CHAPITRE III -

OBJECTIFS ET MOYENS DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE FRANÇAISE

Comme le note M. Gabriel Gaudy, dans un avis récemment présenté au Conseil économique et social intitulé, les perspectives énergétiques de la France à l'horizon 2010-2020 3( * ) , " le temps de l'énergie est celui de la longue durée " . C'est pourquoi il est nécessaire de conserver une politique de l'énergie reposant, d'une part, sur un programme nucléaire toujours mieux maîtrisé et, d'autre part, sur une réelle volonté de protéger l'environnement notamment grâce à la maîtrise de la demande d'énergie et au développement des énergies renouvelables.

I. POURSUIVRE LE PROGRAMME NUCLÉAIRE

La production d'électricité d'origine nucléaire suscite périodiquement des critiques violentes et des interrogations passionnées. Le débat perpétuellement relancé sur " l'avenir du nucléaire " a le mérite de permettre l'expression de vues contradictoires et d'enrichir la vie démocratique. Cependant, votre commission des Affaires économiques constate que l'abandon du nucléaire constituerait une grave erreur, comme l'exemple allemand en témoigne. C'est pourquoi, il convient de poursuivre les recherches sur les réacteurs du futur et d'améliorer les mesures de sécurité, en particulier, en ce qui concerne l'aval du cycle.

A. L'IMPOSSIBLE ABANDON DU NUCLÉAIRE : L'EXEMPLE ALLEMAND

L'évolution de la situation allemande depuis 1998 illustre parfaitement le fait que, quelle que soit la volonté de supprimer la filière nucléaire, une telle hypothèse est inenvisageable pour un pays développé qui ne dispose pas de ressources énergétiques suffisantes. L'Allemagne est dotée de 19 centrales nucléaires qui livrent 28 % du total de l'électricité produite dans ce pays . La branche nucléaire emploie , quant à elle, 150.000 personnes, dont 38.000 participent directement au fonctionnement des centrales. L'industrie allemande n'assure pas la fabrication du MOX utilisé dans les réacteurs. Quant au retraitement des déchets, il s'effectue soit en France, soit en Grande-Bretagne, respectivement grâce à la COGEMA et à BNFL.

L'Allemagne rencontre les mêmes difficultés que la France en ce qui concerne l'entreposage des déchets nucléaires . Un seul site de stockage, situé à Morsleben, est actuellement opérationnel. Cependant, le stockage y est actuellement interrompu à la suite d'une plainte déposée par une organisation écologiste.

Selon le programme de la coalition actuellement au pouvoir, une loi devait, dans les cent jours suivant les dernières élections au Bundestag :

- interdire la construction de toute nouvelle centrale ;

- prohiber le recyclage du combustible et obliger au stockage direct en fin de cycle ;

- déterminer -dans le cadre d'un consensus- les modalités d'une négociation avec les compagnies d'électricité sur la sortie du nucléaire, la durée de ces négociations ne devant pas dépasser un an.

Constitué en octobre 1998, le groupe de travail tripartite (industriels, Etat fédéral et Länder) chargé de définir les termes d'un consensus n'est pas parvenu à trouver une solution satisfaisante pour toutes les parties aux négociations. Parmi les sujets de conflit figuraient notamment la durée de vie estimée des centrales et les modalités de provisionnement de l'opération. En juillet 1999, le chancelier a ajourné toute nouvelle réunion de cette instance.

Au cours des négociations, les opposants les plus résolus au nucléaire ont dû faire des concessions . C'est ainsi, par exemple, que le ministre écologiste de l'environnement, en février 1999, a renoncé à inscrire dans la loi l'interdiction de retraiter les déchets. De leur côté, les industriels ont fait savoir qu'ils entendaient poursuivre l'exploitation des réacteurs tant que les autorisations dont ils jouissaient seraient en règle 4( * ) , sauf à demander de lourdes indemnités au Gouvernement s'il entendait les en empêcher.

Les pouvoirs publics auraient, finalement, à l'automne, proposé aux électriciens que le délai de fermeture des centrales soit fixé au coup par coup, en fonction de l'état de chacune d'elles, et non plus de façon générale à 25 ans comme ils le souhaitaient initialement. Il serait, de la sorte, possible d'arrêter les centrales les plus anciennes avant 25 ans et de laisser fonctionner les plus récentes au-delà de ce délai.

Parallèlement à la négociation relative à la fermeture des centrales, le problème du retraitement des déchets s'est posé de façon particulièrement aigu au cours de ces derniers mois. En effet, le transport de combustibles irradiés vers la France ou vers la Grande-Bretagne a été, unilatéralement, stoppé en mai 1998, de même que le transport, en sens inverse, des résidus vitrifiés issus du retraitement des déchets allemands produits par les usines françaises et anglaises.

En février 1999, 3.800 tonnes de combustible étaient stockées à la Hague, dans l'attente d'être rapatriées outre-Rhin. Aussi, les autorités de Paris ont-elles fait part à Berlin de leur volonté de faire cesser cette situation inacceptable. Finalement, le gouvernement allemand a donné son accord pour organiser le retour des déchets qui pourrait intervenir au cours de l'année 2000.

Votre commission des Affaires économiques souhaiterait connaître l'état exact d'avancement de ce dossier, et aussi la solution que le Gouvernement français entend lui apporter.

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