B. LE CHOIX DE L'ERAP, OUTIL AU SERVICE D'UNE MEILLEURE GOUVERNANCE DES ENTREPRISES PUBLIQUES
1. L'ERAP : un outil d'intervention efficace de l'Etat dans les entreprises industrielles
Le choix
de l'ERAP ne doit rien au hasard. Son statut d'établissement public
industriel et commercial (EPIC), la transparence de son mode de gestion et sa
capacité financière -assortie de la garantie de l'Etat- en font
aujourd'hui pour l'Etat actionnaire un instrument efficace d'intervention, dans
la durée, dans des entreprises industrielles. Au 31 décembre
2002, l'ERAP est une structure sans endettement, qui dispose d'une
trésorerie de près de 50 millions d'euros. Ses comptes,
établis selon les normes françaises, sont soumis au
contrôle et à la certification de deux commissaires aux
comptes
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)
.
L'ERAP a déjà une longue pratique des participations de l'Etat
dans les entreprises, puisque cet établissement a porté et
géré, depuis sa création jusqu'en 1996, le capital
détenu par l'Etat dans le groupe Elf, puis des participations de l'Etat
dans des entreprises du secteur nucléaire comme la Cogema.
L'ERAP a donc accompagné la naissance de la marque Elf et était
toujours actionnaire majoritaire en 1984, quand Elf Aquitaine est devenue la
première entreprise de France. A partir de 1994, conformément
à la décision du gouvernement, l'ERAP a cédé
progressivement ses actions du groupe Elf pour en sortir définitivement
en 1996. Sur cette période de 30 ans, l'ERAP aura fait remonter à
l'Etat plus de 60 milliards de francs de plus values nettes.
L'ERAP est également intervenu à la demande de l'Etat pour
accompagner la réorganisation industrielle de la Société
Le Nickel, acteur essentiel de l'activité de la
Nouvelle-Calédonie et acteur mondial majeur sur le marché de ce
métal stratégique. Entré dans la société Le
Nickel par le rachat des parts qu'y détenait le groupe Imétal en
1990, l'ERAP a recapitalisé et restructuré cette entreprise, en
devenant actionnaire majoritaire du groupe Eramet. L'ERAP a accompagné
le développement du groupe Eramet sur de nouveaux métiers,
jusqu'à sa privatisation en 1999.
A cette date, l'ERAP a favorisé la mise en oeuvre des
« accords de Bercy » qui rééquilibrent au
profit des provinces calédoniennes le produit des richesses
minières de l'île. Il a alors cédé une partie de ses
actions dans Eramet à la SCTPI créée entre les provinces
et apporté le reste de sa participation à Cogema.
Depuis la restructuration du secteur nucléaire français en
septembre 2001, à laquelle il a participé, l'ERAP détient
3,2 % d'Areva, qui regroupe désormais les anciennes
activités de la Cogema, de Framatome et de CEA-Industrie. C'est
aujourd'hui l'unique (et petite
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)
) participation dont l'ERAP ait la
charge.
Cet historique atteste de l'expérience de l'ERAP en matière
d'actionnariat public.
2. Le mécanisme envisagé
Il est
prévu que l'ERAP se voie transférer l'intégralité
de la participation de l'Etat dans France Télécom et s'endette
auprès des marchés financiers pour financer la part de l'Etat
dans le renforcement des fonds propres de l'entreprise.
L'avance d'actionnaires que l'Etat avait proposée à France
Télécom aux conditions de marché aurait été
financée, si le besoin d'y recourir était apparu, par un emprunt
de l'établissement public auprès de la Caisse des
dépôts et consignations. Celle-ci devait ouvrir une ligne de
financement à court terme, mobilisable sous un délai de
48 heures, d'un montant maximal de 9 milliards d'euros,
d'échéance le 1er mars 2003, à un taux
d'intérêt correspondant à l'EONIA augmenté d'une
marge applicable de 0,1 % l'an. Cette avance aurait été
convertible en titres France Télécom lors du futur renforcement
des fonds propres de l'opérateur historique. Elle n'a, en fait, pas
été demandée par l'entreprise.
Désormais, fort des notations que viennent de lui accorder les agences
de « rating », l'ERAP peut émettre un ou plusieurs
emprunts obligataires, bénéficiant de la garantie explicite de
l'Etat. Cet emprunt sera remboursé en temps voulu par l'ERAP à
l'aide de ses moyens propres, des dividendes perçus sur les titres
France Télécom et, surtout, par la revente progressive des titres
de l'entreprise que l'ERAP aura acquis grâce à ces emprunts.
3. L'ERAP, antichambre de l'Agence des participations de l'Etat
Le
transfert à l'ERAP de la part de l'Etat au capital de France
Télécom (parmi d'autres) peut être interprété
comme une première application des recommandations de MM. René
Barbier de La Serre, Jacques-Henri David, Alain Joly et Philippe Rouvillois
exprimées dans le rapport sur « L'Etat actionnaire et le
gouvernement des entreprises publiques » qu'ils ont remis à M.
Francis Mer, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
à la fin du mois de février 2003.
Les auteurs de ce rapport préconisent une clarification des
différentes fonctions qu'exerce l'Etat envers les entreprises publiques
et, notamment, une identification claire de sa fonction d'actionnaire. Cette
identification implique une organisation et des procédures distinctes.
Sur la base des recommandations du rapport, M. Francis Mer a annoncé
lundi 3 mars 2003 sa décision de créer une « Agence des
participations de l'Etat » chargée d'exercer les missions de
l'Etat actionnaire.
Cette agence, qui sera totalement opérationnelle début 2004, a
vocation à assurer toutes les responsabilités d'un actionnaire
vis-à-vis de l'ensemble des entreprises dans lesquelles l'Etat
détient une participation. Interlocuteur unique des dirigeants des
entreprises, l'Agence validera et suivra la mise en oeuvre de la
stratégie des entreprises, contrôlera les risques et la
qualité de gestion, recherchera la valorisation du patrimoine de l'Etat.
Elle rendra des comptes au ministre et informera le Parlement de la situation
du secteur public et de chacune des entreprises concernées.
Placée sous l'autorité du ministre et rattachée au
directeur du Trésor, l'Agence disposera d'une équipe d'une
cinquantaine de personnes issues de l'administration et du monde de
l'entreprise. Elle s'appuiera sur un conseil d'orientation composé de
personnalités reconnues du monde de l'entreprise et des
représentants des autres ministères. Son rôle sera
notamment de fixer les règles de gouvernement des entreprises et les
conditions de délégation et d'information de l'actionnaire.
Votre rapporteur se félicite de ce projet, qui entend donner à
l'Etat tous les moyens d'exercer son rôle d'actionnaire dans les
meilleures conditions
: l'Agence devrait lui permettre de s'appuyer
sur des compétences renforcées, des règles de
fonctionnement plus claires, et une transparence accrue, autant d'outils au
service d'une meilleure gouvernance des entreprises publiques. Votre rapporteur
souhaite notamment
que le rôle d'actionnaire majoritaire de France
Télécom soit désormais assumé par l'Etat avec le
plus grand professionnalisme et la plus grande vigilance
.