Article 10
(art. 14 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre
1945)
Modification des règles d'accès au statut de
résident
L'article 10 du projet de loi a pour objet de
modifier les
règles d'accès au statut de résident
, prévues
à
l'article 14 de l'ordonnance
du 2 novembre 1945.
La carte de résident délivrée à certains
étrangers est
valable pour une durée de dix ans et
renouvelable de plein droit.
Elle confère également
l'autorisation de travailler
sur l'ensemble du territoire national.
1. Les règles actuelles de délivrance de la carte de
résident en vertu de l'article 14
L'article 14 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 constitue l'un des articles
permettant de délivrer à un étranger une carte de
résident. Il dispose que l'étranger peut obtenir une carte de
résident lors qu'il justifie d'une
résidence ininterrompue
d'au moins trois ans sur le territoire français
80(
*
)
.
L'autorité administrative délivre ce titre de long séjour
«
en tenant compte des moyens d'existence, dont l'étranger
peut faire état, parmi lesquels les conditions de son activité
professionnelle, et, le cas échéant, des faits qu'il peut
invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en
France
».
La carte de résident peut également être
délivrée de plein droit pour certaines catégories
d'étrangers en vertu de l'article 15 de l'ordonnance.
Cette seconde
possibilité pour obtenir un titre de long séjour n'est offerte
qu'aux étrangers ayant des liens particuliers avec la France justifiant
cette délivrance de plein droit.
Comme l'indique le rapport annuel rendu par le ministère de
l'intérieur au Parlement, relatif aux titres de séjour des
étrangers en France en 2002
81(
*
)
, près de 85% des
étrangers légalement présents sur le territoire
français sont actuellement en possession d'un titre de séjour
valable dix ans.
Le nombre de cartes de résident délivrées par les
préfectures de métropole au titre de l'article 14
s'élève à
13.410 en 2002
. Ce chiffre est
relativement peu élevé par comparaison avec les 73.573 cartes de
résident délivrées au titre de l'article 15 de
l'ordonnance. De plus, 43096 cartes de résident ont été
délivrées par renouvellement de plein droit en vertu de l'article
16 de l'ordonnance.
2. Les modifications proposées par le projet de loi
Le présent article du projet de loi propose plusieurs modifications
à l'article 14 de l'ordonnance qui
permettent notamment de mettre en
conformité la législation française avec les conclusions
du Conseil de l'Union européenne adoptées en octobre 2002
sur
l'intégration des ressortissants de pays tiers
et, par anticipation,
avec la proposition de directive
relative au statut des ressortissants de
pays tiers résidents de longue durée
82(
*
)
et ayant reçu l'accord
politique du Conseil le 5 juin 2003.
Ø Modifications concernant la durée de résidence
ininterrrompue exigée
L'article 10 du projet de loi prévoit que
désormais les
étrangers devront justifier d'une résidence ininterrompue en
France pendant cinq ans, et non plus seulement trois ans
. Cette nouvelle
durée est celle prévue à l'article 5 de la proposition de
directive communautaire précitée. Elle constitue un plafond
commun pour la durée de séjour exigible, ce qui a permis à
l'Assemblée nationale d'adopter un amendement présenté par
M. Thierry Mariani et accepté par le gouvernement,
prévoyant
deux aménagements réservés
à certaines
catégories d'étrangers.
Ainsi, la
durée de résidence
requise serait
réduite à deux ans
lorsque :
- l'étranger sollicitant la carte de résident a
été autorisé à séjourner en France
au
titre du regroupement familial
demandé par le titulaire d'une carte
de résident ;
-
l'étranger sollicitant la carte de résident est
père ou mère d'un enfant français
résidant en
France et il est
titulaire depuis deux ans de la carte de séjour
temporaire portant la mention « vie privée et
familiale »
du fait de cette qualité de parent d'un enfant
français, à condition qu'il remplisse toujours les conditions
prévues pour l'obtention de cette carte et ne vive pas en état de
polygamie.
L'aménagement favorable à ces deux catégories
d'étrangers est guidé par la
volonté de leur
conférer plus rapidement un titre de long séjour
. Cela se
justifie par la situation spécifique de ces étrangers et les
liens familiaux particulièrement forts qu'ils détiennent sur le
territoire français.
Cette réduction spécifique de la durée de résidence
est introduite alors que parallèlement les articles 12 et 13 du projet
de loi suppriment la délivrance de plein droit de la carte de
résident pour ces étrangers qui sont respectivement parents
d'enfants français résidant en France, sous réserve du
respect de certaines conditions, ou autorisés à entrer sur le
territoire français au titre du regroupement familial demandé par
le titulaire d'une carte de résident
83(
*
)
.
Ø Introduction d'une condition d'intégration
Le gouvernement souhaite encourager, comme l'indique l'étude d'impact de
ce projet de loi, la «
participation effective des
étrangers dans la société
française
»
84(
*
)
. C'est pourquoi le présent
article prévoit également
l'introduction d'une condition
d'intégration pour l'étranger sollicitant une carte de
résident
.
Cette condition d'intégration est
déjà présente
à l'article 3 du projet de loi
, tel qu'adopté par
l'Assemblée nationale et modifiant l'article 6 de l'ordonnance du 2
novembre 1945. Il y est précisé que la satisfaction de cette
condition par l'étranger sera notamment analysée en fonction de
sa connaissance suffisante de la langue française et des principes
régissant la République française ainsi que de son
comportement au regard de l'ordre public
85(
*
)
.
D'autres critères pourront également être retenus, tels que
l'activité professionnelle, le suivi d'une formation professionnelle ou
encore la participation à la vie associative et culturelle du lieu de
résidence.
A terme, le « contrat d'accueil et d'intégration »,
actuellement soumis à expérimentation dans douze
départements, pourrait également être
considéré comme un élément permettant à
l'étranger de justifier qu'il satisfait à la condition
d'intégration
86(
*
)
.
Votre commission vous propose un
amendement de réécriture
du présent article afin :
- de préciser la rédaction du texte concernant la condition
d'intégration de l'étranger dans la société
française, en faisant référence à la
République, par coordination avec un amendement prévu à
l'article 3 du projet de loi, et en indiquant que cette condition devrait
être remplie dans toutes les hypothèses mentionnées au
présent article de l'ordonnance ;
- de reprendre les deux régimes dérogatoires introduits par
l'Assemblée nationale en première lecture pour les
étrangers bénéficiant du regroupement familial ou parent
d'enfant français, en réduisant les conditions qu'ils doivent
remplir. Ainsi, votre commission vous propose de supprimer dans ces
hypothèses la nécessité pour l'étranger de
justifier qu'il a l'intention de s'établir durablement en France.
Votre commission vous soumet également un
amendement
tendant
à prévoir que la carte de résident serait refusée
à l'étranger dont la présence en France constituerait une
menace pour l'ordre public
87(
*
)
et vous propose d'adopter l'article 10
ainsi modifié
.