C. FAVORISER LA RÉHABILITATION DE L'IMMOBILIER TOURISTIQUE
1. La situation de l'immobilier touristique
Le
secteur du tourisme offre, en règle générale, une assez
faible rentabilité économique, car il est confronté
à une logique de cycle long pour les investissements et de durée
de vie courte ou aléatoire pour les produits touristiques offerts.
La rentabilité financière des investissements a permis de
compenser cette situation tant que les taux d'intérêt réels
étaient négatifs compte tenu de l'inflation, et que la
valorisation du patrimoine était assurée grâce aux
plus-values immobilières.
Aujourd'hui, l'économie touristique présente une certaine
vulnérabilité car elle est financée par des emprunts
à taux d'intérêt élevés d'où des
charge fixes très lourdes, alors même que la demande est
hétérogène et sensible aux aléas
macro-économiques.
En conséquence, la France n'investit plus assez dans le secteur
touristique, tant en ce qui concerne les développements nouveaux, que la
remise à niveau de l'existant. Or, compte tenu de la concurrence
acharnée qui est la règle au niveau mondial, le risque est grand
de voir l'activité touristique française régresser dans le
classement mondial par perte de compétitivité.
En ce qui concerne l'hébergement touristique, il faut rappeler que ce
secteur s'est constitué très rapidement -entre 1960 et 1980- pour
faire face à une demande de loisirs en progression très rapide.
La réponse a souvent plus porté sur le quantitatif que sur le
qualitatif. Les investissements ont été fréquemment
réalisés par les particuliers sur la base de prix
élevés en raison des tensions existant sur le marché de
l'offre touristique et sur les marchés financiers. Ces
déséquilibres ne sont apparus qu'avec la baisse de l'inflation et
ils ont été aggravés par la crise immobilière.
Au total, l'investissement réalisé ne dégage qu'une faible
rentabilité, en raison notamment de l'insuffisance de la mise sur le
marché. Bien plus, l'absence d'entretien et d'effort de
rénovation aggrave les difficultés de commercialisation, et au
total, une dégradation des logements et des parties communes des
copropriétés.
A l'heure actuelle, on peut estimer que sur 2,8 millions de lits
existants, à peine 1,25 million sont encore sur le marché.
Près de 750.000 ont plus de vingt ans et ne sont plus à
même de répondre à la demande d'une clientèle plus
exigeante sur la taille, les normes de confort et l'environnement
immédiat. Cette situation concerne la majeure partie des stations de
montagne et du littoral.
2. Un nouvel outil juridique pour la réhabilitation de l'immobilier touristique
Les
élus locaux et les professionnels du secteur se sont mobilisés
pour trouver des instruments juridiques permettant d'inciter les particuliers
à entreprendre ces travaux de réhabilitation.
Sur une question écrite de votre rapporteur pour avis, posée
à ce sujet en juin dernier, la secrétaire d'Etat au tourisme
a précisé qu'un nouveau concept juridique était en cours
d'élaboration et soumis à concertation.
En octobre dernier, M. Michel Bouvard, député, déposait
une proposition de loi, fruit du travail de réflexion mené au
sein de l'Association des Maires des stations françaises de sports
d'hiver et d'été, l'Association nationale des élus de la
montagne, l'Association nationale des élus du littoral et l'Association
nationale des stations classées et des communes touristiques.
L'exposé des motifs souligne que "
la rénovation de
l'immobilier touristique doit trouver son principe de financement dans une mise
en marché beaucoup plus performante, plus commerciale et plus
professionnelle des locaux rénovés
". Pour y parvenir,
il faut un dispositif qui assure le financement d'un investissement lourd,
gagé sur les recettes à venir. Dans ce contexte, les pouvoirs
publics n'interviennent pas pour assurer l'équilibre de
l'opération, mais pour inciter les propriétaires privés
à s'engager dans la réhabilitation en inscrivant leur action
dans une politique locale de réhabilitation et de rénovation
de l'environnement.
Dans ce cadre, il est essentiel de lier étroitement la requalification
du bâti et la professionnalisation de la commercialisation qui doit
permettre de dégager les ressources susceptibles d'assurer la
rentabilité de l'investissement de rénovation.
Le dispositif législatif et réglementaire proposé comporte
deux objectifs principaux :
- permettre aux collectivités de s'engager pleinement et
efficacement dans l'action de réhabilitation par une modification du
code de l'urbanisme et l'institution d'une nouvelle forme d'intervention
publique dénommée " l'opération programmée de
réhabilitation touristique " ;
- mettre en oeuvre de fortes incitations au bénéfice des
propriétaires privés, ces avantages étant accordés
en contrepartie d'un engagement de mise en marché professionnel de
longue durée.
Compte tenu du calendrier parlementaire, cette proposition de loi n'a pas
encore été discutée mais l'un de ses objectifs vient
d'être atteint grâce au vote d'un article additionnel dans le
projet de loi de finances pour 1999. Il résulte d'un amendement
présenté par M. Michel Bouvard, député,
légèrement modifié par le Gouvernement qui l'a
accepté et qui instaure le concept de "
village
résidentiel de tourisme
", auquel il reconnaît un
avantage fiscal sous forme de récupération de TVA en contrepartie
d'engagements de location souscrits par les propriétaires. Ce concept a
un caractère volontairement collectif et global puisque cent lits au
minimum doivent être concernés par l'opération, ce qui
correspond à un peu plus de 20 appartements.
Il s'agit d'un article additionnel après l'article 22 du projet de
loi de finances, qui a pour objet d'assujettir à la TVA les prestations
fournies par cette nouvelle catégorie d'établissement
d'hébergement touristique constituée de locaux d'habitation
meublés, dont les propriétaires ont conclu avec l'exploitant un
contrat de location d'une durée de neuf ans minimum, qui ont fait
l'objet d'une réhabilitation immobilière et qui sont
proposés à la clientèle pour une location
saisonnière.
Afin d'éviter des opérations isolées, la création
d'un VRT devra être implantée au sein d'une
" opération de réhabilitation de l'immobilier de
loisirs " (ORIL), définie au niveau communal ou intercommunal.
L'assujettissement à la TVA permet de récupérer la TVA
supportée en amont sur les travaux de rénovation, ce qui diminue
le coût de ces travaux supportés par les propriétaires.
Outre cette insertion dans le code général des impôts, des
modifications réglementaires devront être arrêtées
par un décret en Conseil d'Etat.
Votre rapporteur pour avis pour avis approuve pleinement l'adoption de ce
dispositif
, notamment son caractère global. Cependant, pour le
rendre réellement attractif et incitatif, il faudra sans doute mobiliser
d'autres sources de financement. La réflexion pourrait ainsi porter sur
l'aménagement des règles d'intervention de l'ANAH.
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Sur proposition de son rapporteur pour avis, la Commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au tourisme dans le projet de loi de finances pour 1999.