ALLEMAGNE



Les principales règles applicables à l'éloignement du territoire résultent des articles 45 à 48 de la loi de 1990 sur les étrangers . Ils prévoient des dispositions spécifiques pour les étrangers qui ont été condamnés par les juridictions pénales.

Ces dispositions n'ont pas été modifiées lors de l'adoption de la loi sur l'immigration, entrée en vigueur le 1 er janvier 2003 et qui a apporté de nombreux changements à la loi sur les étrangers.

Les décisions d'expulsion sont prises séparément au niveau de chaque Land par les services administratifs compétents pour les questions d'immigration. Ceux-ci disposent d'une faculté d'appréciation plus ou moins grande selon que l'éloignement du territoire est obligatoire ou non, et selon que l'étranger appartient ou non à une catégorie protégée.

1) Le lien entre la condamnation pénale et la mesure d'expulsion

D'après l'article 45 de la loi sur les étrangers , les étrangers qui constituent une menace pour l'ordre et la sécurité publics, ou pour tout autre intérêt fondamental de la République fédérale peuvent être expulsés. La menace qu'ils représentent résulte de la réalisation d'infractions particulières ou de leur comportement général.

a) Les condamnations motivant l'expulsion

L'éloignement consécutif à une condamnation pénale fait l'objet de l'article 47 de la même loi, intitulé « Expulsion du fait du caractère particulièrement dangereux ».

Cet article distingue les condamnations entraînant automatiquement l'éloignement de celles qui l'entraînent en règle générale.

Les condamnations pénales entraînant obligatoirement l'expulsion

Le premier alinéa de l'article 47 dispose que, dans plusieurs cas, les étrangers doivent être expulsés du territoire de la République fédérale, sans qu'aucune appréciation de leur situation personnelle puisse être prise en compte, le cas des catégories protégées étant cependant à part. Il s'agit des personnes qui :

- ont été condamnées à une peine privative de liberté d'au moins trois ans, même prononcée avec sursis, à la suite d'une infraction commise intentionnellement ;

- ont été condamnées au cours des cinq dernières années à plusieurs peines privatives de liberté dont la durée cumulée atteint au moins trois ans ;

- ont fait l'objet d'un placement en détention préventive ;

- ont été condamnées soit à une peine privative de liberté d'au moins deux ans soit à une peine privative de liberté prononcée sans sursis pour avoir enfreint la loi sur les stupéfiants ou pour avoir violé certaines des dispositions du code pénal sur la sécurité publique (participation à une réunion ou à une manifestation interdite, ou détention d'une arme).

Les condamnations pénales entraînant en règle générale l'expulsion

D'après le second alinéa de l'article 47, l'expulsion est en principe décidée à l'encontre des étrangers qui :

- ont été condamnés à une peine privative de liberté d'au moins deux ans ou à une peine privative de liberté prononcée sans sursis ;

- ont commis une infraction à la loi sur les stupéfiants autre que la seule consommation, qu'ils aient ou non été condamnés ;

-  se sont livrés à des violences dans le cadre d'une manifestation interdite ou dissoute.

b) La prise en compte des antécédents judiciaires

L'article 46 de la loi sur les étrangers mentionne plusieurs cas susceptibles de justifier l'application du précepte général énoncé à l'article 45 (expulsion consécutive à une menace pour l'ordre public), parmi lesquels :

- la réalisation d'infractions répétées ou d'infractions isolées mais graves à des règles de droit ou à des décisions de justice ;

- la consommation de drogues dures.

Dans les cas prévus par l'article 46, la décision résulte d'une appréciation de l'administration. Elle n'a aucun caractère obligatoire.

2) Les étrangers protégés

a) Les catégories protégées

L'article 48 de la loi sur les étrangers précise que certaines catégories d'étrangers bénéficient d'une protection .

La protection n'empêche pas l'expulsion, mais limite l'application des dispositions sur l'éloignement aux cas où l'étranger constitue une menace très grave pour la sécurité publique , et en particulier aux hypothèses envisagées par le premier alinéa de l'article 47. L'expulsion de l'étranger, même protégé, est alors en principe prononcée (alors quelle est obligatoire pour les étrangers non protégés). Dans les hypothèses envisagées par le second alinéa de l'article 47, l'administration dispose d'une pleine capacité d'appréciation (alors que l'expulsion constitue la règle pour les étrangers non protégés).

La protection dépend principalement de la nature du titre de séjour détenu par l'étranger.

Les étrangers protégés sont ceux qui sont :

- titulaires d'un titre de séjour illimité et inconditionnel ;

- titulaires d'un permis de séjour (1( * )) dont la durée est illimitée et qui sont nés en Allemagne ou y sont arrivés alors qu'ils étaient mineurs ;

- titulaires d'un permis de séjour dont la durée est illimitée et qui sont mariés (ou « pacsés ») avec un étranger appartenant à l'une des deux catégories précédentes ;

- bénéficiaires du droit d'asile ou qui se sont vus reconnaître le statut de réfugiés ;

- titulaires du titre de séjour particulier accordé pour des raisons humanitaires urgentes.

Par ailleurs, les étrangers qui vivent au sein d'un foyer familial comportant des personnes de nationalité allemande jouissent de la même protection.

b) Les autres éléments de protection

Lorsque la décision d'expulsion n'est pas obligatoire, mais qu'elle constitue la règle générale ou qu'elle est laissée à l'appréciation de l'administration, celle-ci doit prendre en compte les éléments suivants :

- la durée du séjour de l'étranger en Allemagne et la nature de ses liens avec son pays d'accueil ;

- les conséquences du départ pour les membres de sa famille qui restent en Allemagne ;

- de manière générale, toutes les raisons humanitaires et personnelles qui peuvent s'opposer à l'expulsion.

En outre, la loi exclut le renvoi d'un étranger vers un État où sa vie et sa santé risquent d'être menacées.

3) L'expulsion

a) La durée de l'éloignement

La décision est en principe prise pour une durée indéterminée. Cependant, l'administration peut la prononcer pour une durée limitée.

b) La date d'expulsion

L'étranger est expulsé à sa sortie de prison. Celle-ci a généralement lieu avant qu'il ait purgé la totalité de sa peine. En effet, l'article 456a du code de procédure pénale prévoit la possibilité de libérer de manière anticipée les étrangers qui doivent quitter le territoire de la République fédérale .

Dans la plupart des Länder, la décision d'éloignement est exécutée peu avant la fin des deux tiers de la peine, c'est-à-dire juste avant le moment où la libération anticipée devient de droit indépendamment de la nationalité du condamné. Dans certains Länder, la décision d'éloignement est exécutée lorsque la moitié de la peine a été purgée.

*

* *

Les décisions d'éloignement prises à l'encontre d'étrangers nés en Allemagne ou qui y sont arrivés pendant leur enfance ont été très critiquées à la fin des années 90, mais sans qu'un réel débat public se développe. L'entrée en vigueur du nouveau code de la nationalité au 1 er janvier 2000 , qui permet l'acquisition de la nationalité allemande en raison de la naissance en Allemagne et qui facilite la naturalisation pour les étrangers vivant depuis longtemps en Allemagne, a modifié les termes du débat .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page