M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à la remise d’un rapport, afin d’évaluer les modalités de contribution des metteurs sur le marché de produits contenant des micropolluants aquatiques.
Par principe, je ne suis pas favorable aux demandes de rapport. Si le législateur souhaite se saisir d’une question, il dispose d’autres moyens plus efficaces, pour articuler contrôle et législation.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 305 rectifié et 732 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 84 (nouveau) (priorité)
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport six mois après la promulgation de la présente loi sur la stratégie nationale permettant d’atteindre l’objectif de réduction de prélèvements d’eau de 10 % en 5 ans et de 25 % en 15 ans au niveau national issu de la seconde phase des Assises de l’eau en juillet 2019 « Un nouveau pacte pour faire face au changement climatique ».
Ce rapport établit comment l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs prendraient en compte cette stratégie de réduction des prélèvements d’eau dans leurs documents de planification et de programmation qui ont des incidences significatives sur les consommations d’eau, y compris les documents d’urbanisme. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 84 (priorité)
M. le président. L’amendement n° 342 rectifié bis, présenté par Mme Procaccia, M. Karoutchi, Mme Deroche, MM. Piednoir et Klinger, Mme Drexler, M. Cambon, Mme Lassarade, M. Paul, Mme Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Pluchet, M. Savary, Mmes Bellurot et Delmont-Koropoulis, MM. Le Rudulier, Allizard et Houpert, Mmes Imbert et Di Folco et MM. Sido, Milon et Rapin, est ainsi libellé :
Après l’article 84
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi fait l’objet d’un nouvel examen par le Parlement dans un délai maximal de cinq ans à compter de sa promulgation.
Elle fait l’objet, dans un délai de quatre ans, d’une évaluation de son application par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Je partage l’opinion de notre collègue Dantec : des rapports, on en a beaucoup demandé, on n’en a pas beaucoup reçu et on en a peu examiné.
L’objet de cet amendement est simple : prévoir un nouvel examen de la présente loi par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans, avec une évaluation par l’Opecst dans quatre ans. Cela permettrait au Parlement de contrôler pour de bon l’application de la loi que nous nous apprêtons à voter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Je comprends la préoccupation des auteurs de cet amendement, qui vise à prévoir un nouvel examen par le Parlement de cette loi, dans un délai maximal de cinq ans à compter de sa promulgation. Il est également prévu que l’application du texte fasse l’objet d’une évaluation par l’Opecst.
Si nous avons souhaité confier au HCC la responsabilité d’évaluer l’application de la loi, rien n’empêche pour autant que des structures parlementaires se saisissent parallèlement de cette tâche. Faut-il pour autant inscrire cette disposition dans le dur de la loi ? Cela ne me semble pas opportun.
Par ailleurs, pourquoi confier cette mission à l’Opecst et non pas, par exemple, aux commissions permanentes du Parlement ?
Même si je partage l’intention des auteurs de l’amendement, j’émets quelques réserves sur son contenu. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi. Je retire l’amendement !
M. le président. L’amendement n° 342 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 738 rectifié, présenté par Mmes Préville, Monier, Rossignol, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 84
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de créer une autorité de sûreté chimique dans le but d’évaluer, de suivre et de contrôler l’utilisation de la chimie dans tous les secteurs d’activité concernés.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à lancer la réflexion sur la nécessité de créer, à l’instar de l’Autorité de sûreté nucléaire, une autorité de sûreté chimique, dont les missions seraient d’évaluer et d’assurer le suivi des incidents et accidents, d’émettre des préconisations à toute entreprise faisant usage de produits chimiques, y compris dans le domaine agroalimentaire ou l’agriculture.
Nous avons tous en mémoire les accidents liés au stockage de produits chimiques et même au fonctionnement de certaines entreprises, comme AZF en 2001, Lubrizol plus récemment. Je pense également à tous ces accidents à plus petite échelle. Cela montre qu’une surveillance accrue serait bienvenue pour une meilleure sûreté concernant l’emploi de ces matières chimiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Cet amendement vise à introduire une énième demande de rapport au sein de ce projet de loi. Nous disposons d’autres moyens pour évaluer l’opportunité de créer cette autorité de sûreté chimique.
Par ailleurs, d’autres établissements publics et autorités interviennent déjà sur ce sujet. Je vous le rappelle, nous avons créé voilà quelques minutes, à l’article 71, un bureau d’enquêtes et d’analyses sur les risques industriels et technologiques. Cet organisme pourra s’occuper des risques chimiques et des accidents qui s’y rapportent, qui seront, nous l’espérons, peu nombreux.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 738 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Les dispositions prévues par cet amendement ne sont pas incompatibles avec la création du bureau d’enquêtes. Il s’agit en effet d’agir en amont, en exerçant une surveillance, comme le fait l’ASN sur toutes les activités ayant recours au nucléaire, y compris la radioprotection, c’est-à-dire l’usage médical.
Quoi qu’il en soit, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 738 rectifié est retiré.
L’amendement n° 742 rectifié, présenté par Mme Préville, M. Cozic et Mmes Monier, Rossignol, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 84
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de créer un Observatoire des sols en vue de documenter la qualité et les évolutions des sols pour mieux protéger ces derniers.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement a pour objet d’envisager la création d’un observatoire des sols en vue de documenter la qualité et les évolutions de ces derniers, afin de mieux les protéger à l’avenir. Les sols sont notre richesse, notre avenir et la vie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Ma réponse ressemblera à celle que je viens de faire à propos de l’amendement précédent. Il s’agit en effet d’une demande de rapport au Gouvernement. Nous avons adopté plusieurs amendements traduisant des propositions de rapport de la commission d’enquête du Sénat.
Là encore, plusieurs établissements publics interviennent sur cette problématique. Je pense notamment à l’Ademe, ainsi qu’aux services d’administration centrale.
Pour ces raisons, ma chère collègue, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. La capitalisation des données relatives aux matières organiques issues du recyclage appliquées sur les zones agricoles et au suivi de la qualité des terres ayant reçu ces matières constitue déjà une action du volet agricole de la feuille de route économie circulaire. En février 2020 a ainsi été intégrée au Géoportail de l’IGN une nouvelle carte, qui donne la description des différents types de sols.
Le travail se poursuit, pour être encore plus précis, grâce notamment aux travaux du groupement d’intérêt scientifique sur les sols associant différents partenaires, dont l’Inrae.
Le rapport que vous demandez ne paraît donc pas nécessaire. Pour l’instant, la priorité doit être de conduire à leur terme les actions déjà engagées en la matière. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 742 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 742 rectifié est retiré.
L’amendement n° 718 rectifié, présenté par Mmes Préville, Monier, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 84
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’intégrer dans tout projet de loi une partie consacrée à l’évaluation des dispositions dudit projet au regard des objectifs de développement durable.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Au cours de l’agenda 2030, dix-sept objectifs de développement durable, les ODD, ont été fixés. Ils couvrent l’intégralité des enjeux de développement durable dans tous les pays, tels que le climat, la biodiversité, l’énergie, l’eau, la pauvreté, l’égalité des genres, la prospérité économique ou encore la paix, l’agriculture, l’éducation.
À l’instar des études d’impact devenues obligatoires pour chaque projet de loi examiné par le Parlement, il est aujourd’hui indispensable de rendre obligatoire une partie consacrée aux ODD que la France s’est engagée à atteindre d’ici à 2030. Cette partie aurait pour fonction de reprendre une à une les dispositions du projet de loi et d’indiquer, pour chacune d’entre elles, l’ODD ou les ODD auxquels elle est censée répondre. Cela serait très positif et nous permettrait d’avoir une lisibilité toute simple sur chaque projet de loi. À chaque article, il serait indiqué à quel ODD il répond.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Les objectifs de développement durable doivent effectivement constituer une boussole dans la conduite de nos politiques publiques. Il est certain que nous devons nous appuyer plus largement sur cet outil, notamment dans l’élaboration des politiques publiques.
Faut-il pour autant intégrer dans tout projet de loi une partie consacrée à l’évaluation des dispositions dudit projet au regard des objectifs de développement durable ? Je suis quelque peu dubitative, car il me semble que le caractère systématique ne ferait qu’entraîner de la lourdeur administrative, parfois même aux dépens de la qualité du reste des études d’impact, qui, souvent, n’est pas au rendez-vous.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Votre assemblée a approuvé le 17 mai dernier le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Son article 2 prévoit qu’avant le 1er juin de chaque année le Gouvernement remette au Parlement un rapport portant sur la cohérence des politiques publiques françaises avec les objectifs de développement durable adoptés en 2015 par les Nations unies.
Ces dispositions apportent une réponse à l’évaluation des politiques publiques au regard des ODD. Considérant que votre amendement est satisfait, madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir le retirer.
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 718 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Oui, je le maintiens.
Préciser à quel ODD répond chaque article améliorerait la lisibilité des politiques publiques et offrirait un bon moyen de communication à destination de nos concitoyens. Cela montrerait notre volonté de respecter ces objectifs de développement durable.
M. le président. L’amendement n° 739 rectifié, présenté par Mme Préville, M. Kerrouche et Mmes Monier, Rossignol, Jasmin et Conway-Mouret, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 84
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de créer un Conseil scientifique unique et pluridisciplinaire en capacité d’apporter au Gouvernement une expertise scientifique face à toute crise notamment celles provoquées par le dérèglement climatique.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Titre….
Dispositions relatives à la gestion des conséquences du dérèglement climatique
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement a pour objet d’envisager la mise en place d’un conseil scientifique unique, à l’instar de ce qui peut exister dans les pays anglo-saxons.
Dans ces pays, un groupe de scientifiques appartenant à toutes les disciplines est mobilisable dès la survenue d’un accident ou au commencement d’une crise. Cet organe est chapeauté par un scientifique en chef – je pense à cet égard au scientifique en chef du Québec, que nous avons auditionné à l’Opecst – capable de mobiliser tous les chercheurs dont il a besoin pour documenter la crise en question et conseiller le Gouvernement.
Plutôt que d’envisager la mise en place d’un conseil scientifique uniquement en cas de crise grave et, donc, avec un délai de réponse, il serait plus pertinent de prévoir ce type d’instance pérenne et susceptible de se rendre disponible immédiatement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Il ne me semble pas opportun de multiplier les instances d’expertise sur le climat. Le morcellement des moyens contribue souvent à l’affaiblissement des structures.
Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Madame la sénatrice, je comprends évidemment le sens de votre appel et je partage la nécessité de s’appuyer sur l’expertise scientifique pour anticiper les crises, y répondre et, d’une manière générale, pour alimenter un débat fondé sur des analyses scientifiques plutôt que sur des préjugés. Or, l’exemple de la crise sanitaire le démontre, l’exécutif est en mesure de réunir très rapidement un conseil scientifique pour éclairer ses décisions. Je ne vois pas l’urgence qui obligerait à mettre en place ce que vous souhaitez.
Par ailleurs, je tiens à le souligner, pour ce qui concerne le climat, le Haut Conseil pour le climat a pour mission de conseiller les décideurs politiques sur les orientations de moyen et long terme, d’évaluer l’action climatique française et de recommander, le cas échéant, des actions correctrices.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Je le précise, ce conseil scientifique pourrait être constitué, par exemple, de directeurs de laboratoire, mais qui continueraient à travailleur dans leur laboratoire. Simplement, en cas de survenue d’une crise majeure, ils pourraient être, comme c’est le cas dans les pays anglo-saxons, mobilisés à la minute même, pour pouvoir faire connaître leur expertise et dire ce qu’il serait bon de faire.
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu du nombre d’amendements restant à examiner, il a été décidé, en accord avec le Gouvernement et les commissions, que nous arrêterons nos travaux de ce jour juste avant l’article 49 du projet de loi. Il nous reste donc 73 amendements à examiner.
À la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
TITRE IV (suite)
SE LOGER
Chapitre III
Lutter contre l’artificialisation des sols en adaptant les règles d’urbanisme
M. le président. Nous reprenons le cours normal de la discussion des articles.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Avant de débuter l’examen des amendements, je souhaiterais dire un mot des travaux qu’a menés la commission et saluer à ce titre mes collègues Christian Redon-Sarrazy et Anne-Catherine Loisier.
Cette partie du projet de loi touche directement au cœur de l’une des compétences des élus locaux : la capacité de définir leur propre projet de territoire. Cette compétence me tient particulièrement à cœur, alors que nous débutons en parallèle l’examen du projet de loi 4D, qui promet justement la décentralisation et la différenciation.
La proposition que nous fait le Gouvernement dans ce chapitre est la suivante : un double objectif de réduction de l’artificialisation des sols avec, d’une part, une réduction de moitié du rythme d’artificialisation en dix ans et, de l’autre, une cible de zéro artificialisation nette (ZAN) en 2050.
Le cœur du dispositif rend obligatoire l’intégration de ces objectifs dans les documents de planification des collectivités. Pour résumer cette mécanique complexe, les Sraddet devront inscrire cet objectif de réduction d’au moins 50 % du rythme d’artificialisation, ainsi qu’une trajectoire par période décennale, et prévoir une répartition entre les différentes parties du territoire régional. La région fixera donc aux collectivités de niveau inférieur des objectifs chiffrés de réduction, charge ensuite aux SCoT et aux PLU de les traduire.
La commission a jugé, et j’en suis moi-même convaincu, que cette approche centralisée, uniforme et prescriptive n’était pas la bonne. Pour autant, comprenez bien, madame la ministre, que nous partageons votre ambition de lutter contre l’étalement urbain et la dégradation des sols. Les collectivités sont d’ailleurs déjà fortement engagées, la plupart du temps, dans cet effort, et les outils sont en partie déjà là.
Avant-hier, en séance publique, sur le chapitre consacré aux transports, la ministre Emmanuelle Wargon disait : « La condition de l’acceptabilité des décisions, c’est la différenciation territoriale. » C’est cette acceptabilité, cette différenciation que notre commission a tenté d’insuffler aux chapitres relatifs à l’artificialisation des sols.
Nous avons d’abord replacé le Sraddet dans son rôle d’orientation générale. Nous ne souhaitons pas en faire un grand répartiteur des droits à construire, au mépris de la compétence des communes et des EPCI en matière d’urbanisme. Nous avons donc souhaité que les SCoT et les PLU puissent avoir une plus grande marge de manœuvre dans la manière dont ils déclinent l’orientation régionale.
Nous avons ensuite renforcé la territorialisation au niveau infrarégional en encadrant les critères qui permettront aux collectivités de justifier leurs propres objectifs : les enjeux propres à la ruralité, les besoins économiques, les trajectoires passées, les projets au service de tout un territoire.
En parallèle et en contrepartie de cette plus grande flexibilité, nous avons souhaité montrer que les collectivités agissaient en responsabilité, en renforçant la logique de bilan et d’évaluation des documents d’urbanisme.
Je pense que nous pouvons tous, sur l’ensemble des travées, nous retrouver dans ces objectifs de territorialisation et de différenciation sans qu’ils mettent aucunement en péril, madame la ministre, l’ambition que nous partageons.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Barbara Pompili, ministre. Je tiens à remercier, avant de commencer ce chapitre, les sénateurs et sénatrices d’avoir choisi d’aller dans le sens de la réduction du rythme d’artificialisation des sols. Je salue en ce sens le travail du rapporteur pour avis et de la présidente de la commission des affaires économiques, ainsi que la majorité sénatoriale.
Je rappelle l’objectif de ce chapitre : entamer une réduction ambitieuse, de 50 %, du rythme d’artificialisation des sols et, surtout, le faire de façon opérationnelle. Vous le savez, l’artificialisation des sols est un fléau, dont nous payons le prix très régulièrement. Malheureusement, les dernières inondations que nous avons connues sur notre territoire montrent le travail qui reste à accomplir.
Je sais l’attachement des collectivités et des exécutifs locaux que vous représentez à leur pouvoir décisionnaire en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire. J’y suis également très attachée, comme le Gouvernement. Nous ne cherchons pas dans cette loi à imposer une forme de centralisme en matière d’aménagement du territoire. Au contraire, nous confions aux différents échelons territoriaux la mission de mettre en œuvre et d’atteindre notre objectif national de façon cohérente, avec l’ensemble des dimensions de l’aménagement du territoire.
Ce volet du projet de loi est très technique, mais c’est la condition sine qua non pour que ses dispositions soient opérationnelles. De fait, il y a encore de l’espace pour améliorer la clarté de certaines dispositions.
Afin de préserver l’ambition écologique du texte, il est important pour le Gouvernement de redire quelles sont ses priorités.
Il est essentiel d’avoir une définition claire et opérationnelle de l’artificialisation. Le Gouvernement présentera un amendement à l’article 48 visant à fonder la définition sur l’altération durable des sols et à préciser les modalités de décompte des objectifs dans les documents de planification.
Il est également primordial de s’assurer que le dispositif proposé permette de territorialiser l’objectif d’une baisse de 50 % en tenant compte, monsieur le rapporteur pour avis, des disparités territoriales des grands projets qui peuvent intervenir, mais sans affaiblir notre ambition. Des améliorations peuvent encore être trouvées à la faveur de la navette parlementaire ou en vue de la commission mixte paritaire.
Nous portons aussi le rétablissement de la mesure de simplification de la mise en œuvre des boni de constructibilité pour favoriser la densification ciblée en zone tendue, à l’article 51 bis A.
Enfin, concernant le sujet de l’urbanisme commercial, je redis clairement l’avancée majeure que représentent les articles 52 et 52 bis : l’interdiction stricte de tout nouveau centre commercial sur des terres agricoles ou naturelles de plus 10 000 mètres carrés et la mise en place d’un système de dérogations contraignant pour les surfaces de moins de 10 000 mètres carrés.
Je rappelle que le Gouvernement est extrêmement attentif au sujet des entrepôts de e-commerce, qui posent des questions d’équité fiscale, de mode de consommation et de modèle de société, mais aussi d’aménagement du territoire. C’est pourquoi la méthode que nous privilégions s’appuie, là encore, sur les territoires et la stratégie qu’ils déploient dans leurs documents de planification.
Je ne doute pas que la qualité de nos débats à venir sur ces sujets essentiels pour les territoires et leur contribution à l’atténuation du changement climatique et à la résilience permettront d’avancer vers ces objectifs que nous partageons.
Article additionnel avant la section 1
M. le président. L’amendement n° 298 rectifié, présenté par MM. Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, M. Gold, Mme M. Carrère, M. Guérini, Mme Guillotin et MM. Guiol, Requier et Roux, est ainsi libellé :
Avant la section 1 : Dispositions de programmation
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les dispositions relatives à la lutte contre l’artificialisation des sols prévues par le chapitre III du titre IV de la présente loi ne s’appliquent pas aux communes de moins de 2 000 habitants dont 90 % de la superficie communale est constituée d’espaces naturels ou de zones agricoles.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Le présent amendement de notre collègue Christian Bilhac vise à exonérer des obligations relatives à la lutte contre l’artificialisation des terres les communes des territoires ruraux et, plus particulièrement, celles de moins de 2 000 habitants dont 90 % de la superficie est consacrée aux activités agricoles ou encore constituée d’espaces naturels.
Il serait contraire à l’esprit de la loi d’obliger ces communes à renoncer à des projets utiles pour leurs habitants et pour l’attractivité de leur territoire, alors qu’elles sont foncièrement ancrées en pleine nature et, partant, les plus respectueuses de l’environnement. Aussi, il convient de ne pas pénaliser des territoires qui étaient jusque-là vertueux en termes de consommation d’espaces naturels. Les objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation bénéficieront avant tout aux grandes villes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à dispenser de l’application de la totalité de ce chapitre de loi relatif à l’artificialisation les petites communes rurales. Il cible les communes de moins de 2 000 habitants dont 90 % de la superficie est constituée d’espaces naturels ou agricoles.
La spécificité des communes très rurales nous tient tous particulièrement à cœur, et je ne fais pas exception à la règle. Durant tout l’examen de ce texte, vous verrez, mes chers collègues, que notre commission a veillé à la prendre en compte. J’ai également travaillé avec nos collègues actifs sur les sujets de ruralité afin de mieux intégrer la ruralité au texte initial. Cependant, la commission n’a pas souhaité exclure purement et simplement ces communes du champ des dispositions sur lesquelles nous nous penchons aujourd’hui.
D’abord, certaines dispositions de ce chapitre sont favorables aux communes, quelles qu’elles soient, notamment celles concernant la simplification ou les extensions des ORT. D’autres sont plus générales que la seule « zéro artificialisation nette », comme le moratoire sur les grandes surfaces.
Ensuite, la grande majorité des petites communes rurales ciblées sont soumises au régime du règlement national d’urbanisme (RNU) : elles n’ont pas de document d’urbanisme et ne seront donc pas soumises aux objectifs chiffrés, au durcissement de certaines règles du PLU, aux obligations rédactionnelles.
Enfin, la commission a modifié le texte tout au long de ce chapitre pour garantir la territorialisation et la différenciation, notamment en prenant en compte les enjeux ruraux ou la spécificité des communes déjà soumises à des restrictions foncières fortes.
Nous allons poursuivre ce travail aujourd’hui. Vous le verrez, la commission sera favorable à plusieurs ajouts concernant le développement rural.
Je pense que de nombreuses petites communes rurales de tradition agricole qui ont été confrontées ces dernières décennies à une urbanisation galopante partagent les objectifs et l’ambition de ce chapitre, notamment dans une optique de protection des terres agricoles.
Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.