B. UNE NÉCESSAIRE PRÉPARATION : L'EPWR
A
l'étude depuis dix ans,
l'European pressurized water reactor
(EPWR) est le fruit de la collaboration entre Framatome et Siemens. D'une
puissance de 1.450 Mw, ce réacteur permettra :
- de diviser par dix les risques de fusion du coeur et d'accroître
en proportion inverse la sécurité ;
- d'optimiser le rendement de l'utilisation du combustible.
Il importe de lancer la " tête de série " industrielle
suffisamment tôt pour disposer de l'expérience requise afin de
passer à la phase de production, lorsque les centrales nucléaires
françaises commenceront à être déclassées, au
début de la décennies 2011-2020. Dans son avis
précité sur les perspectives énergétiques de la
France, le rapporteur du Conseil économique et social a d'ailleurs
souligné cette nécessité : "
afin de
bénéficier d'un retour sur expérience optimale de
tête de série, le Conseil économique et social engage
fortement à ce que les pouvoirs publics et les partenaires industries
intéressés définissent sans plus tarder -probablement
dès 1999- de quel type de réacteur il sera nécessaire. Une
fois la décision prise, le premier réacteur test devra être
lancé dans les meilleurs délais "
5(
*
)
.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite connaître la
décision du Gouvernement au sujet de la poursuite du programme EPWR.
Elle estime que tout retard dans la commande de la " tête de
série " du réacteur serait très préjudiciable
à l'avenir de l'ensemble de la filière nucléaire.
C. POUR UNE AMÉLIORATION DE LA SÛRETÉ ET DE L'AVAL DU CYCLE
L'acceptation du nucléaire par l'opinion publique procède largement de la confiance que cette technologie inspire aux Français. C'est pourquoi il est indispensable de parfaire le dispositif garantissant la sûreté des installations nucléaires et de résoudre la question de la gestion des déchets ultimes.
1. L'indispensable renforcement du contrôle de la sûreté des installations nucléaires.
L'année 1998 a été marquée par la
publication d'un important rapport de M. Jean-Yves Le Déaut,
destiné à la préparation d'un projet de loi sur les
modalités de contrôle et de transparence en matière
nucléaire.
Ce rapport concluait à la création :
- d'une autorité indépendante chargée de la
radioprotection de la sûreté nucléaire ;
- d'une agence de sûreté nucléaire et de
radioprotection constituée sous la forme d'un établissement
public industriel et commercial.
Votre Commission des Affaires économiques juge urgent de
procéder à l'examen du projet de loi destiné à
renforcer la transparence des procédures et la sûreté des
installations nucléaires. Elle souhaite que le Gouvernement
dépose, dès que possible, sur le bureau de chaque
assemblée l'avant-projet de loi soumis à l'examen du Conseil
d'Etat au printemps 1999.
Elle se félicite, au demeurant, des progrès accomplis en
matière de réflexion sur la transparence et la
sûreté.
Dans un rapport présenté au nom de l'Office parlementaire
d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) paru en
mars 1999, M. Claude Birraux, député, établit un
bilan détaillé de l'organisation de la sûreté
nucléaire dans les organismes publics et chez les exploitants. Il
souligne que le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) a
réalisé en la matière d'indéniables progrès,
acquérant une réactivité qui lui faisait défaut
voici dix ans. Il observe, en revanche, s'agissant d'EDF, les
"
dangers de l'autosatisfaction
"
6(
*
)
tout en notant que l'absence d'une
autorité de radioprotection n'est probablement pas
étrangère à cet état de fait. Citant le rapport de
la Direction de la sûreté des installations nucléaires pour
1998 qui critique en particulier "
la négligence
"
à l'origine de la contamination de la surface des convois de
combustibles irradiés, "
l'endormissement
" qui a
contribué aux problèmes apparus sur l'enceinte de la centrale de
Belleville et "
le laisser-faire
" ayant causé la
défaillance du circuit de refroidissement de la centrale de Civaux, le
rapporteur de l'OPECST souligne cependant les progrès
réalisés par EDF en matière d'amélioration de la
maintenance et de respect de la législation du travail.
Dans le même document, M. Claude Birraux s'interroge sur trois
problèmes encore en suspens :
- les modalités de démantèlement des installations
nucléaires ;
- l'effet des effluents radioactifs rejetés par les centrales ;
- l'incidence sur l'environnement de l'arrêt de l'exploitation des
minerais d'uranium en France.
Votre Commission des Affaires économiques appelle l'attention du
Gouvernement sur la nécessité de traiter rapidement ces
questions, faute de quoi c'est l'acceptation du nucléaire qui serait
mise en cause dans l'opinion publique.
2. La gestion des déchets ultimes
La loi
n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux
recherches sur la gestion des déchets radioactifs a prévu
l'exploration de trois modalités de gestion de ces
déchets : la séparation et la transmutation des
éléments à vie longue, le stockage en couche
géologique profonde, enfin l'entreposage de longue durée en
surface. Lors des comités interministériels du
2 février et du 9 décembre 1998, le Gouvernement a
manifesté la volonté de poursuivre les recherches dans ces
trois directions et de privilégier les solutions réversibles.
Séparation et transmutation
Le 9 décembre 1998, le Gouvernement a confirmé son
intérêt pour les recherches sur la transmutation dans les
réacteurs à neutrons rapides d'une part et sur les
capacités de transmutation des systèmes hybrides d'autre part.
Dans cette perspective, des investissements ont été
réalisés à Marcoule sur les installations
" Atalante " afin d'examiner la possibilité de réduire
le volume et la toxicité des déchets par
séparation et
incinération
.
Les recherches en matière de
transmutation
seront poursuivies,
grâce au réacteur Phénix, maintenu en service jusqu'en
2005, le CEA envisageant de poursuivre des études sur ce sujet au moyen
du futur réacteur d'irradiation technologique Jules Horowitz, en
coopération avec le Japon et la Russie notamment.
Le Gouvernement entend enfin, également dans le cadre de la
coopération internationale, tester les possibilités de
réacteurs hybrides
associant un accélérateur de
particules et un réacteur sous-critique.
Conditionnement et entreposage de longue durée
Le Gouvernement a demandé, fin 1998, au CEA de mettre en oeuvre un
programme de recherche sur la possibilité de créer des sites
d'entreposage en subsurface à partir de 2006.
Stockage en couches géologiques profondes
Le premier laboratoire d'étude du stockage en couches géologiques
profondes sera créé à Bure, dans la Meuse. Il sera
implanté à 500 mètres sous terre, dans une couche de
marne particulièrement dense et très imperméable. Les
recherches se poursuivent afin de déterminer la localisation d'un
laboratoire souterrain en terrain granitique. Les études
effectuées dans la Vienne ont, en effet, révélé des
caractéristiques hydrologiques incompatibles avec la création
d'un laboratoire de recherche. On notera que la création du laboratoire
de Bure s'est accompagnée de l'institution d'un Comité local
d'information et de suivi garant, dans les conditions fixées par la loi
n° 91-1381 précitée, de la transparence des travaux
menés dans ce laboratoire.
Votre Commission des Affaires économiques se félicite de la
création du premier laboratoire de recherche sur les déchets.
Elle souhaite que le Gouvernement poursuive activement les études en
cours afin d'explorer jusqu'à leur terme chacune des trois pistes
envisagées par la loi de 1991.