EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le jeudi 13 novembre 2003 , sous la présidence de M. François Trucy, secrétaire , la commission a entendu M. Gérard Braun, rapporteur spécial, lui présenter son rapport sur les crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat pour 2004.
M. François Trucy a salué la présence de M. Pierre Fauchon, rapporteur pour avis des crédits de la fonction publique au nom de la commission des lois, soulignant que ce rapport pour avis avait été créé pour la discussion du projet de loi de finances pour 2004.
M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a d'abord rappelé que l'examen des crédits de la fonction publique appelait, d'une part, une analyse portant sur la présentation des crédits du ministère chargé de la gestion de la fonction publique qui, s'établissant à 223 millions d'euros en 2004, marquaient une progression de 5,6 %, et, d'autre part, une analyse de l'ensemble des charges de personnel de l'Etat qui, s'élevant à près de 121 milliards d'euros pour 2003, représentaient 44,1 % des dépenses du budget général.
D'emblée, il a signalé qu'il se trouvait dans l'impossibilité de donner ce dernier chiffre pour 2004, en raison de la généralisation des expérimentations de globalisation des crédits qui s'étaient traduites par une « profusion » d'enveloppes fongibles comprenant des frais de personnel, mais que la direction du budget travaillait à la reconstitution d'un chiffre permettant de donner une évolution à périmètre constant.
Concernant les crédits de l'agrégat « Fonction publique », M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a signalé que l'augmentation prévue succédait à une baisse de 2 % des crédits pour 2003, qui s'expliquait par la décision de consommer une partie des reports existants. Pour cette année, il a estimé qu'il fallait au contraire se féliciter de la décision du ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, de « purger » les reports, afin que le montant des crédits traduise la réalité de la dépense.
Par ailleurs, il a précisé que, dans le cadre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les crédits du ministère, abondés des dépenses de fonctionnement lui correspondant, devaient constituer une action « Fonction publique » relevant d'un programme « Direction de l'action du gouvernement », figurant lui-même au sein d'une mission devant être instituée pour tous les services du Premier ministre.
Concernant l'examen des charges globales de personnel de l'Etat, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a rappelé qu'elles étaient passées de 40,7 % des crédits du budget général en 1997 à 44,1 % pour 2003. Il a souligné que la tendance à l'accroissement des charges de fonction publique principalement due au dynamisme des rémunérations individuelles et, pour les charges de pension, à la démographie, demeurait, même si la volonté de l'infléchir était aujourd'hui réelle, et si les mesures nécessaires avaient commencé d'être prises. Puis il en est venu à la présentation de ses observations.
En premier lieu, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a indiqué que les effets du changement d'orientation pour 2004 étaient encore ténus. La baisse des effectifs ne représentait guère plus de 0,1 % des charges de la fonction publique, et la très grande progressivité avec laquelle devaient entrer en vigueur les différentes mesures de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites avait pour effet de rendre, pour 2004, quasiment « insensibles » les gains qui en étaient attendus.
En deuxième lieu, il a détaillé les raisons pour lesquelles la diminution du nombre des fonctionnaires devait constituer désormais une priorité. Comme la réforme des retraites devait simplement « freiner » la progression du coût des pensions, il fallait nécessairement « jouer » sur la charge des rémunérations pour contenir le coût de la fonction publique, ce qui impliquait de diminuer les recrutements, dans le contexte, par ailleurs favorable, de la hausse prochaine du nombre des départs en retraite.
Il a souligné que les gains à attendre d'une politique de non-remplacement volontaire pouvaient être substantiels : en 2010, ils devaient excéder 5 milliards d'euros en cas de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, et 10 milliards d'euros si aucun départ n'était remplacé, tandis que le gain attendu de la réforme des retraites n'approchait les 10 milliards d'euros pour le régime de l'Etat qu'à l'horizon 2020, le gain attendu n'excédant pas 3 milliards d'euros pour 2010.
Ainsi, M. Gérard Braun, rapporteur spécial, a pu esquisser un plan de stabilisation des charges de fonction publique : une politique énergique de non-remplacement des départs que devait progressivement épauler la réforme des retraites. Il a, par ailleurs, souligné que si la réforme de l'Etat devait permettre une diminution des effectifs en vertu, notamment, d'un « redimensionnement » de l'action de l'Etat, une baisse significative du nombre de fonctionnaires devait pouvoir être engagée sans plus attendre. En conséquence, il a souhaité la mise en place d'un indicateur visant à donner une visibilité à la politique de baisse des effectifs, montrant en particulier dans quelle mesure la diminution était, respectivement, imputable à des gains de productivité, à des actions de décentralisation ou d'externalisation.
Il a par ailleurs montré qu'en application de la loi précitée du 21 août 2003, l'augmentation des charges de pension était désormais contenue. En raison de l'allongement de la durée de cotisation, jointe à l'instauration d'un mécanisme de décote et au passage à une indexation des pensions sur les prix, le besoin de financement des régimes de la fonction publique avait pu être ramené, à l'horizon 2020, de 28 milliards d'euros, représentant 1,3 % du produit intérieur brut, à 15 milliards d'euros, infléchissant une contrainte appelée à peser sur le montant des prélèvements obligatoires.
M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a signalé que, par ailleurs, subsistaient des gisements d'économies, évalués à 400 millions d'euros, qui résultaient de l'existence de certains dispositifs procurant des avantages excessifs dont la Cour des comptes, dans son rapport particulier d'avril 2003, avait préconisé la suppression. Il a ainsi cité la bonification pour dépaysement, l'indemnité servie à certains pensionnés résidant outre-mer, et celle accordée à certains professeurs de l'enseignement technique.
Enfin, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , s'est félicité que la réforme de l'Etat soit « relancée » par le gouvernement. Après avoir rappelé les enjeux induits par la LOLF et insisté sur la nécessité d'une articulation de la globalisation des crédits opérée au sein des programmes avec des mécanismes de globalisation de crédits relevant de plusieurs programmes au niveau déconcentré, il s'est réjoui que les nouvelles stratégies ministérielles de réforme (SMR) présentées par les différents ministres aient déjà permis la formulation d'engagements précis lors des auditions conduites par la commission à l'occasion de l'examen du budget pour 2004 .
En outre, il a indiqué que, le projet de loi sur les responsabilités locales étant actuellement en cours d'examen par le Parlement, le gouvernement était en voie d'arrêter le principe d'une réforme portant sur une nouvelle organisation des administrations déconcentrées au niveau régional, qui, visant à rationaliser les services de l'Etat, constituait un gage d'économies d'échelle et de simplification pour l'usager.
En conclusion, M. Gérard Braun, rapporteur spécial, a proposé à la commission des finances l'adoption des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Un large débat s'est alors instauré.
M. Yves Fréville a insisté sur l'indispensable lisibilité de la politique de recrutement, dont les aléas étaient susceptibles de démobiliser les jeunes diplômés susceptibles de se présenter aux différents concours de la fonction publique. Par ailleurs, il s'est interrogé sur l'absence de provision pour 2004, concernant une augmentation éventuelle de la valeur du point d'indice.
M. Gérard Braun, rapporteur spécial , après avoir indiqué qu'il convenait non seulement de planifier les recrutements pour offrir une meilleure visibilité aux étudiants, mais aussi d'améliorer l'image de la fonction publique, a confirmé l'absence de provision pour 2004 concernant la hausse de la valeur du point, dont le principe ne pouvait, cependant, être, selon lui, exclu.
M. Joël Bourdin s'est enquis de la répartition des effectifs de la fonction publique entre personnels titulaires et contractuels, et du degré d'exactitude des chiffres dont il était possible de disposer en la matière.
En réponse, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , lui a précisé que ces chiffres connaissaient d'importantes fluctuations en raison de l'existence de plans de titularisations successifs. En revanche, les mesures d'ordre engagées par le gouvernement pour 2004 concernant l'éducation nationale étaient de nature à empêcher, dans une large mesure, la reconstitution d'un « volant » de personnels non comptabilisés dans les effectifs budgétaires. Aussi, le montant des effectifs budgétaires était appelé à mieux correspondre à la réalité de l'emploi dans la fonction publique. Toutefois, la complexité du traitement des informations transmises par les ministères à l'observatoire de l'emploi public n'autorisait une connaissance complète et précise des effectifs qu'avec deux années de retard.
M. Maurice Blin s'est interrogé sur l'opportunité d'instaurer une norme de réduction des effectifs pour chaque ministère, sur la rationalisation des statuts, ainsi que sur les leçons qui pouvaient être tirées des expériences de réforme de l'Etat menées à l'étranger.
En réponse, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , lui a indiqué que, si l'instauration d'une telle norme n'était pas, a priori, envisagée, pour sa part, il préconisait la mise en place d'un indicateur dénombrant et explicitant précisément les diminutions d'effectifs ayant lieu dans chaque ministère.
Il a indiqué qu'une rationalisation des statuts était à attendre d'un prochain projet de loi sur la fonction publique. Puis il a estimé que les expériences étrangères de réforme de l'Etat, notamment anglo-saxonnes, n'étaient pas facilement transposables en France.
M. Jean Arthuis, président , est revenu sur les dispositifs procurant certains avantages en matière de retraite, dont la Cour des comptes, dans son rapport particulier précité d'avril 2003 sur les pensions des fonctionnaires civils de l'Etat, avait préconisé la suppression.
Dans ce cadre, M. Philippe Marini, rapporteur général , a souligné, en particulier, que l'indemnité servie à certains pensionnés résidant outre-mer suscitait des « effets d'aubaine » croissants, justifiant qu'elle soit traitée avec toute la rigueur qu'impliquait le contexte actuel budgétaire.
Par ailleurs, il s'est déclaré en totale opposition avec les principales conclusions de la commission sur les réformes de l'ENA, présidée par M. Yves-Thibault de Silguy, qui tendaient à supprimer le classement de sortie et à instaurer le principe d'un recrutement direct des élèves par « négociation avec l'employeur ». En effet, ces mesures se situaient, selon lui, résolument à l'encontre du concept « d'école globale » qui avait présidé à l'instauration de l'ENA en 1945, et elles risquaient, dès lors, de favoriser certains corporatismes, tout en accentuant la « reproduction sociale ».
Il s'est également interrogé sur les perspectives de refonte de la carrière des administrateurs civils, en vue, notamment, d'en favoriser réellement « l'interministérialité ».
Sur l'ensemble de ces questions concernant la haute fonction publique, M. Gérard Braun, rapporteur spécial , a indiqué qu'il entendait interroger le gouvernement.
Enfin, M. Jean Arthuis, président, évoquant à nouveau le problème des indemnités versées à certains pensionnés résidant outre-mer, qui coûtaient plus de 150 millions d'euros par an sans qu'il fût possible de vérifier la réalité de la condition de résidence normalement attachée au versement de l'indemnité, a suggéré que la commission reprenne une initiative en ce sens, à l'image de l'amendement déposé par M. Philippe Marini, rapporteur général, et lui-même, à l'occasion de la discussion du projet de loi de programme sur l'outre-mer, qui tendait à la suppression de ce dispositif.
M. Gérard Braun, rapporteur spécial, a déclaré partager totalement l'objectif ainsi fixé.
A l'issue de ce débat, la commission a, sur proposition de M. Gérard Braun, rapporteur spécial, décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat .
Réunie à nouveau le jeudi 20 novembre 2003 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé l'adoption des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Réunie le jeudi 13 novembre 2003, sous la présidence de M. François Trucy, secrétaire, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Gérard Braun, rapporteur spécial , sur les crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat pour 2004.
A l'issue de ce débat, la commission a, sur proposition de M. Gérard Braun, rapporteur spécial, décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Réunie à nouveau le jeudi 20 novembre 2003, la commission a confirmé l'adoption des crédits de la fonction publique et de la réforme de l'Etat pour 2004.