteur » permettant à tout sélectionneur d'utiliser librement -sans requérir d'autorisation ni verser de droits- une variété protégée et légalement accessible, comme ressource initiale afin de créer une nouvelle variété. Tout en maintenant la protection de la variété initiale, ce système propre au COV permet donc de favoriser la recherche et ainsi d'enrichir la diversité génétique disponible pour l'ensemble des sélectionneurs.
Ce principe s'étend à l'ensemble des actes (en particulier la production, reproduction, conditionnement ou la vente) que peut effectuer sur la variété nouvellement créée son sélectionneur. Les seules limites à ce principe sont naturellement les cas envisagés aux 3° et 4° de l'article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle 29 ( * ) dans lesquels la variété mise au point ne serait pas réellement nouvelle ou originale.
Dans le premier alinéa de son 2° , il prévoit la non extension des droits du titulaire aux actes concernant sa variété, une variété essentiellement dérivée de cette dernière ou une variété qui ne s'en distingue pas nettement, dans les cas où du matériel de ladite variété -ou du matériel en étant dérivé- a été commercialisé par le titulaire ou avec son consentement.
Les trois alinéas suivants prévoient le maintien du droit du titulaire lorsque ces actes impliquent :
- soit une nouvelle reproduction ou multiplication de la variété en cause ;
- soit une exportation, vers un pays n'appliquant aucune protection de la propriété intellectuelle aux variétés appartenant à la même espèce végétale, de matériel de la variété permettant de la reproduire, sauf si le matériel exporté est destiné à la consommation humaine ou animale.
La notion de « matériel » est définie à l'article 16 de la convention UPOV de 1991. Y est ainsi assimilé le matériel de reproduction ou de multiplication végétative, le produit de la récolte -y compris tout ou partie des plantes- et tout produit en étant directement dérivé.
Les propositions de votre commission
L'insertion de ce nouvel article dans le code de la propriété intellectuelle est pleinement utile et nécessaire dans la mesure, notamment, où il soustrait aux droits du titulaire d'une variété les actes accomplis en vue de la mise au point d'une variété nouvelle par un autre sélectionneur, consolidant ainsi le principe de l'« exception de l'obtenteur ».
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 6 (Article L. 623-5 du code de la propriété
intellectuelle)
Actes faisant perdre à une variété son
caractère de « nouveauté »
Cet article précise les actes réalisés sur une variété préalablement à une demande de COV lui faisant perdre son caractère de « nouveauté ».
Le droit en vigueur
L'article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle détermine les cas et actes faisant perdre à une variété son caractère de « nouveauté », et donc la possibilité offerte à son obtenteur d'en protéger les droits s'y rapportant en obtenant un COV.
Ainsi, dans son premier alinéa, il répute non nouvelle l'obtention ayant reçu, avant la date du dépôt de la demande, une publicité suffisante pour être exploitée, ou se trouvant décrite soit dans un certificat français non encore publié, soit dans une demande de certificat déposée en France, ou bien à l'étranger et bénéficiant d'une priorité.
Dans ses deux alinéas suivants, il énumère les actes ne pouvant être interprétés comme une divulgation de nature à retirer à la variété son caractère de nouveauté.
Or, ces dispositions ne sont pas compatibles avec la définition de la nouveauté prévue par l'article 6 de la convention UPOV de 1991. En outre, elles introduisent des conditions supplémentaires proscrites par le 2 de l'article 5 de cette convention.
Les dispositions du projet de loi
Reprenant le 1 de l'article 6 de la convention UPOV de 1991 et le 1 de l'article 10 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 6 du projet de loi modifie l' article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle afin d'actualiser la notion de « nouveauté » en l'assortissant de délais différents selon les cas.
Dans le premier alinéa du 1° du texte proposé pour cet article, il répute non nouvelle la variété lorsque du matériel de reproduction ou de multiplication végétative ou un produit de récolte a été vendu ou remis à des tiers, en vue de son exploitation, par l'obtenteur ou avec son accord depuis moins d'un an sur le territoire de l'Espace économique européen (EEE).
Son deuxième alinéa couvre les cas où cette vente ou remise à des tiers s'effectue en-dehors du territoire de l'EEE. Dans ce cas, et si elle s'est effectuée plus de quatre ans -six ans pour les arbres et la vigne- avant le dépôt de la demande de COV, elle n'est pas non plus réputée nouvelle. Les conditions de délai sont donc ici plus souples que dans le cas précédent.
Reprenant l'esprit de la réglementation actuelle tout en l'actualisant, le 2° précise que ne peut être assimilé à une remise à des tiers au sens précédemment évoqué la remise de matériel de la variété :
- à un organisme officiel ou officiellement habilité ;
- aux fins d'expérimentation ou de présentation dans une exposition officiellement reconnue.
Dans ces deux cas en effet, on ne peut considérer que la remise à des tiers s'est faite en vue de l'exploitation commerciale de la variété. Afin de s'en assurer, il est d'ailleurs précisé au 2°, in fine , que l'obtenteur doit avoir expressément fait mention de l'interdiction d'une telle exploitation commerciale.
Les propositions de votre commission
Cet article actualise très utilement les conditions de non reconnaissance du caractère de nouveauté au regard de nos engagements internationaux et communautaires.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 7 (Article L. 623-6 du code de la propriété
intellectuelle)
Conditions requises pour prétendre au
bénéfice d'un COV
Cet article tend à préciser le champ d'application personnel et matériel du régime du COV, indiquant notamment qui peut déposer une demande de COV et sous quelles conditions.
Le droit en vigueur
En l'état, l'article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle comporte quatre alinéas prévoyant respectivement :
- la possibilité pour tous les nationaux, domiciliés ou résidents d'Etats partie à la Convention de Paris du 2 décembre 1961 d'obtenir un COV pour toute variété protégée par ladite convention ;
- le bénéfice d'une priorité, lors du dépôt en France d'une demande de COV, pour toute personne -ou son auteur- ayant déjà déposé une même demande dans l'un des Etats précédemment évoqués, dès lors qu'un délai inférieur à un an sépare les deux demandes ;
- la non opposabilité à la validité des COV dont la demande a été déposée dans les conditions précédentes de certains faits survenant dans le délai de priorité, tels que le dépôt d'une autre demande, la publication de l'objet de la demande ou l'exploitation de la variété visée ;
- le bénéfice pour tout étranger de la protection du droit national des obtentions végétales sous condition de réciprocité pour les Français de la part de l'Etat dont cet étranger ressortit.
Les dispositions du projet de loi
L'article 7 du projet de loi, qui reprend le contenu des articles 10 et 11 de la convention UPOV de 1991 et de l'article 12 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, modifie chacun des quatre alinéas de l' article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle, afin d'y intégrer certaines évolutions normatives :
- le premier alinéa étend le bénéfice de la loi à tout ressortissant, domicilié ou résident d'un Etat partie à la convention UPOV ou de la communauté européenne ;
- le deuxième alinéa reprend le texte actuel de l'article L. 623-6 précité ;
- le troisième alinéa précise que le délai de priorité d'une année, en cas de demandes successives de COV par la même personne auprès de deux Etats signataires de la Convention UPOV, est compté à partir de la date de dépôt de la première demande ;
- le quatrième alinéa étend le bénéfice de la protection sous condition de réciprocité à l'ensemble des espèces végétales, du fait de l'exhaustivité du champ d'application de la convention révisée.
Les propositions de votre commission
Cet article apporte d'utiles compléments et précisions quant à la procédure de demande de COV.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 8 (Article L. 623-12 du code de la propriété
intellectuelle)
Prise en compte par le comité chargé
d'instruire la demande de COV des résultats d'examens
réalisés par les obtenteurs eux-mêmes ou leurs ayant
droits
Cet article permet l'exploitation, par le comité chargé d'instruire la demande de COV, des résultats d'examen réalisés par les obtenteurs eux-mêmes ou leurs ayant droits.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle soumet la délivrance d'un COV à un examen préalable réalisé par le Comité de la protection des obtentions végétales (CPOV) 30 ( * ) , certifiant que la variété faisant l'objet de la demande de protection est bien susceptible de bénéficier d'un tel régime protecteur.
Le deuxième alinéa de cet article dispose en l'état que le CPOV peut estimer suffisant, dans le cadre de cette instruction, l'examen préalable effectué par un organisme du même type dans un autre Etat partie à la convention de Paris du 2 décembre 1961. Dans la majorité des cas toutefois, les services nationaux ont validé cet examen après que ses modalités ont été officiellement contrôlées.
Les dispositions du projet de loi
Outre une modification formelle consistant à viser la convention précitée de telle façon qu'elle intègre ses révisions successives, l'article 8 du projet de loi complète le deuxième alinéa de l' article L. 623-12 précité pour permettre au COPV de se satisfaire de l'examen réalisé par l'obtenteur ou son ayant-cause. Il s'agit de reconnaître expressément dans notre droit national une liberté reconnue implicitement par l'article 12 de la convention UPOV de 1991 et accordée en pratique aujourd'hui par ses Etats membres.
Il peut en effet arriver que la mise en place d'une structure officielle d'examen technique, pour une demande nationale, représente un investissement trop important -en compétences, infrastructures, personnel ...- au regard des besoins générés par l'activité de sélection dans l'espèce considérée. Dans ce cas, il est prévu d'autoriser le comité à décider que l'examen est réalisé par l'obtenteur ou son ayant cause selon des modalités officiellement déterminées.
Les propositions de votre commission
Cet article simplifie et allège opportunément les procédures d'instruction des demandes de COV, tout en maintenant leur rigueur et leur efficacité.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 9 (Article L. 623-12 du code de la propriété
intellectuelle)
Allongement de la durée de protection des COV
nationaux
Cet article tend à proroger de 5 ans la durée de protection assurée par les COV français.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-13 du code de la propriété intellectuelle fixe la durée minimale de protection du certificat à :
- vingt ans à partir de sa délivrance dans les cas normaux ;
- vingt-cinq ans si la constitution des éléments de production de l'espèce exige de longs délais.
Au-delà, la variété est considérée comme tombant dans le domaine public et peut donc faire l'objet d'une libre exploitation commerciale.
Les dispositions du projet de loi
Alignant notre législation sur l'article 19 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 9 du projet de loi prolonge de cinq ans la durée de validité des COV, la portant ainsi à :
- vingt-cinq ans à partir de sa délivrance dans les cas normaux ;
- trente ans si la constitution des éléments de production de l'espèce exige de longs délais.
Bien que brève, cette disposition comporte des conséquences pratiques extrêmement importantes. En effet, la protection dont bénéficient plusieurs variétés nationales est en passe d'arriver à son terme 31 ( * ) . Actuellement sources de revenus pour les sélectionneurs nationaux en étant à l'origine, elles tomberaient, si aucune démarche législative n'était entreprise, dans le domaine public, ce qui remettrait en cause l'équilibre des marchés concernés et dégraderait de façon substantielle le revenu de certains opérateurs.
Le délai supplémentaire de cinq années de protection conféré à l'ensemble des variétés bénéficiant actuellement d'un COV devrait au contraire permettre aux sélectionneurs de bénéficier de plus de temps pour se préparer à cette échéance et en relever le défi.
Les propositions de votre commission
Cette mise en cohérence des délais de protection de nos COV par rapport au droit communautaire est à la fois urgente et indispensable, évitant en effet que des obtenteurs titulaire d'un COV français ne soient pénalisés par rapport à ceux d'autres pays européens.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 10 - (Article L. 623-14 du code de la propriété
intellectuelle)
Publicité des actes relatifs aux certificats
d'obtention végétale
Cet article vise à assurer une meilleure information des tiers en améliorant la transparence des demandes de COV.
Le droit en vigueur
L'actuel article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle dispose que les actes portant délivrance du certificat, transmission de propriété, ou une concession de droit d'exploitation ou de gage, relatifs à un certificat d'obtention, ne sont opposables aux tiers que s'ils ont été régulièrement publiés dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat.
Ces conditions de publication sont fixées par divers articles réglementaires du même code. Ainsi, par exemple, l'article R. 623-28 prévoit-il la publication des actes de délivrance des certificats au bulletin officiel du comité des obtentions végétales.
Les dispositions du projet de loi
L'article 10 tend à modifier l' article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle sur deux points :
- d'une part, il ajoute les demandes de certificats à la liste des actes devant être publiés ;
- d'autre part, il reformule cette même liste, indiquant que l'obligation de publicité porte sur « les actes portant délivrance du certificat ainsi que tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de certificat ou à un certificat ».
Les propositions de votre commission
L'ajout de la demande de COV parmi les actes soumis à l'obligation de publicité vise à rendre plus transparente l'existence de droits reconnus à l'obtenteur dès le stade de la demande sur la base de l'article L. 623-7 du code de la propriété intellectuelle.
Dans la mesure où ces droits du demandeur sont d'ores et déjà opposables aux tiers (qui pourraient être tentés d'exploiter la même variété ou demander eux aussi un certificat d'obtention de celle-ci), le fait de prévoir une publicité obligatoire à l'attention de ces derniers constitue une réelle amélioration.
S'agissant de l'autre modification introduite par l'article 9 visant à la présentation non exhaustive de la désignation des actes concernés, votre commission estime qu'il s'agit d'une proposition utile dans la mesure où cette énumération permettra de couvrir de nouvelles situations sans avoir à modifier la loi.
La désignation générique proposée étant suffisamment large, la référence précise (introduite par « notamment ») aux cas de concessions de droit d'exploitation ou de gage est superfétatoire et doit être supprimée par un amendement rédactionnel.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié. |
Article 11 - (Article L. 623-15 du code de la propriété
intellectuelle)
Référence à la convention UPOV
Cet article actualise les références du projet de loi à la convention UPOV.
Le droit en vigueur
L'actuel article L. 623-15 du code la propriété intellectuelle fait référence à la convention de Paris du 2 décembre 1961.
Les dispositions du projet de loi
L'article 11 du projet de loi prévoit de remplacer la référence à la convention de 1961 par une mention plus générale, celle de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales.
Les propositions de votre commission
Il s'agit d'une disposition de portée rédactionnelle puisque la convention nouvellement visée est bien la convention de 1961, modifiée par les actes de révision dès lors qu'ils ont été ratifiés en droit français, comme c'est le cas des révisions de 1972 et 1978 (mais non celui de la révision de 1991).
Cette amélioration permet de supprimer toute ambiguïté. Votre commission estimant qu'elle pourrait être étendue aux autres articles du même code visant la convention du 2 décembre 1961, elle vous propose un amendement en ce sens.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié. |
Article 12 (Articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 [nouveaux] du code de
la propriété intellectuelle)
Licences d'intérêt
public
Cet article prévoit un nouveau cas de licence obligatoire, afin notamment d'éviter les risques de position dominante d'un obtenteur.
Le droit en vigueur
Le droit actuel prévoit deux cas d'obtention de licences obligatoires d'exploitation d'un COV, c'est-à-dire sans l'accord de son titulaire :
- prévu par les articles L. 623-20 et L. 623-21 du code de la propriété intellectuelle, le premier cas est fondé sur les besoins de la défense nationale. En justifiant d'un tel motif, l'Etat peut obtenir la licence d'exploitation d'un COV. Si cette obtention ne nécessite pas l'accord du titulaire, la redevance qui lui est versée est en revanche convenue à l'amiable (à défaut de quoi elle est fixée par l'autorité judiciaire) ;
- le second cas a été introduit par la loi n° 2004-1338 du 8 décembre 2004 relative à la protection des inventions biotechnologiques, qui a inséré dans le code de la propriété intellectuelle les articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2.
Ceux-ci prévoient la possibilité d'attribuer obligatoirement une licence au titulaire d'un brevet concernant une invention biotechnologique dès lors, d'une part, que l'exploitation de celle-ci n'est pas possible sans porter atteinte à un droit d'obtention végétal antérieur et, d'autre part, que cette invention constitue à l'égard de la variété végétale un progrès technique important et présente un « intérêt économique considérable ».
La demande d'une telle licence s'effectue devant le tribunal de grande instance et sa procédure d'octroi et de retrait est aménagée par l'article L. 623-22-2 précité.
Les dispositions du projet de loi
L'article 12 du projet de loi prévoit d'introduire -au moyen des nouveaux articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 du code de la propriété intellectuelle- un troisième cas de licence obligatoire qui serait attribuée pour des motifs d'intérêt public, eu égard notamment à l'insuffisance notoire de l'approvisionnement du marché agricole concerné par cette variété.
Il est exigé, d'une part, que le demandeur n'ait pu obtenir une licence dans un délai d'un an à dater de sa demande auprès du titulaire du certificat et, d'autre part, que ce demandeur soit en état d'exploiter la variété de manière sérieuse et effective.
Ces conditions s'imposent aussi à la demande de licence obligatoire présentée par le titulaire de certificats délivrés pour une variété essentiellement dérivée d'une variété protégée qui n'aurait pas pu obtenir du titulaire du certificat de la variété initiale les autorisations nécessaires à l'exploitation de sa propre variété, ou réciproquement 32 ( * ) .
Enfin, cet article prévoit d'appliquer aux licences ainsi délivrées un régime identique à celui des licences obligatoires introduites par la loi du 8 décembre 2004 précitée, fondé sur :
- la non-exclusivité de la licence (qui peut donc être attribuée à plusieurs demandeurs) ;
- l'intervention du tribunal pour déterminer et éventuellement modifier la durée de cette licence ainsi que son champ d'application et le montant des redevances auxquelles elle donne lieu ;
- la faculté pour le titulaire du COV de demander le retrait de la licence dès lors que son bénéficiaire ne satisferait plus aux conditions d'octroi ;
- l'interdiction de toute cession ou transmission des droits attachés à la licence 33 ( * ) .
Les propositions de votre commission
L'introduction de ce troisième cas de licence obligatoire permet de répondre à une réelle nécessité. Ce serait par exemple le cas si une espèce ne présentait qu'une seule variété exploitable, risquant alors d'aboutir à un monopole. Il convient de noter que ce système est prévu pour les variétés protégées au plan communautaire (par l'article 29 du règlement n° 2100/94 précité) et que, plus de dix ans après son introduction, il n'a pas posé de difficultés particulières.
Ces raisons conduisent votre commission à recommander l'adoption de cet article, sous réserve d'un amendement rédactionnel visant à modifier les références des articles de code afin de tirer les conséquences de la création des articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 par la loi du 8 décembre 2004 précitée.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié. |
Article 13 (Article L. 623-3 du code de la propriété
intellectuelle)
Déchéance du droit d'obtention
Cet article rend plus évolutifs les critères de déchéance du droit de l'obtenteur.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-23 du code de la propriété intellectuelle prévoit trois cas dans lesquels le titulaire d'un COV peut en être déchu.
Le premier cas concerne le titulaire qui n'est pas en mesure de présenter à l'administration les éléments de reproduction ou de multiplication végétative, tels que les graines, boutures, greffons, rhizomes ou tubercules, permettant de reproduire la variété protégée avec les caractères morphologiques ou physiologiques tels que définis dans le certificat d'obtention.
Le deuxième cas est celui du titulaire qui refuse de se soumettre aux inspections faites en vue de vérifier les mesures qu'il a prises pour la conservation de la variété.
Le troisième cas vise à sanctionner le non-paiement de la redevance annuelle pour service rendu, qui doit être versée au profit de l'Institut national de recherche agronomique (INRA).
Le même article précise aussi la procédure de déchéance : cette dernière est constatée par le comité des obtentions végétales et peut être remise en cause lorsqu'elle avait été motivée par un défaut de paiement de la redevance 34 ( * ) .
Enfin, la décision définitive constatant la déchéance doit être publiée.
Les dispositions du projet de loi
L'article 13 du projet de loi vise le premier cas de déchéance. Il se propose de remplacer l'énumération des types d'éléments de reproduction et de multiplications végétales que le titulaire doit présenter par une formule générale rappelant qu'il s'agit dans tous les cas d'éléments permettant de reproduire la variété protégée avec les caractéristiques morphologiques et physiologiques.
Les propositions de votre commission
Votre commission accueille favorablement l'amélioration proposée par l'article 13, et ce pour deux raisons :
- d'un point de vue rédactionnel, compte tenu de la prudence de principe vis-à-vis de la présence dans les textes normatifs d'énumérations non-exhaustives (les « notamment », les « par exemple » et les « tels que ») ;
- d'autre part, du fait que les évolutions scientifiques, techniques ou juridiques pourraient conduire à multiplier les cas où les éléments à produire par le titulaire ne se limiteraient pas strictement aux graines, boutures, greffons, rhizomes et tubercules.
En prévision de telles hypothèses, il apparaît donc nécessaire d'améliorer et d'alléger la rédaction actuelle du code.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article additionnel après l'article 13 [nouveau] (Article
L. 623-23-1 [nouveau] du code de la propriété
intellectuelle)
Nullité des certificats d'obtention
végétale
Cet article introduit en droit interne des dispositions relatives à la nullité du droit d'obtenteur.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-23 du code de la propriété intellectuelle détermine les conditions dans lesquelles le titulaire d'un certificat d'obtention végétale peut en être déchu.
En revanche, aucune disposition du code ne concerne la nullité du certificat . Celle-ci se distingue de la déchéance par deux caractéristiques essentielles : d'une part, elle vise le certificat lui-même et non son titulaire et, d'autre part, elle a un effet rétroactif, réputant le certificat sans valeur depuis sa délivrance.
En revanche, l'article 21 de la convention UPOV impose à chaque signataire de déclarer nul le droit d'obtenteur qu'il a octroyé s'il s'avère :
- que l'obtenteur ne remplissait pas les conditions nécessaires lors de l'octroi du droit d'obtenteur, y compris dans le cas spécifique où l'octroi du droit d'obtenteur a été essentiellement fondé sur les renseignements et documents fournis par l'obtenteur (protection provisoire) ;
- que le droit d'obtenteur avait été octroyé à une personne qui n'y avait pas droit (à moins qu'il ne soit transféré à la personne qui y a droit).
Les propositions de votre commission
Conformément à l'un des objectifs de ce projet de loi, qui consiste en une adaptation du droit français à la convention UPOV de 1991, il est nécessaire d'introduire les dispositions de son article 21 dans le code de la propriété intellectuelle.
Tel est l'objet de l'insertion du nouvel article L. 623-23-1 que votre commission vous propose de réaliser au moyen d'un article additionnel après l'article 13.
Cet article adopte une rédaction aussi proche que possible de celle de la convention UPOV afin d'éviter toute ambiguïté ou conflit entre les normes françaises et internationales.
Votre commission vous demande d'adopter ce nouvel article. |
Article 14 (Article L. 623-24 du code de la propriété
intellectuelle)
Droits des salariés à l'origine de COV
Cet article tend à transposer au domaine des COV des dispositions relatives aux droits des salariés en matière d'inventions.
Le droit en vigueur
L'article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle rend applicable aux COV les dispositions du droit des brevets concernant :
- la transmission des droits (L. 613-8 et L. 613-29 à L. 613-32 du même code) ;
- la copropriété (articles L. 613-29 à L. 613-32 dudit code).
Les dispositions du projet de loi
L'article 14 du projet de loi a pour objet de transposer également au domaine des COV les dispositions relatives aux droits des salariés lorsqu'ils sont inventeurs, c'est-à-dire lorsqu'ils sont à l'origine de la mise au point de la nouvelle variété.
Ainsi, il complète l' article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa prévoyant l'application aux COV des dispositions de l'article L. 611-1 du même code, qui concernent les droits des salariés inventeurs.
Afin de rendre compréhensible une telle transposition, il précise la correspondance entre les termes techniques des deux dispositifs :
- la notion d'« invention » doit être entendue au sens d'« obtention » ;
- celle de « brevet » comme « certificat d'obtention végétale » ;
- tandis que la « commission de conciliation » correspond à la commission instituée par décret pour le secteur spécifique des obtentions végétales.
Cette transposition du régime du droit des salariés inventeurs au domaine des COV permet de fixer les droits et obligations respectifs desdits salariés et de leurs employeurs :
- les obtentions mises au point par le salarié dans le cadre d'une mission inventive, d'études ou de recherche lui étant confiée appartiennent à son employeur, les conditions de sa rémunération pour cette découverte relevant des conventions ou accords collectifs, ou bien de son contrat de travail ;
- toutes les autres obtentions sont de la propriété du salarié, sauf dans les cas où leur mise au point présente un lien avec l'entreprise ou les fonctions qu'il y occupe. Dans de tels cas, l'employeur peut se faire attribuer la propriété ou la jouissance totale ou partielle des droits attachés au COV, en contrepartie d'une juste rémunération du salarié ;
- le salarié inventeur et l'employeur sont soumis à une obligation d'information réciproque, sans pour autant compromettre par leur divulgation l'exercice des droits attachés au COV.
Les propositions de votre commission
Cet article aligne très opportunément le régime des droits des salariés inventeurs dans le domaine des COV avec celui des brevets, permettant une égale protection desdits salariés.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 15 (Article L. L. 623-25 du code de la propriété
intellectuelle)
Régime de sanction de la contrefaçon
Cet article tend à préciser et adapter le régime de sanction de la contrefaçon.
Le droit en vigueur
La contrefaçon est actuellement définie par le premier alinéa de l'article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle comme une atteinte portée aux droits du titulaire d'un COV tels que prévus par l'article L. 623-4 du même code 35 ( * ) . Elle engage, en tant que telle, la responsabilité civile de son auteur.
Le deuxième alinéa du même article L. 623-25 reprend l'important principe dit du « privilège de l'obtenteur », permettant à tout opérateur d'utiliser une variété protégée pour mettre au point une nouvelle variété, sans autorisation ni versement de droits au titulaire du COV de la variété initiale. Il est expressément indiqué que de telles pratiques ne constituent pas une atteinte aux droits de ce titulaire.
Le troisième alinéa permet au titulaire d'une licence d'office 36 ( * ) et au bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation d'exercer une action en contrefaçon si, après une mise en demeure infructueuse, le titulaire du COV ne s'en est pas lui-même chargé à l'encontre de la personne utilisant illégalement sa variété protégée.
Les quatrième et cinquième alinéas précisent les personnes autorisées à intervenir à l'instance.
Les dispositions du projet de loi
Purement formel, le I de l'article 15 du projet de loi procède à la renumérotation d'une section du code de la propriété intellectuelle.
Le II tend à remplacer les trois premiers alinéas de l' article L. 623-25 du même code par deux alinéas apportant trois nouveautés par rapport au texte actuel :
- la prise en compte de la dérogation liée aux « semences de ferme ». L'article L. 623-4-1 du code de la propriété intellectuelle, tel que créé par l'article 5 du projet de loi, permet aux agriculteurs, sous certaines conditions, d'utiliser le produit de leur récolte pour ensemencer les suivantes. Une telle possibilité serait réduite à néant si l'on considérait qu'un tel acte constituait une atteinte aux droits du titulaire du COV et devait être sanctionné au titre de la contrefaçon. C'est pourquoi il est indiqué à la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 623-25 précité que le régime de la contrefaçon s'applique « sous réserve des dispositions de l'article L. 623-24-1 » ;
- l'assimilation de l'utilisation incorrecte ou abusive de la dénomination variétale à de la contrefaçon. Afin de prémunir le titulaire des droits du préjudice que constituerait pour lui un usage erroné de la dénomination de la variété sur laquelle il détient un COV, la seconde phrase de l'alinéa précédemment évoqué précise qu'une telle utilisation serait susceptible d'être sanctionnée au titre de la contrefaçon ;
- l'ouverture des actions en contrefaçon aux titulaires de licences obligatoires. L'article L. 623-22-1 du code de la propriété intellectuelle, tel que créé par l'article 12 du projet de loi, permet l'octroi d'une licence obligatoire dès lors, notamment, qu'elle est d'intérêt public. Le deuxième alinéa du texte proposé par le présent article du projet de loi pour l'article L. 623-25 précité étend au bénéficiaire d'une telle licence obligatoire la possibilité d'exercer une action en contrefaçon si le titulaire du COV, après mise en demeure, ne s'en est pas lui-même chargé.
Les dispositions prévues dans le deuxième alinéa de l'article L. 623-25 précité, relatives au « privilège de l'obtenteur », ne sont pas reprises dans la rédaction que propose de cet article le présent article du projet de loi dans la mesure où elles figurent déjà à l'article 5 dudit projet, qui les transfère à l'article L. 623-4-1 du code de la propriété intellectuelle.
Les propositions de votre commission
Cet article tend très utilement à moduler le périmètre de la contrefaçon :
- en le restreignant pour éviter de sanctionner, lorsqu'elle s'effectue dans les conditions légales, la pratique des semences de ferme ;
- en l'étendant afin d'y assimiler l'utilisation incorrecte ou abusive d'une dénomination variétale et de l'ouvrir aux titulaires de licences obligatoires créées par le projet de loi.
Votre rapporteur vous propose simplement d'adopter un amendement de coordination à cet article.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié. |
Article 16 (Articles L. 623-24-1 à L. 623-248 [nouveaux] du
code de la propriété intellectuelle)
Dérogation au
droit en faveur des agriculteurs
Cet article insère dans le code de la propriété intellectuelle une section définissant et encadrant la « dérogation au droit en faveur des agriculteurs », c'est-à-dire la pratique des semences de ferme.
Le droit en vigueur
La convention de 1991 laisse à chaque membre de l'UPOV la faculté d'autoriser, sous certaines conditions, une telle pratique. Le droit communautaire a choisi d'autoriser cette pratique, pour les seules espèces protégées par un COV communautaire, à la condition qu'il y ait un accord -individuel ou, à défaut, collectif- entre les agriculteurs bénéficiaires et les titulaires des droits.
En revanche, en l'état actuel du droit français, conformément aux articles L. 623-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle tels qu'ils résultent de la loi n° 70-489 du 11 juin 1970 relative aux obtentions végétales, cette pratique est interdite pour les variétés ne bénéficiant que d'un COV national, comme cela a été confirmé par la jurisprudence.
Bien qu'interdite en principe pour ce dernier type de variétés, la pratique des semences de ferme est devenue courante. Si elle a fait l'objet, en 2001, d'un accord interprofessionnel dans le secteur du blé tendre 37 ( * ) satisfaisant agriculteurs et obtenteurs, il n'en est pas de même dans les autres filières. Aussi est-il nécessaire que soit instauré un système autorisant les semences de ferme contre une équitable indemnisation, pour les COV communautaires comme pour les COV nationaux.
Les dispositions du projet de loi
A cette fin, l'article 16 du projet de loi tend à reproduire en droit français le dispositif déjà prévu pour les variétés bénéficiant d'une protection communautaire, en autorisant les agriculteurs à utiliser le produit de leur récolte pour ensemencer les suivantes, sous certaines conditions toutefois, dont celle de leur juste rémunération.
Il insère à cet effet dans le chapitre III du titre II du livre VI du code de la propriété intellectuelle une section 3 regroupant les articles L. 623-24-1 à L. 623-24-8 nouveaux.
Le contenu de ces articles s'inspire donc directement de la législation communautaire, et plus particulièrement de l'article 14 du règlement du Conseil (CE) n° 2100/94 précité et du règlement d'application s'y référant, le règlement de la Commission (CE) n° 1768/95 du 24 juillet 1995 précité.
L' article L. 623-24-1 détermine les principes généraux de la dérogation à l'article L. 623-4, qui fixe les droits du titulaire d'un COV sur sa variété.
Cette dérogation ne vaut que pour un certain nombre d'espèces, dont il est prévu qu'elles soient énumérées par décret en Conseil d'Etat. Elle consiste en un droit reconnu aux agriculteurs d'utiliser le produit de la récolte obtenue par la mise en culture d'une variété protégée à des fins de reproduction ou de multiplication, c'est-à-dire en vue d'obtenir de nouvelles semences, qui elles-mêmes seront à l'origine de nouvelles récoltes. L'autorisation de l'obtenteur n'est pas requise préalablement à l'utilisation de la semence. En revanche, celle-ci ne peut avoir lieu que sur l'exploitation de l'agriculteur y recourant : toute commercialisation des semences obtenues par l'agriculteur est donc interdite, de même que tout échange avec d'autres exploitants.
Le premier alinéa de l' article L. 623-24-2 fait obligation aux agriculteurs utilisant des semences de ferme de payer une indemnité aux titulaires des COV dont ils utilisent les variétés. Cette rémunération doit en effet permettre à l'obtenteur de continuer à financer son effort de recherche, et donc d'améliorer les ressources génétiques globales.
Le second alinéa de cet article prévoit une exception pour les « petits agriculteurs », ces derniers bénéficiant d'une exemption de l'obligation de payer. Sont visés les exploitants évoqués par le 3 de l'article 14 du règlement du Conseil (CE) n° 2100/94 précité, c'est-à-dire :
- pour les plantes fourragères, les agriculteurs ne cultivant pas d'espèces végétales sur une surface supérieure à celle qui serait nécessaire pour produire 92 tonnes de céréales ;
- pour les autres plantes, les agriculteurs répondant à des critères appropriés comparables.
L' article L. 623-24-3 prévoit, dans ses quatre alinéas, les modalités de fixation du montant des redevances dues par les agriculteurs pratiquant les semences de ferme.
Dans son premier alinéa , il confie à une instance paritaire le soin de fixer le montant de l'indemnité due aux titulaires de COV. Il est prévu que cette instance soit composée de représentants des obtenteurs et des agriculteurs désignés par les organisations syndicales les plus représentatives de chaque profession.
Aux termes du deuxième alinéa , l'instance est chargée de fixer le montant de l'indemnité par accord entre ses deux collèges.
Le troisième alinéa soumet cet accord à l'agrément de l'autorité administrative, ce qui le rend applicable, pour les espèces et variétés prises en compte, à l'ensemble des agriculteurs usant des semences de ferme et à tous les obtenteurs exploitant les variétés correspondantes.
Le quatrième alinéa proportionne le montant de l'indemnité à la surface ensemencée. Il fait obligation aux agriculteurs utilisant des semences de ferme de déclarer chaque année aux obtenteurs ou à leurs ayant-droits les surfaces ensemencées et les variétés utilisées.
Dans son premier aliné a, l' article L. 623-24-4 ouvre à l'instance paritaire la possibilité, en sus de sa compétence pour la fixation du montant de l'indemnité, de définir, pour une période déterminée, d'autres règles d'assiette, de calcul et de contrôle de ladite indemnité. Il est prévu que la composition de l'instance soit élargie aux représentants des organismes stockeurs, après avis du Conseil supérieur d'orientation de l'économie agricole et alimentaire, lorsque l'accord supporte leur intervention pour la perception des sommes dues.
Dans son deuxième alinéa , il prévoit la substitution des accords ainsi adoptés et agréés par l'autorité administrative à ceux résultant de l'application des dispositions de l'article L. 623-24-1 ayant le même objet, et leur application à l'ensemble des agriculteurs utilisant des semences de ferme et des obtenteurs représentés aux accords.
Dans son troisième alinéa , il permet aux signataires de l'accord de confier aux organismes stockeurs agissant pour le compte des obtenteurs la perception des sommes dues.
L' article L. 623-24-5 fixe la procédure à suivre en l'absence d'accord conclu par l'instance paritaire. Dans ce cas, une commission d'arbitrage fixe le montant de l'indemnité. Composée de deux représentants de chacun des collèges, elle est présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire ayant voix prépondérante.
L' article L. 623-24-6 ouvre la possibilité pour les agriculteurs de recourir aux services de trieurs à façon, afin de garantir la bonne qualité de leurs semences. Les opérations de triage doivent être réalisées de façon à ce que soit garantie l'identité des produits soumis au tirage et de ceux en résultant, du double point de vue de la pureté spécifique comme de la pureté variétale 38 ( * ) . A défaut, les semences sont assimilées à une contrefaçon et soumises en tant que telles au régime de l'article L. 623-25.
L' article L. 623-24-7 assimile à de la contrefaçon le non respect par les agriculteurs utilisant des semences de ferme de la réglementation s'y rapportant.
L' article L. 623-24-8 renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application de la nouvelle section ainsi créée dans le code de la propriété intellectuelle.
Les propositions de votre commission
Cet article est extrêmement important. En effet, il inscrit dans notre droit un système équilibré reconnaissant expressément aux agriculteurs un droit à pratiquer des semences de ferme, tout en prévoyant les modalités d'une juste indemnisation pour les obtenteurs propriétaires des droits sur les variétés utilisées.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Section 2
-
Dispositions diverses
Article 17 - Dispositions transitoires
Cet article accorde aux COV déjà délivrés le bénéfice des mesures du présent texte.
Le droit en vigueur
Les droits des titulaires de COV déjà délivrés sont, par définition, protégés dans les conditions fixées par le code de la propriété intellectuelle.
Les dispositions du projet de loi ne leur sont pas applicables, sauf mention expresse.
Les dispositions du projet de loi
Le 1° prévoit que l'allongement des durées de protection 39 ( * ) s'applique aux variétés d'ores et déjà protégées par un COV national.
Le 2° prévoit que seront applicables aux certificats d'obtention délivrés ou demandés avant l'entrée en vigueur du présent texte la nouvelle définition de la portée des COV, notamment s'agissant de la question des variétés essentiellement dérivées 40 ( * ) et de l'exception des sélectionneurs 41 ( * ) (article L. 623-4), ainsi que de la possibilité d'octroi de licences obligatoires d'intérêt public (articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2) 42 ( * ) . Cette application aux certificats demandés ou octroyés avant l'entrée en vigueur du présent texte vaut aussi pour les nouvelles dispositions des articles L. 623-13 (durées des protections) 43 ( * ) et L. 623-25 (sanctions pénales).
Le 3° de l'article 17 dispose que les dispositions des nouveaux articles L. 624-1 à L. 624-8 relatifs aux semences de ferme sont applicables aux seuls certificats octroyés (et non aux certificats demandés) avant leur entrée en vigueur.
Le 4° prévoit que les variétés essentiellement dérivées pour lesquelles l'obtenteur aura, avant l'entrée en vigueur de la loi, fait des préparatifs effectifs et sérieux ne seront pas soumises au 4° de l'article L. 623-4 issu du présent texte, qui étend aux variétés essentiellement dérivées les droits exclusifs de l'obtenteur de la variété initiale.
Les propositions de votre commission
Au 1° , votre commission est favorable aux dispositions relatives aux durées de protection dans la mesure où l'un des intérêts de l'allongement prévu est précisément son application aux variétés existantes, faute de quoi il serait nécessaire d'attendre vingt ans pour que le projet de loi produise ses premiers effets concrets en la matière. Or, tel n'est pas le but recherché.
Au 2° , l'application de la nouvelle loi aux COV déjà octroyés ou demandés apparaît elle aussi de nature à consolider ce système, d'autant plus que la protection des variétés existantes a pâti pendant quinze ans de la non-application de la convention UPOV de 1991.
Au 3° , le fait que les variétés dont les certificats ont été demandés et non encore protégés soient exclues des nouvelles dispositions en matière de semences de ferme se justifie par des considérations d'équité ainsi que par des arguments pratiques.
De ces deux points de vue, il pourrait s'avérer extrêmement difficile d'envisager le paiement de droits par les agriculteurs, s'agissant de semences qui n'étaient pas l'objet d'un COV avant que le système d'accord de rémunération ne soit mis en place dans le cadre de la loi. De même, ce sont des considérations d'équité qui conduisent à prévoir au 4° que ne soit pas rétroactivement privé de ses droits un obtenteur qui s'est investi dans la sélection d'une variété essentiellement dérivée, sans pouvoir anticiper que les droits sur celle-ci seraient désormais attribués aux titulaires de la variété initiale.
Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification. |
Article 18 - Application à l'outre-mer
Cet article prévoit une application relativement large du texte à l'outre-mer.
Le droit en vigueur
L'article 74 de la Constitution, tel qu'issu de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, abroge la notion de territoires d'outre-mer au profit de celle de collectivités d'outre-mer 44 ( * ) , pour chacune desquelles sont définies les conditions d'application des lois et règlements.
Les dispositions du projet de loi
L'article 18 du projet de loi prévoit que les dispositions de son titre premier s'appliquent dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.
Les propositions de votre commission
Le projet de loi ayant été déposé en 1996, il convient d'adapter sa rédaction aux évolutions institutionnelles intervenues depuis.
Outre la suppression rédactionnelle de l'expression « territoires d'outre-mer », cette adaptation vise aussi à exclure la Polynésie française du champ d'application de l'article. En effet, pour cette dernière, les règles de propriété intellectuelle relèvent de dispositions locales (ce qui n'est par exemple pas le cas de la Nouvelle-Calédonie).
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié . |
TITRE II - CONTRÔLE DES ACTIVITÉS DE PRODUCTION ET DE COMMERCIALISATION DES MATÉRIELS DE MULTIPLICATION DES VÉGÉTAUX, ET CONTRÔLE DES IMPORTATIONS
Composé du seul article 19, le titre II du projet de loi regroupe un certain nombre de dispositions générales concernant les règles de production et de commercialisation des semences, plants et plantes destinées à être replantés, ainsi que de contrôle des importations.
Article 19 (Articles 365 à 370 [nouveaux] du code rural)
Règles de production et de commercialisation des semences, plants et
plantes destinées à être replantés, ainsi que de
contrôle des importations
Cet article introduit dans le livre II du code rural un titre XII intitulé « Contrôle des activités de production, de commercialisation et d'importation des matériels de multiplication des végétaux, des plants et des plantes destinées à être replantées », composé des articles 365 à 370 nouveaux.
Le droit en vigueur
Les règles actuellement applicables aux matériels de multiplication des végétaux, plants et plantes destinées à être replantées sont aujourd'hui disséminées dans plusieurs textes normatifs.
En effet, depuis les lois fondatrices du groupement international des semences, graines et plants (GNIS), qui datent de 1941 et 1943, plusieurs branches de l'activité semences ou plants -plantes ornementales, matériels de reproduction des espèces forestières, plants de vigne, plants fruitiers certifiés- se sont séparées du « tronc commun » pour faire l'objet de décrets particuliers.
Si ces textes ont été pris en application de la loi du 1 er août 1905 sur la répression des fraudes en matière de services et de produits, certaines de leurs dispositions ne s'y rattachent pas explicitement, ce qu'a eu l'occasion de souligner le Conseil d'Etat.
Les dispositions du projet de loi
C'est afin d'asseoir le fondement législatif de tous ces textes sur des dispositions spécifiques et homogènes que l'article 19 du projet de loi propose de les regrouper, au sein du livre II du code rural, dans un nouveau titre douzième comportant les articles 365 à 369 nouveaux.
L' article 365 pose le principe et prévoit les modalités des contrôles.
Dans son premier alinéa , il soumet les matériels de multiplication des végétaux tels que les semences et boutures, ainsi que les plants et plantes destinées à être replantés 45 ( * ) , à des contrôles réalisés par les organismes agréés chargés de la certification des semences et plants, au cours des opérations de production, conditionnement, stockage, emballage ou d'étiquetage.
Le deuxième alinéa encadre la mise en oeuvre de ces contrôles. Il ouvre aux agents de ces organismes l'accès aux locaux, installations, lieux et véhicules à usage professionnel des entreprises ou personnes faisant l'objet de tels contrôles. En sont exclus les domiciles et parties domiciliaires. Le contrôle de ces emplacements n'est permis qu'entre huit et vingt heures, lorsque l'accès est autorisé au public ou pendant qu'une activité s'y déroule. Les agents sont habilités à recueillir, sur convocation ou sur place, toutes les informations et copies des documents utiles à leurs contrôles. Ils peuvent également prélever des échantillons de matériels en vue de les faire analyser pour vérifier leur conformité aux normes en vigueur. Les contrôles qu'ils opèrent donnent lieu à attestation par procès-verbal dont copie est remise à la personne en ayant fait l'objet.
Le troisième alinéa soumet les laboratoires procédant aux analyses demandées par les organismes de contrôle ou par les agriculteurs à l'agrément de l'autorité administrative.
Le quatrième alinéa met à la charge des producteurs ou entreprises concernés les frais engagés par les organismes de certification, et notamment le coût des analyses de laboratoire auxquelles ils recourent.
Dans son premier alinéa , l' article 366 exige de toute personne souhaitant effectuer des activités de production, protection, traitement ou commercialisation des matériels mentionnés à l'article 365 qu'elle en fasse préalablement la déclaration auprès de l'organisme de certification concerné.
Dans son deuxième alinéa , il prévoit la possibilité d'en dispenser par décret les personnes réalisant des activités de simple multiplication ou production de semences pour le compte de tiers, c'est-à-dire les « agriculteurs-multiplicateurs ».
L' article 367 introduit la possibilité, pour les personnes ou entreprises concernées, d'un contrôle interne de leur production se substituant à un contrôle externe par un organisme certificateur. Une telle faculté, qui apporterait une plus grande souplesse aux opérateurs intéressés, serait toutefois doublement encadrée : d'une part, elle devrait s'effectuer dans les conditions imposées par la réglementation communautaire ; d'autre part, elle serait soumise à un agrément administratif préalable.
L' article 368 précise les mesures susceptibles d'être ordonnées en cas de non-conformité des produits ou de non-respect des formalités prévues aux articles précédents. Dans ce cas, sans préjudice des sanctions qui pourraient être prises suite aux constations opérées par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), une série de mesures graduées peut être décidée :
- la mise en demeure (par les agents certificateurs) de se conformer à la réglementation ;
- la possibilité, pour ces agents, de proposer à l'autorité administrative l'interdiction de commercialisation des matériels en cause et le retrait des agréments accordés 46 ( * ) ;
- la saisine éventuelle, par ces agents, du tribunal de grande instance en cas de manquement particulièrement grave, pour que soit ordonnée la destruction desdits matériels.
L' article 369 interdit, dans son premier alinéa , l'importation en provenance de pays tiers à la Communauté européenne ou à l'Espace économique européen de matériels ne respectant pas les normes de qualité européennes. Il habilite les agents du service de la protection des végétaux à contrôler la conformité des matériels importés à ces normes.
Dans son deuxième alinéa , il donne compétence auxdits agents pour décider, lorsque leurs contrôles font apparaître la non-conformité des matériels :
- soit le refoulement desdits matériels ;
- soit la prescription, aux frais de l'importateur, des mesures appropriées.
Le troisième alinéa de cet article ouvre la possibilité à l'autorité administrative de confier, sous sa responsabilité, tout ou partie des opérations de contrôle des matériels importés aux organismes agréés chargés de la certification des semences et des plants.
L' article 370 renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application du titre créé au livre deuxième du code rural par le présent article du projet de loi.
Les propositions de votre commission
Cet article regroupe et harmonise très utilement l'ensemble des règles, aujourd'hui éparses, relatives à la production, à la commercialisation et à l'importation des semences, plants et plantes destinées à être replantés.
Toutefois, eu égard aux changements intervenus depuis la rédaction du projet de loi quant aux emplacements du code rural où il doit s'insérer, votre commission vous proposera un amendement réécrivant entièrement l'article afin de procéder aux mises à jour et aux coordinations formelles nécessaires.
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié. |
* 26 Le genre, l'espèce et la variété sont ainsi différents taxons de la classification botanique
* 27 Ensemble des gènes d'un individu dépendant des gènes hérités de ses parents.
* 28 Relatif à l'ensemble des caractères individuels correspondant à une réalisation du génotype, c'est-à-dire du patrimoine génétique d'un individu dépendant des gènes hérités de ses parents.
* 29 Dans la rédaction proposée par l'article 4 du projet de loi.
* 30 Placé auprès du ministre chargé de l'agriculture, il est présidé par un représentant de l'Etat et composé de personnalités des secteurs public et privé compétentes en matière de génétique, de botanique et d'agronomie.
* 31 Au printemps de cette année pour la variété de pommes de terre Monalisa ; à la fin de cette même année pour la variété Charlotte.
* 32 Pour le titulaire du COV de la variété initiale qui se serait vu refuser une licence d'exploitation d'une variété essentiellement dérivée.
* 33 Sauf dans le cas d'une transmission de l'entreprise ou de la partie de l'entreprise à laquelle ces droits sont rattachés.
* 34 Cette remise en cause est possible, sous certaines conditions, lorsque le titulaire peut justifier d'une excuse légitime présentée dans les six mois.
* 35 C'est-à-dire les droits à produire, introduire sur le territoire, vendre ou offrir en vente tout ou partie de la plante ou, dans certains cas, de ses éléments de reproduction ou multiplication.
* 36 Régime permettant à l'Etat d'obtenir, à tout moment, par décret en Conseil d'Etat ou arrêté interministériel, pour des motifs d'intérêt général, un droit d'exploitation sur une variété protégée et de le concéder à toute personne le lui demandant.
* 37 Cf. supra, exposé général.
* 38 Cela signifie que les produits résultant du triage doivent être de la même espèce et de la même variété que ceux soumis au triage.
* 39 Cf. supra, le commentaire de l'article 9.
* 40 Cf. supra, le commentaire de l'article 4.
* 41 Cf. supra, le commentaire de l'article 5.
* 42 Cf. supra, le commentaire de l'article 12.
* 43 L'apport de cette mention par rapport à celle déjà effectuée au 1° est qu'elle s'applique non seulement aux certificats octroyés, mais aussi à ceux qui n'en sont qu'au stade de la demande (demande enregistrée).
* 44 À l'exception de la Nouvelle-Calédonie, régie par des dispositions spécifiques aux termes de la loi constitutionnelle du 20 juillet 1998.
* 45 Ensuite appelés « matériels ».
* 46 Ceci n'est envisageable que lorsqu'il n'est pas donné suite à la mise en demeure.