M. Rémy Pointereau. Ce n’est pas la question !
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous auriez également constaté que nous avons éclairé les parties, de manière approfondie et comme jamais auparavant, sur les conséquences du « oui » et du « non »,…
M. Pierre Frogier. À la bonne heure !
M. Jean Castex, Premier ministre. … que nous avons mieux fixé les orientations pour l’après-12 décembre, quel que soit le résultat du scrutin, et que nous avons réaffirmé – je réponds ainsi à votre question, monsieur le sénateur –, après le Président de la République et avec le ministre des outre-mer, notre souhait fort que le choix des Néo-Calédoniens soit celui de la France !
Nous avons donc réaffirmé plus que jamais la stratégie de la France dans l’Indo-Pacifique, et ce quelles que soient les décisions totalement contestables du gouvernement australien.
Je veux néanmoins vous rappeler que celui qui s’humilie, c’est celui qui renie sa signature. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Pierre Sueur. C’est vrai !
M. Jean Castex, Premier ministre. Ainsi, contrairement à ce que vous dites, nous sommes loin, très loin, de l’indifférence que vous avez cru déceler dans notre attitude.
J’en profite pour signaler au Sénat que, à l’inverse, nous manifestons en permanence notre pleine solidarité à l’égard de ce territoire, la Nouvelle-Calédonie, frappé par la covid-19, un sujet que vous n’avez pas évoqué dans votre question.
La situation sur ce front s’améliore, vous le savez ; nous en sommes à 223 cas pour 100 000 habitants, alors que nous en étions à 1 300 cas voilà quelques semaines. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. Ce n’est pas la question !
M. Jean Castex, Premier ministre. La vaccination progresse en Nouvelle-Calédonie ; c’est une excellente chose.
Cette solidarité se manifeste par des renforts que la métropole envoie vers l’île, comme elle l’a fait pour tous les territoires ultramarins. Il y a ainsi, en permanence, 300 personnes venues de métropole qui aident nos concitoyens de Nouvelle-Calédonie, et, je vous l’annonce, nous allons renforcer notre aide de cinq lits de réanimation supplémentaires, par l’envoi d’un détachement du service de santé des armées.
Donc, oui, monsieur le sénateur Frogier, sur ce sujet comme sur tous les autres, le gouvernement de la République est pleinement mobilisé ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
commémorations du 17 octobre 1961
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Le Rudulier. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Des « crimes inexcusables pour la République » : tels sont les propos tenus, samedi dernier, par le Président de la République à l’occasion de la commémoration du massacre du 17 octobre 1961 à Paris, un sujet extrêmement sensible et délicat, dès lors que l’on touche aux relations franco-algériennes et tout particulièrement à la période coloniale.
Or l’itinérance mémorielle du Président de la République devient, à masure que son quinquennat avance, une forme d’errance mémorielle. Ce nouvel acte de repentance sur l’Algérie, en dehors de toute contextualisation, introduit une nouvelle fracture au sein de notre société. Cette propagande victimaire semble des plus inconvenantes et revêt une forme d’indécence.
Aussi, monsieur le Premier ministre, ma question est somme toute assez simple : pourquoi devoir s’excuser en permanence de notre histoire ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur Le Rudulier, une grande nation est sans doute celle qui regarde son histoire avec vérité. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargée de la ville. Eh oui !
M. Gérald Darmanin, ministre. Par ailleurs, je n’ai pas de leçons de patriotisme à recevoir, moi dont le grand-père a choisi la France ! (Marques d’ironie sur les mêmes travées.)
Monsieur le sénateur, une grande nation est celle qui fait la vérité pour elle-même et non pour plaire aux autres, parce qu’elle exige justement des autres de faire la vérité également sur leur histoire.
Vous avez regretté que cela se soit fait « en dehors de toute contextualisation », mais il y a bien eu, le 17 octobre 1961, des milliers de personnes – des femmes, des enfants, des hommes – qui ont manifesté ; il y a bien eu des blessés par centaines et il y a bien eu des dizaines de morts du fait d’agents publics français. C’est une vérité historique ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et SER.)
Mme Catherine Conconne. Tout à fait !
M. Gérald Darmanin, ministre. Dire cette vérité et reconnaître ses crimes, ce qu’a fait le Président de la République, comme l’avait fait avant lui Bertrand Delanoë en tant que maire de Paris. Ce n’est en aucun cas une errance, monsieur le sénateur ; c’est considérer que nous devons regarder notre histoire en face et que nous demandons à tous les pays de faire de même.
Aussi, devant la vérité – les années 1960 relèvent désormais du temps des historiens –, il faut peut-être que nous soyons tous unis et que nous ne cherchions pas à faire de la politique politicienne, surtout quand autant de morts relèvent de la responsabilité de la République ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour la réplique.
M. Stéphane Le Rudulier. Monsieur le ministre, toute histoire nationale a sa part d’ombre et de lumière, mais, quand on considère notre roman national, on y trouve fort heureusement plus de lumière que d’ombre.
Mme Catherine Conconne. N’importe quoi !
M. Stéphane Le Rudulier. Nous devons tous, ici, être fiers de notre histoire nationale.
Or la repentance à répétition du Président de la République,…
Mme Éliane Assassi. Cessez de dire cela !
M. Stéphane Le Rudulier. … c’est la porte ouverte à la concurrence des mémoires, qui dressent les Français les uns contre les autres en fonction de leur origine. (Huées sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
Le chemin de la réconciliation avec l’Algérie est semé d’embûches, mais, pour se réconcilier, monsieur le ministre, il faut être deux. Cette réciprocité est indispensable à l’apaisement de nos relations. Or nous sommes aujourd’hui dans un système de mémoire « hémiplégique » (Mêmes mouvements.),…
Mme Éliane Assassi. On ne peut pas utiliser n’importe quels mots !
M. Stéphane Le Rudulier. … dans lequel seule la France consent à l’effort de vérité historique, alors même que, dans cette histoire douloureuse, les torts sont partagés.
M. le président. Il faut conclure !
M. Stéphane Le Rudulier. Pour conclure, je voudrais citer Marc Bloch, selon lequel « l’anachronisme est le pire péché de l’historien ». Cela vaut aussi, monsieur le ministre, pour le Président de la République… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Huées sur les travées des groupes CRCE et GEST.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Notre prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 27 octobre 2021, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)
PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet d’un vote
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la présidente, lors du scrutin n° 11 du 19 octobre 2021, l’ensemble des membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires souhaitait voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de votre mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.
4
Fonction de directrice ou de directeur d’école
Adoption en deuxième lecture d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, créant la fonction de directrice ou de directeur d’école (proposition n° 875 [2020-2021], texte de la commission n° 57, rapport n° 56).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, on retient souvent de Charles Péguy ses écrits sur les professeurs, ces fameux « hussards noirs » qui font partie des emblèmes de notre nation. On oublie trop souvent qu’il a écrit sur une autre fonction essentielle de notre école, celle de directrice et de directeur d’école, dont il disait qu’« elle résume à elle seule l’ordre de notre belle société ».
Aujourd’hui, je veux faire miens ses mots. En effet, par-delà d’éventuelles divergences, tout ce que nous nous dirons sera, j’en suis certain, une manière de rendre hommage de façon unanime à cette fonction.
Ils sont un repère pour tout le monde, les parents, les élèves, les professeurs, les maires. Le matin, ils accueillent les enfants à la grille. Au téléphone, ils font face à l’imprévu avec l’inspecteur ou l’inspectrice. Ils sont à l’écoute des parents qui s’interrogent sur l’avenir de leurs enfants. Ils font face parfois à une certaine agressivité de notre société. Ils font face à toutes les difficultés, sont les partenaires de bien des interlocuteurs. Mais ils vivent aussi l’une des plus belles aventures du monde, en accompagnant le développement des enfants. Ils sont justes avec les élèves dans toutes les situations. Tout simplement, ils sont ceux qui fertilisent notre société.
Ils ont été en première ligne durant la crise sanitaire pour organiser la continuité des enseignements, et c’est grâce à eux que nous pouvons nous enorgueillir d’être, dans le monde, l’un des pays à avoir maintenu nos écoles ouvertes le plus longtemps. Je veux une nouvelle fois leur exprimer, à eux, mais aussi à tous les acteurs de l’éducation nationale, notre gratitude.
Nous pouvons afficher une maîtrise de la situation dans les écoles depuis la rentrée, car ils ont su s’adapter à toutes les règles contraignantes liées à la situation sanitaire.
Aujourd’hui, que demandent-ils ? Vous le savez, nous avons mené de larges consultations, par voie d’enquêtes ou de concertations. Ils demandent que l’on reconnaisse leur rôle, qu’on leur donne plus d’autonomie et de liberté, qu’on leur fasse confiance pour prendre, en responsabilité, les décisions qui s’imposent dans l’exercice de leurs fonctions. Ils réclament de pouvoir, au quotidien, se consacrer aux fonctions les plus importantes qui leur incombent.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez rencontré nos directeurs et directrices d’école. Vous connaissez nos territoires, nos directeurs d’école et leurs difficultés. Vous ne voulez pas en rester au statu quo. Vous voulez que, sur tous les plans, les choses avancent.
Nous avons fait un certain nombre de choses, avant même cette proposition de loi, pour améliorer les conditions d’exercice des directeurs d’école. Permettez-moi de les rappeler.
Des mesures ont déjà été prises pour améliorer les conditions d’exercice des directeurs : dès l’été de 2019, le chantier de l’amélioration de la situation des directrices et des directeurs a été mis à l’agenda social. Cela s’est fait au travers une grande consultation, dont les résultats sont publics, et qui a permis de mesurer l’ampleur de leurs attentes.
En premier lieu, nous avons octroyé, dans le cadre réglementaire existant, la pleine responsabilité de la programmation et de la mise en œuvre des 108 heures annuelles de service.
En deuxième lieu, nous avons amélioré leurs outils numériques de gestion, afin qu’ils puissent se recentrer sur l’essentiel, à savoir le pilotage de leur école.
En troisième lieu, nous avons expérimenté, depuis la dernière rentrée, une fonction de référent pour les directrices et directeurs d’école. Ceux-ci, on le sait, avaient besoin de cette interlocution.
En quatrième lieu, nous avons décidé le versement d’une indemnité exceptionnelle de 450 euros à l’automne 2020 aux directeurs d’école. Cette indemnité annuelle a été pérennisée en 2021.
Depuis la rentrée de 2021, comme je m’y étais engagé, un nouveau régime de décharges a été installé : 600 emplois supplémentaires y sont consacrés, ce qui a permis de proposer de nouvelles décharges. Désormais, 40 % des directeurs et directrices en bénéficient. Des discussions sont en cours avec les organisations syndicales pour aller de l’avant dès la rentrée 2022.
Enfin, les directeurs d’école ont bénéficié d’avancées majeures permises par le Grenelle : la pérennisation de l’indemnité de 450 euros que je viens d’évoquer ; la prime d’équipement informatique de 176 euros par an, dont bénéficient également les professeurs ; la prime d’attractivité, qui peut monter jusqu’à 1 400 euros par an pour les débuts de carrière, à laquelle viendront s’ajouter, en février 2022, 800 euros supplémentaires pour les débuts de carrière, cette prime étant dégressive pour les milieux et fins de carrière ; un plus important taux d’accès à la classe exceptionnelle, sans parler des mesures comme les primes en REP+, le réseau d’éducation prioritaire renforcé.
Aujourd’hui, avec cette proposition de loi, il s’agit d’aller au-delà, en permettant aux directeurs et directrices d’être pleinement les pilotes pédagogiques de l’école dont ils s’occupent.
Cette proposition de loi s’inscrit dans la droite ligne de ce que nous avons fait jusqu’ici : reconnaître par la loi la fonction de directrice et de directeur d’école, son autonomie, son accompagnement matériel et humain. Il faudra aussi aller plus loin dans l’aide que nous devons collectivement fournir aux directeurs d’école. Je n’en doute pas, ce point sera présent dans nos débats.
Reconnaître leur fonction, c’est reconnaître la mission qui est la leur, une mission de stimulation, de coordination, d’encouragement et d’harmonisation des initiatives de l’équipe pédagogique, en tenant compte notamment de la diversité de la taille des écoles.
Reconnaître leur fonction, c’est reconnaître leur rôle de pilote au sein d’un collectif, contribuant à l’échange de pratiques, à la coordination des enseignements, pour une meilleure continuité des apprentissages. C’est aussi reconnaître leur rôle de proposition dans l’accompagnement de proximité et la formation, pour qu’ils puissent mieux répondre aux besoins de l’équipe des professeurs de leur école.
Avec les « constellations », c’est-à-dire la façon dont sont conçues les formations continues à l’école primaire, on a un bel exemple de cette horizontalité, de cette volonté de tenir compte des besoins au plus près du terrain.
Reconnaître leur fonction, c’est leur permettre de mieux porter le projet d’école auprès des collectivités et des parents d’élèves, mais aussi auprès de la hiérarchie éducative. Le directeur d’école – c’était vrai déjà au temps de Charles Péguy –, est le porte-parole de l’école au centre du village ou du quartier. Reconnaître sa fonction, c’est aussi reconnaître l’école.
L’examen en séance devra nous permettre d’avancer sur ce sujet, un trouvant un consensus pour lever les points de blocage qui se sont manifestés lors de l’examen en commission.
Je veux tout d’abord saluer le travail que vous avez réalisé, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis le début de l’examen de ce texte. Vous avez su l’enrichir, et nous avons su, je crois, tenir compte de ces enrichissements. Vous avez su trouver un équilibre entre la volonté d’avancer sur cet enjeu majeur, conformément aux attentes des acteurs de terrain, et les craintes qui s’étaient exprimées çà et là.
Je veux rendre hommage à la députée Cécile Rilhac, qui est l’origine de ce texte. C’est un bel exemple de la maturation d’un sujet, notamment par le dialogue entre les deux assemblées et le travail de chaque chambre, qui a écouté les acteurs de terrain.
Vous l’avez fait, notamment, pour ce qui concerne l’article 1er, qui consacre une autorité fonctionnelle au directeur ou à la directrice d’école. Les travaux du Sénat ont permis de faire évoluer cet article et de lever toute ambiguïté, tout en réaffirmant cette fonction, si essentielle.
La nouvelle version est parfaitement claire et de nature à rassurer ceux qui avaient des doutes sur nos intentions. Elle a été adoptée en l’état par vos collègues députés, je tiens à le souligner.
Certaines réserves se sont exprimées lors de l’examen en commission. Il convient de résoudre ces quelques difficultés et de rechercher le consensus le plus large possible.
J’en viens donc à l’article 2 bis. Il tend à donner la possibilité à l’État, aux communes ou à leurs groupements, dans le cadre de leurs compétences respectives – j’insiste sur ce point –, de mettre à la disposition des directeurs d’école des moyens d’assistance administrative et matérielle.
Vous avez supprimé la mention des collectivités, craignant qu’elles ne se voient imposer une charge nouvelle. Je vous le dis très clairement : il n’y aura pas de charge nouvelle pour les communes. Il s’agit simplement d’acter dans la loi la faculté de proposer une aide aux directeurs, afin de les soulager dans leurs tâches administratives.
Nous ne pouvons le faire sans évoquer les communes, dont certaines agissent d’ores et déjà, car ce serait porter atteinte au principe de partage des compétences, auquel cette chambre, je le sais, est particulièrement attachée.
Le rôle de l’État, dans ce dossier, est de se substituer à elles lorsqu’elles n’en ont pas les moyens, comme nous le faisons en bien des endroits. Il ne s’agit pas d’expliquer aux communes qui agissent depuis des années que tel n’est pas leur rôle. Nous souhaitons simplement nous assurer qu’un minimum d’équité est assuré sur l’ensemble du territoire.
Aussi, je vous proposerai tout à l’heure de réintroduire cette mention par voie d’amendement.
Tout d’abord, je n’imagine pas un seul instant que, dans un texte aussi fondamental pour l’école, les communes ne soient pas une seule fois mentionnées, alors qu’elles constituent un acteur prépondérant.
Ensuite, je suis très attaché, et je sais que vous l’êtes aussi, à préserver le couple maire-directeur d’école, car je sais combien cette entente est fondamentale, en particulier dans nos territoires ruraux, où elle joue un rôle moteur dans l’« alliance éducative », qui représente un interlocuteur privilégié pour de nombreuses familles.
Enfin, il est souhaitable que les deux chambres puissent s’accorder sur les équilibres qui ont été trouvés au fil des discussions, afin d’envoyer un signal très clair aux directeurs d’école qui nous regardent.
En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que vous allez examiner aujourd’hui constitue une avancée décisive pour notre école. Je veux saluer l’important travail parlementaire accompli. Je pense bien évidemment à Cécile Rilhac, que j’ai déjà citée, mais aussi à l’ancienne sénatrice Françoise Laborde et au sénateur Max Brisson, qui ont constamment nourri nos travaux et nos réflexions.
Cette proposition de loi vient parachever notre action déterminée en faveur de l’école primaire, avec le renforcement constant des moyens pour le premier degré – nous en reparlerons dans le cadre de la discussion budgétaire –, la formation des enseignants, l’apprentissage des savoirs fondamentaux, ainsi que le dédoublement des classes en réseau d’éducation prioritaire renforcée, ce qui a permis de limiter les effectifs partout ailleurs.
Nous devons être au rendez-vous de l’attente de ces serviteurs de la République que sont les directrices et directeurs d’école, reconnaître leur engagement et leur dévouement au service de nos élèves, de notre école et de l’avenir de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Julien Bargeton, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons à la fin des échanges entre les deux assemblées sur ce texte.
Au moment où nous examinons cette proposition de loi, je souhaite saluer l’engagement de l’ensemble des directeurs des écoles, qui jouent un rôle fondamental, comme l’a encore montré la crise du Covid. Ils sont les interlocuteurs privilégiés des parents d’élèves, des maires et du système éducatif. Aujourd’hui, nous pouvons collectivement leur rendre hommage.
La pandémie a entraîné dans leurs fonctions des changements, dont certains seront sans doute pérennisés, eu égard à la nouvelle vision de leur rôle fondamental qui a émergé.
Pourtant, de façon paradoxale, ils ne sont pas reconnus et ne disposent pas de réels cadres juridiques pour agir, alors même que leurs missions sont essentielles. C’est cela avant tout que répare ce texte.
Le texte de notre collègue députée Cécile Rilhac permet des avancées significatives, qu’il convient de saluer, en faveur des directeurs d’école. Elles s’inscrivent dans le cadre des travaux menés au Sénat par Françoise Laborde et Max Brisson, lesquels avaient fait apparaître un triple consensus : les directeurs d’école ont besoin de temps, de formation et de moyens. Nous sommes tous d’accord pour le dire. Ensuite, bien entendu, les dispositifs prévus par le texte peuvent faire l’objet de débats, mais la volonté politique est partagée entre le Parlement et le Gouvernement.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, vous avez accru les temps de décharge à partir de cette rentrée 2021. Par ailleurs, la loi de finances pour 2022 viendra pérenniser l’indemnité exceptionnelle versée à la rentrée scolaire 2020. D’autres mesures sont également prévues dans le cadre du Grenelle de l’éducation. Aujourd’hui, nous avons l’occasion d’améliorer le rôle de directeur d’école.
Les points d’accord sont nombreux, je veux le souligner. L’autorité fonctionnelle constitue un apport important du Sénat, qui permet aux directeurs d’école de disposer de l’autorité pour assurer le bon fonctionnement de l’école, ainsi que les missions qui leur sont confiées. C’est évidemment une avancée importante.
Nous avons également supprimé toute mesure de contingentement qui aurait pu être opposée à l’avancement.
Par ailleurs, nous avons retenu le principe selon lequel le temps de décharge doit être suffisant pour effectuer de manière effective les missions.
En outre, nous avons intégré, dans le cadre de la formation initiale des enseignants, une formation sur les missions exercées par les directeurs d’école. C’est la reprise de l’une des préconisations du rapport Brisson-Laborde.
Outre ces convergences aux articles 1er et 2, je rappelle que six des neuf articles ont été votés conformes entre les deux chambres. Il s’agit notamment de la création d’un référent « direction d’école » par département, de l’élection par voie électronique des représentants des parents d’élèves et les conditions d’élaboration du plan de sécurité.
Ont également été supprimés, de façon conforme entre les deux chambres, certains éléments qui avaient été introduits, à savoir le conseil de la vie scolaire et les demandes de rapport.
Les points d’accord sont donc importants. Certes, l’Assemblée nationale a procédé à un ajout, à l’article 1er, concernant les « chargés d’école », c’est-à-dire les enseignants de classe unique. Une telle situation concerne environ 8 % des écoles en France, ce qui n’est pas rien. Les classes uniques font battre le cœur des villages ruraux. Ces chargés d’école, sans être directeurs, assurent un certain nombre de leurs missions.
Leur mention dans la loi interroge. Aussi, la discussion de l’amendement déposé par notre collègue Sonia de La Provôté permettra de vous entendre, monsieur le ministre, sur leur inclusion dans cet article 1er.
Il ne faudrait pas que la reconnaissance des chargés d’école par leur mention à l’article 1er soit, au bout du compte, préjudiciable à ces derniers. La question posée est la suivante : toutes les dispositions relatives au temps de décharge leur sont-elles applicables, comme c’est le cas actuellement ? J’espère que notre débat nous permettra d’aborder ces questions.
J’en viens maintenant aux désaccords, qui sont trop nombreux pour espérer un vote conforme aujourd’hui. Pour autant, je souhaite que nous puissions aboutir à un accord sur ce texte très attendu.
Premièrement, l’Assemblée nationale a supprimé l’obligation d’une formation certifiante pour devenir directeur d’école. C’était l’une des recommandations du rapport Brisson-Laborde.
Deuxièmement, il en est de même pour l’obligation d’une formation continue tous les cinq ans. Les textes évoluent régulièrement, les missions se diversifient. Je pense notamment à la labellisation Paris 2024, aux cités éducatives, aux contrats locaux d’accompagnement, à la prévention, à la détection du harcèlement scolaire et au cyberharcèlement. Dans la mesure où de nouveaux sujets apparaissent sans cesse, il semblait être justifié qu’une formation continue obligatoire soit organisée tous les cinq ans pour y faire face.
Troisièmement, l’Assemblée nationale est revenue sur l’obligation, pour les services déconcentrés de l’éducation nationale, de présenter chaque année les recours et l’utilisation du temps de décharge des directeurs devant la commission départementale de l’éducation. Cette disposition avait été introduite à la suite d’un constat : les directeurs d’école ne peuvent pas toujours utiliser leur temps de décharge ; nous l’avons entendu dans le cadre de nos auditions.
Vous avez annoncé pour la rentrée 2021, monsieur le ministre, des mesures permettant de garantir des jours de décharge effectifs et réguliers. Je tiens à saluer cette avancée. Toutefois, le rendez-vous annuel que nous envisageons dans chaque département serait l’occasion de faire le point sur la réalité des décharges.
Ces trois points de désaccord devraient pouvoir être surmontés si nous avançons avec la volonté commune d’aboutir à un accord, nos divergences ne paraissant pas insolubles.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, un réel désaccord demeure entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur les modalités des aides matérielles et humaines apportées aux directeurs d’école.
Selon moi, ce qui va sans dire va mieux en le disant. La réalité, c’est une compétence partagée respectueuse de chacun.
Néanmoins, le Sénat a voté en première lecture une obligation d’intervention de l’État et la suppression de toute référence aux communes et leurs groupements, puisqu’il ne veut pas sembler ajouter une charge supplémentaire aux communes. Vous vous en êtes expliqué, monsieur le ministre. Quoi qu’il en soit, c’est la position majoritaire au Sénat, et c’est l’un des points majeurs de divergence.
Selon moi, nous pourrions aboutir à une rédaction commune, chaque assemblée faisant un pas vers l’autre. Nous verrons si nous y parviendrons !
Nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à vouloir améliorer la situation des directeurs d’école. Le texte est attendu par les principaux concernés, et il ne faudrait pas qu’il bute sur un sujet certes important, mais qui ne constitue pas le cœur du texte. Nous avons la possibilité d’avancer ensemble, et c’est dans cet esprit que votre rapporteur a voulu travailler.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je nous souhaite des débats sereins, dans l’esprit des travaux menés en commission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Max Brisson et Cédric Vial applaudissent également.)