ARTICLE 10
Relèvement de la limite d'application du
régime simplifié d'imposition des bénéfices
agricoles
Commentaire : le présent article vise à
relever de 274.400 euros à 350.000 euros la limite d'application du
régime réel simplifié d'imposition des
bénéfices agricoles.
I. LE DROIT EXISTANT
D'après les dispositions du code général des impôts
relatives aux régimes d'imposition des bénéfices
agricoles, l'évaluation des bénéfices agricoles imposables
peut faire intervenir trois modes d'imposition différents : le
régime du forfait collectif, le régime réel
simplifié et le régime réel normal.
L'article 14 de la loi de finances pour 2001
79(
*
)
avait en effet supprimé,
à compter de l'imposition des revenus de l'année 2001, la
possibilité pour les exploitants agricoles dont le montant annuel des
recettes était compris entre 76.224,5 euros et 114.336,76 euros,
d'opter pour l'application du régime transitoire d'imposition des
bénéfices agricoles en vigueur depuis 1987.
Répartition des exploitants agricoles selon leur régime
d'imposition en 2001
|
Nombres d'exploitants |
Régime réel normal |
120.000 |
Régime réel simplifié |
114.000 |
Régime du forfait collectif |
362.450 |
Total |
596.450 |
Source : ministère de l'économie, des
finances
et de l'industrie
A. LE RÉGIME DU FORFAIT COLLECTIF
D'après les dispositions de l'article 69 du code général
des impôts,
le régime du forfait collectif s'applique de droit
aux exploitants agricoles dont les recettes, pour l'ensemble de leurs
exploitations, sont inférieures à une moyenne de 76.300 euros
mesurée sur deux années consécutives
.
Les exploitants, normalement placés sous le régime du forfait,
peuvent toutefois choisir d'opter pour une imposition au régime
réel simplifié ou normal. En outre, les exploitations nouvelles
relèvent de plein droit du forfait durant leurs deux premiers exercices,
sauf cas d'exclusion obligatoire ou d'option contraire. Enfin, il faut
souligner qu'en application de l'article 109 de la loi de finances pour
1997
80(
*
)
, les
sociétés, autres que les GAEC, constituées depuis le
1
er
janvier 1997, sont désormais exclues du régime du
forfait et relèvent obligatoirement, sans distinction du chiffres
d'affaires, du régime réel d'imposition.
Le régime du forfait collectif constituait à l'origine le mode
quasi-exclusif d'évaluation de la matière imposable agricole et
il concerne encore aujourd'hui 60 % des exploitants agricoles redevables.
Sa
mise en place en 1949 s'expliquait en grande partie par l'absence de
comptabilité véritable, qui a longtemps caractérisé
l'exploitation agricole et qui rendait impossible toute imposition sur des
bénéfices réels
. De même n'était-il pas
concevable de procéder à la mise en place d'un forfait individuel.
Dans le régime du forfait collectif, le bénéfice agricole
de l'exploitant est calculé en fonction de bénéfices
unitaires moyens constatés, pour chacun des types de culture et
d'exploitation, dans le département ou la région agricole. Le
bénéfice calculé est supposé tenir compte de
l'ensemble des charges et recettes.
Les obligations déclaratives des exploitants agricoles imposés au
régime du forfait agricole sont minimes. Ainsi, ils doivent remplir un
formulaire descriptif des éléments physiques caractérisant
leur exploitation, nécessaire au calcul du bénéfice
forfaitaire. Le bénéfice ainsi calculé (sous la forme d'un
bénéfice moyen à l'unité d'exploitation) doit
être cohérent avec ceux des départements voisins. Pour les
activités de polyculture et de viticulture, les exploitants sont
dispensés de cette formalité si les caractéristiques de
leur exploitation sont inchangées par rapport à l'année
précédente.
Le maintien du régime du forfait collectif en matière
d'imposition des bénéfices agricoles n'incite pas une grande
majorité des agriculteurs à se doter d'une comptabilité
précise et fiable
. En outre, beaucoup de jeunes agriculteurs
choisissent souvent, après la période biennale de
référence, de rester au régime du forfait alors même
qu'il serait plus avantageux pour eux d'opter pour une imposition au
bénéfice réel. Il apparaît donc aujourd'hui
nécessaire de
restreindre de façon effective et progressive le
champ d'application du forfait collectif en soumettant toute nouvelle
installation relevant de la TVA agricole à l'imposition du régime
réel des bénéfices agricoles
81(
*
)
.
B. LES RÉGIMES DES BÉNÉFICES RÉELS
Les exploitants agricoles peuvent relever, soit de plein droit, soit sur
option, du régime d'imposition d'après le bénéfice
réel. Celui-ci peut être normal ou simplifié.
1. Le régime réel normal
D'après les dispositions de l'article 69 du code général
des impôts,
lorsque les recettes d'un exploitant agricole, pour
l'ensemble de ses exploitations, dépassent une moyenne de 76.300 euros
mesurée sur deux années consécutives,
l'intéressé est obligatoirement imposé d'après son
bénéfice réel à compter de la première
année suivant la période biennale considérée
.
En outre, d'après les dispositions de l'article 69 B du code
général des impôts, les exploitants agricoles
imposés, en raison de leurs recettes, d'après un régime de
bénéfice réel au titre de l'année 1984 ou d'une
année ultérieure, sont soumis définitivement à un
régime de cette nature. Toutefois, lorsque les recettes d'un exploitant
agricole, mesurées sur la moyenne de deux années
consécutives, s'abaissent en dessous de 46.000 euros,
l'intéressé peut, sur option, être soumis au régime
du forfait à compter du 1
er
janvier de l'année qui
suit la période biennale de référence.
Dans le cadre de ce régime, le bénéfice imposable, pour
un exercice donné dont la durée est fixée à douze
mois, est déterminé selon des règles proches de celles
applicables aux entreprises industrielles et commerciales, certains
aménagements permettant toutefois de prendre en compte les
spécificités de l'activité agricole
.
Le bénéfice imposable est un bénéfice net,
égal à la différence entre les produits bruts de
l'exploitation et les charges qu'elle supporte. Il est déterminé
d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute
nature effectuées au cours de la période, y compris, notamment,
les cessions d'éléments quelconques de l'actif, en cours ou en
fin d'exploitation. En pratique, le calcul du bénéfice agricole
imposable s'opère à partir du résultat comptable de
l'exploitation en apportant à ce résultat des corrections
extra-comptables (abattements ou déductions) pour tenir compte de
règles fiscales spécifiques.
Un exploitant agricole soumis au régime réel normal doit
conserver et tenir à jour un certain nombre de documents :
livre-journal, livre d'inventaire sur lequel figurent bilan et compte de
résultat ainsi que des factures et pièces justificatives des
recettes, dépenses et stocks constitués. Ces documents doivent
être conservés pendant au moins six ans.
2. Le régime réel simplifié
D'après les dispositions de l'article 69 du code général
des impôts,
un régime simplifié d'imposition
d'après le bénéfice réel s'applique aux petits et
moyens exploitants agricoles relevant de l'impôt sur le revenu
:
-
sur option
, aux exploitants normalement placés sous le
régime du forfait ;
-
de plein droit
, aux autres exploitants, y compris ceux dont le forfait
a été dénoncé par l'administration, dont la moyenne
des recettes, mesurée sur deux années consécutives,
n'excède pas 274.400 euros.
Ces deux catégories d'exploitants peuvent toutefois opter pour le
régime normal mais cette option doit être formulée avant le
1
er
mai de la première année à laquelle elle
s'applique.
En cas de dépassement de la limite des 274.400 euros, les
intéressés sont soumis de plein droit au régime normal
d'imposition d'après le bénéfice réel à
compter de la première année suivant la période biennale
considérée.
Le mode d'imposition au réel simplifié est plus souple pour
les exploitants agricoles
: la comptabilité est
allégée, des règles particulières s'appliquent aux
immobilisations, à la détermination du produit brut, ainsi que
des frais et des charges. En outre, depuis l'entrée en vigueur de
l'article 14 de la loi de finances pour 2001 précitée, les
exploitants agricoles soumis au régime réel simplifié ont
la possibilité de constituer des provisions en cas de créances
douteuses, de frais de grosse réparation ou de
dépréciation des stocks. De plus, ils sont autorisés
à comptabiliser, d'une part, les frais généraux à
la clôture de l'exercice selon une comptabilité d'engagement,
d'autre part, les stocks au prix de revient ou au cours du jour si celui-ci est
inférieur au prix de revient.
Dans le cadre du régime réel simplifié, les exploitants
doivent tenir à jour un livre-journal. Les créances et les dettes
sont constatées à la fin de l'exercice et certains frais
généraux sont calculés selon des modalités
simplifiées.
Les obligations déclaratives diffèrent de celles du
régime réel normal
. En effet, les exploitants soumis au
régime réel normal doivent effectuer une déclaration
spéciale. Pour le régime réel simplifié, la
déclaration comporte un tableau des immobilisations et amortissements
ainsi qu'un bilan et un compte de résultat fiscal simplifiés.
Pour le régime réel normal, au-delà du bilan et du compte
de résultat, des tableaux comptables supplémentaires relatifs
notamment aux prévisions, créances et dettes ainsi que des
tableaux fiscaux doivent être présentés.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE
1. Le relèvement du seuil d'application du régime réel
simplifié
Le
I
du présent article propose de relever de 274.400 euros
à 350.000 euros le plafond d'application du régime
réel simplifié inscrit au b du II de l'article 69 du code
général des impôts.
L'exposé des motifs du présent article précise que cette
modification devrait bénéficier à 14.000 exploitants
agricoles.
En outre, ce relèvement du seuil d'application du régime
réel simplifié ne devrait engendrer aucun coût dans la
mesure où la principale différence entre le régime
réel normal et le régime réel simplifié
réside dans les obligations déclaratives et comptables relatives
à ces régimes.
2. Une précision rédactionnelle
Le
II
du présent article propose de confirmer une
interprétation doctrinale des conséquences du dépassement
par un exploitant du plafond des recettes applicable à son régime
d'imposition.
Le III de l'article 69 du code général des impôts dispose
en effet, dans sa rédaction actuelle, qu'en cas de dépassement
des 274.400 euros fixant la limite d'application de plein droit du
régime réel simplifié, les intéressés sont
soumis de plein droit au régime normal d'imposition d'après le
bénéfice réel
à compter de la première
année
suivant la période biennale considérée.
Le
II
du présent article propose de préciser qu'en cas de
dépassement de cette limite, les intéressés sont soumis de
plein droit au régime réel normal d'imposition
à
compter du premier exercice
suivant la période biennale
considérée.
Le fait de modifier le régime d'imposition à compter de la
première année civile suivant la période de calcul des
recettes moyennes sur deux exercices posait en effet un problème pour la
majorité des exploitants au régime réel simplifié
dont les exercices ne coïncident pas avec les années civiles. Il
fallait donc diviser l'exercice suivant la période biennale en deux
parties pour appliquer les dispositions du code général des
impôts de manière stricte.
Par mesure de simplification, la doctrine administrative avait
considéré que, dans ce cas, le nouveau régime d'imposition
s'appliquait à compter du premier exercice suivant la période
biennale. Le
II
du présent article propose de confirmer cette
doctrine au sein du code général des impôts.
3. Une application à compter du 1
er
janvier 2004
Le
III
du présent article précise que l'ensemble de ces
dispositions sont applicables pour la détermination des résultats
des exercices clos à compter du 1
er
janvier 2004.
D'après les dispositions de l'article 69 du code général
des impôts, l'option pour le régime réel normal doit
être faite avant le 1
er
mai de l'année aux revenus de
laquelle elle se rapporte. L'option pour le régime réel normal
pour les revenus de 2003 a donc pu être exercée jusqu'au
1
er
mai 2003.
Dans la mesure où de nombreux exploitants relevant, de droit, du
régime simplifié préfèrent toutefois être
assujettis au régime normal, et où l'option pour ce régime
n'est exercée qu'au mois de mai, il est nécessaire de n'appliquer
le relèvement du seuil du régime simplifié prévu
par le présent article que pour les exercices clos à compter du
1
er
janvier 2004 afin que les exploitants se trouvant, du fait du
relèvement du seuil, dans le champ d'application du régime
réel simplifié, aient la possibilité d'opter pour le
régime normal en mai 2004 s'ils le souhaitent.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le relèvement du seuil d'application du régime réel
simplifié des bénéfices agricoles est de nature à
simplifier les obligations déclaratives de nombreux exploitants
agricoles qui le souhaitent
.
Toutefois, il convient de souligner qu'aujourd'hui de nombreux agriculteurs
décident d'opter pour la soumission au régime réel normal
alors même que le niveau de leurs recettes leur permettrait de
bénéficier des deux autres régimes existants, à
savoir le réel simplifié et le forfait collectif. Ainsi, parmi
les quelques 120.000 exploitants soumis au régime réel normal,
73 % avaient un niveau de recettes inférieur à 226.000
euros. De nombreux exploitants préfèrent donc opter pour le
régime normal d'imposition au bénéfice réel,
notamment pour des raisons de comptabilité et de gestion de
l'exploitation plus fiables.
Votre rapporteur général considère cependant que le
présent article peut être source de simplification administrative
et déclarative pour certains exploitants agricoles qui en
éprouveraient aujourd'hui le besoin.
Décision de la commission : votre commission vous
propose d'adopter cet article sans modification.