Avertissement : Cette étude correspond à l'état de la législation en décembre 1996, elle a été remplacée par l'étude LC 133 de mars 2004. |
SUISSE
Le titre
cinquième du code pénal, "
Infractions contre
l'intégrité sexuelle
", contient les dispositions
applicables en cas d'abus sur des mineurs.
|
Au début du mois d'octobre 1996, le Conseil national a adopté un projet de loi tendant à faire passer de cinq à dix ans le délai de prescription applicable aux infractions qui relèvent de l'article 187 . Ce projet a été voté à l'unanimité. Il doit ensuite être soumis au Conseil des Etats. Compte tenu du délai référendaire ( 8( * ) ), la disposition devrait entrer en vigueur au printemps prochain.
I - LE VIOL
L'article 190 du code pénal, relatif au viol, énonce
à l'alinéa 1 : "
Celui qui, notamment en usant de menace
ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d'ordre
psychique ou en la mettant hors d'état de résister, aura
contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel,
sera puni de la réclusion pour dix ans au plus.
"
Il envisage donc
uniquement le viol des personnes de sexe féminin
mais n'exclut
pas les enfants
puisqu'il ne comporte aucune
indication d'âge.
La peine minimale est fixée à trois ans de réclusion
"
si l'auteur a agi avec cruauté, notamment s'il a fait usage
d'une arme dangereuse ou d'un autre objet dangereux
".
Par ailleurs, l'article 191 punit notamment l'acte sexuel commis sur
"
une
personne incapable de discernement ou de
résistance
" de la réclusion pour dix ans au plus ou de
l'emprisonnement
(9(
*
)).
Aucun de ces deux articles ne permet de considérer un acte de
pénétration anale ou orale comme un viol.
En revanche, l'article 187, qui punit tout "
acte d'ordre
sexuel
" commis sur un enfant de moins de 16 ans d'une peine de
réclusion d'au plus cinq ans ou d'une peine d'emprisonnement, permet de
punir de tels actes. Par "
acte d'ordre sexuel
", la
jurisprudence entend, en effet, tout contact entre le corps de l'un des
participants et les organes génitaux dénudés de l'autre.
En cas de décès de la victime, le délinquant sexuel est
non seulement puni pour avoir abusé de la victime mais aussi pour
assassinat, meurtre ou homicide pour négligence, selon les
circonstances. Le juge punit alors le délinquant pour l'infraction la
plus grave en augmentant le cas échéant la durée de la
peine pour tenir compte de l'abus sexuel.
II - LES AUTRES AGRESSIONS SEXUELLES
1) Sur des enfants de moins de 16 ans
L'article 187-1 du code pénal
énonce :
"
Celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins
de 16 ans, celui qui aura entraîné un enfant de cet âge
à commettre un acte d'ordre sexuel, celui qui aura mêlé un
enfant de cet âge à un acte d'ordre sexuel, sera puni de la
réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement.
"
L'expression "
acte d'ordre sexuel
" exclut toute
différence entre les agressions et les atteintes.
Toutefois,
si la différence d'âge entre les participants n'est
pas supérieure à trois ans, l'acte n'est pas punissable
.
De même, la peine est réduite si l'auteur de l'infraction a agi
sans savoir que la victime avait moins de 16 ans.
Par ailleurs,
l'article 191
punit "
l'acte sexuel, un acte
analogue ou un autre acte
d'ordre sexuel
" commis sur
"
une personne incapable de discernement ou de
résistance
" d'une peine de réclusion d'au plus dix ans.
Or, dans une affaire d'abus commis sur un enfant de 5 ans par son
grand-père, la Cour de cassation pénale du Tribunal
fédéral a décidé en août 1994 que
les deux
articles 187 et 191 du code pénal pouvaient s'appliquer
simultanément car ils protègent deux valeurs
différentes
: le premier tend à préserver le
développement psychique des mineurs tandis que le second cherche
à sauvegarder la liberté sexuelle et l'honneur des personnes
incapables de discernement ou de résistance quel que soit leur
âge. Ainsi, l'abus commis sur un enfant peut donner lieu à un
double verdict et à une peine aggravée.
A cette occasion, le Tribunal fédéral a rappelé qu'en cas
de viol, une punition aggravée pouvait être prononcée sur
la double base des articles 190 et 191.
2) Sur des mineurs de plus de 16 ans
Aux
termes de l'article 188-1 du code pénal, les "
actes d'ordre
sexuel
" commis sur des mineurs de plus de 16 ans sont punissables de
l'emprisonnement s'ils ont été commis par une personne
"
profitant de rapports d'éducation, de confiance ou de travail,
ou de liens de dépendance d'une autre nature
".
Dans une telle situation, il peut également être fait application
de
l'article 193
selon lequel "
celui qui, profitant de la
détresse où se trouve la victime ou d'un lien de
dépendance fondé sur des rapports de travail ou d'un lien de
dépendance de toute autre nature, aura déterminé celle-ci
à commettre ou à subir un acte d'ordre sexuel, sera puni de
l'emprisonnement
".
III - LES ATTEINTES SEXUELLES
Aucune
différence n'est faite entre les différents abus selon que leur
réalisation suppose ou non l'emploi de la violence, de la contrainte, de
la menace ou de la surprise.
Le code individualise seulement l'exhibitionnisme, puni au maximum par une
peine de prison de six mois.
IV - LA PREVENTION DE LA RECIDIVE
1) Les interdictions
Si le
délinquant exerce une profession ou tient un commerce subordonnés
à une autorisation officielle (médecin, pharmacien) et qu'il
commet dans l'exercice de son activité une infraction pour laquelle il
est condamné à une peine privative de liberté
supérieure à trois mois, il peut se voir interdire l'exercice de
sa profession pour une durée de six mois à cinq ans s'il y a lieu
de craindre de nouveaux abus.
Le juge peut aussi prononcer l'incapacité pour une durée de deux
à dix ans à l'encontre du magistrat ou du fonctionnaire coupable
d'un délit. De façon générale, toute personne
condamnée à la réclusion ou à l'emprisonnement peut
se voir déclarée incapable de remplir une charge ou une fonction
officielle pour une durée de deux à dix ans si l'infraction
montre qu'elle est indigne de confiance.
2) Le traitement des malades mentaux
Lorsqu'il est établi que l'abus commis résulte d'une maladie mentale ou de troubles graves de la personnalité, le juge peut ordonner l'hospitalisation ou l'internement du délinquant pour une durée qui n'est pas fixée d'avance mais qui dépend des effets du traitement.
3) L'extraterritorialité des dispositions pénales
De
façon générale, les autorités suisses peuvent
poursuivre en Suisse des
ressortissants suisses
pour des crimes ou des
délits commis à l'étranger si l'acte est
réprimé aussi dans l'Etat où il a été commis
et si l'auteur se trouve en Suisse ou s'il a été extradé
vers la Confédération en raison de son infraction. Cette
disposition existe depuis 1937.
Le projet de révision du code pénal va plus loin puisqu'il
prévoit que
tout délinquant, Suisse ou étranger
,
devrait pouvoir être puni en Suisse s'il se trouve en Suisse et que
l'acte est également réprimé dans l'Etat où
l'infraction a été commise.
Dans le cas particulier des abus sexuels sur des enfants, l'exigence de double
incrimination (en Suisse et dans le pays où l'infraction a
été commise) pourrait être supprimée.