III. UN BUDGET QUI NE RÉPOND PAS AUX ATTENTES
Le
projet de budget de la police pour 1999 s'élève à
29,11 milliards de francs
, ce qui correspond à une
progression en francs courants de
2,93 %
, légèrement
supérieure à celle de l'ensemble du budget qui est en
augmentation de 2,3%.
Sa part dans le budget de l'Etat
s'élève à
1,79%
et est comparable à celles des dernières
années. Sa part dans le Produit intérieur brut (0,33%) est en
diminution depuis 1996.
Le budget de la police est
avant tout conditionné par les
dépenses de personnel
qui représentent
83,25% des
crédits
,
laissant peu de marge de manoeuvre
budgétaire
. La part des dépenses de fonctionnement
s'élève à 13,41% et celle des dépenses en capital
à 3,34%.
Les dépenses de personnel s'élèvent à
24,2 milliards de francs et sont en augmentation de 2,6%. Les
crédits de fonctionnement courant des services atteindront
3,82 milliard de francs, soit une augmentation de 2,4%, alors que les
crédits d'équipements s'élèveront à 1,26
milliards de francs en autorisations de programme (+10,3%) et à
971 millions en crédits de paiement (+14,4%).
A. LES PERSONNELS
1. Les effectifs budgétaires
Les
effectifs budgétaires de la police s'élèveront en 1999
à 127 731 agents, dont
113 088 personnels actifs
.
En incluant
4 150 policiers auxiliaires
et
15 850
adjoints de sécurité
,
on dénombre
147 731
agents.
Depuis la loi d'orientation, les personnels actifs se répartissent en
trois corps :
- le corps de conception et de direction (commissaires de police) :
2 000 personnes ;
- le corps de commandement et d'encadrement (lieutenants, capitaines et
commandants) : 17 000 personnes ;
- le corps de maîtrise et d'application (gardiens, brigadiers et
brigadiers-majors) : 94 000 personnes.
La réforme des corps et des carrières, concrétisée
dans le règlement général d'emploi publié le 4
septembre 1996, s'accompagne d'une
modification de la répartition des
effectifs entre les trois corps
de manière à aboutir à
une augmentation du nombre des agents de maîtrise et d'application.
Ce changement de structure s'échelonne sur plusieurs années. En
2010, l'effectif des commissaires serait ainsi réduit à
1 600 et celui des officiers à 13 000 tandis que celui des
gardiens et gradés s'élèverait à 98 000. A
l'heure actuelle, les officiers sont, à titre transitoire, trop nombreux
pour exercer un réel emploi d'encadrement.
Le budget pour 1999 prévoit ainsi la transformation de 24 emplois de
commissaires et de 424 emplois d'officiers en 448 emplois des corps de
maîtrise et d'application.
Les autres variations d'effectifs concernent :
- la création de
7 600 emplois d'adjoints de
sécurité
qui viendront s'ajouter aux 8 250 postes
créés en 1998 ;
- la suppression de
4 175 emplois de policiers auxiliaires
dans le cadre de la suppression du service national obligatoire ;
- la transformation de 53 emplois d'officiers en 50 emplois
d'attachés de police ;
- la création d'un emploi de directeur et de deux emplois de
sous-directeur pour la
future direction de la formation
de la police,
gagée sur la suppression de sept emplois de d'officiers ;
- la suppression de 128 emplois administratifs de catégorie
C.
2. Les crédits
Les
dépenses de personnel
(
24,2 milliards de francs)
connaissent un accroissement de 2,61 % (+577,3 MF) sous l'influence
des
rémunérations d'activité.
Cette augmentation est imputable pour
plus de 80%
à
l'accroissement des rémunérations dû à l'accord
salarial de la fonction publique de février 1998
(+476,6 MF).
Elle résulte en second lieu du recrutement de
7600 adjoints de
sécurité
supplémentaires (+158,6 MF) ;
Le budget prévoit néanmoins
quelques mesures
catégorielles
nouvelles :
- la création d'une
prime d'encadrement des adjoints de
sécurité
qui serait versée à 5 000
fonctionnaires pour un montant mensuel de 120 F (+7,5 MF). Votre
rapporteur s'interroge à cet égard sur
l'intérêt
de multiplier des primes de faible montant
dont les critères de
répartition ne sont pas toujours clairement établis ;
- la création pour un montant global de 0,9 MF, d'une
prime de
qualification, dite " OPJ 16 ",
au bénéfice des
1 000 agents du corps de maîtrise et d'application qui se verraient
attribuer la qualification d'officier de police judiciaire en application de la
loi n° 98-1035 du 18 novembre 1998. Cette prime serait d'un montant
de 230 F mensuel, identique à celui versé aux gendarmes, sachant
cependant que le gain réel ne sera que de 90 F mensuel, les agents
concernés perdant le bénéfice de la prime d'agent de
police judiciaire, dite " APJ 20 ". Il est envisagé dans les
années à venir de porter le nombre de ces nouveaux officiers de
police judiciaire à 8 000 pour combler le déficit en OPJ
résultant de la réforme des corps et carrières et
augmenter globalement leurs effectifs dans un souci de meilleure
efficacité de la police de proximité. A cet égard, votre
rapporteur souhaite que ces agents, dont les
services d'affectation ne
sont pas encore déterminés,
ne soient pas cantonnés
dans des unités spécialisées dans l'investigation.
Il
se demande par ailleurs
si un montant supplémentaire mensuel de 90 F
de prime présente
une incitation suffisante
à
l'accomplissement d'une formation difficile et à la prise en charge
d'importantes responsabilités ;
- l'augmentation du nombre de bénéficiaires de
l'échelon exceptionnel de gardien de la paix (5,6 MF) ;
- La revalorisation de
la prime de commandement
au profit des
lieutenants (5 MF). Cette revalorisation
ne semble pas suffisante pour
satisfaire les officiers
, notamment ceux des services centraux, pour qui la
mise en place, en février 1998, de la prime de commandement
unifiée pour l'ensemble du corps s'est soldée par une perte de
revenu par rapport à la situation antérieure ;
- La création d'une prime de sujétion pour les
personnels
techniques
de laboratoire affectés aux services d'identité
judiciaire (+2 MF) ;
- La revalorisation du régime indemnitaire des secrétaires
administratifs de police et agents des services techniques du matériel
(+1,8 MF);
3. Une insuffisante gestion prévisionnelle des effectifs
Du fait
de la pyramide des âge des corps actifs de policiers, un grand nombre de
départs à la retraite
doivent intervenir dans les
prochaines années dans les trois corps actifs de la police nationale.
D'ici 2003 sont ainsi attendus 28 000 départs, dont 547 chez les
commissaires, 4 800 chez les officiers et plus de 22 000 chez les
gardiens et gradés, soit
plus d'un quart de l'effectif en 1998 de
chaque corps
.
La situation sera encore plus tendue pour les gardiens et gradés qui
doivent voir leurs effectifs augmenter du fait du repyramidage des corps
actifs. Plus de 25 000 recrutements devraient intervenir sur cinq ans dans
ce corps. Compte tenu de la durée de formation, il existe un
décalage d'un an entre le recrutement d'un agent et sa prise de poste.
Pour éviter une désorganisation totale des services,
il est
impératif de prévoir des recrutements de personnels par
anticipation
, sous peine de manquer cruellement d'effectifs, ne serait-ce
que pour encadrer les adjoints de sécurité.
Une politique de proximité, exige en effet la présence d'un
maximum de personnels sur le terrain. Les
effectifs globaux de la police ont
diminué
d'un millier de personnes, dont
144 personnels
actifs
, depuis 1995.
On ne peut prendre le risque, du fait des
départs à la retraite, de faire reposer la sécurité
des Français sur des emplois-jeune inexpérimentés, peu
formés et recrutés dans des conditions telles que la
qualité de leur action n'est pas assurée.
M. Jean-Pierre Chevènement avait annoncé son souhait
d'opérer des recrutements par anticipation en 1998. Il semblerait que
1200 à 1400 policiers puissent prochainement être recrutés
en surnombre. Une telle mesure semble néanmoins insuffisante et l'effort
doit être régulièrement poursuivi dans les années
à venir.
4. Des crédits de formation insuffisants
La
formation des personnels
est annoncée à juste titre comme
un objectif prioritaire avec la création d'une
direction de la
formation
au sein de la direction générale de la police
nationale et la tenue d'assises nationales de la formation au mois de
février 1999.
Il est donc
paradoxal de constater une baisse de 9 millions de francs (soit
4,7%) des crédits de formation inscrits au titre des écoles
au chapitre 34-41 au moment où l'école de Nîmes, ouverte en
1998, doit monter en puissance et où les actions à engager
prioritairement se multiplient du fait :
- de l'organisation très lourde des formations des adjoints de
sécurité et de la nécessité de former leurs
tuteurs ;
- de la formation des agents du corps de maîtrise et d'application
à la fonction d'officier de police judiciaire. 8 000 agents
seraient concernés à terme. Cette formation durerait
55 jours étalés sur 2 ans, celle des titulaires d'un DEUG ou
des anciens enquêteurs étant réduite à 28 jours sur
un an ;
- de la formation des agents à la délinquance des mineurs
et à la délinquance urbaine, prévue par le plan
gouvernemental contre la délinquance des mineurs.
Votre commission ne s'explique pas ce fossé entre les
déclarations ministérielles en faveur de la formation et la
diminution constatée des crédits qui lui sont
consacrés.