M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi.

M. Jérémy Bacchi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on nous avait promis que les jeux Olympiques auraient un héritage ; pourtant, financièrement parlant, avec près de 188 millions d’euros de coupes pour le seul programme « Sport », permettez-moi de ressentir un fort scepticisme !

Cette baisse concerne notamment les engagements à l’égard du sport du quotidien, qui subissent une réduction de crédits de près de 151,6 millions d’euros, ainsi que le financement du Pass’Sport avec une coupe de 10 millions d’euros.

Le programme « Sport » devient ainsi l’une des missions proportionnellement les plus amputées dans ce budget 2025, sans même compter le coup de rabot de 50,5 millions d’euros que ces crédits ont connu au mois de février 2024.

Et voilà qu’aujourd’hui, madame la ministre, vous entendez opérer une coupe supplémentaire de 34,3 millions d’euros par voie d’amendement ! Le groupe CRCE–K condamne fermement, tant sur la forme que sur le fond, cette décision qui envoie un message désastreux aux millions de sportifs français.

Dès lors, je m’interroge, madame la ministre, sur la sincère volonté de votre ministère en matière d’héritage des jeux Olympiques. J’en veux pour preuve les ressources du plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 », gérées par l’Agence nationale du sport, qui vont être réduites de 100 millions d’euros dans ce PLF 2025. Cette coupe équivaut peu ou prou aux sommes déjà prévues pour ce programme phare en faveur des équipements sportifs. Cela signifie que les autorisations d’engagement octroyées à l’ANS pour de nouveaux chantiers n’auront pas leur contrepartie en crédits de paiement dans le PLF 2025.

Rappelons que deux tiers des 270 000 équipements sportifs qui maillent notre pays ont pourtant besoin d’être rénovés. Je pense en particulier aux piscines : la situation de nombre d’entre elles est plus que préoccupante en raison de leur vieillissement et du coût énergétique que celui-ci implique.

Par ailleurs, alors même que les collectivités, premières financeuses du sport en France, avec 12,5 milliards d’euros dépensés chaque année, sont confrontées à des coûts d’investissement et de fonctionnement croissants en raison de la vétusté de leurs équipements sportifs, leur budget sera ponctionné de près de 5 milliards d’euros.

Cette réduction drastique du budget des collectivités aura des répercussions évidentes sur leurs investissements en direction du sport ; cela ne fait que renforcer mon interrogation quant à votre volonté de donner un véritable héritage aux jeux Olympiques.

Dès lors, alors que les JO et le choix du sport comme grande cause nationale en 2024 avaient suscité une véritable dynamique, dont a notamment témoigné la hausse de 10 % du nombre de nouveaux licenciés, comment peut-on sérieusement prétendre vouloir réussir un quelconque héritage en amputant si durement le budget du programme « Sport » tout en réduisant de manière aussi drastique le budget de nos collectivités ?

Quant à nous, membres du groupe CRCE-K, il nous semble urgent de poursuivre l’effort entrepris au travers du plan de création de 5 000 équipements, donc d’annuler la baisse de 100 millions d’euros prévue en la matière dans ce PLF.

Nous avons d’ailleurs déposé un amendement en ce sens. Nous souhaitons financer cette proposition par la suppression du SNU, qui ne remplit pas sa mission en matière de mixité sociale et n’est pas en mesure d’assurer l’ensemble de ses missions du fait d’un manque d’encadrement.

De plus, il nous apparaît plus que nécessaire de conserver dans ce budget la hausse de 113,4 millions d’euros des ressources de l’ANS issues de la taxe sur les paris sportifs en ligne, proposition déjà adoptée par le Sénat. Le déplafonnement en question ne mettra point en difficulté les opérateurs de jeux. Selon le rapport de 2023 de l’Autorité nationale des jeux (ANJ), le marché des jeux en ligne a retrouvé en 2023 les niveaux de croissance particulièrement dynamiques observés depuis 2017 : le produit brut des jeux a progressé de 7,2 %, pour s’établir à 2,3 milliards d’euros.

Pour conclure, nous pensons que le succès des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) ne doit pas être jugé à l’aune du seul nombre de médailles remportées : l’augmentation du nombre de pratiquants d’une activité physique et sportive, autre indicateur crucial, ne peut passer que par le soutien à une politique publique sportive ambitieuse.

Dès lors, pour toutes les raisons que j’ai exposées, nous voterons contre ce budget.

M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier.

Mme Mathilde Ollivier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la situation est particulière et inédite. Ce discours, madame la ministre, s’adressait à l’origine à votre prédécesseur. Le contexte politique fait que je m’adresse à vous au sujet d’orientations et de crédits budgétaires sur lesquels vous n’avez pas, vous-même, travaillé.

Certes, les hommes et les femmes politiques changent, mais la politique, elle, reste la même. Le problème est bien là !

À la découverte de ce projet de loi de finances, à la découverte d’une baisse de 231 millions d’euros des crédits de la mission pour l’année 2025, ma réaction fut sans équivoque : de la surprise et de la déception !

En effet, la France a vécu pendant deux mois au rythme de la compétition sportive. Le succès populaire des Jeux a parfaitement illustré l’importance du sport dans les consciences collectives.

Pourtant, le programme « Sport » subit de plein fouet l’austérité budgétaire, avec une baisse globale de 182 millions d’euros de crédits : un recul sans précédent. On a l’impression qu’une fois les Jeux terminés, on tourne la page, pour passer à autre chose. Pourtant, cet héritage, c’est maintenant qu’il peut s’inscrire durablement dans nos politiques publiques.

Nous, membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, proposons plutôt une grande loi de programmation, qui aurait pour objectif de faire du sport un terrain de jeu populaire et émancipateur. Ce texte reposerait sur trois grands piliers.

Premièrement, il faut valoriser la pratique du sport dès le plus jeune âge. Pour cela, nous souhaitons revenir sur la baisse des crédits du Pass’Sport, véritable allocation de rentrée sportive qui permet à des familles d’alléger le coût exorbitant des licences sportives. Nous proposons également d’investir la question du temps libre, en reprenant les dispositions de ma proposition de loi visant à promouvoir et démocratiser l’accès aux vacances sportives.

Deuxièmement, nous voulons que soient traitées les problématiques des violences sexuelles et sexistes dans le sport.

Troisièmement, nous posons la question des infrastructures et de l’accessibilité des complexes sportifs. Aujourd’hui, la moitié des équipements sportifs construits avant 1985, soit 50 000 sur tout le territoire, n’ont jamais été rénovés. Au vu de l’urgence climatique que nous vivons, il faut lancer une politique ambitieuse de rénovation du bâti et ainsi soutenir nos collectivités locales. C’est également un enjeu d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap. Après les jeux Paralympiques, il est particulièrement regrettable de voir le Gouvernement reculer sur le plan « 5 000 équipements sportifs – Génération 2024 ».

Ainsi, les coupes budgétaires touchent tous les pans de notre politique sportive. Une seule exception doit être relevée : le Gouvernement propose, par amendement, de créer un nouveau programme « Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver 2030 » destiné à financer un nouvel établissement public.

Au moins, me direz-vous, c’est l’occasion d’avoir des échanges sur le sujet. En effet, la droite sénatoriale refuse que l’on en débatte dans notre assemblée : elle s’oppose au lancement d’une mission d’information sur cet événement, dont les conséquences financières, économiques, sociales et environnementales sont pourtant majeures et nécessitent un débat parlementaire.

Pour ce qui concerne le programme « Jeunesse et vie associative », les contours du budget proposé ne sont pas plus réjouissants.

Qu’il s’agisse du Fonjep ou des associations agréées de jeunesse et d’éducation populaire, nous déplorons le manque de considération dont on fait montre pour ces acteurs incontournables de la cohésion sociale et territoriale, alors que nous devrions plus que jamais les soutenir.

Toutefois – c’est assez rare pour être signalé –, nous marquons une victoire dans ces débats. Nous nous réjouissons en effet de la fin programmée et annoncée du service national universel. C’est un combat que les Écologistes mènent depuis le début de ce dispositif.

Le SNU a été un échec sur tous les plans : coûts exorbitants, objectifs flous, manque de mixité sociale, dérives permanentes, dispositif esquivé et critiqué par la jeunesse… En consacrant cette suppression définitive du service national universel, nous proposons de rediriger ses crédits budgétaires vers le sport.

Vous l’aurez compris, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

M. le président. La parole est à M. David Ros. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. David Ros. Permettez-moi tout d’abord, madame la ministre, de vous féliciter pour votre nomination, mais surtout pour l’organisation remarquable des derniers JOP à Paris, résultat incontestable à mettre à votre crédit.

Du crédit, nous passons à l’héritage : le budget 2025 est l’occasion de se jeter à l’eau. Alors, madame la ministre, faut-il voir dans ce budget, une piscine à moitié vide ou une piscine à moitié pleine ? (Sourires.)

Nous débattons aujourd’hui d’une mission qui concerne près de 30 millions de nos concitoyens : sportifs licenciés, bénévoles associatifs et jeunes engagés dans divers dispositifs. Ce budget est une trahison de leur engagement et de leurs espoirs.

Ainsi, les crédits alloués au sport pour 2025 subissent une réduction de près de 170 millions d’euros, soit une baisse de plus de 23 % par rapport à 2024. Et nous apprenons aujourd’hui que vous allez encore nous proposer, par amendement, une baisse supplémentaire de 34 millions d’euros pour le sport ! En cette night session, ce n’est pas l’Open de Bercy, mais le « Close de Bercy » ! (Sourires.)

Dès demain, si ce projet de budget n’est pas amendé, le sport représentera moins de 0,15 % du budget de la Nation, une part dérisoire, indigne des ambitions pourtant proclamées par le Président de la République lui-même. Comment, dans ces conditions, répondre à l’élan collectif généré par Paris 2024 ?

Les chiffres sont pourtant sans équivoque : à la rentrée, les clubs ont enregistré une hausse des inscriptions de 32 % en triathlon, de 25 % en escrime, de 20 % en tennis de table. En revanche, faute de moyens, plus de 100 000 inscriptions ont été refusées en basket-ball et en hand-ball. Débordés, les clubs instaurent des quotas, limitent les entraînements et voient leur capacité à accueillir s’effondrer.

Bref, la passion des Français pour le sport se heurte à une gestion budgétaire qui transforme cet engouement en frustration.

À cela s’ajoute l’abandon de la généralisation des deux heures hebdomadaires supplémentaires au collège. S’y ajoute également le manque d’ambition pour le sport à l’université, le plus grand angle mort de la politique sportive dans notre pays, bien en deçà du niveau des pays anglo-saxons, pour ne citer qu’eux.

Le 7 avril 2023, une feuille de route sur le développement du sport universitaire était signée. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Je vous serais reconnaissant, madame la ministre, de bien vouloir informer le Sénat de vos avancées en la matière.

Ce budget 2025 apparaît comme une occasion manquée ; malheureusement, il ne reste plus grand-chose dans le bassin : je dirais même que nous touchons le fond !

Mon collègue Adel Ziane, en seconde mi-temps (Sourires.), reviendra plus précisément sur l’attente et les besoins des collectivités locales, en particulier sur les équipements nautiques. Je lui laisserai également le soin d’annoncer le vote du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sur cette mission, même s’il n’y aura ni suspense ni prolongation… (Nouveaux sourires.)

Madame la ministre, sachez que nous resterons sur le terrain, à vos côtés. Nous défendrons des amendements et soutiendrons tous ceux dont l’adoption permettrait de modifier le budget à la hauteur des enjeux sportifs mentionnés.

Nous resterons en tenue, jusqu’au coup de sifflet final pour travailler à une politique sportive et associative ambitieuse, cohérente et pérenne. (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la reprise, cette semaine, des débats budgétaires constitue une épreuve pour la République. En cas de nouvel échec, en cas de nouvelle censure, même si cela n’a pas été le cas aujourd’hui, fort heureusement, le débat sera inévitable : peut-on surmonter la crise sans changer nos institutions ? Ce qui est en jeu, c’est tout autant le vote du budget que le procès de la Ve République.

Le débat sera posé, mais il ne sera pas tranché. Nos institutions peuvent-elles nous permettre de sortir de la crise institutionnelle ? Ou bien contribuent-elles au contraire au blocage, comme celles de la IVe République participaient de la paralysie de l’action publique lors de la guerre d’Algérie ?

Notre conviction, au groupe Les Indépendants, c’est que la Ve République n’est pas le problème, mais la solution. Deux enjeux sont devant nous. Le premier, le plus évident et le plus urgent, c’est de rétablir nos finances publiques. Le second, qui dépend du premier, c’est de préserver l’unité de la République.

La mission « Sport, jeunesse et vie associative », dont nous examinons aujourd’hui les crédits, est emblématique de ces deux défis.

Certes, les budgets afférents représentent à peine 0,3 % du budget général, soit un poids relativement faible dans les finances publiques. Nos débats risquent donc de paraître quelque peu anecdotiques, eu égard à la gravité de la crise financière qui nous menace.

Mais ces débats revêtent une portée symbolique très forte. Ces dépenses peuvent sembler non essentielles, parce que subventionner des associations sur deniers publics n’est pas une mission première de l’État. Elles sont, à coup sûr, très difficiles à réduire, car derrière chacune de ces dépenses il y a des emplois, des structures qui vivent et dépendent de ces financements et qui souhaitent les voir pérennisés. Et nombre de ces structures, malgré leur dépendance financière, comptent des hommes et des femmes qui œuvrent utilement pour le bien public.

Toutefois, face à la menace de la crise financière, il est nécessaire, il est de notre responsabilité collective de réduire ces dépenses ; je pense tout autant à certaines subventions aux associations qu’aux dépenses de fonctionnement du ministère.

Tel est le sens d’un amendement que notre groupe défendra. Comme pour tous les crédits qui ne relèvent pas des missions régaliennes de l’État, nous demandons une baisse d’au moins 2 %.

Pour conclure, j’ajouterai un mot sur le service national universel, dont nous allons, si je ne me trompe, acter la fin dans ce budget.

Le SNU est né d’une très belle idée. C’était, au fond, la volonté de ressusciter, sous une autre forme, le service militaire ou plutôt de réactiver son pouvoir d’intégration républicaine tout en le dépouillant de son caractère militaire.

C’était sans doute, par construction, mission impossible. Mais il me semble louable d’avoir essayé. Ce dispositif n’a pas fonctionné. Il a même échoué. Il faut constater cet échec et en tirer les conclusions. Rien ne sert de préserver des dispositifs auxquels on ne croit plus. C’est le sens d’un amendement que je défendrai.

Mais l’objectif visé, à savoir renforcer l’adhésion des plus jeunes générations à la République et stimuler la cohésion pour faire nation, ne sera, heureusement, pas enterré avec le dispositif. Seulement, il nous faudra trouver de nouveaux moyens plus efficients et plus intégrateurs d’y parvenir.

Je suis certaine, madame la ministre – je salue à cette occasion votre action –, que le sport est un excellent moyen d’y contribuer. L’immense réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris nous l’a rappelé : le sport est un puissant levier d’intégration républicaine.

Parce qu’il permet à tout un chacun de s’élever, par son travail personnel, par son goût de l’effort, par sa force de caractère, sans aucune considération sociale, ethnique ou religieuse, le sport est le creuset républicain par excellence. C’est aussi un excellent médicament préventif pour notre santé corporelle ou mentale.

Puisse l’esprit des jeux Olympiques, tout à la performance et à l’excellence, nous guider dans nos débats budgétaires afin de rétablir au plus vite nos finances publiques ! Nous voterons les crédits de cette mission. (M. Vincent Louault applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Do Aeschlimann. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le succès des jeux Olympiques de l’été 2024 a rappelé combien le sport pouvait être un facteur de cohésion nationale et de rayonnement international.

Cependant, cette discussion me permet d’insister à la fois sur l’importance du sport pour tous et sur les points de vigilance qui s’imposent dans cette période de sérieux budgétaire.

Il nous est proposé, dans ce projet de loi de finances pour 2025, une réduction importante des crédits du programme « Sport ».

Au total, hors JOP, cela représente une baisse de 222 millions d’euros si l’on prend en compte l’amendement gouvernemental de dernière minute, soit 30 % du budget global.

Ces baisses, bien qu’elles soient de taille, peuvent sembler compréhensibles dans le contexte budgétaire et après les efforts exceptionnels réalisés pour les jeux Olympiques et Paralympiques. Mais rappelons que les JO de Paris ont suscité un enthousiasme qu’il ne faudra pas décevoir. Et nous devons également préparer les JO d’hiver de 2030.

Certains éléments de ce budget vont dans le bon sens. Je salue le maintien du plan « Génération 2024 », à hauteur de 100 millions d’euros.

Cependant, je voudrais partager avec vous quelques-unes des préoccupations que m’inspire ce budget. Ces choix auront en effet des conséquences très concrètes sur le terrain.

Cette baisse de crédits intervient alors que, comme l’a souligné le rapporteur Lozach, de nombreux équipements sportifs sont vétustes. En effet, près des deux tiers des 270 000 infrastructures existantes ont été mises en service avant 1995 et nécessitent une rénovation.

Parmi les équipements les plus dégradés figurent les piscines, dont beaucoup datent du plan « mille piscines » des années 1970. Ces infrastructures vieillissantes et énergivores nécessitent une modernisation.

Certaines piscines ferment en raison du coût de leur entretien. Cela est problématique, car la natation scolaire fait partie intégrante des programmes d’enseignement. On trouve un autre exemple de ce problème dans la fermeture de nombreuses patinoires, notamment en Île-de-France. Rien que dans le département des Hauts-de-Seine, deux patinoires ont fermé récemment : à Colombes, en 2022, et à Boulogne-Billancourt l’année dernière.

La construction de ces équipements sportifs est largement assumée par les collectivités locales, surtout les communes, toutes confrontées à une baisse de leurs ressources.

Au-delà de la question des infrastructures, le fonctionnement des clubs risque d’être affecté par la baisse du budget alloué à l’Agence nationale du sport, un pilier de l’écosystème sportif. L’engagement des bénévoles doit pourtant être soutenu.

Surtout, la réduction, de près de 10 millions d’euros, des crédits alloués au Pass’Sport soulève des interrogations. Ce dispositif a permis à de nombreux jeunes, souvent issus de familles modestes, d’accéder au sport en réduisant le coût des licences. Il contribue à l’égalité des chances, à l’inclusion et à l’amélioration de la santé publique.

Alors que la sédentarité devient un enjeu de société, réduire l’enveloppe du Pass’Sport pourrait envoyer un signal contre-productif.

À vrai dire, le sport doit être envisagé, non comme une simple dépense, mais comme un investissement dans notre avenir.

Alors que la commission des affaires sociales du Sénat lance une mission d’information sur les politiques de prévention en santé, je veux souligner que le sport en constitue l’un des piliers. Investir dans le sport aujourd’hui, c’est protéger la santé demain. La recherche scientifique montre les bienfaits du sport contre un très grand nombre de maladies. Alors que 2025 est l’année de la santé mentale, rappelons que le sport est plus efficace que la médication pour lutter contre les détresses psychologiques.

Mes chers collègues, madame la ministre, bien que le contexte budgétaire soit tendu, nous devons nous donner les moyens de rester une grande nation sportive ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Adel Ziane. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Adel Ziane. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l’a souligné mon collègue David Ros, les crédits de cette mission sont malheureusement très insuffisants au regard des défis que nous devons relever.

Madame la ministre, je salue l’action que vous avez menée au sein du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop), s’agissant en particulier de l’héritage.

Cela étant, nous constatons une forme de dissonance, qui nous frappe tous ce soir, entre le moment exceptionnel que nous avons vécu collectivement lors des jeux Olympiques et Paralympiques l’été dernier et ce projet de budget.

En tant qu’élu de la Seine-Saint-Denis, territoire qui a accueilli les jeux Olympiques et Paralympiques, je suis particulièrement préoccupé.

Les collectivités territoriales, premiers financeurs publics du sport, sont les grandes sacrifiées de ce budget. Alors qu’elles contribuent aux activités sportives à hauteur de 12,5 milliards d’euros par an, soit près du double du financement de l’État, elles devront faire face à des coupes drastiques.

Des équipements neufs, construits ou rénovés à l’occasion des Jeux risquent de ne pas profiter à celles et ceux qui souhaitent les utiliser. La baisse des crédits témoigne d’une désinvolture coupable, que nous dénonçons.

La généralisation des deux heures de sport au collège ? Abandonnée.

Le plan « Génération 2024 » et les 5 000 équipements promis ? Renvoyés aux calendes grecques, comme l’ont rappelé de nombreux collègues, de droite comme de gauche.

Dans ce contexte, le vieillissement de nos infrastructures – 61 % d’entre elles datent d’avant 1995 – continue de compromettre l’accès de tous à des équipements dignes de ce nom.

Où est la volonté de faire du sport un levier d’émancipation, madame la ministre, comme on nous l’avait promis ?

J’en viens aux crédits de la jeunesse. L’augmentation des crédits de l’Agence du service civique, que nous saluons, ne vise qu’à renflouer une trésorerie exsangue et ne permettra pas de financer plus de missions.

Pendant ce temps, le service national universel continue d’accaparer des moyens disproportionnés : 128 millions d’euros pour seulement 66 000 jeunes. Ce dispositif, dont le coût moyen s’élève à 2 900 euros par participant, n’atteint pas ses objectifs de mixité sociale et n’a pas d’impact collectif.

Le tissu associatif, pilier de notre cohésion sociale, est lui aussi fragilisé. Avec ses 16 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés, il est en première ligne face aux crises sociales et économiques. Pourtant, il subit de plein fouet l’inflation, la baisse des subventions et la transformation des financements publics en appels à projets, souvent inaccessibles aux petites structures. En quinze ans, les associations ont vu la part des subventions dans leurs ressources diminuer de 41 %.

Ce budget est une occasion manquée. Pourtant, des solutions existent.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain fera de nombreuses propositions par voie d’amendements : la réallocation des crédits du SNU au sport ; un plan pluriannuel ambitieux pour moderniser nos infrastructures sportives, garantir leur accessibilité et répondre à l’afflux de nouveaux licenciés ; un soutien accru au bénévolat associatif par une revalorisation des postes Fonjep et le financement d’emplois dédiés ; la relance du sport universitaire, dont le développement permettrait aux jeunes une pratique nécessaire à leur équilibre et accessible sans frais supplémentaires.

Madame la ministre, le sport et l’engagement associatif ne sont pas un luxe. Ce sont des droits, des vecteurs d’égalité. Sans inflexion majeure, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Mathilde Ollivier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un honneur pour moi d’être pour la première fois aujourd’hui au Sénat au banc du Gouvernement, et ce pour discuter avec vous des moyens de mon ministère. Je me réjouis du maintien d’un grand ministère réunissant les sports, la jeunesse et la vie associative et je suis déterminée à mettre à profit ce beau portefeuille pour faire vivre ses différentes composantes entre elles.

Ce projet de budget s’inscrit dans un contexte politique très particulier et très contraint, notamment par les effets de la censure. Il est aussi le premier après cette magnifique réussite que furent les Jeux de Paris 2024. Vous connaissez mon attachement profond à l’héritage de ces Jeux, à ce que nous pourrons transmettre à nos enfants, à nos sportifs et à notre société. Aussi, comme je l’ai déjà indiqué publiquement, je me battrai pour que cet héritage ne soit pas sacrifié.

Vous êtes nombreux à l’avoir relevé, mes crédits connaissent une baisse significative dans la version initiale du PLF. Les crédits du sport diminuent de 268 millions d’euros par rapport à 2024, soit une baisse de 29 %.

Cette baisse s’explique par deux éléments.

Premièrement, elle se justifie par l’extinction logique de dépenses spécifiquement liées à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques pour 141 millions d’euros : 86 millions d’euros sur le programme 350 dédié aux infrastructures des Jeux et 55 millions d’euros sur le programme 219 « Sport ».

Deuxièmement, cette baisse s’explique par une réduction des moyens de 127 millions d’euros des mesures hors jeux Olympiques et Paralympiques : de 100 millions d’euros sur le plan d’équipements sportifs ; de 10 millions d’euros sur le Pass’Sport ; de 10 millions d’euros sur les emplois socio-sportifs ; de 4 millions d’euros sur les deux heures de sport supplémentaires au collège ; de 3 millions d’euros sur les dispositifs d’insertion.

À cela s’ajoute la baisse de 6 millions d’euros du plafond des taxes affectées à l’Agence nationale du sport pour contribuer au redressement des comptes publics, auquel je sais le Sénat très attaché.

Malgré ces baisses, ce budget dans sa version initiale stabilisait les moyens consacrés à la performance sportive à hauteur de 108 millions d’euros afin de poursuivre la dynamique des Jeux et de se projeter vers les prochaines échéances.

Les moyens des établissements publics du ministère étaient en progression et passaient de 142 millions d’euros à 146 millions d’euros.

Nous préservions aussi les emplois du ministère, en particulier les 1 442 emplois de conseillers techniques sportifs (CTS), comme en 2024.

La stratégie nationale sport santé, portée avec le ministère de la santé, devait être poursuivie et son budget stabilisé à 7,5 millions d’euros. Nous travaillons d’ailleurs, mon collègue et moi, à une nouvelle stratégie 2025-2030 à laquelle je serai évidemment très attentive.

Je suis aussi très sensible à la nécessité de poursuivre la dynamique en faveur du sport à l’école et durant les temps périscolaires.

À cet égard, je tiens à adresser mes remerciements à tous les professeurs des écoles et aux professeurs d’EPS, qui jouent un rôle majeur, essentiel, pour former des citoyens physiquement cultivés, critiques et autonomes, capables de s’engager dans une pratique sportive régulière.

Le programme « 30 minutes d’activité physique quotidienne à l’école », dont la généralisation est engagée, est une avancée réelle pour la santé des élèves, mais aussi pour les conditions d’apprentissage. Je souligne en outre que cette avancée ne pèse pas sur les comptes publics ! Elle coûte zéro euro dans le budget de l’éducation nationale.

Le programme « 2 heures supplémentaires de sport au collège » répond à un enjeu important, à un âge où nous constatons le décrochage de la pratique. Le dispositif est recentré sur les établissements où les besoins sont les plus forts, dans les établissements des réseaux d’éducation prioritaire, que ce soit en REP ou en REP+, où la sédentarité touche le plus grand nombre d’élèves.

Enfin, au lendemain des Jeux, la dynamique du Pass’Sport est très bonne. On dénombrait ainsi 1,65 million de bénéficiaires l’année dernière, contre 1,38 million en 2023, soit une nette hausse.

Pour les équipements sportifs, nous devions engager 100 millions d’euros l’an prochain et poursuivre ainsi le plan « Génération 2024 », dans un contexte où, je le sais, les inquiétudes des collectivités sont fortes au regard de l’effort budgétaire qui leur est demandé.

Ce projet de budget pour 2025 nous permet d’engager également la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques des Alpes en 2030 via l’octroi de la garantie financière de l’État. Il prévoit aussi la création d’un nouveau programme budgétaire pour le financement de l’organisation de ces Jeux. Nous aurons l’occasion d’en discuter ultérieurement lors de l’examen d’un amendement gouvernemental visant à y consacrer de premiers crédits afin de permettre la mise en place de la nouvelle Solideo, la Société de livraison des ouvrages olympiques, l’établissement public qui sera chargé de la livraison des ouvrages olympiques. Voter cet amendement, c’est poser la première pierre du projet Alpes 2030.

Je profite également de ce propos pour revenir sur l’amendement de Michel Savin, adopté en première partie du PLF, et sur les amendements identiques qui avaient aussi été déposés par plusieurs d’entre vous. Ils tendent à prévoir le déplafonnement de la taxe affectée aux paris sportifs et à ajouter 113 millions d’euros à nos moyens. Ces amendements ont reçu un avis défavorable du Gouvernement. Néanmoins, je sais que ce sujet, qui a animé vos débats, a suscité un consensus transpartisan dans les deux assemblées.

En 2012, après les jeux de Londres, le Royaume-Uni a connu dans ses clubs le même engouement que celui que nous connaissons aujourd’hui. En 2013, cette dynamique avait disparu, sacrifiée au nom de politiques budgétaires qui avaient réduit drastiquement les moyens alloués au sport. Sans infrastructures, sans éducateurs, il avait alors été impossible de faire vivre cet héritage. Tout au long de l’aventure Paris 2024, nous nous sommes collectivement promis de ne pas répéter cette erreur. Je sais que c’est également votre cas et que c’est la philosophie qui vous a guidés quand vous avez adopté cet amendement.

À titre personnel, je considère qu’il est vertueux que le sport finance le sport. C’est le cas de l’amendement Savin, dont je comprends la philosophie et les objectifs. Il devra trouver un écho lors de la navette parlementaire et nous devons être à l’écoute des propositions qui ont été faites par les parlementaires de tous bords sur ce sujet. La poursuite de nos débats doit ouvrir un certain nombre de perspectives pour le sport, la jeunesse et la vie associative.

J’y insiste, il ne faut pas opposer la politique en faveur du sport et celle en faveur de la jeunesse. Il s’agit évidemment pour moi d’un tout, qui doit avoir une cohérence d’ensemble et une ambition commune.

Or un certain nombre d’amendements visent à transférer les crédits du service national universel vers le sport. J’y suis défavorable. Si nous pouvons convenir que le budget du sport, d’autant plus en cette année post-olympique, doit être ambitieux, il ne me semble pas opportun, sans plus de recul, de sacrifier le SNU au profit du sport.

Je ne voudrais pas que mon propos prête à confusion : je ne soutiens pas une forme de statu quo. Si le SNU a suscité plusieurs observations et critiques – il faut les entendre et les objectiver –, il recueille par ailleurs un taux de satisfaction élevé, aussi bien chez les jeunes que chez leurs enseignants, qui relèvent un effet positif sur leurs élèves. Il faut également entendre ces retours. Nous devons maintenant travailler à l’amélioration de ce dispositif en associant pleinement le Parlement.

Dans cette période de transition, le Gouvernement prévoyait pour 2025 une dotation ramenée à 80 millions d’euros pour le SNU. C’était l’objet d’un amendement gouvernemental déposé en fin d’année dernière. Ce montant permettait de financer 40 000 séjours, ce qui correspond exactement aux inscriptions à date.

Un nouvel amendement gouvernemental a été déposé aujourd’hui, tendant à prévoir ces mêmes économies et un effort supplémentaire de 34 millions d’euros sur le sport et de 34 millions d’euros sur la jeunesse et la vie associative. Ainsi, les économies supplémentaires dans notre mission atteignent 123 millions d’euros. Je suis consciente que cela complique encore davantage l’équation que je viens de décrire. Cela résulte évidemment du coût de la censure.

Les autres moyens de mon ministère destinés à accompagner la jeunesse doivent être préservés.

L’Agence du service civique bénéficiera de 600 millions d’euros en 2025, ce qui permettra de maintenir l’objectif de 150 000 volontaires par an en 2025. Le service civique écologique, lancé en 2024, sera poursuivi en 2025. Nous sommes en ligne avec l’objectif de 50 000 volontariats sur cette thématique d’ici à 2027.

Le mentorat, déployé depuis 2021, se poursuit et la majoration de 5 millions d’euros de sa dotation en 2024 est pérennisée. Je suis très attachée à ce dispositif en faveur de l’égalité des chances, dont le Premier ministre a parlé dans sa déclaration de politique générale. Je me réjouis de sa montée en puissance : alors que 30 000 jeunes ont bénéficié d’un mentorat en 2020, nous avons passé la barre de 160 000 jeunes accompagnés en 2024.

Les moyens du dispositif « colos apprenantes » seront également reconduits en 2025 à hauteur de 40 millions d’euros, comme en 2024. Ce dispositif a permis à 300 000 jeunes de partir en séjour depuis 2020. Le maintien du budget en 2025 permettra à 50 000 enfants d’en bénéficier.

Les moyens du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) et du Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) sont également préservés.

Pour simplifier la vie des associations, nous nous appuyons sur le réseau Guid’Asso afin de leur offrir un service de proximité, d’accueil et de conseil. Nous finaliserons d’ailleurs sa généralisation dans l’ensemble des régions, notamment en outre-mer, tout en portant une attention particulière à Mayotte.

Cette année, dans une grande communion nationale, nous nous sommes tous retrouvés unis derrière nos athlètes, dont nous avons admiré les performances historiques. Ces champions ont pu compter sur les moyens mis à disposition de la haute performance. Par leurs exploits, leurs émotions, leur proximité avec les Français, ils ont conquis et inspiré la jeunesse de notre pays.

Cette jeunesse s’est ensuite tournée à la rentrée vers les clubs de chacune de nos villes, de chacun de nos villages, dans tous les territoires. Certains seront les champions de demain, mais tous noueront avec le sport une relation unique tout au long de leur vie. Nous devons accompagner ce mouvement et conserver cet élan. Je suis sûre que vos travaux et la poursuite de la navette nous permettront d’atteindre cette ambition.