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En dehors du code pénal , qui condamne l'homicide, même s'il est commis sur demande de la victime, ainsi que l'aide au suicide, plusieurs textes évoquent l'euthanasie sans la nommer. Ils cherchent avant tout à limiter l'acharnement thérapeutique .

La loi sur l'exercice de la profession médicale empêche un médecin de traiter un malade contre son gré, même si le patient a exprimé sa volonté par avance dans un testament de vie. De plus, un médecin peut s'abstenir de soigner un " mourant dont la mort est inévitable ", si les soins ne servent qu'à retarder la date du décès. Dans les mêmes circonstances, il peut fournir les antalgiques nécessaires pour apaiser les souffrances du malade, même si ce geste risque d'abréger la survie du patient.

De façon symétrique, la loi sur le statut du patient prévoit qu'un malade puisse refuser un traitement qui ne sert qu'à retarder la date du décès, recevoir des antalgiques qui risquent d'avancer son décès, et rédiger un testament de vie dans lequel il exprime son refus de tout traitement médical dans certaines circonstances.

I. LE CADRE JURIDIQUE

1) Le code pénal

Outre les dispositions relatives à l'homicide, à la non-assistance à personne en danger, et aux coups et blessures, le code pénal comporte deux articles qui visent explicitement l'euthanasie : les articles 239 et 240 qui condamnent respectivement l'homicide commis à la demande de la victime et l'aide au suicide.

L'article 239 énonce en effet : " Celui qui tue autrui à sa demande expresse est puni par une peine de détention pouvant atteindre trois ans ou par une peine de prison d'au moins soixante jours ". L'article 239 prévoit donc une sanction allégée, car l'homicide se traduit normalement par une détention d'au moins cinq ans.

L'article 240 prévoit que : " Celui qui prête son concours au suicide d'autrui est sanctionné par une amende ou une peine de prison. Si l'action est accomplie dans un but intéressé, la durée de la peine de prison peut atteindre trois ans. "

Par ailleurs, les articles 84 et 85 du code pénal prévoient que les sanctions puissent être atténuées, voire supprimées, si les actes punissables ont été commis dans des circonstances particulières. C'est par exemple le cas lorsque l'auteur de l'acte punissable a agi " sous l'influence d'une émotion forte, ou lorsque d'autres explications particulières justifient l'état du coupable ".

2) La loi sur l'exercice de la profession médicale

Son chapitre 2 est consacré aux devoirs du médecin. Il commence par les articles 6 et 6a, qui s'appliquent notamment aux patients en fin de vie. Ces dispositions ont été introduites dans la loi en 1992.

L'article 6 énonce en effet à partir de l'alinéa 3 :

" 3. A moins de disposer d'une autorisation spéciale, un médecin ne doit pas commencer ou poursuivre un traitement contre la volonté du patient. Cette disposition s'applique également lorsque le patient a exprimé, dans un testament de vie, son désir d'être dispensé de tout traitement prolongeant sa vie dans l'hypothèse où il serait mourant et où sa mort serait inévitable.

" 4. Par traitement prolongeant la vie, on entend traitement qui n'offre aucune perspective de guérison, d'amélioration ou de soulagement, mais qui vise seulement à allonger la survie.

" 5. Dans les cas où le patient est mourant et où sa mort est inévitable, mais où il n'y a pas de testament de vie, le médecin peut se dispenser de commencer ou de poursuivre des soins qui ne peuvent que retarder la date du décès. Dans les mêmes circonstances, le médecin peut donner des antalgiques, des calmants ou des produits analogues, qui sont nécessaires pour soulager le patient, même si une telle action peut conduire à hâter le moment du décès.
"

L'article 6a énonce :

" 1. Toute personne majeure peut établir un testament de vie. Le testateur exprime ainsi sa volonté en matière de soins médicaux, s'il devait se trouver dans une situation où il ne pourrait plus exercer d'une autre façon son droit d'autodétermination.

" 2. Le ministre de la Santé établira des dispositions plus précises sur l'établissement, la formulation, l'enregistrement et la révocation des testaments de vie.

" 3. Le ministre de la Santé établira les règles sur les droits perçus pour l'enregistrement des testaments de vie. "

3) La loi sur le statut juridique du patient

Les chapitres 2 et 3 de cette loi, qui date de 1998, sont consacrés respectivement au libre arbitre du patient en général et dans des cas particuliers. Parmi les cas particuliers, la loi prévoit celui des mourants.

Elle énonce à l'article 16 , qui se rapporte précisément au traitement des mourants dont la mort est inévitable :

" 1. Un mourant dont la mort est inévitable peut refuser un traitement qui ne peut que retarder l'arrivée de la mort.

" 2. Dans la mesure où un mourant dont la mort est inévitable ne peut plus exercer son droit d'autodétermination, le personnel soignant peut s'abstenir de commencer ou de poursuivre un traitement prolongeant la vie (cf. article 17, alinéa 3).

" 3. Un mourant dont la mort est inévitable peut prendre des antalgiques, des calmants ou des produits analogues qui sont nécessaires pour le soulager, même si ceci peut conduire à hâter le moment du décès ".

L'article 17 concerne les testaments de vie :

" 1. Toute personne qui a plus de dix-huit ans, qui n'est pas sous tutelle, qui remplit les conditions personnelles, et notamment les conditions de santé, conformément à l'article 5 de la loi sur la tutelle, peut rédiger un testament de vie. Dans un testament de vie, l'intéressé peut exprimer sa volonté en matière de traitement médical s'il devait se trouver dans un état où il ne pourrait plus exercer lui-même son droit d'autodétermination .

" 2. Un testament de vie peut contenir des dispositions selon lesquelles :

1) au cas où le testateur est mourant et où sa mort est inévitable, il ne désire pas de traitement prolongeant la vie ;

2) dans les cas où la maladie, l'extrême affaiblissement dû à la vieillesse, un accident, un arrêt cardiaque, ou tout autre événement semblable a provoqué une invalidité si grave que le testateur serait durablement hors d'état de prendre soin de lui-même physiquement et mentalement, le testateur ne désire pas un traitement prolongeant la vie.


" 3. Par traitement prolongeant la vie on entend traitement qui n'offre aucune perspective de guérison, d'amélioration ou de soulagement, mais qui vise seulement à allonger la survie.

" 4. Dans la mesure où un membre du personnel soignant, face à un patient qui n'est pas en état d'exercer son droit d'autodétermination, envisage de commencer un traitement prolongeant la vie d'un mourant dont la mort est inévitable, ou envisage de poursuivre un tel traitement dans les cas visés au n° 2 de l'alinéa 2, cette personne doit consulter le registre des testaments de vie, conformément à l'article 18, en vue de vérifier s'il y a un testament de vie.

" 5. Dans les cas visés au n° 1 de l'alinéa 2, le souhait du testateur a force obligatoire pour le personnel soignant, tandis que dans les cas visés au n° 2 du même alinéa, il n'a qu'une valeur indicative et doit donc être examiné. "

La loi distingue donc le cas des malades en phase terminale de ceux qui souffrent d'affections graves ou invalidantes, car le testament de vie n'a force obligatoire que pour les premiers.

4) Les dispositions réglementaires sur le testament de vie

Le règlement du ministre de la Santé du 14 septembre 1998 sur les testaments de vie, en vigueur depuis le 1 er octobre 1998, remplace le précédent, qui datait de 1992. Ce dernier avait apporté une reconnaissance juridique à une pratique antérieure.

Le règlement rappelle la valeur juridique des testaments de vie, qui doivent être formulés sur des imprimés spéciaux et enregistrés à l'hôpital. L'enregistrement suppose le paiement d'un droit minime (50 couronnes, soit environ 40 francs). Un tel testament est révocable, pas nécessairement par écrit dans la mesure où la volonté de l'intéressé est exprimée sans équivoque.

Une circulaire et des directives ont été adressées à tous les médecins du pays, pour leur rappeler la conduite à tenir lorsqu'ils se trouvent en présence d'un testament de vie et pour compléter les dispositions législatives et réglementaires présentées plus haut.

Ces documents développent les dispositions de la loi. Ils rappellent notamment le devoir qu'ont les médecins de respecter les volontés exprimées dans les testaments de vie lorsqu'elles émanent de " mourants dont la mort est inévitable ". La circulaire précise l'impossibilité de définir cette expression, mais indique que peuvent être considérés comme tels des patients dont la mort surviendra dans l'espace de quelques jours ou de quelques semaines, et ce malgré la mise en oeuvre de toutes les ressources médicales disponibles (cancéreux en phase terminale ou malades souffrant de plusieurs défaillances organiques). En revanche, face à des malades souffrant de troubles cérébraux (maladie d'Alzheimer par exemple) ou pulmonaires, le médecin n'est pas lié par les dispositions du testament de vie.

En l'absence de testament de vie, le médecin agit conformément à ce que prévoit l'article 6 de la loi sur l'exercice de la profession médicale. Il peut donc prendre la décision d'abréger la survie de certains patients.

5) Les directives sur l'administration continue par voie intraveineuse d'opioïdes aux malades en phase terminale

Pour tenir compte des critiques selon lesquelles les médecins ont trop souvent recours aux antalgiques majeurs pour hâter le décès de certains mourants, le ministère de la Santé a publié, en 1995, des directives sur l'administration continue par voie intraveineuse d'opioïdes aux malades en phase terminale.

Ce document, qui fournit les dosages à respecter, variables selon le passé du malade, rappelle en premier lieu l'interdiction de l'euthanasie active. Il précise également que ce mode d'administration des opioïdes constitue le dernier recours.

II. LA PRATIQUE ET LE DEBAT

Les dispositions contenues dans la loi sur l'exercice de la profession médicale ont permis de légaliser l'euthanasie passive et l'euthanasie indirecte pour des mourants condamnés à mourir dans le délai de quelques jours ou de quelques semaines.

L'euthanasie indirecte semble largement pratiquée :
un rapport publié au printemps 1996 par le Comité d'éthique a permis de mettre en évidence qu'un médecin sur dix exagérait le recours à la morphine pour abréger la vie de certains mourants.

A l'heure actuelle, le débat sur l'euthanasie concerne principalement les malades en phase terminale, mais dont la mort n'est pas prévisible à court terme. L'immense majorité des médecins ainsi que le Comité d'éthique s'opposent à la légalisation, sous quelque forme que ce soit, de l'euthanasie active de cette catégorie de patients. En revanche, tous insistent sur la nécessité de développer les soins palliatifs. Un rapport publié au début de l'année 1997 par les autorités sanitaires nationales a d'ailleurs prévu la multiplication et l'organisation rationnelle des unités de soins palliatifs.

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