Rapport n° 172 (2005-2006) de M. Jean BIZET , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 25 janvier 2006

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N° 172

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 janvier 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi relatif aux obtentions végétales et modifiant le code de la propriété intellectuelle et le code rural ,

Par M. Jean BIZET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Christian Gaudin, Jean Pépin, Bruno Sido, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Yves Coquelle, Roland Courteau, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Mme Michelle Demessine, M.  Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, André Ferrand, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Mme Adeline Gousseau, MM. Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Mmes Sandrine Hurel, Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial.

Voir le numéro :

Sénat : 145 (1996-1997)

Environnement.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Les sciences du vivant, et plus particulièrement l'amélioration des espèces végétales destinées à être cultivées, recouvrent aujourd'hui une importance fondamentale à de nombreux égards : conservation et enrichissement du patrimoine naturel ; régularité de la production et amélioration de la qualité et de la sécurité sanitaire ; respect de l'environnement ou encore consolidation d'un secteur industriel dont le poids économique ne cesse de croître.

La France a traditionnellement été un pays de référence en ce domaine : outre le fait qu'elle joue un rôle central sur les marchés mondiaux de semences végétales, elle a oeuvré à l'élaboration d'un système équilibré de protection des droits des inventeurs et des utilisateurs de ces produits. Se distinguant en de nombreux points du brevet, le certificat d'obtention végétale (COV) permet ainsi d'assurer la protection juridique de chaque variété végétale nouvelle et la rémunération de ses auteurs, tout en autorisant l'usage de ces ressources pour la création d'autres variétés (« exception du sélectionneur ») et l'utilisation par les exploitants agricoles d'une partie du produit de leur récolte 1 ( * ) pour ensemencer les suivantes (« exception de l'agriculteur »).

Le système du COV a été intégré dans plusieurs textes : la Convention instituant l'Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV) du 2 décembre 1961, révisée à plusieurs reprises, et la réglementation européenne telle qu'elle résulte du règlement communautaire (CE) n° 2100/94 du 17 juillet 1994 et de ses règlements d'application, s'appliquant directement en droit interne pour certaines espèces.

Alors qu'il a très souvent été à l'origine de ces textes, notre pays connaît aujourd'hui d'importants retards. Ainsi, la France n'a pas intégré les principales avancées relatives à la durée de protection offerte par les COV, à leur articulation avec le système des brevets et à la possibilité pour les agriculteurs de recourir à des semences de ferme. Outre leur impact économique, tant pour les fabricants de semences que pour les agriculteurs, ces carences affectent également la position de notre pays dans les négociations à l'échelle internationale pour le développement du système du COV.

Si des considérations politiques liées à la difficulté de satisfaire les différentes parties sur la question des semences de ferme ont pu légitimement inciter la France à ajourner l'adaptation de son droit aux avancées internationales ou communautaires, ces obstacles semblent aujourd'hui levés depuis qu'un accord interprofessionnel a été conclu dans le secteur du blé en 2001.

C'est dans cette optique que le présent projet de loi, en instance devant le Parlement depuis bientôt une dizaine d'années, vise à actualiser les règles juridiques applicables dans notre pays en matière de sélection végétale.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE CERTIFICAT D'OBTENTION VÉGÉTALE (COV), UN SYSTÈME ÉQUILIBRÉ INSTAURÉ IL Y A PLUS DE 40 ANS

A. LE COV PROTÈGE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE EN MATIÈRE VÉGÉTALE

1. La protection de variétés nouvelles

La recherche variétale se traduit par la création de semences donnant de nouvelles variétés végétales. Leur originalité par rapport aux variétés existantes est appréciée au regard de trois critères essentiels habituellement regroupés sous le sigle DHS :

- la distinction (différenciation par un ou plusieurs caractères de toutes les variétés déjà connues) ;

- l'homogénéité (production de plantes strictement semblables) ;

- la stabilité (permanence de l'homogénéité dans le temps).

Ainsi, il existe aujourd'hui 237 variétés de blé tendre, 227 de melons, 57 de radis et 179 de pommes de terre. En tout, ce sont près de 5.000 variétés qui sont mises à la disposition des agriculteurs et horticulteurs français pour l'ensemble des espèces, avec un rythme de création de près de 600 nouvelles variétés par an. L'essentiel de ces inventions est le fait des entreprises semencières -aussi appelées sélectionneurs ou obtenteurs- dont la part majeure de la rémunération passe par les certificats d'obtention végétale (COV).

2. Le COV, protection de la propriété intellectuelle

Titre de propriété, le COV confère à son détenteur un droit exclusif sur l'exploitation commerciale de la variété protégée, pendant une durée déterminée et sous le contrôle de l'administration. En fonction de ses perspectives de développement, l'obtenteur peut opter pour une protection française ou européenne, cette dernière étant gérée par l'Office communautaire des variétés végétales (OCVV), situé à Angers.

L'exclusivité du droit de l'obtenteur ne signifie pas l'exclusivité de la production des semences de la variété : en contrepartie du paiement d'une redevance, l'obtenteur peut délivrer des concessions ou des licences pour que des tiers puissent produire et commercialiser sa variété.

Ce système et les droits qui en découlent permettent aux obtenteurs de financer leurs recherches, qui nécessitent des investissements considérables. En effet, le poste « recherche et développement » représente 10 à 15 % du chiffre d'affaires des entreprises semencières et l'invention d'une nouvelle variété exige en moyenne 100 millions d'euros et 10 ans de préparation.

L'ensemble de ces éléments pourrait tendre à assimiler le COV à une forme de brevet. Toutefois, ces deux titres de propriété intellectuelle procèdent de philosophies différentes.

B. MAIS LE COV N'EST PAS UN BREVET2 ( * )

Conçu dès l'origine pour prendre en compte les spécificités d'une matière « vivante », le COV se distingue du brevet sur deux points essentiels.

1. La procédure de reconnaissance d'une variété nouvelle

En matière de brevet, la nouveauté de l'invention est établie à partir d'un dossier. En revanche, dans le système du COV, la nouveauté de l'espèce est reconnue suite à une expérimentation dans les champs. Cette exigence permet une meilleure appréhension des trois critères précédemment évoqués. Elle est toutefois lourde de conséquences, notamment pour les cultures nécessitant plusieurs années avant que la nouveauté de la variété puisse être établie (cinq ans environ pour les variétés de vignes, par exemple).

2. Les possibilités d'utilisation de la variété par des tiers

A la différence des brevets, qui interdisent toute libre utilisation du matériel protégé, même dans un cadre expérimental, le COV protège les variétés nouvellement créées tout en autorisant leur usage pour tout nouveau programme d'amélioration végétale, évitant ainsi la privatisation du patrimoine génétique ou de l'espèce. Ce système très particulier est appelé « exception du sélectionneur ».

De ce fait, si un sélectionneur utilise la semence d'une variété mexicaine de maïs afin de créer une nouvelle variété, seule cette dernière sera protégée par le COV. Ainsi, l'usage de la ressource originelle reste toujours possible pour ceux qui souhaitent l'utiliser. De plus, la nouvelle variété créée viendra enrichir la diversité génétique disponible pour d'autres sélectionneurs, en France, au Mexique et partout dans le monde.

C. LE DISPOSITIF INTERNATIONAL DES OBTENTIONS VÉGÉTALES A ÉTÉ MIS EN PLACE À L'INITIATIVE DE LA FRANCE

C'est à l'initiative de la France que fut signée le 2 décembre 1961 la convention de Paris sur la protection des obtentions végétales 3 ( * ) .

Cette convention n'institue pas un régime unique de COV international qui confèrerait directement à l'obtenteur des droits dans l'ensemble des pays signataires 4 ( * ) , mais elle impose un système de protection nationale des variétés dans chacun des Etats concernés.

Est aussi mise en place une organisation internationale -l'Union pour la protection des obtentions végétales (UPOV), située à Genève- qui assure la coordination entre les Etats et veille au respect des règles.

C'est aussi dans le cadre de l'UPOV qu'ont été négociées et signées les révisions de la Convention intervenues en 1972 et 1978, ainsi que la réforme substantielle de 1991.

II. UN DISPOSITIF AMÉLIORÉ DEPUIS 1991 ET PRECISÉ PAR LE DROIT COMMUNAUTAIRE

A. LA CONVENTION DE 1991

L'acte de révision signé le 19 mars 1991 complète le dispositif sur deux points principaux : la primauté du COV face au brevet au travers de la notion de « variété essentiellement dérivée » et le règlement de la question délicate des « semences de ferme ».

1. L'extension des droits des obtenteurs au regard de ceux des titulaires de brevets biotechnologiques

La convention UPOV du 19 mars 1991 actualise certaines des obligations des Etats membres afin, notamment, d'accroître le droit de l'obtenteur.

Dans son article 2, elle invite chaque Etat membre à octroyer et à protéger les droits des obtenteurs, expression qui se substitue à la rédaction de l'article 2 du protocole de révision du 23 octobre 1978, qui stipulait que chaque Etat pouvait reconnaître le droit de l'obtenteur « par un titre de protection particulier ou un brevet ». Au-delà de cette différence formelle, le texte réalise une avancée juridique substantielle : tandis que le brevet ne s'applique qu'à une technique de reproduction variétale ou de transformation génétique, le certificat d'obtention végétale, quant à lui, protège la variété elle-même. Sur la base de cette définition, la convention prévoit que le droit de l'obtenteur s'étend aux « variétés essentiellement dérivées de la variété protégée », ce qui peut inclure les variétés obtenues après modification génétique.

Ainsi, l'entreprise de génie génétique qui utilise une variété protégée par un COV comme support de son propre produit (par exemple, une résistance à un insecte ou un herbicide) ne pourra plus exploiter la variété modifiée sans l'autorisation du titulaire du COV lorsque cette variété est « essentiellement dérivée » de la variété initiale.

2. La création d'un cadre favorable à la résolution du problème des semences de ferme

Si l'exception prévue au profit des sélectionneurs a toujours été consubstantielle au COV, il n'en est, en revanche, pas de même pour celle applicable aux agriculteurs 5 ( * ) .

En fait, la question porte sur le point de savoir si un agriculteur peut utiliser librement des « semences de ferme », c'est-à-dire des graines tirées d'une récolte elle-même issue de semences protégées par un COV.

Avant 1991, les conventions n'indiquaient rien de spécifique à cet égard. La position prise par les législations nationales était liée à l'interprétation donnée par chaque Etat partie de l'article 5 de la convention de 1961 qui stipulait que le « droit accordé à l'obtenteur a pour effet de soumettre à son autorisation préalable la production à des fins d'écoulement commercial du matériel de reproduction de la variété ». Certains pays (comme la France) avaient considéré que « l'écoulement commercial » visé pouvait être la récolte obtenue à partir de semences de ferme, et que celles-ci étaient donc implicitement interdites par l'article 5, sauf pour un usage dit « amateur », c'est-à-dire ne donnant jamais lieu à la commercialisation d'un produit, même dans les phases ultérieures de la chaîne de production. Au contraire, d'autres Etats (comme le Royaume-Uni) avaient estimé que l'écoulement commercial visé était celui de la production du matériel de reproduction et que les semences de ferme n'étaient pas interdites dès lors qu'elles n'étaient pas vendues.

Pour la première fois, la convention UPOV de 1991 précise expressément l'état du droit sur ce point. D'une part, elle prévoit que la protection ne couvre plus seulement le matériel de reproduction ou de multiplication végétative, mais également tout acte de reproduction, ce qui inclut les semences de ferme.

D'autre part, son article 15 prévoit explicitement la possibilité d'exclure du droit d'obtenteur les semences produites et utilisées sur une même exploitation , ce principe s'appliquant « dans des limites raisonnables, et sous réserve des intérêts légitimes de l'obtenteur ».

3. Le renforcement du système du COV sur d'autres points majeurs

a) La convention étend la portée des certificats d'obtention

D'une part, la protection engendrée par le droit d'obtention est substantiellement renforcée par la convention : à l'origine limitée à 24 espèces, elle est étendue à la totalité des espèces ou genres végétaux.

D'autre part, l'obtenteur doit donner son autorisation pour sept catégories d'actes (contre trois auparavant) : à la production, la mise en vente et la commercialisation originelle, le nouveau texte ajoute le conditionnement et la détention aux fins de production et de commercialisation, ainsi que l'importation et l'exportation.

b) Les critères de base de définition des variétés sont précisés

Le critère de nouveauté est réputé acquis si la variété n'a pas été commercialisée depuis plus d'un an sur le territoire du pays où la demande est déposée, et depuis plus de quatre ans dans un autre pays.

Le critère de distinction fait l'objet, dans la nouvelle convention, d'une formulation plus claire : il y a variété distincte si celle-ci « se distingue nettement de toute autre variété dont l'existence, à la date du dépôt de la demande, est notoirement connue ».

Les deux critères d'homogénéité et de stabilité font référence à des notions biologiques.

Enfin, la variété pour laquelle un droit d'obtenteur est sollicité doit recevoir une dénomination constituant sa désignation générique.

B. LA CONTRIBUTION DU DROIT COMMUNAUTAIRE

Au-delà de l'appartenance de l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne à l'UPOV, le droit communautaire est intervenu 6 ( * ) ponctuellement, en particulier en matière de durée de protection des obtentions et d'autorisation des semences de ferme.

1. L'articulation du droit communautaire et des protections internationales et nationales

a) Protection communautaire et protection internationale

Le droit communautaire s'est inscrit d'entrée dans le système UPOV, l'Union européenne étant d'ailleurs devenue membre à part entière de l'organisation le 29 juillet 2005 7 ( * ) .

Mais alors que la convention s'étend (depuis 1991) à l'ensemble des espèces végétales, les règlements communautaires limitent leur protection à 21 d'entre elles 8 ( * ) (auxquelles s'ajoute une espèce fourragère protégée seulement au Portugal).

b) Protection communautaire et protection nationale

En matière de protection des obtentions végétales, le dispositif communautaire se superpose aux droits nationaux, sans s'y substituer . En effet, le choix est laissé aux obtenteurs entre un COV valable dans leur seul pays d'origine et un certificat communautaire offrant une protection dans l'ensemble de l'Union.

Si la protection communautaire est, par définition, plus large, il n'est en revanche pas possible de remplacer un COV national par un COV communautaire dans la mesure où le certificat communautaire ne dispose que pour l'avenir et ne peut bénéficier aux variétés déjà protégées au plan national 9 ( * ) . Elle s'applique donc aux variétés nouvelles ou aux variétés dont la protection nationale arrive à échéance.

2. Les apports du droit communautaire

a) En matière de durée de protection

Si la convention de 1991 fixe des durées minimales de validité du droit d'obtenteur (20 ans pour la quasi-totalité des espèces et 25 ans pour les vignes et les arbres), elle autorise les membres de l'UPOV à prévoir des durées de protection plus longues.

C'est dans ce cadre que l'Union européenne a étendu la durée des obtentions qu'elle protège à 25 ans pour l'ensemble des espèces, à l'exception des arbres, des vignes et des pommes de terre, qui bénéficient d'une protection de 30 ans.

b) Sur la question des semences de fermes

Dans le cadre très général prévu par la convention UPOV de 1991, le droit communautaire a aménagé un dispositif d'autorisation et d'encadrement de l'exception de l'agriculteur 10 ( * ) .

Il prévoit que soient conclus des accords, individuels ou collectifs, entre agriculteurs et obtenteurs sur la rémunération des droits de ces derniers. A défaut de tels accords, le montant de la redevance s'établit à 50 % du montant qui aurait été du pour l'achat des ces semence, sous réserve de certaines modulations.

Quant à la constatation de la quantité de semences utilisée par les agriculteurs, elle repose sur la déclaration de ces derniers et des prestataires d'opérations de triage à façon auxquels ils peuvent faire appel, ainsi que sur les informations que l'obtenteur peut demander aux services officiels.

Il convient de préciser que l'ensemble de ce régime de rémunération des obtenteurs ne s'applique pas aux « petits agriculteurs », au sens de la politique agricole commune.

III. L'ADAPTATION DU DISPOSITIF FRANÇAIS EST NÉCESSAIRE ET DÉSORMAIS POSSIBLE

A. LA FRANCE NE BÉNÉFICIE TOUJOURS PAS DES AVANCÉES DES ANNÉES 1990, CE QUI FRAGILISE SA POSITION

N'ayant pas ratifié la convention de 1991, notre pays connaît trois retards principaux : sur la durée des COV, sur l'articulation des COV avec les brevets et sur le principe des semences de ferme.

1. Les obtenteurs français sont fragilisés par les durées de validité des certificats

Si certaines variétés développées par les obtenteurs français bénéficient des durées de protection communautaires, tel n'est pas le cas en revanche pour celles qui ne sont protégées qu'en France 11 ( * ) . En effet, les certificats de protection valables dans notre pays sont délivrés pour des durées de 20 et 25 ans 12 ( * ) , soit cinq ans de moins que pour les protections communautaires. Cela équivaut à une perte de protection de 20 à 25 %.

A titre d'exemple, pour les obtenteurs des variétés de pommes de terre Charlotte et Mona Lisa dont la protection expire en 2006, le coût annuel de cette carence pourrait s'élever respectivement à 670.000 euros et 225.000 euros, du fait des pertes de redevance en résultant. Il en est de même du blé tendre Galaxie et de l'orge Flika qui perdraient leur protection le 6 mars de cette année.

Or, la protection de ces variétés est essentielle pour les 77 entreprises de sélection de notre pays. Elles en font en effet le premier producteur et exportateur européen « semences et plants ».

2. Par sa non reconnaissance de la notion de « variété essentiellement dérivée », la France affaiblit sa position

Cette notion, introduite dans la convention de 1991, marque une avancée dans l'articulation entre le système du brevet et celui du COV .

Or, quinze ans après l'adoption de ce texte, la France ne s'est toujours pas dotée de dispositions permettant d'éviter que l'introducteur d'un gène breveté dans une variété végétale puisse avoir un droit de propriété total sur la nouvelle variété obtenue. Pourtant, il y a urgence : les capacités d'invention biotechnologiques sont aujourd'hui sans commune mesure avec ce qu'elles étaient au début des années 1990 et elles bénéficient désormais d'un cadre juridique plus favorable depuis la transposition de la directive 98/44/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques 13 ( * ) .

Le retard dans la ratification de la convention est dommageable en soi, mais il affecte aussi la position de la France qui, étant depuis plus de quarante ans la principale inspiratrice du système du COV, est aujourd'hui appelée à jouer un rôle central dans la reconnaissance internationale dudit système par rapport à celui du brevet. En effet, l'augmentation du nombre des pays signataires de la convention UPOV ne signifie pas pour autant qu'il existe un consensus international sur l'intérêt des COV par rapport aux brevets. Depuis que l'OMC autorise la mise en place de systèmes de propriété intellectuelle en matière végétale 14 ( * ) , plusieurs pays en développement s'interrogent sur les mérites respectifs des deux dispositifs, dont l'un (le brevet) est promu principalement par les Etats-Unis 15 ( * ) et l'autre (le COV) par les européens.

L'une des questions centrales de ce débat réside dans la capacité du COV à s'articuler harmonieusement avec le système des brevets, déjà très répandu 16 ( * ) . Le fait que la France, pays emblématique de l'UPOV, n'applique toujours pas le mode d'articulation posé par la convention UPOV de 1991 affecte non seulement sa crédibilité au sein de l'union, mais fragilise également l'ensemble du système vis-à-vis des pays tiers.

3. Les agriculteurs français n'ont en principe pas droit aux semences de ferme

Les agriculteurs français ne bénéficient des possibilités qu'offre la convention UPOV de 1991 en matière de semences de ferme, ni même de celles instituées par le droit communautaire lorsqu'il s'agit de variété relevant du régime national de protection.

C'est d'ailleurs la contradiction entre le principe posé par la convention UPOV de 1991 et la situation française qui a retardé la mise en conformité du droit français. Fort heureusement, l'obstacle est aujourd'hui levé.

B. LES OBSTACLES À L'ÉVOLUTION DE NOTRE DROIT SONT DÉSORMAIS LEVÉS

1. Le conflit des semences fermières a gêné l'adaptation du droit français

La pratique des semences de ferme, ancienne et fort répandue, a longtemps été tolérée de fait bien que non autorisée par le droit français. Plutôt que de s'imposer par la contrainte juridique, les obtenteurs avaient plutôt basé leur stratégie sur l'amélioration de l'attractivité de leurs produits (développement des semences certifiées par l'Etat, dynamisation des catalogues), avec pour résultat un triplement du taux d'utilisation de semences certifiées en France (de 20 % à 60 %) entre la fin des années 1950 et les années 1980.

Toutefois, la tendance s'est inversée au début des années 1980 17 ( * ) sous l'effet de plusieurs facteurs, dont la recherche d'économies par les exploitants de grandes cultures du fait des premières limitations apportées aux aides agricoles européennes. Les semences de ferme sans redevance venaient ainsi concurrencer dans de plus grandes proportions les semences achetées aux obtenteurs.

Aussi ces derniers envisagèrent-ils de faire valoir leurs droits sur les semences de ferme, par la voie de la négociation. Mais les premières tentatives, en 1982, se traduisirent par un échec, dans la mesure, notamment, où les semences de ferme apparaissaient, aux yeux des agriculteurs, comme une pratique habituelle et légitime dont une majorité ignorait de bonne foi qu'elle était interdite. Eurent alors lieu les premiers procès mettant en cause et condamnant des agriculteurs, dont le plus connu est celui qui s'est déroulé devant la Cour d'appel de Nancy 18 ( * ) .

Face à ces tensions, les pouvoirs publics ont recherché un nouvel équilibre moins défavorable aux agriculteurs que l'interdiction absolue. Inversement, les Etats autorisant les semences de ferme (comme le Royaume-Uni) exprimaient leur souci d'un rééquilibrage du dispositif dans l'autre sens (plus favorable aux obtenteurs). Aussi la France prit-elle l'initiative de la révision de 1991, premier encadrement de la pratique des semences de ferme dans le cadre de l'UPOV.

Toutefois, la réussite de cette négociation internationale ne signifiait pas ipso facto la résolution du conflit entre agriculteurs et obtenteurs français. C'est même l'absence d'une telle résolution qui a gêné l'adoption par la France du projet de loi de ratification de la convention de 1991, qui avait pourtant été déposé au Parlement en 1996 19 ( * ) .

En fait, ce n'est que cinq ans plus tard que les perspectives sont devenues plus favorables.

2. Les voies d'une résolution sont ouvertes depuis l'accord de 2001

Le 26 juin 2001 a été conclu un accord interprofessionnel pour le financement de la recherche variétale par tous les utilisateurs de semences de blé tendre.

Il donne la possibilité aux agriculteurs français de ressemer sur leur propre exploitation une partie de leurs récoltes de variétés de blé tendre protégées, à condition de verser au titulaire du droit une rémunération équitable. La procédure mise en place permet aux obtenteurs de blé diffusant des variétés sur le territoire français de récupérer des « cotisations volontaires obligatoires » assises sur les récoltes de blé.

Cet accord, qui est en vigueur depuis quatre ans, fonctionne bien. Il a permis aux obtenteurs d'augmenter leurs ressources financières de 20 % sur l'espèce blé tendre 20 ( * ) . De plus, il est bien admis par les agriculteurs.

Certes, seule une filière dispose aujourd'hui d'un tel accord, les autres n'en étant pour le moment qu'au stade de la négociation. Toutefois il convient de rappeler que le blé tendre constituait un enjeu central du conflit, tant du fait de l'importance de cette culture 21 ( * ) que parce qu'il s'agit d'une plante simple à reproduire en semences de ferme 22 ( * ) .

Depuis cet accord, la nécessaire actualisation des règles juridiques applicables en France est devenue possible. Reste à déterminer sous quelle forme cette adaptation doit s'opérer.

C. AU-DELÀ DE LA RATIFICATION DE LA CONVENTION UPOV DE 1991, UNE LOI SPÉCIFIQUE EST NÉCESSAIRE

1. La nécessaire ratification de la convention UPOV de 1991 est en cours...

Quinze ans après en avoir été l'initiatrice, la France a engagé le processus de ratification de l'acte portant révision de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales du 19 mars 1991, qui devrait aboutir très rapidement.

Le Sénat a adopté le 17 janvier 2006 dernier le projet de loi autorisant la ratification de ce texte 23 ( * ) et il devrait être soumis à l'Assemblée nationale dans les semaines qui viennent.

2. ...mais elle doit être complétée par d'autres dispositions législatives

La seule ratification de la convention UPOV de 1991 ne suffira pas à réaliser l'entière adaptation du droit français.

D'une part, la mise en oeuvre des dispositions de la convention devra s'accompagner d'une actualisation du code de la propriété intellectuelle, comme ce fut déjà le cas pour les précédentes conventions 24 ( * ) .

D'autre part, ni la convention de 1991, ni même le droit communautaire, ne permettront d'allonger à 25 et 30 ans les variétés bénéficiant d'une protection nationale (cas de la pomme de terre Charlotte).

Enfin, la résolution de la question des semences de ferme telle qu'elle a débuté en France par la voie d'un accord interprofessionnel pourrait appeler l'adoption de dispositions législatives nationales.

C'est dans ce cadre que s'inscrit le présent projet de loi.

IV. LE PRÉSENT PROJET DE LOI EST TOUJOURS D'ACTUALITÉ

A. LE CONTENU DU PROJET DE LOI

1. L'adaptation du droit français à la convention UPOV de 1991

L'article 1er étend l'exclusion de la brevetabilité à l'ensemble des obtentions végétales.

L'article 2 précise ce que recouvre la notion de « variété » végétale .

L'article 3 définit les conditions auxquelles les variétés peuvent faire l'objet de certificats d'obtention végétale.

L'article 4 actualise les dispositions relatives aux droits des obtenteurs, c'est-à-dire aux droits de ces derniers sur les variétés qu'ils ont mises au point.

L'article 5 détermine le champ non couvert par les droits de l'obtenteur.

L'article 6 définit la notion de « nouveauté ».

L'article 7 tend à préciser le champ d'application personnel et matériel du régime de COV, notamment en déterminant qui peut déposer une demande de COV et sous quelles conditions.

L'article 8 autorise le comité chargé d'instruire la demande de COV à exploiter des résultats d'examen réalisés par les obtenteurs eux-mêmes ou leurs ayant droits.

L'article 11 actualise les références du projet de loi à la convention UPOV.

2. La consolidation du régime du certificat national d'obtention végétale

L'article 9 prolonge de cinq ans la durée de protection assurée par les COV.

L'article 14 transpose au domaine des COV des dispositions relatives aux droits des salariés en matière d'inventions.

L'article 15 précise et adapte le régime de sanction de la contrefaçon.

L'article 17 accorde aux COV déjà délivrés le bénéfice des mesures de la loi.

L'article 18 prévoit une application relativement large du texte à l'outre-mer.

Composé du seul article 19, le titre II du projet de loi regroupe un certain nombre de dispositions générales concernant les règles de production et de commercialisation des semences, plants et plantes destinées à être replantés, ainsi que de contrôle des importations.

3. La recherche d'un meilleur équilibre entre les droits de l'obtenteur et ceux des tiers

L'article 10 assure une meilleure information des tiers en améliorant la transparence des demandes de COV.

L'article 12 prévoit un nouveau cas de licence obligatoire, afin notamment d'éviter les risques de position dominante d'un obtenteur.

L'article 13, par une amélioration rédactionnelle, rend plus évolutifs les critères de déchéance du droit de l'obtenteur.

L'article 16 insère dans le code de la propriété intellectuelle une section définissant et encadrant la « dérogation au droit en faveur des agriculteurs », c'est-à-dire la possibilité d'utiliser des semences de ferme.

B. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que ce texte constitue une amélioration très substantielle de la situation actuelle .

Pour ces raisons, elle propose son adoption moyennant plusieurs amendements rédactionnels ou de référence, visant essentiellement à adapter le projet 1996 aux évolutions du droit national et international intervenues depuis 25 ( * ) .

D'autres amendements visent à clarifier la rédaction actuelle du code de la propriété intellectuelle, sans en affecter l'esprit. Enfin, après l'article 13, votre commission propose d'intégrer dans le droit français les dispositions relatives à la nullité du droit d'obtenteur. Celles-ci étaient absentes du projet de loi alors qu'elles figurent pourtant parmi les obligations imposées aux signataires de la convention UPOV de 1991.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER - DISPOSITIONS RELATIVES AUX CERTIFICATS D'OBTENTION VÉGÉTALE
Section 1 -

Dispositions modifiant et complétant le code de la propriété intellectuelle
Article 1er (Article L. 611-17 du code de la propriété intellectuelle)
Extension de l'exclusion du régime du brevet à l'ensemble des variétés végétales

Cet article étend l'exclusion de la brevetabilité à l'ensemble des obtentions végétales.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle interdit la brevetabilité des obtentions végétales d'un genre ou d'une espèce bénéficiant du régime de protection institué par les dispositions dudit code. Il en résulte que les obtentions végétales n'étant pas soumises au régime du COV peuvent potentiellement être brevetées.

Le deuxième alinéa de l'article 623-4 du même code prévoit que des décrets en Conseil d'Etat rendent progressivement applicables le régime du COV aux différentes espèces végétales en fonction de l'évolution des connaissances scientifiques et des moyens de contrôle.

Le décret n° 95-1407 du 28 décembre 1995, codifié à l'article R. 623-55 dudit code, édicte que « des certificats d'obtention végétale peuvent être délivrés (...) pour toute variété appartenant à une espèce du règne végétal ».

La rédaction combinée de ces différents articles peut prêter à confusion en laissant à penser que certaines variétés végétales restent, par nature, exclues du régime du COV, ce qui n'est pas le cas.

Les dispositions du projet de loi

L'article 1 er du projet de loi tend donc à clarifier ce point, en précisant que le système du brevet ne peut s'appliquer à aucune obtention végétale, toutes les variétés d'obtention végétale pouvant potentiellement faire l'objet d'un COV.

Il s'aligne ainsi sur le contenu des articles 3 de la convention UPOV de 1991 et du règlement (CE) n° 2100/94 précité.

Pour ce faire, il modifie l' article L. 611-17 du code la propriété intellectuelle, qui prévoit l'exclusion de la brevetabilité pour certains types d'inventions, afin d'ajouter l'ensemble des obtentions végétales à la liste des inventions faisant l'objet d'une telle interdiction.

Les propositions de votre commission

L'article 17 de la loi du 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique a inséré dans le code de la propriété intellectuelle un article L. 611-19 excluant déjà de la brevetabilité « les races animales ainsi que les procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux ou d'animaux » .

Par conséquent, l'article 1er du projet de loi n'a plus d'utilité. Aussi, votre rapporteur vous propose d'adopter un amendement tendant à supprimer cet article.

Votre commission vous demande d'adopter l'amendement de suppression de cet article qu'elle vous présente.

Article 2 (Article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle)
Définition de la « variété végétale »

Cet article introduit la définition de « variété végétale ».

Le droit en vigueur

Il existe actuellement deux sources juridiques de définition de la variété en droit français :

- d'une part, l'article R. 661-26 du code rural, résultant de la transposition de la directive 68/193 du 9 avril 1998 concernant la commercialisation des matériels de multiplication végétative de la vigne ;

- d'autre part, l'article 5-1 du règlement (CE) 2100/94 du 17 juillet 1994 précité.

Aucune disposition législative ne pose donc une définition générale de la variété dans notre droit national.

Les dispositions du projet de loi

L'article 2 du projet de loi tend à remédier à cette carence en modifiant l' article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle, qui définit en l'état les conditions auxquelles une variété peut être appelée « obtention végétale » et faire l'objet d'une protection juridique. Il s'inspire directement de la définition de la variété que donne l'article 1 er de la convention UPOV de 1991 et l'article 5 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.

Il prévoit ainsi qu'une variété correspond à un ensemble végétal d'un taxon botanique du rang le plus bas connu. Le taxon constitue une unité présentant des caractéristiques communes au sein d'un ensemble plus vaste 26 ( * ) .

Afin de constituer une variété à part entière, cet ensemble végétal du taxon le plus bas connu doit satisfaire à plusieurs critères :

- être défini par l'expression des caractères résultant d'un certain génotype 27 ( * ) ou d'une certaine combinaison de génotypes ;

- se distinguer de tout autre ensemble végétal par l'expression d'au moins un desdits caractères ;

- être considéré comme une entité du fait de son aptitude à être reproduit conforme.

Les propositions de votre commission

Cette définition de la variété, en tout point conforme aux prévisions du droit international et communautaire, est indispensable à la bonne mise en oeuvre du système UPOV.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 3 (Articles L. 623-2, L. 623-3 et L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle)
Conditions auxquelles des variétés peuvent faire l'objet de certificats d'obtention végétale

Cet article définit les conditions auxquelles les variétés peuvent faire l'objet de COV.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle, modifié par l'article 2 du projet de loi, définit les conditions auxquelles une variété est appelée « obtention végétale » et bénéficie de la protection du régime juridique y étant associé. Quatre éléments sont ainsi pris en compte : la nouveauté, l'originalité, l'homogénéité et la stabilité.

Les dispositions du projet de loi

Le I de l'article 3 du projet de loi tend à modifier l' article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle, qui prévoit en l'état la non brevetabilité des obtentions végétales d'un genre ou d'une espèce bénéficiant du régime de protection institué par les dispositions du même code, afin de reprendre et adapter ces quatre éléments :

- pour ce qui est de la nouveauté , il est précisé qu'elle peut résulter, soit d'une création, soit d'une découverte, comme c'est déjà prévu. Cependant, il est mentionné que cette découverte doit nécessairement s'accompagner d'un développement. Il s'agit ainsi d'interdire l'attribution d'un COV suite à la simple appropriation d'une ressource génétique naturelle qui serait restée inexploitée. La protection d'une telle ressource par un COV suppose en effet un réel travail de sélection conservatrice par un sélectionneur, et non la seule découverte d'une variété inconnue ;

- en ce qui concerne l' originalité , il est indiqué que la variété doit se distinguer de toute autre variété dont l'existence est notoirement connue à la date du dépôt de la demande. Sont donc supprimées, par rapport à l'actuelle législation, les dispositions indiquant qu'une telle distinction peut résulter d'un caractère important, précis et peu fluctuant, ou de plusieurs caractères dont la combinaison est de nature à qualifier la nouveauté ;

- s'agissant de l' homogénéité , il est précisé que la variété doit être suffisamment uniforme dans ses caractères pertinents. Il est ajouté, par rapport à l'état actuel du droit, que cette uniformité est appréciée sous réserve de la variation prévisible de la variété compte tenu de sa reproduction sexuée ou de sa multiplication végétative ;

- enfin, pour ce qui est de la stabilité , il est prévu que la variété doit être identique à sa définition initiale à la suite de ses reproductions ou multiplications successives ou, en cas de cycle particulier de reproduction ou de multiplication, à la fin de chaque cycle.

Ces quatre critères ne sont en réalité que la reprise -sous une forme simplifiée- de ceux prévus à la fois dans la convention UPOV de 1991 (aux articles 1 et 5 à 9) et dans le règlement (CE) n° 2100/94 précité (aux articles 5 à 10).

Le II de cet article procède à la coordination rendue nécessaire par le fait que la définition des conditions d'obtention d'un COV est transférée de l'article L. 623-1 à l'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle. Ainsi, il substitue la référence à l'article L. 623-2 à celle dudit article L. 623-1 dans les articles L. 623-3 et L. 623-12 du même code, où il est actuellement fait référence aux conditions à satisfaire pour obtenir un COV.

Les propositions de votre commission

Cette définition des conditions auxquelles les variétés peuvent faire l'objet de COV, conforme aux prescriptions du droit international comme à celles du droit communautaire, est entièrement cohérente.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 4 (Article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle)
Droit exclusif des obtenteurs

Cet article actualise les dispositions relatives aux droits des obtenteurs, c'est-à-dire aux droits qu'ont les sélectionneurs sur les variétés qu'ils ont mises au point.

Le droit en vigueur

Le premier alinéa de l'actuel article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit la possibilité pour toute obtention végétale de faire l'objet d'un titre appelé « certificat d'obtention végétale » conférant à son titulaire un certain nombre de droits exclusifs :

- produire l'obtention ;

- l'introduire sur le territoire ;

- la vendre ou l'offrir en vente entièrement ou partiellement.

Le second alinéa renvoie à des décrets la détermination progressive des espèces végétales auxquelles s'appliquent ces dispositions, ainsi que les éléments de la plante sur laquelle portent les droits de l'obtenteur.

Les dispositions du projet de loi

L'article 4 du projet de loi réécrit entièrement l' article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle, afin de mieux préciser les droits de l'obtenteur, leur portée et leurs limites, en prenant en compte la convention UPOV et la réglementation communautaire.

Le reprend et complète l'actuel premier alinéa de l'article L. 623-4 précité. Ainsi, les droits que confère le COV aux obtenteurs sont étendus :

- à la reproduction de l'obtention ;

- à son conditionnement aux fins de reproduction ou de multiplication ;

- à toute forme de vente ou commercialisation ;

- à l'exportation et à l'importation ;

- ainsi qu'à la détention à l'une des fins précitées.

Les 2°, 3° et 4° prévoient divers cas d'extension des droits du titulaire du COV.

L'actuel second alinéa relatif aux décrets fixant des listes d'espèces est supprimé. Il est remplacé par un qui synthétise les 2° et 3° de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 afin de prévoir, lorsque l'autorisation des obtenteurs n'a pas été requise pour reproduire leurs variétés, l'extension de leur droit exclusif :

- au produit de la récolte, y compris aux plantes entières et aux parties de plantes ;

- aux produits fabriqués directement à partir du produit de récolte de la variété protégée.

Le prévoit l'extension du droit exclusif du titulaire aux variétés proches ou essentiellement dérivées des siennes, en reprenant les distinctions opérées à cet égard par le 5 de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 et par le 5 de l'article 13 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.

Il est ainsi indiqué que ce droit s'étend :

- aux variétés ne se distinguant pas nettement de la variété protégée au sens de l'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle, tel que modifié par l'article 3 du projet de loi. On sait que le 1° de cet article exige d'une variété qu'elle réponde à un critère d'originalité pour bénéficier du statut d'obtention végétale protégée ;

- aux variétés dont la production nécessite l'emploi répété de la variété protégée.

Le introduit l'importante notion de « variété essentiellement dérivée », à laquelle il étend le droit exclusif du titulaire, reprenant ainsi le b du 5 de l'article 14 de la convention UPOV de 1991 et le 6 de l'article 13 du règlement (CE) n° 2100/94 précité.

Dans son premier alinéa , il pose le principe de l'extension du droit exclusif du titulaire d'un COV portant sur une variété initiale aux variétés essentiellement dérivées de cette variété initiale.

La notion de « variété essentiellement dérivée » a été introduite par le 5 de l'article 14 de la convention UPOV révisée en 1991. Elle y est définie comme une variété issue d'une variété préexistante qu'elle modifie sur un caractère à déterminisme génétique simple (couleur, résistance à une maladie ou à un insecte ...). Le patrimoine génétique de la variété initiale n'est donc que faiblement modifié, les caractères phénotypiques 28 ( * ) de la variété essentiellement dérivée y étant identiques, à l'exception du caractère modifié.

L'objet de cet article est de se prémunir contre les pratiques par lesquelles des sélectionneurs ne modifieraient que très marginalement une variété afin de s'en approprier le droit exclusif : dans ce cas, le sélectionneur ayant mis au point la variété d'origine conserve le bénéfice de la protection y étant liée, y compris sur la variété essentiellement dérivée.

Les quatre autres alinéas définissent la notion de « variété essentiellement dérivée d'une autre variété dite initiale ». En est constitutive la variété qui :

- est principalement dérivée de la variété initiale, ou d'une variété qui est elle-même principalement dérivée de la variété initiale ;

- se distingue nettement de la variété initiale au sens de l'article L. 623-2 ;

- est conforme à la variété initiale dans l'expression des caractères essentiels résultant du génotype ou de la combinaison de génotypes de la variété initiale, sauf en ce qui concerne les différences résultant de la dérivation.

Les propositions de votre commission

Cet article actualise très utilement les droits de l'obtenteur au regard de nos engagements internationaux et communautaires. Il les complète également en reprenant les trois cas d'extension y étant prévus, et plus particulièrement celui ayant trait aux « variétés essentiellement dérivées », qui permet de prévenir les appropriations indues d'un premier travail de sélection.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 5 (Article L. 623-4-1 [nouveau] du code la propriété intellectuelle)
Limites du droit exclusif de l'obtenteur

Cet article prévoit le champ non couvert par les droits de l'obtenteur.

Le droit en vigueur

Le droit positif ne contient pas actuellement de dispositions de ce type. Elles ont en effet été introduites par la convention UPOV de 1991 pour prendre en compte les progrès scientifiques et techniques en matière de procédés d'obtention et d'échanges commerciaux transcontinentaux.

Les dispositions du projet de loi

Reprenant donc les articles 15 et 16 de la convention UPOV de 1991, ainsi que les mêmes articles du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 5 du projet de loi précise les cas de dérogation et d'épuisement des droits de l'obtenteur. Il crée à cette fin un article L. 623-4-1 au sein du code de la propriété intellectuelle.

Dans son , il prévoit que le droit du titulaire ne s'étend pas à certains actes qui, dans le système du brevet, requerraient l'autorisation du détenteur des droits, voire l'acquittement de droits à son profit. Sont ainsi autorisés :

- les actes accomplis à titre privé à des fins non professionnelles. Il s'agit de permettre l'utilisation de la variété et la multiplication des semences à des fins non commerciales ou dans un cadre privé ou familial, comme c'est le cas par exemple des jardiniers amateurs ;

- les actes accomplis à titre expérimental, sans intention de mettre au point une nouvelle variété qui serait protégée et susceptible de faire l'objet d'une commercialisation ;

- les actes accomplis aux fins de la création d'une nouvelle variété et les actes visés au 1° de l'article L. 623-4 portant sur cette nouvelle variété, à moins que les dispositions des 3° et 4° de cet article soient applicables.

Est ici visé le très important principe dit d'« exception de l'obtenteur » permettant à tout sélectionneur d'utiliser librement -sans requérir d'autorisation ni verser de droits- une variété protégée et légalement accessible, comme ressource initiale afin de créer une nouvelle variété. Tout en maintenant la protection de la variété initiale, ce système propre au COV permet donc de favoriser la recherche et ainsi d'enrichir la diversité génétique disponible pour l'ensemble des sélectionneurs.

Ce principe s'étend à l'ensemble des actes (en particulier la production, reproduction, conditionnement ou la vente) que peut effectuer sur la variété nouvellement créée son sélectionneur. Les seules limites à ce principe sont naturellement les cas envisagés aux 3° et 4° de l'article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle 29 ( * ) dans lesquels la variété mise au point ne serait pas réellement nouvelle ou originale.

Dans le premier alinéa de son , il prévoit la non extension des droits du titulaire aux actes concernant sa variété, une variété essentiellement dérivée de cette dernière ou une variété qui ne s'en distingue pas nettement, dans les cas où du matériel de ladite variété -ou du matériel en étant dérivé- a été commercialisé par le titulaire ou avec son consentement.

Les trois alinéas suivants prévoient le maintien du droit du titulaire lorsque ces actes impliquent :

- soit une nouvelle reproduction ou multiplication de la variété en cause ;

- soit une exportation, vers un pays n'appliquant aucune protection de la propriété intellectuelle aux variétés appartenant à la même espèce végétale, de matériel de la variété permettant de la reproduire, sauf si le matériel exporté est destiné à la consommation humaine ou animale.

La notion de « matériel » est définie à l'article 16 de la convention UPOV de 1991. Y est ainsi assimilé le matériel de reproduction ou de multiplication végétative, le produit de la récolte -y compris tout ou partie des plantes- et tout produit en étant directement dérivé.

Les propositions de votre commission

L'insertion de ce nouvel article dans le code de la propriété intellectuelle est pleinement utile et nécessaire dans la mesure, notamment, où il soustrait aux droits du titulaire d'une variété les actes accomplis en vue de la mise au point d'une variété nouvelle par un autre sélectionneur, consolidant ainsi le principe de l'« exception de l'obtenteur ».

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 6 (Article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle)
Actes faisant perdre à une variété son caractère de « nouveauté »

Cet article précise les actes réalisés sur une variété préalablement à une demande de COV lui faisant perdre son caractère de « nouveauté ».

Le droit en vigueur

L'article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle détermine les cas et actes faisant perdre à une variété son caractère de « nouveauté », et donc la possibilité offerte à son obtenteur d'en protéger les droits s'y rapportant en obtenant un COV.

Ainsi, dans son premier alinéa, il répute non nouvelle l'obtention ayant reçu, avant la date du dépôt de la demande, une publicité suffisante pour être exploitée, ou se trouvant décrite soit dans un certificat français non encore publié, soit dans une demande de certificat déposée en France, ou bien à l'étranger et bénéficiant d'une priorité.

Dans ses deux alinéas suivants, il énumère les actes ne pouvant être interprétés comme une divulgation de nature à retirer à la variété son caractère de nouveauté.

Or, ces dispositions ne sont pas compatibles avec la définition de la nouveauté prévue par l'article 6 de la convention UPOV de 1991. En outre, elles introduisent des conditions supplémentaires proscrites par le 2 de l'article 5 de cette convention.

Les dispositions du projet de loi

Reprenant le 1 de l'article 6 de la convention UPOV de 1991 et le 1 de l'article 10 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 6 du projet de loi modifie l' article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle afin d'actualiser la notion de « nouveauté » en l'assortissant de délais différents selon les cas.

Dans le premier alinéa du du texte proposé pour cet article, il répute non nouvelle la variété lorsque du matériel de reproduction ou de multiplication végétative ou un produit de récolte a été vendu ou remis à des tiers, en vue de son exploitation, par l'obtenteur ou avec son accord depuis moins d'un an sur le territoire de l'Espace économique européen (EEE).

Son deuxième alinéa couvre les cas où cette vente ou remise à des tiers s'effectue en-dehors du territoire de l'EEE. Dans ce cas, et si elle s'est effectuée plus de quatre ans -six ans pour les arbres et la vigne- avant le dépôt de la demande de COV, elle n'est pas non plus réputée nouvelle. Les conditions de délai sont donc ici plus souples que dans le cas précédent.

Reprenant l'esprit de la réglementation actuelle tout en l'actualisant, le précise que ne peut être assimilé à une remise à des tiers au sens précédemment évoqué la remise de matériel de la variété :

- à un organisme officiel ou officiellement habilité ;

- aux fins d'expérimentation ou de présentation dans une exposition officiellement reconnue.

Dans ces deux cas en effet, on ne peut considérer que la remise à des tiers s'est faite en vue de l'exploitation commerciale de la variété. Afin de s'en assurer, il est d'ailleurs précisé au 2°, in fine , que l'obtenteur doit avoir expressément fait mention de l'interdiction d'une telle exploitation commerciale.

Les propositions de votre commission

Cet article actualise très utilement les conditions de non reconnaissance du caractère de nouveauté au regard de nos engagements internationaux et communautaires.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 7 (Article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle)
Conditions requises pour prétendre au bénéfice d'un COV

Cet article tend à préciser le champ d'application personnel et matériel du régime du COV, indiquant notamment qui peut déposer une demande de COV et sous quelles conditions.

Le droit en vigueur

En l'état, l'article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle comporte quatre alinéas prévoyant respectivement :

- la possibilité pour tous les nationaux, domiciliés ou résidents d'Etats partie à la Convention de Paris du 2 décembre 1961 d'obtenir un COV pour toute variété protégée par ladite convention ;

- le bénéfice d'une priorité, lors du dépôt en France d'une demande de COV, pour toute personne -ou son auteur- ayant déjà déposé une même demande dans l'un des Etats précédemment évoqués, dès lors qu'un délai inférieur à un an sépare les deux demandes ;

- la non opposabilité à la validité des COV dont la demande a été déposée dans les conditions précédentes de certains faits survenant dans le délai de priorité, tels que le dépôt d'une autre demande, la publication de l'objet de la demande ou l'exploitation de la variété visée ;

- le bénéfice pour tout étranger de la protection du droit national des obtentions végétales sous condition de réciprocité pour les Français de la part de l'Etat dont cet étranger ressortit.

Les dispositions du projet de loi

L'article 7 du projet de loi, qui reprend le contenu des articles 10 et 11 de la convention UPOV de 1991 et de l'article 12 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, modifie chacun des quatre alinéas de l' article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle, afin d'y intégrer certaines évolutions normatives :

- le premier alinéa étend le bénéfice de la loi à tout ressortissant, domicilié ou résident d'un Etat partie à la convention UPOV ou de la communauté européenne ;

- le deuxième alinéa reprend le texte actuel de l'article L. 623-6 précité ;

- le troisième alinéa précise que le délai de priorité d'une année, en cas de demandes successives de COV par la même personne auprès de deux Etats signataires de la Convention UPOV, est compté à partir de la date de dépôt de la première demande ;

- le quatrième alinéa étend le bénéfice de la protection sous condition de réciprocité à l'ensemble des espèces végétales, du fait de l'exhaustivité du champ d'application de la convention révisée.

Les propositions de votre commission

Cet article apporte d'utiles compléments et précisions quant à la procédure de demande de COV.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 8 (Article L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle)
Prise en compte par le comité chargé d'instruire la demande de COV des résultats d'examens réalisés par les obtenteurs eux-mêmes ou leurs ayant droits

Cet article permet l'exploitation, par le comité chargé d'instruire la demande de COV, des résultats d'examen réalisés par les obtenteurs eux-mêmes ou leurs ayant droits.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle soumet la délivrance d'un COV à un examen préalable réalisé par le Comité de la protection des obtentions végétales (CPOV) 30 ( * ) , certifiant que la variété faisant l'objet de la demande de protection est bien susceptible de bénéficier d'un tel régime protecteur.

Le deuxième alinéa de cet article dispose en l'état que le CPOV peut estimer suffisant, dans le cadre de cette instruction, l'examen préalable effectué par un organisme du même type dans un autre Etat partie à la convention de Paris du 2 décembre 1961. Dans la majorité des cas toutefois, les services nationaux ont validé cet examen après que ses modalités ont été officiellement contrôlées.

Les dispositions du projet de loi

Outre une modification formelle consistant à viser la convention précitée de telle façon qu'elle intègre ses révisions successives, l'article 8 du projet de loi complète le deuxième alinéa de l' article L. 623-12 précité pour permettre au COPV de se satisfaire de l'examen réalisé par l'obtenteur ou son ayant-cause. Il s'agit de reconnaître expressément dans notre droit national une liberté reconnue implicitement par l'article 12 de la convention UPOV de 1991 et accordée en pratique aujourd'hui par ses Etats membres.

Il peut en effet arriver que la mise en place d'une structure officielle d'examen technique, pour une demande nationale, représente un investissement trop important -en compétences, infrastructures, personnel ...- au regard des besoins générés par l'activité de sélection dans l'espèce considérée. Dans ce cas, il est prévu d'autoriser le comité à décider que l'examen est réalisé par l'obtenteur ou son ayant cause selon des modalités officiellement déterminées.

Les propositions de votre commission

Cet article simplifie et allège opportunément les procédures d'instruction des demandes de COV, tout en maintenant leur rigueur et leur efficacité.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 9 (Article L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle)
Allongement de la durée de protection des COV nationaux

Cet article tend à proroger de 5 ans la durée de protection assurée par les COV français.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-13 du code de la propriété intellectuelle fixe la durée minimale de protection du certificat à :

- vingt ans à partir de sa délivrance dans les cas normaux ;

- vingt-cinq ans si la constitution des éléments de production de l'espèce exige de longs délais.

Au-delà, la variété est considérée comme tombant dans le domaine public et peut donc faire l'objet d'une libre exploitation commerciale.

Les dispositions du projet de loi

Alignant notre législation sur l'article 19 du règlement (CE) n° 2100/94 précité, l'article 9 du projet de loi prolonge de cinq ans la durée de validité des COV, la portant ainsi à :

- vingt-cinq ans à partir de sa délivrance dans les cas normaux ;

- trente ans si la constitution des éléments de production de l'espèce exige de longs délais.

Bien que brève, cette disposition comporte des conséquences pratiques extrêmement importantes. En effet, la protection dont bénéficient plusieurs variétés nationales est en passe d'arriver à son terme 31 ( * ) . Actuellement sources de revenus pour les sélectionneurs nationaux en étant à l'origine, elles tomberaient, si aucune démarche législative n'était entreprise, dans le domaine public, ce qui remettrait en cause l'équilibre des marchés concernés et dégraderait de façon substantielle le revenu de certains opérateurs.

Le délai supplémentaire de cinq années de protection conféré à l'ensemble des variétés bénéficiant actuellement d'un COV devrait au contraire permettre aux sélectionneurs de bénéficier de plus de temps pour se préparer à cette échéance et en relever le défi.

Les propositions de votre commission

Cette mise en cohérence des délais de protection de nos COV par rapport au droit communautaire est à la fois urgente et indispensable, évitant en effet que des obtenteurs titulaire d'un COV français ne soient pénalisés par rapport à ceux d'autres pays européens.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 10 - (Article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle)
Publicité des actes relatifs aux certificats d'obtention végétale

Cet article vise à assurer une meilleure information des tiers en améliorant la transparence des demandes de COV.

Le droit en vigueur

L'actuel article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle dispose que les actes portant délivrance du certificat, transmission de propriété, ou une concession de droit d'exploitation ou de gage, relatifs à un certificat d'obtention, ne sont opposables aux tiers que s'ils ont été régulièrement publiés dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat.

Ces conditions de publication sont fixées par divers articles réglementaires du même code. Ainsi, par exemple, l'article R. 623-28 prévoit-il la publication des actes de délivrance des certificats au bulletin officiel du comité des obtentions végétales.

Les dispositions du projet de loi

L'article 10 tend à modifier l' article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle sur deux points :

- d'une part, il ajoute les demandes de certificats à la liste des actes devant être publiés ;

- d'autre part, il reformule cette même liste, indiquant que l'obligation de publicité porte sur « les actes portant délivrance du certificat ainsi que tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de certificat ou à un certificat ».

Les propositions de votre commission

L'ajout de la demande de COV parmi les actes soumis à l'obligation de publicité vise à rendre plus transparente l'existence de droits reconnus à l'obtenteur dès le stade de la demande sur la base de l'article L. 623-7 du code de la propriété intellectuelle.

Dans la mesure où ces droits du demandeur sont d'ores et déjà opposables aux tiers (qui pourraient être tentés d'exploiter la même variété ou demander eux aussi un certificat d'obtention de celle-ci), le fait de prévoir une publicité obligatoire à l'attention de ces derniers constitue une réelle amélioration.

S'agissant de l'autre modification introduite par l'article 9 visant à la présentation non exhaustive de la désignation des actes concernés, votre commission estime qu'il s'agit d'une proposition utile dans la mesure où cette énumération permettra de couvrir de nouvelles situations sans avoir à modifier la loi.

La désignation générique proposée étant suffisamment large, la référence précise (introduite par « notamment ») aux cas de concessions de droit d'exploitation ou de gage est superfétatoire et doit être supprimée par un amendement rédactionnel.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 11 - (Article L. 623-15 du code de la propriété intellectuelle)
Référence à la convention UPOV

Cet article actualise les références du projet de loi à la convention UPOV.

Le droit en vigueur

L'actuel article L. 623-15 du code la propriété intellectuelle fait référence à la convention de Paris du 2 décembre 1961.

Les dispositions du projet de loi

L'article 11 du projet de loi prévoit de remplacer la référence à la convention de 1961 par une mention plus générale, celle de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales.

Les propositions de votre commission

Il s'agit d'une disposition de portée rédactionnelle puisque la convention nouvellement visée est bien la convention de 1961, modifiée par les actes de révision dès lors qu'ils ont été ratifiés en droit français, comme c'est le cas des révisions de 1972 et 1978 (mais non celui de la révision de 1991).

Cette amélioration permet de supprimer toute ambiguïté. Votre commission estimant qu'elle pourrait être étendue aux autres articles du même code visant la convention du 2 décembre 1961, elle vous propose un amendement en ce sens.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 12 (Articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle)
Licences d'intérêt public

Cet article prévoit un nouveau cas de licence obligatoire, afin notamment d'éviter les risques de position dominante d'un obtenteur.

Le droit en vigueur

Le droit actuel prévoit deux cas d'obtention de licences obligatoires d'exploitation d'un COV, c'est-à-dire sans l'accord de son titulaire :

- prévu par les articles L. 623-20 et L. 623-21 du code de la propriété intellectuelle, le premier cas est fondé sur les besoins de la défense nationale. En justifiant d'un tel motif, l'Etat peut obtenir la licence d'exploitation d'un COV. Si cette obtention ne nécessite pas l'accord du titulaire, la redevance qui lui est versée est en revanche convenue à l'amiable (à défaut de quoi elle est fixée par l'autorité judiciaire) ;

- le second cas a été introduit par la loi n° 2004-1338 du 8 décembre 2004 relative à la protection des inventions biotechnologiques, qui a inséré dans le code de la propriété intellectuelle les articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2.

Ceux-ci prévoient la possibilité d'attribuer obligatoirement une licence au titulaire d'un brevet concernant une invention biotechnologique dès lors, d'une part, que l'exploitation de celle-ci n'est pas possible sans porter atteinte à un droit d'obtention végétal antérieur et, d'autre part, que cette invention constitue à l'égard de la variété végétale un progrès technique important et présente un « intérêt économique considérable ».

La demande d'une telle licence s'effectue devant le tribunal de grande instance et sa procédure d'octroi et de retrait est aménagée par l'article L. 623-22-2 précité.

Les dispositions du projet de loi

L'article 12 du projet de loi prévoit d'introduire -au moyen des nouveaux articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 du code de la propriété intellectuelle- un troisième cas de licence obligatoire qui serait attribuée pour des motifs d'intérêt public, eu égard notamment à l'insuffisance notoire de l'approvisionnement du marché agricole concerné par cette variété.

Il est exigé, d'une part, que le demandeur n'ait pu obtenir une licence dans un délai d'un an à dater de sa demande auprès du titulaire du certificat et, d'autre part, que ce demandeur soit en état d'exploiter la variété de manière sérieuse et effective.

Ces conditions s'imposent aussi à la demande de licence obligatoire présentée par le titulaire de certificats délivrés pour une variété essentiellement dérivée d'une variété protégée qui n'aurait pas pu obtenir du titulaire du certificat de la variété initiale les autorisations nécessaires à l'exploitation de sa propre variété, ou réciproquement 32 ( * ) .

Enfin, cet article prévoit d'appliquer aux licences ainsi délivrées un régime identique à celui des licences obligatoires introduites par la loi du 8 décembre 2004 précitée, fondé sur :

- la non-exclusivité de la licence (qui peut donc être attribuée à plusieurs demandeurs) ;

- l'intervention du tribunal pour déterminer et éventuellement modifier la durée de cette licence ainsi que son champ d'application et le montant des redevances auxquelles elle donne lieu ;

- la faculté pour le titulaire du COV de demander le retrait de la licence dès lors que son bénéficiaire ne satisferait plus aux conditions d'octroi ;

- l'interdiction de toute cession ou transmission des droits attachés à la licence 33 ( * ) .

Les propositions de votre commission

L'introduction de ce troisième cas de licence obligatoire permet de répondre à une réelle nécessité. Ce serait par exemple le cas si une espèce ne présentait qu'une seule variété exploitable, risquant alors d'aboutir à un monopole. Il convient de noter que ce système est prévu pour les variétés protégées au plan communautaire (par l'article 29 du règlement n° 2100/94 précité) et que, plus de dix ans après son introduction, il n'a pas posé de difficultés particulières.

Ces raisons conduisent votre commission à recommander l'adoption de cet article, sous réserve d'un amendement rédactionnel visant à modifier les références des articles de code afin de tirer les conséquences de la création des articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2 par la loi du 8 décembre 2004 précitée.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 13 (Article L. 623-3 du code de la propriété intellectuelle)
Déchéance du droit d'obtention

Cet article rend plus évolutifs les critères de déchéance du droit de l'obtenteur.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-23 du code de la propriété intellectuelle prévoit trois cas dans lesquels le titulaire d'un COV peut en être déchu.

Le premier cas concerne le titulaire qui n'est pas en mesure de présenter à l'administration les éléments de reproduction ou de multiplication végétative, tels que les graines, boutures, greffons, rhizomes ou tubercules, permettant de reproduire la variété protégée avec les caractères morphologiques ou physiologiques tels que définis dans le certificat d'obtention.

Le deuxième cas est celui du titulaire qui refuse de se soumettre aux inspections faites en vue de vérifier les mesures qu'il a prises pour la conservation de la variété.

Le troisième cas vise à sanctionner le non-paiement de la redevance annuelle pour service rendu, qui doit être versée au profit de l'Institut national de recherche agronomique (INRA).

Le même article précise aussi la procédure de déchéance : cette dernière est constatée par le comité des obtentions végétales et peut être remise en cause lorsqu'elle avait été motivée par un défaut de paiement de la redevance 34 ( * ) .

Enfin, la décision définitive constatant la déchéance doit être publiée.

Les dispositions du projet de loi

L'article 13 du projet de loi vise le premier cas de déchéance. Il se propose de remplacer l'énumération des types d'éléments de reproduction et de multiplications végétales que le titulaire doit présenter par une formule générale rappelant qu'il s'agit dans tous les cas d'éléments permettant de reproduire la variété protégée avec les caractéristiques morphologiques et physiologiques.

Les propositions de votre commission

Votre commission accueille favorablement l'amélioration proposée par l'article 13, et ce pour deux raisons :

- d'un point de vue rédactionnel, compte tenu de la prudence de principe vis-à-vis de la présence dans les textes normatifs d'énumérations non-exhaustives (les « notamment », les « par exemple » et les « tels que ») ;

- d'autre part, du fait que les évolutions scientifiques, techniques ou juridiques pourraient conduire à multiplier les cas où les éléments à produire par le titulaire ne se limiteraient pas strictement aux graines, boutures, greffons, rhizomes et tubercules.

En prévision de telles hypothèses, il apparaît donc nécessaire d'améliorer et d'alléger la rédaction actuelle du code.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 13 [nouveau] (Article L. 623-23-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle)
Nullité des certificats d'obtention végétale

Cet article introduit en droit interne des dispositions relatives à la nullité du droit d'obtenteur.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-23 du code de la propriété intellectuelle détermine les conditions dans lesquelles le titulaire d'un certificat d'obtention végétale peut en être déchu.

En revanche, aucune disposition du code ne concerne la nullité du certificat . Celle-ci se distingue de la déchéance par deux caractéristiques essentielles : d'une part, elle vise le certificat lui-même et non son titulaire et, d'autre part, elle a un effet rétroactif, réputant le certificat sans valeur depuis sa délivrance.

En revanche, l'article 21 de la convention UPOV impose à chaque signataire de déclarer nul le droit d'obtenteur qu'il a octroyé s'il s'avère :

- que l'obtenteur ne remplissait pas les conditions nécessaires lors de l'octroi du droit d'obtenteur, y compris dans le cas spécifique où l'octroi du droit d'obtenteur a été essentiellement fondé sur les renseignements et documents fournis par l'obtenteur (protection provisoire) ;

- que le droit d'obtenteur avait été octroyé à une personne qui n'y avait pas droit (à moins qu'il ne soit transféré à la personne qui y a droit).

Les propositions de votre commission

Conformément à l'un des objectifs de ce projet de loi, qui consiste en une adaptation du droit français à la convention UPOV de 1991, il est nécessaire d'introduire les dispositions de son article 21 dans le code de la propriété intellectuelle.

Tel est l'objet de l'insertion du nouvel article L. 623-23-1 que votre commission vous propose de réaliser au moyen d'un article additionnel après l'article 13.

Cet article adopte une rédaction aussi proche que possible de celle de la convention UPOV afin d'éviter toute ambiguïté ou conflit entre les normes françaises et internationales.

Votre commission vous demande d'adopter ce nouvel article.

Article 14 (Article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle)
Droits des salariés à l'origine de COV

Cet article tend à transposer au domaine des COV des dispositions relatives aux droits des salariés en matière d'inventions.

Le droit en vigueur

L'article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle rend applicable aux COV les dispositions du droit des brevets concernant :

- la transmission des droits (L. 613-8 et L. 613-29 à L. 613-32 du même code) ;

- la copropriété (articles L. 613-29 à L. 613-32 dudit code).

Les dispositions du projet de loi

L'article 14 du projet de loi a pour objet de transposer également au domaine des COV les dispositions relatives aux droits des salariés lorsqu'ils sont inventeurs, c'est-à-dire lorsqu'ils sont à l'origine de la mise au point de la nouvelle variété.

Ainsi, il complète l' article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa prévoyant l'application aux COV des dispositions de l'article L. 611-1 du même code, qui concernent les droits des salariés inventeurs.

Afin de rendre compréhensible une telle transposition, il précise la correspondance entre les termes techniques des deux dispositifs :

- la notion d'« invention » doit être entendue au sens d'« obtention » ;

- celle de « brevet » comme « certificat d'obtention végétale » ;

- tandis que la « commission de conciliation » correspond à la commission instituée par décret pour le secteur spécifique des obtentions végétales.

Cette transposition du régime du droit des salariés inventeurs au domaine des COV permet de fixer les droits et obligations respectifs desdits salariés et de leurs employeurs :

- les obtentions mises au point par le salarié dans le cadre d'une mission inventive, d'études ou de recherche lui étant confiée appartiennent à son employeur, les conditions de sa rémunération pour cette découverte relevant des conventions ou accords collectifs, ou bien de son contrat de travail ;

- toutes les autres obtentions sont de la propriété du salarié, sauf dans les cas où leur mise au point présente un lien avec l'entreprise ou les fonctions qu'il y occupe. Dans de tels cas, l'employeur peut se faire attribuer la propriété ou la jouissance totale ou partielle des droits attachés au COV, en contrepartie d'une juste rémunération du salarié ;

- le salarié inventeur et l'employeur sont soumis à une obligation d'information réciproque, sans pour autant compromettre par leur divulgation l'exercice des droits attachés au COV.

Les propositions de votre commission

Cet article aligne très opportunément le régime des droits des salariés inventeurs dans le domaine des COV avec celui des brevets, permettant une égale protection desdits salariés.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 15 (Article L. L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle)
Régime de sanction de la contrefaçon

Cet article tend à préciser et adapter le régime de sanction de la contrefaçon.

Le droit en vigueur

La contrefaçon est actuellement définie par le premier alinéa de l'article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle comme une atteinte portée aux droits du titulaire d'un COV tels que prévus par l'article L. 623-4 du même code 35 ( * ) . Elle engage, en tant que telle, la responsabilité civile de son auteur.

Le deuxième alinéa du même article L. 623-25 reprend l'important principe dit du « privilège de l'obtenteur », permettant à tout opérateur d'utiliser une variété protégée pour mettre au point une nouvelle variété, sans autorisation ni versement de droits au titulaire du COV de la variété initiale. Il est expressément indiqué que de telles pratiques ne constituent pas une atteinte aux droits de ce titulaire.

Le troisième alinéa permet au titulaire d'une licence d'office 36 ( * ) et au bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation d'exercer une action en contrefaçon si, après une mise en demeure infructueuse, le titulaire du COV ne s'en est pas lui-même chargé à l'encontre de la personne utilisant illégalement sa variété protégée.

Les quatrième et cinquième alinéas précisent les personnes autorisées à intervenir à l'instance.

Les dispositions du projet de loi

Purement formel, le I de l'article 15 du projet de loi procède à la renumérotation d'une section du code de la propriété intellectuelle.

Le II tend à remplacer les trois premiers alinéas de l' article L. 623-25 du même code par deux alinéas apportant trois nouveautés par rapport au texte actuel :

- la prise en compte de la dérogation liée aux « semences de ferme ». L'article L. 623-4-1 du code de la propriété intellectuelle, tel que créé par l'article 5 du projet de loi, permet aux agriculteurs, sous certaines conditions, d'utiliser le produit de leur récolte pour ensemencer les suivantes. Une telle possibilité serait réduite à néant si l'on considérait qu'un tel acte constituait une atteinte aux droits du titulaire du COV et devait être sanctionné au titre de la contrefaçon. C'est pourquoi il est indiqué à la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 623-25 précité que le régime de la contrefaçon s'applique « sous réserve des dispositions de l'article L. 623-24-1 » ;

- l'assimilation de l'utilisation incorrecte ou abusive de la dénomination variétale à de la contrefaçon. Afin de prémunir le titulaire des droits du préjudice que constituerait pour lui un usage erroné de la dénomination de la variété sur laquelle il détient un COV, la seconde phrase de l'alinéa précédemment évoqué précise qu'une telle utilisation serait susceptible d'être sanctionnée au titre de la contrefaçon ;

- l'ouverture des actions en contrefaçon aux titulaires de licences obligatoires. L'article L. 623-22-1 du code de la propriété intellectuelle, tel que créé par l'article 12 du projet de loi, permet l'octroi d'une licence obligatoire dès lors, notamment, qu'elle est d'intérêt public. Le deuxième alinéa du texte proposé par le présent article du projet de loi pour l'article L. 623-25 précité étend au bénéficiaire d'une telle licence obligatoire la possibilité d'exercer une action en contrefaçon si le titulaire du COV, après mise en demeure, ne s'en est pas lui-même chargé.

Les dispositions prévues dans le deuxième alinéa de l'article L. 623-25 précité, relatives au « privilège de l'obtenteur », ne sont pas reprises dans la rédaction que propose de cet article le présent article du projet de loi dans la mesure où elles figurent déjà à l'article 5 dudit projet, qui les transfère à l'article L. 623-4-1 du code de la propriété intellectuelle.

Les propositions de votre commission

Cet article tend très utilement à moduler le périmètre de la contrefaçon :

- en le restreignant pour éviter de sanctionner, lorsqu'elle s'effectue dans les conditions légales, la pratique des semences de ferme ;

- en l'étendant afin d'y assimiler l'utilisation incorrecte ou abusive d'une dénomination variétale et de l'ouvrir aux titulaires de licences obligatoires créées par le projet de loi.

Votre rapporteur vous propose simplement d'adopter un amendement de coordination à cet article.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 16 (Articles L. 623-24-1 à L. 623-248 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle)
Dérogation au droit en faveur des agriculteurs

Cet article insère dans le code de la propriété intellectuelle une section définissant et encadrant la « dérogation au droit en faveur des agriculteurs », c'est-à-dire la pratique des semences de ferme.

Le droit en vigueur

La convention de 1991 laisse à chaque membre de l'UPOV la faculté d'autoriser, sous certaines conditions, une telle pratique. Le droit communautaire a choisi d'autoriser cette pratique, pour les seules espèces protégées par un COV communautaire, à la condition qu'il y ait un accord -individuel ou, à défaut, collectif- entre les agriculteurs bénéficiaires et les titulaires des droits.

En revanche, en l'état actuel du droit français, conformément aux articles L. 623-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle tels qu'ils résultent de la loi n° 70-489 du 11 juin 1970 relative aux obtentions végétales, cette pratique est interdite pour les variétés ne bénéficiant que d'un COV national, comme cela a été confirmé par la jurisprudence.

Bien qu'interdite en principe pour ce dernier type de variétés, la pratique des semences de ferme est devenue courante. Si elle a fait l'objet, en 2001, d'un accord interprofessionnel dans le secteur du blé tendre 37 ( * ) satisfaisant agriculteurs et obtenteurs, il n'en est pas de même dans les autres filières. Aussi est-il nécessaire que soit instauré un système autorisant les semences de ferme contre une équitable indemnisation, pour les COV communautaires comme pour les COV nationaux.

Les dispositions du projet de loi

A cette fin, l'article 16 du projet de loi tend à reproduire en droit français le dispositif déjà prévu pour les variétés bénéficiant d'une protection communautaire, en autorisant les agriculteurs à utiliser le produit de leur récolte pour ensemencer les suivantes, sous certaines conditions toutefois, dont celle de leur juste rémunération.

Il insère à cet effet dans le chapitre III du titre II du livre VI du code de la propriété intellectuelle une section 3 regroupant les articles L. 623-24-1 à L. 623-24-8 nouveaux.

Le contenu de ces articles s'inspire donc directement de la législation communautaire, et plus particulièrement de l'article 14 du règlement du Conseil (CE) n° 2100/94 précité et du règlement d'application s'y référant, le règlement de la Commission (CE) n° 1768/95 du 24 juillet 1995 précité.

L' article L. 623-24-1 détermine les principes généraux de la dérogation à l'article L. 623-4, qui fixe les droits du titulaire d'un COV sur sa variété.

Cette dérogation ne vaut que pour un certain nombre d'espèces, dont il est prévu qu'elles soient énumérées par décret en Conseil d'Etat. Elle consiste en un droit reconnu aux agriculteurs d'utiliser le produit de la récolte obtenue par la mise en culture d'une variété protégée à des fins de reproduction ou de multiplication, c'est-à-dire en vue d'obtenir de nouvelles semences, qui elles-mêmes seront à l'origine de nouvelles récoltes. L'autorisation de l'obtenteur n'est pas requise préalablement à l'utilisation de la semence. En revanche, celle-ci ne peut avoir lieu que sur l'exploitation de l'agriculteur y recourant : toute commercialisation des semences obtenues par l'agriculteur est donc interdite, de même que tout échange avec d'autres exploitants.

Le premier alinéa de l' article L. 623-24-2 fait obligation aux agriculteurs utilisant des semences de ferme de payer une indemnité aux titulaires des COV dont ils utilisent les variétés. Cette rémunération doit en effet permettre à l'obtenteur de continuer à financer son effort de recherche, et donc d'améliorer les ressources génétiques globales.

Le second alinéa de cet article prévoit une exception pour les « petits agriculteurs », ces derniers bénéficiant d'une exemption de l'obligation de payer. Sont visés les exploitants évoqués par le 3 de l'article 14 du règlement du Conseil (CE) n° 2100/94 précité, c'est-à-dire :

- pour les plantes fourragères, les agriculteurs ne cultivant pas d'espèces végétales sur une surface supérieure à celle qui serait nécessaire pour produire 92 tonnes de céréales ;

- pour les autres plantes, les agriculteurs répondant à des critères appropriés comparables.

L' article L. 623-24-3 prévoit, dans ses quatre alinéas, les modalités de fixation du montant des redevances dues par les agriculteurs pratiquant les semences de ferme.

Dans son premier alinéa , il confie à une instance paritaire le soin de fixer le montant de l'indemnité due aux titulaires de COV. Il est prévu que cette instance soit composée de représentants des obtenteurs et des agriculteurs désignés par les organisations syndicales les plus représentatives de chaque profession.

Aux termes du deuxième alinéa , l'instance est chargée de fixer le montant de l'indemnité par accord entre ses deux collèges.

Le troisième alinéa soumet cet accord à l'agrément de l'autorité administrative, ce qui le rend applicable, pour les espèces et variétés prises en compte, à l'ensemble des agriculteurs usant des semences de ferme et à tous les obtenteurs exploitant les variétés correspondantes.

Le quatrième alinéa proportionne le montant de l'indemnité à la surface ensemencée. Il fait obligation aux agriculteurs utilisant des semences de ferme de déclarer chaque année aux obtenteurs ou à leurs ayant-droits les surfaces ensemencées et les variétés utilisées.

Dans son premier aliné a, l' article L. 623-24-4 ouvre à l'instance paritaire la possibilité, en sus de sa compétence pour la fixation du montant de l'indemnité, de définir, pour une période déterminée, d'autres règles d'assiette, de calcul et de contrôle de ladite indemnité. Il est prévu que la composition de l'instance soit élargie aux représentants des organismes stockeurs, après avis du Conseil supérieur d'orientation de l'économie agricole et alimentaire, lorsque l'accord supporte leur intervention pour la perception des sommes dues.

Dans son deuxième alinéa , il prévoit la substitution des accords ainsi adoptés et agréés par l'autorité administrative à ceux résultant de l'application des dispositions de l'article L. 623-24-1 ayant le même objet, et leur application à l'ensemble des agriculteurs utilisant des semences de ferme et des obtenteurs représentés aux accords.

Dans son troisième alinéa , il permet aux signataires de l'accord de confier aux organismes stockeurs agissant pour le compte des obtenteurs la perception des sommes dues.

L' article L. 623-24-5 fixe la procédure à suivre en l'absence d'accord conclu par l'instance paritaire. Dans ce cas, une commission d'arbitrage fixe le montant de l'indemnité. Composée de deux représentants de chacun des collèges, elle est présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire ayant voix prépondérante.

L' article L. 623-24-6 ouvre la possibilité pour les agriculteurs de recourir aux services de trieurs à façon, afin de garantir la bonne qualité de leurs semences. Les opérations de triage doivent être réalisées de façon à ce que soit garantie l'identité des produits soumis au tirage et de ceux en résultant, du double point de vue de la pureté spécifique comme de la pureté variétale 38 ( * ) . A défaut, les semences sont assimilées à une contrefaçon et soumises en tant que telles au régime de l'article L. 623-25.

L' article L. 623-24-7 assimile à de la contrefaçon le non respect par les agriculteurs utilisant des semences de ferme de la réglementation s'y rapportant.

L' article L. 623-24-8 renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application de la nouvelle section ainsi créée dans le code de la propriété intellectuelle.

Les propositions de votre commission

Cet article est extrêmement important. En effet, il inscrit dans notre droit un système équilibré reconnaissant expressément aux agriculteurs un droit à pratiquer des semences de ferme, tout en prévoyant les modalités d'une juste indemnisation pour les obtenteurs propriétaires des droits sur les variétés utilisées.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Section 2 -

Dispositions diverses

Article 17 - Dispositions transitoires

Cet article accorde aux COV déjà délivrés le bénéfice des mesures du présent texte.

Le droit en vigueur

Les droits des titulaires de COV déjà délivrés sont, par définition, protégés dans les conditions fixées par le code de la propriété intellectuelle.

Les dispositions du projet de loi ne leur sont pas applicables, sauf mention expresse.

Les dispositions du projet de loi

Le prévoit que l'allongement des durées de protection 39 ( * ) s'applique aux variétés d'ores et déjà protégées par un COV national.

Le prévoit que seront applicables aux certificats d'obtention délivrés ou demandés avant l'entrée en vigueur du présent texte la nouvelle définition de la portée des COV, notamment s'agissant de la question des variétés essentiellement dérivées 40 ( * ) et de l'exception des sélectionneurs 41 ( * ) (article L. 623-4), ainsi que de la possibilité d'octroi de licences obligatoires d'intérêt public (articles L. 623-22-1 et L. 623-22-2) 42 ( * ) . Cette application aux certificats demandés ou octroyés avant l'entrée en vigueur du présent texte vaut aussi pour les nouvelles dispositions des articles L. 623-13 (durées des protections) 43 ( * ) et L. 623-25 (sanctions pénales).

Le de l'article 17 dispose que les dispositions des nouveaux articles L. 624-1 à L. 624-8 relatifs aux semences de ferme sont applicables aux seuls certificats octroyés (et non aux certificats demandés) avant leur entrée en vigueur.

Le prévoit que les variétés essentiellement dérivées pour lesquelles l'obtenteur aura, avant l'entrée en vigueur de la loi, fait des préparatifs effectifs et sérieux ne seront pas soumises au 4° de l'article L. 623-4 issu du présent texte, qui étend aux variétés essentiellement dérivées les droits exclusifs de l'obtenteur de la variété initiale.

Les propositions de votre commission

Au , votre commission est favorable aux dispositions relatives aux durées de protection dans la mesure où l'un des intérêts de l'allongement prévu est précisément son application aux variétés existantes, faute de quoi il serait nécessaire d'attendre vingt ans pour que le projet de loi produise ses premiers effets concrets en la matière. Or, tel n'est pas le but recherché.

Au , l'application de la nouvelle loi aux COV déjà octroyés ou demandés apparaît elle aussi de nature à consolider ce système, d'autant plus que la protection des variétés existantes a pâti pendant quinze ans de la non-application de la convention UPOV de 1991.

Au , le fait que les variétés dont les certificats ont été demandés et non encore protégés soient exclues des nouvelles dispositions en matière de semences de ferme se justifie par des considérations d'équité ainsi que par des arguments pratiques.

De ces deux points de vue, il pourrait s'avérer extrêmement difficile d'envisager le paiement de droits par les agriculteurs, s'agissant de semences qui n'étaient pas l'objet d'un COV avant que le système d'accord de rémunération ne soit mis en place dans le cadre de la loi. De même, ce sont des considérations d'équité qui conduisent à prévoir au 4° que ne soit pas rétroactivement privé de ses droits un obtenteur qui s'est investi dans la sélection d'une variété essentiellement dérivée, sans pouvoir anticiper que les droits sur celle-ci seraient désormais attribués aux titulaires de la variété initiale.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 18 - Application à l'outre-mer

Cet article prévoit une application relativement large du texte à l'outre-mer.

Le droit en vigueur

L'article 74 de la Constitution, tel qu'issu de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, abroge la notion de territoires d'outre-mer au profit de celle de collectivités d'outre-mer 44 ( * ) , pour chacune desquelles sont définies les conditions d'application des lois et règlements.

Les dispositions du projet de loi

L'article 18 du projet de loi prévoit que les dispositions de son titre premier s'appliquent dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

Les propositions de votre commission

Le projet de loi ayant été déposé en 1996, il convient d'adapter sa rédaction aux évolutions institutionnelles intervenues depuis.

Outre la suppression rédactionnelle de l'expression « territoires d'outre-mer », cette adaptation vise aussi à exclure la Polynésie française du champ d'application de l'article. En effet, pour cette dernière, les règles de propriété intellectuelle relèvent de dispositions locales (ce qui n'est par exemple pas le cas de la Nouvelle-Calédonie).

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié .

TITRE II - CONTRÔLE DES ACTIVITÉS DE PRODUCTION ET DE COMMERCIALISATION DES MATÉRIELS DE MULTIPLICATION DES VÉGÉTAUX, ET CONTRÔLE DES IMPORTATIONS

Composé du seul article 19, le titre II du projet de loi regroupe un certain nombre de dispositions générales concernant les règles de production et de commercialisation des semences, plants et plantes destinées à être replantés, ainsi que de contrôle des importations.

Article 19 (Articles 365 à 370 [nouveaux] du code rural)
Règles de production et de commercialisation des semences, plants et plantes destinées à être replantés, ainsi que de contrôle des importations

Cet article introduit dans le livre II du code rural un titre XII intitulé « Contrôle des activités de production, de commercialisation et d'importation des matériels de multiplication des végétaux, des plants et des plantes destinées à être replantées », composé des articles 365 à 370 nouveaux.

Le droit en vigueur

Les règles actuellement applicables aux matériels de multiplication des végétaux, plants et plantes destinées à être replantées sont aujourd'hui disséminées dans plusieurs textes normatifs.

En effet, depuis les lois fondatrices du groupement international des semences, graines et plants (GNIS), qui datent de 1941 et 1943, plusieurs branches de l'activité semences ou plants -plantes ornementales, matériels de reproduction des espèces forestières, plants de vigne, plants fruitiers certifiés- se sont séparées du « tronc commun » pour faire l'objet de décrets particuliers.

Si ces textes ont été pris en application de la loi du 1 er août 1905 sur la répression des fraudes en matière de services et de produits, certaines de leurs dispositions ne s'y rattachent pas explicitement, ce qu'a eu l'occasion de souligner le Conseil d'Etat.

Les dispositions du projet de loi

C'est afin d'asseoir le fondement législatif de tous ces textes sur des dispositions spécifiques et homogènes que l'article 19 du projet de loi propose de les regrouper, au sein du livre II du code rural, dans un nouveau titre douzième comportant les articles 365 à 369 nouveaux.

L' article 365 pose le principe et prévoit les modalités des contrôles.

Dans son premier alinéa , il soumet les matériels de multiplication des végétaux tels que les semences et boutures, ainsi que les plants et plantes destinées à être replantés 45 ( * ) , à des contrôles réalisés par les organismes agréés chargés de la certification des semences et plants, au cours des opérations de production, conditionnement, stockage, emballage ou d'étiquetage.

Le deuxième alinéa encadre la mise en oeuvre de ces contrôles. Il ouvre aux agents de ces organismes l'accès aux locaux, installations, lieux et véhicules à usage professionnel des entreprises ou personnes faisant l'objet de tels contrôles. En sont exclus les domiciles et parties domiciliaires. Le contrôle de ces emplacements n'est permis qu'entre huit et vingt heures, lorsque l'accès est autorisé au public ou pendant qu'une activité s'y déroule. Les agents sont habilités à recueillir, sur convocation ou sur place, toutes les informations et copies des documents utiles à leurs contrôles. Ils peuvent également prélever des échantillons de matériels en vue de les faire analyser pour vérifier leur conformité aux normes en vigueur. Les contrôles qu'ils opèrent donnent lieu à attestation par procès-verbal dont copie est remise à la personne en ayant fait l'objet.

Le troisième alinéa soumet les laboratoires procédant aux analyses demandées par les organismes de contrôle ou par les agriculteurs à l'agrément de l'autorité administrative.

Le quatrième alinéa met à la charge des producteurs ou entreprises concernés les frais engagés par les organismes de certification, et notamment le coût des analyses de laboratoire auxquelles ils recourent.

Dans son premier alinéa , l' article 366 exige de toute personne souhaitant effectuer des activités de production, protection, traitement ou commercialisation des matériels mentionnés à l'article 365 qu'elle en fasse préalablement la déclaration auprès de l'organisme de certification concerné.

Dans son deuxième alinéa , il prévoit la possibilité d'en dispenser par décret les personnes réalisant des activités de simple multiplication ou production de semences pour le compte de tiers, c'est-à-dire les « agriculteurs-multiplicateurs ».

L' article 367 introduit la possibilité, pour les personnes ou entreprises concernées, d'un contrôle interne de leur production se substituant à un contrôle externe par un organisme certificateur. Une telle faculté, qui apporterait une plus grande souplesse aux opérateurs intéressés, serait toutefois doublement encadrée : d'une part, elle devrait s'effectuer dans les conditions imposées par la réglementation communautaire ; d'autre part, elle serait soumise à un agrément administratif préalable.

L' article 368 précise les mesures susceptibles d'être ordonnées en cas de non-conformité des produits ou de non-respect des formalités prévues aux articles précédents. Dans ce cas, sans préjudice des sanctions qui pourraient être prises suite aux constations opérées par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), une série de mesures graduées peut être décidée :

- la mise en demeure (par les agents certificateurs) de se conformer à la réglementation ;

- la possibilité, pour ces agents, de proposer à l'autorité administrative l'interdiction de commercialisation des matériels en cause et le retrait des agréments accordés 46 ( * ) ;

- la saisine éventuelle, par ces agents, du tribunal de grande instance en cas de manquement particulièrement grave, pour que soit ordonnée la destruction desdits matériels.

L' article 369 interdit, dans son premier alinéa , l'importation en provenance de pays tiers à la Communauté européenne ou à l'Espace économique européen de matériels ne respectant pas les normes de qualité européennes. Il habilite les agents du service de la protection des végétaux à contrôler la conformité des matériels importés à ces normes.

Dans son deuxième alinéa , il donne compétence auxdits agents pour décider, lorsque leurs contrôles font apparaître la non-conformité des matériels :

- soit le refoulement desdits matériels ;

- soit la prescription, aux frais de l'importateur, des mesures appropriées.

Le troisième alinéa de cet article ouvre la possibilité à l'autorité administrative de confier, sous sa responsabilité, tout ou partie des opérations de contrôle des matériels importés aux organismes agréés chargés de la certification des semences et des plants.

L' article 370 renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application du titre créé au livre deuxième du code rural par le présent article du projet de loi.

Les propositions de votre commission

Cet article regroupe et harmonise très utilement l'ensemble des règles, aujourd'hui éparses, relatives à la production, à la commercialisation et à l'importation des semences, plants et plantes destinées à être replantés.

Toutefois, eu égard aux changements intervenus depuis la rédaction du projet de loi quant aux emplacements du code rural où il doit s'insérer, votre commission vous proposera un amendement réécrivant entièrement l'article afin de procéder aux mises à jour et aux coordinations formelles nécessaires.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

ANNEXE I - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

- MM. Olivier CLÉMENT et Yves MANGUY, en charge du dossier « semences » à la Confédération paysanne ;

- M. Jean-Pierre DELAGE, président de la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF) ; M. Michel GERAY, porte-parole ; et MM. Jean-Claude LAJOUS et Philippe RICHÉ, délégués du Mouvement de défense des exploitants familiaux (MODEF) ;

- M. Didier MARTEAU, vice-président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) ; Mme Nadine NORMAND, chargée des relations avec le Parlement ; et M. Guillaume RAGONNAUD, chargé d'études ;

- M. François LUCAS, président de la Coordination rurale ; et M. Nicolas JACQUET, vice-président ;

- M. Roland PETIT-PIGEARD, directeur général de la Société coopérative d'intérêt collectif agricole des sélectionneurs et obtenteurs de variétés végétales (SICASOV) ; et M. Eric BARGY, président directeur général de la société GERMICOPA ;

- M. Philippe GRACIEN, directeur général du Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS) ; et M. François BURGAUD, directeur des relations extérieures ;

- M. Claude FAUCHER, conseiller technique au cabinet de M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation et de la pêche et de la ruralité ; Mme Anne LIEURE, chargée des relations avec le Parlement ; Mme Marie-Françoise GUILHEMSANS, directrice, chef du service des affaires juridiques ; M. Bernard MATHON, chef du bureau de la sélection végétale et des semences à la direction des politiques économique et internationale ; et Mme Guillemine BABILLON, chargée de mission.

ANNEXE II - LA DISTINCTION ENTRE LE COV ET LE BREVET

CERTIFICAT D'OBTENTION VÉGÉTALE

BREVET

Libre utilisation de la variété protégée pour en créer une autre

Nécessité d'obtenir l'accord du détenteur du brevet et, dans l'affirmative, d'acquitter des droits pour utiliser la variété à des fins de création variétale

Possibilité d'utiliser librement la variété à titre expérimental, sans production

Autorisation nécessaire pour utiliser la variété à titre expérimental, même sans commercialisation ultérieure

Possibilité pour l'agriculteur de réutiliser -sous certaines conditions- le produit de sa récolte pour ensemencer la suivante (« semences de ferme »)

Pas de principe équivalent

Possibilité d'utiliser librement la variété et de multiplier les semences à des fin non commerciales, dans un cadre privé (jardiniers amateurs) ou familial

Nécessité d'obtenir l'accord du détenteur du brevet et, dans l'affirmative, d'acquitter des droits pour utiliser la variété

* 1 Ces semences réutilisées sont qualifiées de « semences de ferme ».

* 2 Cf. infra, annexe 2.

* 3 Même si notre pays ne l'a mise en oeuvre qu'en 1972, sur la base de la loi n° 70-489 du 11 juin 1970 relative à la protection des obtentions végétales.

* 4 Au 31 décembre 2005, le nombre de ces signataires était de 60, auxquels 16 pays africains devraient s'ajouter en 2006.

* 5 Souvent dénommée « privilège de l'agriculteur ».

* 6 A partir du règlement (CE) n° 2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales.

* 7 Cette adhésion permet aux services de la Commission européenne de participer aux négociations au sein de l'UPOV, aux côtés des représentants des Etats membres.

* 8 Par exemple, le maïs est exclu du périmètre d'application du droit communautaire.

* 9 Plus précisément aux variétés protégées depuis plus d'un an dans au moins deux pays de l'Union européenne.

* 10 C'est l'objet de l'intégralité du règlement (CE) n° 1768/95 de la Commission du 24 juillet 1995 ainsi que du règlement (CE) n° 2605/98 de la Commission du 3 décembre 1998.

* 11 Ou dans d'autres pays offrant eux aussi des protections moins favorables.

* 12 Article L. 623-13 du code de la propriété intellectuelle.

* 13 Même s'il est vrai que le législateur français a veillé à préserver l'exemption du sélectionneur pour les variétés obtenues à partir de variétés incorporant elles-mêmes des inventions biotechnologiques brevetées. Ainsi, aux termes de la loi n° 2004-1338 du 8 décembre 2004 relative à la protection des inventions biotechnologiques, si une nouvelle variété résultant d'un travail de sélection ne contient pas l'invention biotechnologique (un gène breveté), elle peut être exploitée librement par celui qui l'a créée. Si, à l'inverse, le gène breveté s'exprime dans la nouvelle variété créée, une licence du détenteur du gène breveté doit être obtenue pour pouvoir l'exploiter.

* 14 Accord de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) signé à Marrakech le 15 avril 1994.

* 15 Membres de l'UPOV, les Etats-Unis pratiquent un système mixte : ils protègent certaines de leurs variétés par des COV et d'autres par le système du brevet, qu'ils promeuvent clairement au niveau international.

* 16 Le progrès biotechnologique conduit précisément à impliquer dans le domaine agricole de plus en plus d'entreprises (souvent multinationales) des secteurs de la chimie ou de la pharmacie, dont l'essentiel du modèle économique et des pratiques courantes repose sur l'utilisation de brevets.

* 17 En 1983, la part des semences donnant lieu à paiement de redevances ne s'établissait plus qu'à 55 %.

* 18 CA Nancy, 13 septembre 1988, arrêt n° 1607/88.

* 19 Projet de loi n° 144 (1996-1997) déposé au Sénat le 11 décembre 1996.

* 20 Soit 5 millions d'euros en moyenne annuelle.

* 21 Qui occupe 5 millions d'hectares et regroupe 400 obtenteurs et producteurs et 27.000 agriculteurs multiplicateurs de semences.

* 22 Elle est dite en effet « autogame », c'est-à-dire qu'elle s'autoféconde et se reproduit facilement, avec les mêmes caractéristiques d'une génération à l'autre, ce qui n'est, par exemple, pas le cas du maïs.

* 23 Projet de loi n° 144 (1996-1997).

* 24 A commencer par celle de 1961, reprise par la loi n° 70-489 du 11 juin 1970 précitée, constituant la base du chapitre du code de la propriété intellectuelle consacré aux obtentions végétales.

* 25 Etant entendu que la transposition de la convention UPOV de 1991 est déjà en grande partie réalisée par le projet de loi lui-même.

* 26 Le genre, l'espèce et la variété sont ainsi différents taxons de la classification botanique

* 27 Ensemble des gènes d'un individu dépendant des gènes hérités de ses parents.

* 28 Relatif à l'ensemble des caractères individuels correspondant à une réalisation du génotype, c'est-à-dire du patrimoine génétique d'un individu dépendant des gènes hérités de ses parents.

* 29 Dans la rédaction proposée par l'article 4 du projet de loi.

* 30 Placé auprès du ministre chargé de l'agriculture, il est présidé par un représentant de l'Etat et composé de personnalités des secteurs public et privé compétentes en matière de génétique, de botanique et d'agronomie.

* 31 Au printemps de cette année pour la variété de pommes de terre Monalisa ; à la fin de cette même année pour la variété Charlotte.

* 32 Pour le titulaire du COV de la variété initiale qui se serait vu refuser une licence d'exploitation d'une variété essentiellement dérivée.

* 33 Sauf dans le cas d'une transmission de l'entreprise ou de la partie de l'entreprise à laquelle ces droits sont rattachés.

* 34 Cette remise en cause est possible, sous certaines conditions, lorsque le titulaire peut justifier d'une excuse légitime présentée dans les six mois.

* 35 C'est-à-dire les droits à produire, introduire sur le territoire, vendre ou offrir en vente tout ou partie de la plante ou, dans certains cas, de ses éléments de reproduction ou multiplication.

* 36 Régime permettant à l'Etat d'obtenir, à tout moment, par décret en Conseil d'Etat ou arrêté interministériel, pour des motifs d'intérêt général, un droit d'exploitation sur une variété protégée et de le concéder à toute personne le lui demandant.

* 37 Cf. supra, exposé général.

* 38 Cela signifie que les produits résultant du triage doivent être de la même espèce et de la même variété que ceux soumis au triage.

* 39 Cf. supra, le commentaire de l'article 9.

* 40 Cf. supra, le commentaire de l'article 4.

* 41 Cf. supra, le commentaire de l'article 5.

* 42 Cf. supra, le commentaire de l'article 12.

* 43 L'apport de cette mention par rapport à celle déjà effectuée au 1° est qu'elle s'applique non seulement aux certificats octroyés, mais aussi à ceux qui n'en sont qu'au stade de la demande (demande enregistrée).

* 44 À l'exception de la Nouvelle-Calédonie, régie par des dispositions spécifiques aux termes de la loi constitutionnelle du 20 juillet 1998.

* 45 Ensuite appelés « matériels ».

* 46 Ceci n'est envisageable que lorsqu'il n'est pas donné suite à la mise en demeure.

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