M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Cet article 8 se justifie aussi par l’augmentation parallèle du taux d’inflation et du produit intérieur brut nominal français, qui a mécaniquement fait diminuer le niveau relatif de ces seuils et contribué à une augmentation significative des notifications à l’Autorité de la concurrence.
Les nouveaux seuils prévus à l’article 8 tiennent compte, outre de la hausse du PIB et de l’inflation, du caractère problématique des opérations de concentration notifiées à l’Autorité de la concurrence sur les cinq dernières années.
Sachez que les nouveaux seuils ont été déterminés après une analyse approfondie des opérations susceptibles de sortir du champ de contrôle de l’Autorité de la concurrence pour bien s’assurer que les opérations qui ne seraient plus notifiées ne risquaient pas de soulever de problèmes de concurrence.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 307.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, c’est une contradiction : vous prétendez être au service des travailleurs de ce pays, mais vous allez constamment contre leur intérêt économique !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 124 rectifié est présenté par MM. Masset, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold et Guiol et Mmes Jouve et Pantel.
L’amendement n° 377 est présenté par Mme Poncet Monge, MM. Dossus, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 3
Remplacer le nombre :
250
par le nombre :
200
II. – Alinéa 4
Remplacer le nombre :
80
par le nombre :
67
La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 124 rectifié.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à recalculer les seuils généraux prévus à l’article 8 à partir desquels les entreprises doivent notifier leurs projets d’opérations de concentration auprès de l’Autorité de la concurrence.
Ses auteurs se fondent ainsi sur le taux d’inflation cumulé plutôt que sur le PIB, ce qui permettrait de fixer un seuil plus équitable ne favorisant pas indûment les grandes entreprises et préservant l’esprit de cette obligation de notification.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 377.
Mme Raymonde Poncet Monge. Aucune révision des seuils généraux n’a eu lieu depuis 2004, non plus que des seuils applicables au commerce de détail depuis 2008. Il était donc nécessaire de les réévaluer.
Notre amendement vise non pas à aller à l’encontre de cette révision, mais à uniformiser les taux de recalcul desdits seuils. En effet, si les seuils applicables au commerce de détail ont été recalculés sur le taux d’inflation cumulé, les seuils généraux l’ont été en fonction du taux de croissance du PIB – c’est une nouveauté !
Ce double taux conduit à surélever les seuils généraux en comparaison des seuils de commerce de détail en leur permettant d’aller au-delà de la nécessaire prise en compte de l’inflation, ce qui revient en réalité à avantager les grandes entreprises en élevant le seuil à partir duquel elles sont obligées de notifier leurs opérations de concentration à l’Autorité de la concurrence.
Cet avantage n’a pas de justification – certainement pas celle de l’inflation – et le recalcul des seuils généraux en fonction la seule inflation maintient les mêmes niveaux de seuils à euros constants là où la non-prise en compte de l’inflation les abaissait. Mais au-delà de l’inflation, on modifie les seuils en les élevant.
En conséquence, cet amendement tend à corriger les seuils généraux en calculant ces seuils de chiffre d’affaires sur le taux d’inflation cumulé et non sur le PIB, afin de retenir un seuil qui ne soit pas biaisé au profit des grandes entreprises et d’assurer une uniformisation juste du calcul des deux seuils.
Madame la ministre, pourquoi deux modes de calcul, dont l’un est plus favorable aux grandes entreprises ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Yves Bleunven, rapporteur. Le niveau des seuils proposé par l’Autorité de la concurrence me semble justifié, et dans la limite de ce que permet le règlement européen sur les concentrations.
La méthodologie utilisée me paraît également pertinente, d’autant que la quasi-totalité des opérations qui ne seront plus notifiées à l’Autorité de la concurrence font l’objet de décisions simples d’autorisation, sans condition.
Encore une fois, c’est une mesure attendue par le monde économique : avis défavorable sur les amendements identiques nos 124 rectifié et 377.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Monsieur le rapporteur a évoqué la méthodologie, c’est une disposition qui intervient à la suite des analyses de l’Autorité de la concurrence sur les cinq dernières années.
J’y insiste, nous avons également effectué une analyse préventive précise des opérations susceptibles de sortir du champ de contrôle de l’Autorité de la concurrence pour nous assurer que ces opérations ne risqueraient pas de soulever de problèmes de concurrence.
Réhausser les seuils généraux à 250 millions d’euros pour le chiffre d’affaires mondial et à 80 millions d’euros pour le chiffre d’affaires en France ne favorisera pas indûment les grandes entreprises, dont les opérations resteront notifiables à l’Autorité.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, comme la commission, émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je remercie Mme la ministre, qui vient de m’expliquer de façon très pédagogique pourquoi il y a deux taux…
Je suis d’accord sur le principe de la révision, puisqu’il s’agit de tenir compte de l’inflation ; mais pourquoi les seuils applicables au commerce de détail suivent-ils à euro constant l’inflation cumulée, alors que les seuils généraux des grandes entreprises sont indexés sur le PIB ?
Je rappelle que le produit intérieur brut n’a pas qu’un effet prix, il a aussi un effet volume, qui marque la productivité. Appelons un chat un chat : vous élevez les seuils généraux sans dire pourquoi vous prévoyez deux taux. Vous vous cachez donc derrière l’inflation pour permettre aux grandes entreprises d’éviter de notifier leurs opérations de concentration à l’Autorité de la concurrence.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 124 rectifié et 377.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 308 rectifié, présenté par MM. Barros et Gay, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
….- À compter de l’entrée en vigueur du I, les comités sociaux et économiques mentionnés à l’article L. 2312-1 du code du travail peuvent saisir l’Autorité de la concurrence pour les opérations de concentration définies par l’article L. 430-1 du code de commerce, lorsque les chiffres d’affaires totaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du I de l’article L. 430-2 du code précité sont respectivement supérieurs à 150 millions d’euros et à 50 millions d’euros, et lorsque ceux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du II du même article sont respectivement supérieurs à 75 millions d’euros et à 15 millions d’euros.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement de repli vise à autoriser, sur option, la saisine de l’Autorité de la concurrence par le comité social et économique (CSE) pour les concentrations inférieures aux seuils actuels et supérieures aux seuils antérieurs au présent article.
Les comités sociaux et économiques sont, dans le droit existant, « laissés sur la touche » : ils ne peuvent que constater les fusions, dont ils ne sont avertis que dans les trois jours après la notification auprès de l’Autorité de la concurrence.
Les salariés sont exclus d’une décision pour le moins stratégique au regard des effets délétères sur l’emploi que ne manquent jamais de provoquer une opération de concentration. La casse de l’emploi est un argument suffisant pour les doter d’un tel pouvoir.
Cet amendement a aussi vocation à constituer un garde-fou et à faire de l’Autorité de la concurrence un tiers de confiance pour les salariés. Plus de notifications automatiques sans avis, mais une possibilité qui leur est laissée. C’est un équilibre acceptable entre votre intention et l’impérieuse nécessité de ne pas créer « un nid à contentieux » et une procédure incitative aux concentrations.
En 2023, 55 % des concentrations examinées par l’Autorité de la concurrence ont concerné la distribution, ce qui n’est probablement pas étranger à l’inflation de 11,9 % sur un an des produits alimentaires.
Certes, avec 300 dossiers, l’année 2023 est une année record en matière d’opérations notifiées, mais ce nombre fluctue. Cela ne justifie pas en soi un rehaussement des seuils.
En l’absence de toute dérive, le risque réside dans la volonté du Gouvernement de faire des économies sur le budget de fonctionnement de cette autorité administrative indépendante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Yves Bleunven, rapporteur. L’objectif visé par cet amendement est contraire à celui de l’article 8, qui tend à réduire le nombre de petites opérations de concentration notifiées – ces dernières ne soulèvent généralement pas de problèmes de concurrence, au contraire des opérations de concentration de plus grande taille.
Par ailleurs, je rappelle que l’Autorité de la concurrence peut, dans le cadre de ses fonctions consultatives, être saisie de toute question de concurrence par plusieurs parties prenantes, dont les organisations syndicales, mais aussi les organisations professionnelles, le Gouvernement, les commissions parlementaires, les collectivités territoriales et les associations de consommateurs.
Pour ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 478, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 464-9 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « et sous réserve que le chiffre d’affaires que chacune d’entre elles a réalisé en France lors du dernier exercice clos ne dépasse pas 50 millions d’euros et que leurs chiffres d’affaires cumulés ne dépassent pas 200 millions d’euros » sont supprimés ;
2° Après le mot : « excéder », la fin de la deuxième phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « pour chacune des entreprises en cause, 10 % du dernier chiffre d’affaires hors taxe connu en France ».
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de simplifier la procédure prévue à l’article L. 464-9 du code de commerce, qui attribue au ministre chargé de l’économie le pouvoir de proposer une transaction-injonction aux entreprises auteures de pratiques anticoncurrentielles.
Actuellement, cette procédure ne peut être mise en œuvre qu’aux conditions suivantes : premièrement, le chiffre d’affaires de chacune des entreprises s’étant livrées à de telles pratiques ne doit pas dépasser 50 millions d’euros et leurs chiffres d’affaires cumulés ne pas dépasser 200 millions d’euros ; deuxièmement, le montant maximal de la transaction ne peut excéder 150 000 euros ou 5 % du dernier chiffre d’affaires connu en France, si cette valeur est plus faible.
Ces conditions cumulatives trop restrictives limitent l’accès des entreprises à la transaction-injonction, qui permet pourtant un traitement de l’affaire plus rapide et moins coûteux pour les entreprises, dans le respect des droits de la défense.
C’est pourquoi cet amendement tend à ce que la procédure de transaction-injonction soit ouverte à toutes les entreprises, sans limite de chiffre d’affaires. L’articulation actuelle avec les pouvoirs de l’Autorité de la concurrence sera maintenue, puisque celle-ci conservera son droit de priorité en continuant de traiter les affaires qu’elle souhaite instruire et juger à son niveau.
En outre, le Gouvernement propose de relever le montant maximal de la transaction à 10 % du chiffre d’affaires en France de chacune des entreprises en cause, au lieu de 5 % actuellement. Pour information, ce plafond de 10 % reste bien inférieur à celui des sanctions qu’applique l’Autorité de la concurrence, à savoir 10 % du chiffre d’affaires mondial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Yves Bleunven, rapporteur. Madame la ministre, je vais répéter mes propos de discussion générale : nous avons été très surpris et par la méthode et par le fond.
Pour ce qui concerne la méthode, ce sujet arrive sur la table tardivement, par voie d’amendement, alors qu’il aurait mérité de figurer au sein du projet de loi initial. Nous aurions alors pu tirer profit de l’étude d’impact et de l’avis du Conseil d’État.
Il n’a pas non plus été abordé par l’Autorité de la concurrence lors de l’audition de son président, et nous n’avons reçu aucune information de sa part sur cette question. C’est un peu problématique.
Dans ce contexte, j’estime que nous ne sommes pas en mesure d’évaluer correctement les conséquences de cet amendement.
Nous sommes également très réservés sur le fond.
Sous couvert de simplification des démarches administratives des entreprises et d’allégement de la charge de travail de l’Autorité de la concurrence, vous plaidez pour un renforcement des pouvoirs du ministre chargé de l’économie, avec le risque, que nous avons souligné à plusieurs reprises, que les décisions prises par vos services soient de plus en plus politisées tout en faisant l’objet d’un moindre contrôle démocratique.
De fait, vos services agiront selon les instructions du ministre, alors que l’examen par une autorité administrative indépendante disposant d’experts reconnus en matière de droit de la concurrence est un bien meilleur gage de neutralité.
Si vous estimez que le traitement des dossiers par l’Autorité de la concurrence est trop long, vous pouvez aussi renforcer ses effectifs et ses moyens !
Le Sénat plaide en ce sens depuis plusieurs années, raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Brault, Capus et Malhuret, Mme Bourcier, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte et MM. V. Louault, A. Marc, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la dernière phrase de l’article L. 123-16 du code de commerce, la seconde occurrence du mot : « deux » est remplacée par le mot : « cinq ».
La parole est à M. Emmanuel Capus.
M. Emmanuel Capus. Il s’agit d’un amendement de notre collègue Vanina Paoli-Gagin.
Si les petites entreprises ont le droit de se doter d’une comptabilité simplifiée, les effets de seuil les font basculer dans une comptabilité normale dès lors qu’elles dépassent un certain chiffre d’affaires, un certain effectif.
Aujourd’hui, les entreprises doivent passer en comptabilité normale lorsque le dépassement des seuils se produit pendant deux exercices consécutifs. Cet amendement vise à faire passer cette durée à cinq ans, afin que ce soit moins brutal.
Cette mesure procède du même esprit que l’article 11 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, selon lequel une entreprise dispose d’un délai de cinq ans pour se mettre en conformité avec les obligations liées aux différents franchissements d’effets de seuil.
M. Pierre Jean Rochette. Excellent !
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Monsieur Capus, l’article du code de commerce que vous visez fixe les obligations comptables des entreprises, qui sont distinctes selon leur taille.
Il est prévu qu’une entreprise qui franchit un seuil dispose d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité avec ses obligations.
Cette durée, qui est inférieure à celle que prévoient la plupart des cas de franchissement de seuil, est régie par la directive européenne du 26 juin 2013.
Le présent amendement, qui vise à allonger le délai à cinq ans, est par conséquent contraire au droit européen, raison pour laquelle je me vois contraint d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 444 rectifié bis, présenté par Mme Romagny, M. J.P. Vogel, Mme Saint-Pé, MM. Duffourg et Anglars, Mme O. Richard, MM. Kern, Cambier et Mandelli, Mme Ventalon, MM. J.M. Arnaud et Laménie, Mme Billon et MM. Fargeot, Levi et Henno, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 210-2 du code de commerce les mots : « , la durée qui ne peut excéder quatre-vingt-dix-neuf ans » sont supprimés.
La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.
Mme Anne-Sophie Romagny. Je suis assez surprise que l’examen de mon amendement n’ait pas été programmé à l’article additionnel après l’article 6, en discussion commune avec l’amendement n° 164 rectifié de Mme Aeschlimann, puisqu’il portait sur la même thématique.
Toujours est-il que cet amendement résulte de l’inquiétude que m’inspire la situation des chefs d’entreprise qui n’effectuent pas les formalités nécessaires à la prorogation de la vie de leur société.
Les rapporteurs auraient pu me dire que la durée de vie de quatre-vingt-dix-neuf ans constituait déjà une formalité de simplification, puisqu’elle permet d’apurer le registre du commerce et des sociétés (RCS). J’entends cet argument.
Il se trouve que l’amendement de Mme Aeschlimann, qui a été adopté par notre assemblée voilà quelques instants, est un habile compromis entre l’inquiétante situation actuelle et la solution que j’ai proposée : je retire donc mon amendement.
M. le président. Ma chère collègue, les discussions communes d’amendements obéissent non à des proximités thématiques, mais à des arguments légistiques.
L’amendement n° 444 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 75, présenté par MM. Brault, Malhuret, Capus, V. Louault, A. Marc et Chasseing, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme L. Darcos, M. Chevalier, Mmes Bourcier et Paoli-Gagin et M. Rochette, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l’article L. 631-14 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai d’un mois prévu au 1° du III de l’article L. 622-13 est ramené à huit jours lorsque le contrat est un contrat de sous-traitance au sens de l’article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance et que le cocontractant placé en redressement judiciaire a qualité de sous-traitant au sens du même article 1er. »
La parole est à M. Jean-Luc Brault.
M. Jean-Luc Brault. Dans le cadre d’un dépôt de bilan d’une PME ou d’une PMI, le mandataire liquidateur doit d’abord favoriser l’Urssaf et l’Assedic ; or, bien souvent, il se favorise lui-même.
M. Pierre Jean Rochette. Très juste !
M. Jean-Luc Brault. Bien souvent, il n’autorise à reprendre le chantier que lorsque tous les comptes sont vidés – je l’ai vécu personnellement dans mon entreprise, sous-traitante d’entreprises générales de bâtiment.
Comme je l’ai récemment expliqué à Mme la ministre, je demande, premièrement, que les mandataires liquidateurs nomment immédiatement quelqu’un pour reprendre le chantier d’un cotraitant ou d’un sous-traitant qui aurait déposé le bilan : rester quinze jours sans plombier ou sans électricien coûte très cher au chantier et à la collectivité ! Il importe que le syndic ne mette pas un, deux ou trois mois à nommer une nouvelle entreprise pour reprendre un chantier.
De fait, pendant trois mois, il administre les comptes ! Je le dis de manière un peu directe, mais je peux vous assurer que les choses se passent ainsi.
J’y insiste, il est important, en cas de dépôt de bilan d’un sous-traitant en plomberie, en plâtrerie ou encore en chauffage, que le syndic ne prenne que quinze jours ou trois semaines au maximum pour nommer un autre sous-traitant.
Deuxièmement, je demande qu’il en aille de même en cas de chantier en cotraitance dans une collectivité.
Ne laissons pas traîner les chantiers. Quand un nouveau sous-traitant est nommé trois mois plus tard, je peux vous dire que cela coûte très cher, et que le syndic vit bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Yves Bleunven, rapporteur. Nous avons eu l’occasion d’échanger sur cet amendement intéressant.
Celui-ci vise à prévoir une résiliation anticipée dérogatoire des contrats de sous-traitance lorsque le sous-traitant est placé en redressement judiciaire.
Dans le droit commun, un délai d’un mois est prévu avant qu’un contrat ne soit résilié de plein droit lorsqu’un cocontractant est placé en redressement judiciaire. Durant cette période, l’administrateur provisoire a la possibilité de prendre parti sur la poursuite du contrat.
L’amendement vise à ramener ce délai à huit jours. Or nous souhaitons aller dans le sens d’une réduction du délai, afin de ne pas laisser le donneur d’ordre dans l’expectative. Il s’agit de lui permettre, le cas échéant, de trouver un remplaçant rapidement.
À cet égard, les dispositions de cet amendement constituent une piste intéressante, même si le raccourcissement du délai est important. Sans doute faut-il essayer de trouver un compromis sur la durée.
Sur cet amendement, la commission spéciale a souhaité s’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Monsieur le sénateur Brault, je trouve votre idée intéressante.
Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement. Toutefois, dans la droite ligne de ce que vient de dire M. le rapporteur, je serai favorable à un amendement rectifié qui retiendrait un délai de quinze jours.
Sur le fond, je vous remercie de cette mesure intéressante !
M. le président. Monsieur Brault, êtes-vous d’accord pour rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme la ministre ?
M. Jean-Luc Brault. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, j’ai vécu une telle situation dans mon entreprise, pour laquelle travaillaient 120 gars en plomberie et chauffage.
En cas de dépôt de bilan, les syndics mettent deux, voire trois mois à nommer une nouvelle entreprise. Pendant ce temps, pardonnez mon langage, les compagnons s’emmerdent ! (Sourires.) Ils ne savent pas quoi faire. C’est un vrai problème.
Il faut dire à ces syndics qu’ils doivent nommer quelqu’un le plus rapidement possible en cas de dépôt de bilan d’une PME.
Souvent, les entreprises concernées n’ont qu’un microlot : la plomberie, le chauffage, l’électricité, la plâtrerie, le faux plafond… Dès lors, un délai de quinze jours me semble pertinent : il leur laisse suffisamment de temps, tout en réduisant les factures des syndics pour l’entreprise générale de bâtiment.
Monsieur le président, je suis d’accord pour rectifier mon amendement dans le sens suggéré par Mme la ministre.
M. le président. Monsieur Brault, j’ai bien compris que les compagnons étaient parfois « désappointés » par la situation que vous décrivez. (Nouveaux sourires.)
Je suis donc saisi d’un amendement n° 75 rectifié, présenté par MM. Brault, Malhuret, Capus, V. Louault, A. Marc et Chasseing, Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme L. Darcos, M. Chevalier, Mmes Bourcier et Paoli-Gagin et M. Rochette, et ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l’article L. 631-14 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai d’un mois prévu au 1° du III de l’article L. 622-13 est ramené à quinze jours lorsque le contrat est un contrat de sous-traitance au sens de l’article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance et que le cocontractant placé en redressement judiciaire a qualité de sous-traitant au sens du même article 1er. »
Quel est l’avis de la commission spéciale ?
M. Yves Bleunven, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
L’amendement n° 286 rectifié, présenté par MM. Lefèvre, Burgoa, Khalifé, Karoutchi, H. Leroy et Chatillon, Mmes Canayer et Berthet, M. D. Laurent, Mmes Jacques et M. Mercier, M. Frassa, Mme Dumont, MM. Saury et Somon, Mmes Bellurot, Belrhiti et Richer, M. Sautarel, Mme Petrus, MM. Pernot, Piednoir et Brisson, Mme Josende, M. Panunzi, Mme Ventalon, MM. Tabarot, Laménie, Belin et Gremillet, Mmes Imbert, Malet et P. Martin, MM. Michallet et Genet et Mme de Cidrac, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1684 du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Max Brisson.
M. Max Brisson. Cet amendement vise à supprimer la solidarité fiscale entre acquéreur et vendeur, quelle que soit la nature de l’entreprise.
En pratique, cette responsabilité contraint les parties à bloquer le prix de vente du fonds de commerce pendant quatre-vingt-dix jours à compter de la publication de la cession au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc), afin de réserver ce prix à l’administration fiscale si le comptable du Trésor en fait la demande pour les impôts dus à raison de l’exploitation.
Cette immobilisation du prix empêche le vendeur de réinvestir rapidement et crée une inégalité de traitement entre les différentes formes de cession d’entreprise.
Afin d’harmoniser le régime applicable à chacune des catégories d’entreprises, cet amendement tend à supprimer le dispositif de solidarité fiscale entre acquéreur et vendeur.