Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Olivier Jacquin. … qui sont des personnes bénéfiques à la société, repensons les espaces publics et portons un nouveau regard sur les mobilités.

Surtout, mes chers collègues, faites du vélo, et casqués !

Mme le président. La parole est à Mme Nadège Havet.

Mme Nadège Havet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte dont nous débattons ce matin, déposé par François Bonneau et plusieurs de ses collègues, tend à instaurer une obligation de port du casque pour tous les cyclistes, mais également pour tous les usagers d’engins de déplacement personnel motorisés.

L’article unique qui nous est présenté vient également punir l’absence de casque de la même peine d’amende que dans le cas d’une conduite de moto sans casque.

L’objectif – mieux protéger les usagers – est partagé sur toutes les travées de notre assemblée. Dans le bilan dressé en 2020 par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, la gravité d’un accident, établie en calculant le nombre de tués pour 100 blessés, est en effet plus élevée pour les cyclistes ne portant pas de casque que pour les autres : 2,3, contre 1,8 en agglomération ; 19, contre 11 hors agglomération.

D’un point de vue normatif, cette proposition de loi fait suite à deux mesures récentes démontrant que les pouvoirs publics se saisissent pleinement de la problématique : une mesure réglementaire de 2017 a rendu le port du casque obligatoire pour les enfants âgés de moins de 12 ans, qu’ils soient conducteurs ou passagers d’un cycle ; une autre mesure, toujours d’ordre réglementaire, a étendu l’obligation, en 2019, aux utilisateurs d’EDPM lorsqu’ils sont autorisés par l’autorité de police à circuler hors agglomération.

Je voudrais par ailleurs citer trois politiques qui ont porté leurs fruits, et qui continuent de le faire.

Je pense tout d’abord à l’opération Coup de pouce vélo. L’État a octroyé, au cours des années 2020 et 2021, une prime de 50 euros par vélo pour couvrir des frais de réparation. Plusieurs dizaines de millions d’euros ont été engagées, afin de soutenir et sécuriser le matériel des usagers.

Je pense également au dispositif Savoir rouler à vélo, lancé en 2019 à destination des enfants de 6 à 11 ans, afin que ceux-ci acquièrent une réelle autonomie sur la voie publique avant leur entrée au collège. Dans mon département, ce sont près de 700 attestations qui ont été délivrées dans ce cadre en 2020.

Je pense enfin au plan Vélo et mobilités actives, présenté en 2018. Toujours dans le Finistère, voici l’évolution en matière d’aménagements cyclables sécurisés : 400 kilomètres déployés en décembre 2017 et quelque 703 kilomètres en 2021. Sur toute la Bretagne, nous sommes passés d’un peu moins de 3 000 kilomètres à plus de 4 000 kilomètres en quatre ans.

La Délégation à la sécurité routière, de son côté, a porté deux campagnes de communication, à l’automne 2020 et au printemps 2021, visant le port des équipements de sécurité et l’amélioration de la visibilité des cyclistes.

Sans obligation, donc, le taux d’équipement naturel en casque chez les plus de 12 ans est en constante progression – preuve que les démarches de sensibilisation fonctionnent. En effet, l’objectif doit être de trouver un juste équilibre entre la sécurité et le soutien au développement de ce mode de déplacement, afin de ne pas décourager la pratique collective, en essor depuis maintenant deux ans. Il s’agit d’un enjeu de santé publique et d’un enjeu environnemental.

Entre le 1er janvier et le 31 décembre 2021, le nombre de passages de vélos a été de 28 % plus important qu’en 2019. C’est une augmentation notable.

S’agissant de l’obligation, il faut également noter que la mise en œuvre par les forces de l’ordre du dispositif proposé présenterait d’importantes difficultés. Nous pouvons d’ailleurs observer que, à l’étranger, peu de pays ont opté pour une obligation généralisée du port du casque à vélo.

Si mon groupe votera contre le texte, je voudrais saluer cette proposition de François Bonneau, dont nous partageons l’esprit, et reprendre quelques éléments avancés par le rapporteur Jérôme Durain.

Ainsi, monsieur le rapporteur, nous soutenons votre volonté de recherche d’équilibre, avec – je reprends vos propos – « une forme de volontarisme dans le port du casque et de prudence dans la dimension obligatoire ». Nous partageons aussi votre préconisation quant à la poursuite de la sécurisation des infrastructures.

Mme le président. La parole est à Mme Béatrice Gosselin. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Béatrice Gosselin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, nous remarquons une évolution de nos moyens de transport en faveur de la micromobilité : vélos, trottinettes, gyropodes ou skateboards électriques rencontrent un succès croissant.

La crise sanitaire a amplifié l’utilisation de ces modes de déplacement. Ainsi, le marché du cycle a augmenté de 25 % de 2019 à 2020, atteignant un chiffre d’affaires de 3 milliards d’euros. Les applications sur les téléphones, permettant de louer en un clic un vélo ou une trottinette, ont également contribué à ce développement en milieu urbain.

Ces modes de déplacement apportent des bienfaits physiques aux utilisateurs, au travers de la pratique du sport. Ils sont bénéfiques à l’environnement, car leur utilisation contribue à la diminution des gaz à effets de serre.

D’ailleurs, dans mon département de la Manche, nous nous sommes engagés dans cette politique volontariste d’aménagement et de valorisation des voies cyclables, afin de favoriser les déplacements doux, utilitaires, mais aussi le tourisme de nature et de loisirs.

Par l’aménagement des anciennes lignes de chemin de fer ou des chemins de halage, nous avons pu mettre en place des boucles vélos locales sur routes partagées et, ainsi, bénéficier d’un maillage dense de plus de 1 000 kilomètres d’itinéraires cyclables. Beaucoup reste néanmoins à faire.

Le problème de la sécurité de ces engins devient de plus en plus critique. En 2020, sur le plan national, les cyclistes représentaient 6 % de la mortalité routière, cela a déjà été souligné, avec 178 tués, dont la moitié sans casque.

Depuis mars 2017, le port d’un casque homologué et attaché est obligatoire pour les enfants de moins de 12 ans, qu’ils soient passagers ou conducteurs d’un cycle, et le non-respect de cette obligation est sanctionné par une contravention de quatrième catégorie.

En outre, le décret du 23 octobre 2019 relatif à la réglementation des engins de déplacement personnel a rendu obligatoire le port du casque pour tous les engins de déplacement personnel motorisés autorisés à circuler sur des routes limitées à 80 kilomètres par heure. Nous constatons que 86 % des propriétaires d’EDPM portent un casque, ce nombre s’abaissant à 9 %, seulement, pour les engins en libre-service.

Le port du casque, même s’il est fortement conseillé, n’est pas obligatoire pour les cyclistes de plus de 12 ans et les adultes.

Il est vrai que de nombreux scientifiques attestent de l’efficacité du casque en cas d’accident. Une étude de l’université d’Australie de 2016, regroupant 40 études internationales, conclut que le port du casque réduit de 51 %, en moyenne, les risques de blessures à la tête et au visage.

En France, si la mortalité cycliste, stable depuis trois ans, a tout de même augmenté de plus de 21 % depuis 2010, le nombre de blessés en EDPM s’est accru de 40 % en une seule année.

Le casque est porté par 31 % des utilisateurs en 2020 selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière.

Si la proposition de loi a pour but de rendre obligatoire le port du casque pour tous les utilisateurs de moyens de micromobilité, on peut noter qu’elle ne fait pas consensus. La Fédération française des usagers de la bicyclette s’y oppose notamment, craignant que cette nouvelle contrainte ne décourage les utilisateurs de la pratique du vélo, dont les bénéfices pour la santé publique sont connus.

Malgré tout, ce texte a le mérite de soulever un débat légitime de sécurité routière et de santé publique.

Autant étendre le port du casque obligatoire pour les EDPM me semble une mesure de bon sens, autant l’imposer pour les cyclistes me paraît plus complexe.

Encourager le recours à ce dispositif de sécurité par des campagnes de communication sur le danger du non-port de casque, en particulier dans les établissements scolaires ; renforcer la sécurisation des infrastructures, par exemple en peignant des bandes cyclables sur la chaussée ou en développant le nombre de voies réservées à ces moyens doux de mobilité ; innover pour rendre le casque moins contraignant : tout cela permettrait une acceptabilité progressive de cet équipement de sécurité, afin de concilier l’effet bénéfique de l’exercice physique permis par la pratique du vélo avec le souci important d’une protection maximale pour les usagers de cycles.

Toutefois, laissons les cyclistes adultes prendre leur responsabilité concernant le port du casque !

Cette proposition de loi vise également à étendre la possibilité d’immobiliser ou de mettre en fourrière cycles et EDPM, au titre de l’article L. 431-1 du code de la route qui s’applique actuellement aux deux-roues motorisés, lorsqu’il y a défaut du port des équipements obligatoires – casque et gants –, mais aussi en l’absence de gilet réfléchissant hors agglomération ou de l’éclairage complémentaire pour les EDPM. Ces sanctions sont applicables au conducteur, comme à son passager éventuel.

Ces mesures sont d’ordre réglementaire et ne relèvent pas de la compétence du législateur.

De plus, la possibilité de mettre en fourrière un véhicule en cas de non-respect du règlement entraînerait des difficultés pratiques – elle nécessiterait la mobilisation d’agents et entraînerait des coûts supplémentaires. Ces mesures de rétorsion seraient également peu efficientes, car, contrairement aux deux-roues motorisés, tels que les motos ou les scooters, ces engins n’ont pas de carte grise, et la mise en œuvre prévue au 1er mars 2022 semble totalement irréaliste.

Le partage de la chaussée par ces différents types de véhicules doit relever du bon sens et du civisme de chacun. Ce serait, je pense, la meilleure des protections. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme le président. La discussion générale est close.

La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.

La parole est à M. François Bonneau.

M. François Bonneau, auteur de la proposition de loi. Je voudrais remercier les différents orateurs de leur contribution au débat, notamment le rapporteur Jérôme Durain, qui a travaillé sur ce sujet en commission.

Les interventions montrent qu’il existe un consensus sur ce problème, qui est réel et qui s’accentue. Il faut engager un train de mesures pour améliorer la situation, même si – nous sommes tous d’accord sur ce point – l’utilisation des deux-roues est excellente pour de nombreuses raisons.

Toutefois, je comprends aussi qu’il n’y a pas de consensus sur le texte, pour les raisons déjà évoquées et sur lesquelles je ne vais pas revenir.

Au titre de l’article 26 de notre règlement, je vais donc vous demander, madame la présidente, de ne pas soumettre ce texte au vote.

Pour autant, au travers de ce débat et au regard des différents sujets qui ont été évoqués, j’invite naturellement le Gouvernement à prendre des mesures allant dans le sens que nous souhaitons.

Je retire donc cette proposition de loi, madame la présidente.

Mme le président. Mes chers collègues, je rappelle les termes de l’article 26 du règlement du Sénat : « L’auteur ou le premier signataire d’une proposition de loi ou de résolution peut toujours la retirer, même quand la discussion est ouverte. »

La proposition de loi relative au port du casque à vélo et dans le cadre d’autres moyens de transport est donc retirée.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.)

PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative au port du casque à vélo et dans le cadre d'autres moyens de transport
 

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Dossier législatif : proposition de loi visant à la création d'une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19
Discussion générale (suite)

Plateforme de référencement des malades chroniques de la covid-19

Adoption définitive d’une proposition de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Union Centriste, de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à la création d’une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19 (proposition n° 229, résultat des travaux de la commission n° 318, rapport n° 317).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la création d'une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19
Article 1er

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis pour examiner la proposition de loi visant à la création d’une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19, présentée à l’Assemblée nationale par le député Michel Zumkeller dans le cadre de l’espace réservé au groupe de l’Union des démocrates et indépendants (UDI).

La problématique de la prise en charge des formes persistantes de covid fait l’objet d’une attention toute particulière de la communauté scientifique et du Gouvernement, mais aussi de la représentation nationale, qui s’en est saisie de manière précoce et réactive au cours de la crise liée à l’épidémie de covid-19.

La nouvelle vague due à la diffusion du variant omicron montre à quel point le sujet demeure une préoccupation de premier plan.

Permettez-moi, tout d’abord, de me prêter à un rapide exercice de définition, afin de préciser ce dont nous débattons collectivement. Derrière l’appellation commune de « covid long », il y a probablement deux types de patients.

Les premiers sont des patients pour lesquels les symptômes de la maladie initiale persistent entre quatre et douze semaines, qui récupèrent lentement, certes, mais qui récupèrent vraiment de la maladie. C’est ce que l’on appelle le « covid long ».

Les seconds sont des patients qui développent, pendant ou après l’infection, des symptômes persistants pendant plus de douze semaines et ne pouvant être expliqués par un autre diagnostic. C’est ce que l’on appelle le « post-covid », avec une hétérogénéité importante des cas, allant d’une perte de l’odorat à un trouble majeur de l’autonomie, invalidant ceux qui y sont sujets. L’évolution de l’état des patients est souvent fluctuante ; l’amélioration est très lente, et il y a des risques de séquelles.

Il est compliqué d’avoir une estimation précise des formes persistantes actuellement, mais, sur le fondement de ces définitions, on peut considérer que 25 %, environ, des personnes infectées ont présenté ou présentent des symptômes persistants de type covid long, tout en sachant que les personnes vaccinées ont deux fois moins de risque de développer des formes persistantes. Ces situations de covid long durent entre deux et trois mois, mais je vous rappelle que, par définition, ces symptômes ne persistent pas plus de trois mois.

On estime par ailleurs que 10 % des personnes ont présenté ou présentent des symptômes persistants au-delà de trois mois de type post-covid. Parmi ces dernières, 10 % se trouveraient dans une situation « complexe » du fait des conséquences directes de la maladie elle-même, avec des symptômes qui affectent drastiquement leur qualité de vie ou qui sont renforcés par leur situation personnelle, notamment lorsqu’elles présentent des comorbidités. Cette catégorie représente entre 70 000 et 100 000 personnes, qui pourraient exiger, à date, des structures spécifiques de prise en charge.

Pour les personnes souffrant de tels symptômes, le besoin de prise en charge est réel ; il y a également une demande légitime de reconnaissance. C’est une préoccupation forte des malades, relayée par différentes associations qui les représentent.

Ces patients, par leur nombre et par la diversité des symptômes qui peuvent les infecter, représentent un enjeu organisationnel important pour notre système de santé, qui doit se mettre en capacité d’apporter une réponse coordonnée appropriée à leurs besoins.

En matière de prise en charge, notre souci constant, dès l’origine, a été de lutter contre l’errance médicale, le recours à des traitements non adaptés, voire les hospitalisations non nécessaires. Pour cela, le Gouvernement a pris plusieurs mesures visant à assurer des parcours de soins cohérents, individualisés, pour répondre à la diversité des cas de symptômes persistants post-covid.

La Haute Autorité de santé a ainsi publié, en février 2021, des recommandations relatives aux critères diagnostiques, aux modalités de dépistage et de prises en charge cliniques et paracliniques des adultes avec symptômes via des « réponses rapides », couplées à des fiches pratiques.

Une actualisation de ces recommandations selon l’évolution des connaissances a été publiée en novembre dernier. Une fiche pédiatrique est en cours d’élaboration et devait être prochainement publiée.

L’élément central des recommandations ministérielles réside dans la mise en place de cellules de coordination post-covid visant à accompagner, informer, orienter les professionnels et les patients, ainsi que coordonner les interventions nécessaires à la prise en charge des cas « complexes » post-covid, et cela dans tous les territoires.

On comptabilise actuellement 118 cellules de coordination, réparties sur l’ensemble du territoire, ce qui offre un important maillage territorial.

L’offre de soins développée dans ce cadre se structure en trois niveaux : les médecins généralistes au centre du dispositif en premier recours ; un niveau intermédiaire comportant des explorations fonctionnelles ; des centres proposant des services de santé et de rééducation en dernier niveau pour la prise en charge des patients complexes.

Le financement de besoins supplémentaires pour développer cette offre de soin a été assuré par les agences régionales de santé (ARS), via des dotations de fonds d’intervention régionaux (FIR). Nous étudions actuellement les possibilités de renforcer le soutien en faveur de la kinésithérapie et de l’activité de soins de suite et de réadaptation.

Nous avons par ailleurs mené des opérations de communication auprès des professionnels de santé comme du grand public. Sans doute encore trop peu d’acteurs en France ont connaissance de ces initiatives. De nouvelles mesures d’information devront donc être déployées.

Nous poursuivons également l’effort de recherche sur ce sujet, car il faut faire preuve d’humilité et reconnaître collectivement que, si nos connaissances ont fortement progressé sur les conséquences durables de l’infection à la covid-19, il reste encore un certain nombre de zones d’ombre à explorer.

L’ensemble des projets dédiés spécifiquement aux formes persistantes de covid et sélectionnés au niveau national a déjà bénéficié d’une allocation budgétaire de 5,5 millions d’euros. Un nouvel appel à projets, dédié aux projets de recherche sur le covid long, est paru en novembre dernier.

Comme vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est donc mobilisé pour améliorer la prise en charge des patients, former et informer les professionnels de santé et le grand public, ainsi que progresser en matière de recherche.

C’est dans ce contexte que vous avez à examiner la présente proposition de loi.

Dans son article 1er, elle prévoit la mise en place d’une plateforme en ligne de référencement, permettant aux patients souffrant de symptômes persistants post-covid qui le souhaitent d’être référencés et de partager les données ainsi renseignées avec leur médecin.

La Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM), en partenariat avec l’association TousPartenairesCovid, finance d’ores et déjà la création d’une plateforme en ligne pour aider les patients souffrant de symptômes persistants du covid à mieux s’orienter dans le système de santé.

Après avoir renseigné un questionnaire, le patient pourra, soit imprimer ses réponses pour les présenter à son médecin traitant, soit les partager directement par voie électronique. Cette plateforme, qui est en cours de mise en œuvre, sera déployée très prochainement.

Quant à l’article 2 de la proposition de loi, il rappelle les grands principes de prise en charge des patients et de remboursement des soins liés aux symptômes persistants post-covid.

Ces dispositions sont donc en phase avec les orientations retenues par le Gouvernement pour structurer le parcours de soins, étant bien sûr précisé qu’il ne sera aucunement indispensable de se déclarer via la plateforme en ligne en cours de déploiement pour être pleinement pris en charge, selon la complexité de sa situation. Je préfère souligner ce point au regard de certains des amendements déposés.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’aurez compris, le Gouvernement partage les objectifs globaux de cette proposition de loi, qui rejoint tout à fait des initiatives déjà en place ou en cours de déploiement, bien qu’elle ne soit pas forcément nécessaire à la mise en œuvre et la poursuite de ces actions.

Les échanges que nous avons eus à cette occasion, et que nous aurons, permettent avant tout de rappeler l’importance de la question du covid long pour tous ceux de nos concitoyens qui sont concernés et d’informer sur les actions engagées, que nous renforcerons dans les prochains mois pour améliorer encore et toujours leur prise en charge. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi qu’au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui vise à créer une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19.

Elle a été déposée à la fin de l’année 2020 par notre collègue député Michel Zumkeller et adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en première lecture, le 26 novembre dernier.

Son inscription à l’ordre du jour par le groupe Union Centriste vise à mettre en lumière la situation des personnes souffrant de « covid long ». Ces dernières décrivent des errances thérapeutiques qui sont de véritables calvaires, humainement dramatiques, sans doute évitables. Elles ont la sensation de former une sorte de « cohorte invisible ».

« Nous sommes face à un désert d’information, un désert de coordination médicale, un désert d’actions politiques », déclarent les associations qui se sont constituées.

Si, bien évidemment, la réalité est différente, puisque plusieurs unités se sont d’ores et déjà mises en place, j’ai pourtant nettement ressenti, au cours de mes auditions, l’urgence de proposer un dispositif de dimension nationale, qui permette de coordonner les actions locales, d’améliorer les parcours de soins, d’éviter les pertes de chance, d’avoir une meilleure visibilité et une forme de stratégie globale, qui permette enfin de rompre l’isolement des malades. Il s’agit en quelque sorte de leur donner la possibilité de « faire corps », dans la diversité de leurs douloureux parcours, d’être tous connus, reconnus et accompagnés.

Selon la Haute Autorité de santé, trois critères doivent être réunis pour établir la présence d’une affection post-covid : un épisode initial symptomatique de covid-19 confirmé ou probable, le prolongement d’au moins un des symptômes initiaux au-delà des quatre semaines suivant la phase aiguë et l’absence de diagnostic alternatif. Cette définition est amenée à évoluer suivant les résultats des recherches et des observations à venir.

Il ne s’agit pas seulement de patients ayant souffert d’une forme sévère de la maladie et dont la récupération est difficile, loin de là.

À l’expression « covid long », les agences sanitaires privilégient celle de « symptômes prolongés ou persistants à la suite d’une covid-19 ». C’est pourtant de « covid long » que le Président de la République a parlé dans son discours de vœux… Quoi qu’il en soit, en l’absence de marqueur biologique, c’est pour l’instant uniquement par les symptômes que le diagnostic peut être posé – encore faut-il qu’il le soit.

Une étude récente a recensé jusqu’à 53 symptômes. Les plus fréquents sont la fatigue extrême, les troubles cognitifs – on parle souvent de « brouillard cognitif » –, les difficultés à se déplacer et l’essoufflement. Fluctuants, durables, ils affectent la vie quotidienne et peuvent causer des inaptitudes professionnelles, fragilisant et précarisant les malades. « Ma vie a complètement basculé ! » témoigne une enseignante. « Aujourd’hui, je ne peux plus tenir debout, ni marcher, ni conduire, ni travailler. Je ne peux plus faire les gestes du quotidien, ni m’occuper de mes enfants. »

On rapporte désormais plusieurs centaines de cas pédiatriques, d’enfants présentant les mêmes symptômes, avec des formes pouvant être très invalidantes.

L’évaluation de la prévalence de la persistance de la maladie reste complexe. Le World Economic Forum vient de publier des chiffres faisant état de 10 % de patients dans le monde souffrant de symptômes durables. Le « covid long » est donc un réel enjeu de santé publique, qui doit être placé au cœur de nos préoccupations.

Or, dans un contexte inédit, faute de temps ou, dans certains cas, d’informations suffisantes, les médecins peinent parfois à établir des diagnostics et à garantir la bonne prise en charge de leurs patients.

La Haute Autorité de santé a élaboré, dès février 2021, des fiches de « réponses rapides » permettant aux médecins de mieux cerner les symptômes persistants de covid-19 chez l’adulte.

Par ailleurs, des dispositifs d’appui et de coordination ont été mis en place dans différents territoires, notamment en Occitanie ou à Paris. Ces initiatives, qui s’appuient sur les praticiens de ville et le monde hospitalier, sont utiles et ont montré leur efficacité.

Des prises en charges dédiées existent aussi dans certains hôpitaux. J’ai pu échanger à ce sujet avec la cellule mise en place à l’Hôtel-Dieu à Paris. « Nous sommes face à des symptômes inhabituels, les médecins sont désemparés. Tout ce qui tend à améliorer la prise en charge est utile », nous ont-ils dit.

Toutefois, aux yeux des associations de patients et de certains médecins, nos territoires sont très inégalement pourvus, et ces dispositifs demeurent souvent insuffisants pour assurer une prise en charge correcte des personnes. Les professionnels mobilisés sur le sujet font tous état de réelles situations de détresse.

La présente proposition de loi vise donc à répondre à cette problématique.

Ainsi, son article 1er prévoit la création d’une plateforme de suivi sur laquelle pourraient se référencer, sur la base du volontariat, les personnes souffrant ou ayant souffert de symptômes post-covid. Celles-ci peuvent faire cette démarche seules, ou avec l’aide de leur médecin traitant. Elles répondront alors à une série de questions, qui permettront une première évaluation.

Selon la commission, la véritable plus-value de cette plateforme, c’est l’amélioration de la prise en charge et de l’orientation des patients. Les agences régionales de santé (ARS) et l’assurance maladie nous semblent devoir en être les gestionnaires.

Cette plateforme sera non seulement un service d’information dédié aux symptômes post-covid, mais surtout un outil d’appui au diagnostic pour le patient dans son dialogue avec son médecin.

Même si la collecte de données médicales présente un intérêt, elle se trouve biaisée scientifiquement par le caractère volontaire des auto-déclarations. (Mme Laurence Cohen le confirme.) « Le plus simple serait de considérer la plateforme à des fins de collecte de données épidémiologiques ; le plus utile, ce serait la prise en charge des patients et leur orientation, même si c’est plus compliqué », nous indiquait l’un des médecins auditionnés.

Un décret d’application de cet article, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), devra préciser les modalités de sa mise en œuvre. Il devra veiller au nécessaire encadrement de la plateforme, au nom de la protection des données de santé.

En vertu de l’article 2, les personnes enregistrées sur la plateforme pourront être prises en charge, ou bien par leur médecin traitant – selon un protocole déterminé –, ou bien par une unité de soins post-covid, dans un établissement hospitalier de proximité pour les pathologies les plus lourdes. Les ARS auront pour mission de faciliter le déploiement de ces unités.

J’ai exposé devant la commission les réserves que m’inspirait cet article. Toutefois, elles ne doivent pas faire obstacle à l’adoption de ce texte. Ces différents points méritent simplement d’être clarifiés pour que l’intention de l’auteur oriente bien la mise en œuvre du dispositif.

Concernant les réponses apportées aux personnes référencées sur la plateforme, ce texte ne doit pas laisser à penser qu’un traitement différencié serait applicable aux patients selon qu’ils sont référencés ou non. La plateforme est bien un outil d’appui, non une étape supplémentaire ou un passage obligé.

J’en viens à la répartition des rôles entre médecin traitant et prise en charge hospitalière, qu’il ne s’agit pas non plus d’opposer l’un à l’autre. Le médecin traitant reste le pilier du parcours de soins du patient. L’esprit de ce texte de loi, c’est la coordination et la complémentarité, toujours dans l’intérêt du malade.

Face à une pathologie émergente, l’inscription dans la loi de structures dédiées à la prise en charge en milieu hospitalier des symptômes post-covid est un signal rappelant le rôle de l’hôpital en général dans le suivi des cas complexes. En effet, le sens donné à ce texte doit préserver une part de souplesse : l’offre de soins chargée de répondre aux besoins des patients souffrant de symptômes post-covid doit évidemment associer la ville et l’hôpital et être répartie sur l’ensemble du territoire.

Il convient ainsi de poursuivre la structuration des cellules de coordination post-covid déployées depuis mars 2021, conformément aux recommandations du ministère des solidarités et de la santé. La mise en place d’un maillage territorial est, à cet égard, l’un des enjeux sur lesquels nous souhaitons insister.

Enfin, l’article 2 réaffirme la prise en charge conjointe des frais de santé par l’assurance maladie obligatoire et les complémentaires santé. Je rappelle également que des prises en charge à 100 % peuvent être prévues pour les affections de longue durée (ALD).

Notre commission des affaires sociales a souhaité marquer ses réserves quant à la rédaction transmise par l’Assemblée nationale. Elle n’a pas adopté ce texte, renvoyant ainsi le débat à la séance publique.

Un certain nombre d’améliorations auraient bel et bien permis d’accroître la portée opérationnelle de cette proposition de loi. Néanmoins, nous sommes aujourd’hui face à un calendrier législatif particulièrement contraint.

L’intention des auteurs de la proposition de loi, que nous avons clarifiée, et les pistes qui résultent des travaux de la commission sont de nature à garantir la mise en œuvre du présent texte.

Cette proposition de loi permet une prise en charge améliorée et une reconnaissance globale cohérente avec l’organisation du système de soins. Elle constitue partant un réel apport pour les patients. C’est pourquoi, à titre personnel, j’invite le Sénat à adopter ce texte dans la rédaction transmise par l’Assemblée nationale. (Mme Colette Mélot applaudit.)