M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 298 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Section 1

Dispositions de programmation

Article additionnel avant la section 1 - Amendement n° 298 rectifié
Dossier législatif : projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets
Article 48

Article 47

Afin de tendre vers l’objectif d’absence de toute artificialisation nette des sols, en 2050, à l’échelle nationale, le rythme de l’artificialisation des sols dans les dix années suivant la date de promulgation de la présente loi doit être tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de la consommation d’espace observée sur les dix années précédant cette date.

L’État garantit l’application différenciée et territorialisée de ces objectifs, dans les conditions fixées par la loi.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. L’article 47 fixe une grande orientation de réduction de l’artificialisation, qui traduit l’ambition dont la Convention citoyenne pour le climat s’est fait l’écho. Il prévoit deux objectifs distincts : d’une part, l’atteinte du « zéro artificialisation nette » en 2050, qui correspond à l’orientation fixée au niveau européen, et, d’autre part, une division par deux du rythme de l’artificialisation nouvelle sur une période de dix ans.

En amont de nos débats, je souhaite dire un mot de cette logique de réduction de l’artificialisation nette, qui s’appliquera à l’échelle de la planification, c’est-à-dire des PLU et des SCoT.

J’y insiste, il ne s’agit pas de dire que chaque particulier ou aménageur devra, pour chaque projet qui artificialise, acheter un terrain de même taille et le renaturer. Aucun projet individuel ne pourra être interdit sur cette base. Cela signifie, en revanche, que l’on regardera pour chaque PLU ou chaque SCoT, par exemple, le nombre d’hectares qui ont été artificialisés sur la période et le nombre d’hectares qui ont été désartificialisés : voilà ce qu’est l’artificialisation nette. Je proposerai tout à l’heure un amendement pour clarifier cette notion et sa définition, qui ont beaucoup occupé les débats de la commission.

Je souhaite également rappeler que l’article 47 a une valeur programmatique, c’est-à-dire qu’il n’est pas directement opposable au PLU ou au projet individuel, mais qu’il fixe simplement une orientation pour la Nation.

En commission, nous avons souhaité réaffirmer, dès l’article 47, deux principes qui me paraissent fondamentaux : d’abord, ces objectifs sont fixés par la loi à une échelle qui est bien nationale ; ensuite, nous avons inscrit noir sur blanc dans la loi que l’État garantira par les décrets ou via les préfets l’application territorialisée et différenciée de ces objectifs, c’est-à-dire qu’il devra prendre en compte les spécificités locales et accueillir les projets de territoire des élus locaux.

Plusieurs des amendements que nous allons examiner vont dans le même sens. Croyez bien que nous en partageons pleinement l’intention. C’est la raison pour laquelle, j’y insiste, notre commission a veillé à inscrire ces principes fondamentaux dès l’article 47.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, sur l’article.

M. Franck Montaugé. S’il est un sujet de ce texte sur lequel nous sommes particulièrement dubitatifs, c’est bien celui du développement économique et de l’accueil des populations nouvelles en milieu rural.

L’objectif « zéro artificialisation nette » ne doit pas brider ou annihiler les capacités d’accueil et de développement des communes rurales françaises. Il doit permettre de protéger – je pourrais dire sanctuariser – les terres agricoles nourricières. Sur ce point, la majorité de l’Assemblée nationale n’a pas pris ses responsabilités : elle est restée dans une démarche d’imposition verticale définie par décret, échappant donc à tout débat démocratique, une fois de plus. En l’état, les maires, les élus locaux, ne pourraient à terme que constater les effets négatifs d’une procédure qui leur a complètement échappé, alors que le souhait de ruralité alimenté par le mal-être métropolitain n’a jamais été aussi présent.

Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, ce n’est pas acceptable. Il ne suffit pas de s’affranchir de l’objectif pour que le problème disparaisse. C’est un point important du texte de la commission sur lequel nous sommes en désaccord, même si je tiens ici à saluer le travail du rapporteur pour avis Jean-Baptiste Blanc et du groupe de travail qu’il a piloté.

Les démarches les plus efficaces résultent toujours de négociations entre parties prenantes. Imposer, on le sait, cela ne marche pas. Il faut, dans la négociation entre régions et communes ou EPCI, construire un calendrier réaliste qui nous permette d’être au rendez-vous de 2030 et de 2050. Il faut aussi savoir contractualiser le chemin à suivre et procéder ensuite à des évaluations régulières. C’est possible, mais pas avec le texte proposé.

Nous vous présenterons un cadre de contractualisation avec la convention de sobriété foncière, qui doit indiquer le point zéro, l’état des lieux quantitatif de l’artificialisation et son évolution au cours des dix prochaines années. Il faut fixer la trajectoire à suivre – c’est un problème fondamental pour les maires et les présidents d’EPCI – à partir des projets d’aménagement stratégique des ex-PADD, devenus les SCoT, qui résultent eux-mêmes des projets de PLUi, PLU, PLH et autres cartes communales.

À ces conditions, la transition, l’économie agricole et les aspirations de nombreux Français à la ruralité seront compatibles. Ces objectifs pourront être saisis comme une chance, un levier de développement, comme nous y aspirons tous ici, me semble-t-il.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 441 est présenté par MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

L’amendement n° 1523 est présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé, P. Joly, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Tissot, Mmes Harribey et Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

de tendre vers

par les mots :

d’atteindre

La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 441.

M. Ronan Dantec. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 1523.

M. Christian Redon-Sarrazy. L’article 47 du projet de loi fixe une trajectoire de réduction de l’artificialisation des sols d’ici à 2050.

Aujourd’hui, 3,5 millions d’hectares sont artificialisés en France – 20 000 à 30 000 hectares sont grignotés chaque année sur la nature et les terres agricoles. Tous les territoires sont concernés, y compris ceux dont la population décroît. L’artificialisation augmente en effet presque quatre fois plus vite que la population.

Les travaux de la commission ont abouti à réduire l’ambition de l’article 47, en remplaçant l’expression « afin d’atteindre » par « afin de tendre vers » l’objectif d’absence de toute artificialisation nette. Or, malgré un affichage de maîtrise de la consommation d’espaces depuis plus de trente ans, l’artificialisation des sols se poursuit.

L’engagement national de réduction de l’artificialisation des sols est une mesure structurante pour l’avenir de nos territoires. Les objectifs doivent être affirmés clairement et sans ambiguïté. Notre amendement tend donc à revenir à la notion d’atteinte de l’objectif de ZAN pour 2050.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un débat intéressant.

Monsieur Dantec, votre amendement n’est pas du tout rédactionnel. (Sourires sur les travées du groupe GEST.) Nous avons eu ce débat en commission et au sein du groupe de travail : que privilégier, entre les termes « tendre vers » ou « atteindre » l’objectif de ZAN en 2050 ? La commission a opté pour « tendre vers », en adoptant un amendement de notre collègue Stéphane Sautarel. Par cohérence avec cette position de la commission, je suis plutôt défavorable à ces amendements.

Il ne nous semble pas opportun de continuer l’aller-retour entre ces deux notions et de revenir en arrière, d’autant que cette disposition n’est pas juridiquement contraignante. Je rappelle en effet que l’article 47 a dans tous les cas un caractère programmatique. Le choix de la formulation a donc peu d’influence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Ce sera ma seule intervention dans le cadre de l’article 47.

Je suis très opposé aux amendements de nos excellents collègues. Pourquoi ? Parce que la rédaction de la commission – « tendre vers » – est frappée au coin du bon sens. Pourquoi condamner l’artificialisation en soi ? Le développement de la société est urbain, et les technologies exigent de remettre en permanence en cause la nature et l’usage des sols.

On voit ce que représente une remise en cause des sols anciennement artificialisés. À Paris, par exemple, l’un des plus grands propriétaires fonciers est sans doute la SNCF. Avant qu’elle ne désartificialise ses terrains et les rende à la construction, il se passera un temps fou.

J’ai été ministre des postes et télécommunications : historiquement, les centres de tri étaient situés près des gares ; désormais, ils sont près des échangeurs routiers.

J’ai présidé la région Lorraine : les friches industrielles y sont innombrables, en raison de la reconversion des industries textile, sidérurgique ou minière. Or ces friches sont en général irrécupérables immédiatement, parce qu’elles sont soit enclavées dans des ensembles urbains, soit inadaptées à des usages nouveaux.

Nous avons donc besoin de la plus grande souplesse.

Que les partisans du blocage de l’artificialisation le soient en pensant aux commerces et aux lotissements, c’est leur droit, mais si ces commerces et ces lotissements existent, c’est parce qu’ils répondent à une demande.

Des femmes, des hommes, des familles veulent vivre dans un certain type de logement, car ils n’acceptent plus la densité urbaine avec le mode de vie qu’elle implique. Tous nos compatriotes, et ils sont nombreux, n’ont pas la chance de vivre au cœur d’une ville historique avec des moyens importants.

De la même façon, sur le plan commercial, si vous voulez être certains qu’Amazon reprenne la totalité de la distribution dans notre pays, bloquons les zones d’activité commerciale, qui apportent, qu’on le veuille ou non, une forme de satisfaction.

C’est la raison pour laquelle – et je me tais à cet instant, car mon temps de parole est écoulé –, je pense que l’objectif de « tendre vers » choisi par la commission est beaucoup plus réaliste qu’un couperet qui rendrait toute opération d’adaptation impossible…

M. le président. Merci, mon cher collègue !

M. Gérard Longuet. … et qui découragerait nos élus locaux de se battre pour le développement de leur territoire. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Personnellement, j’ai beau parfaitement me reconnaître dans le tendre Vert… (L’orateur marque un temps de pause. – Murmures interrogatifs sur diverses travées.) Je vous expliquerai après, mes chers collègues…

M. Philippe Tabarot. Ah oui ! Je l’ai ! (Exclamations amusées sur de nombreuses travées.)

M. Ronan Dantec. Je vois qu’il y en a qui suivent. (Rires.)

Pour autant, comme l’a dit M. le rapporteur pour avis, cet article a un caractère programmatique. Le programmatique fixe l’objectif : « atteindre ». La mise en application consiste à aller vers l’objectif, c’est-à-dire « tendre vers ».

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 441 et 1523.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 135 rectifié bis est présenté par Mmes Noël, Puissat et Deromedi, M. Burgoa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Daubresse et Courtial, Mme Raimond-Pavero, MM. Houpert, de Legge et L. Hervé, Mme Dumont, MM. Brisson, Genet et D. Laurent, Mme Joseph, M. Grand et Mme Pluchet.

L’amendement n° 588 rectifié est présenté par Mme Paoli-Gagin, M. Lagourgue, Mme Mélot et MM. Menonville, Decool et A. Marc.

L’amendement n° 658 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, M. Cabanel, Mme M. Carrère et MM. Guérini, Guiol, Requier et Roux.

L’amendement n° 1020 rectifié bis est présenté par MM. Levi, Regnard et Bonnecarrère, Mme Lassarade, MM. Hingray et Détraigne, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Le Nay, Mme Vérien, M. Duffourg, Mme Billon, MM. Bonhomme, Kern et Cigolotti et Mme Morin-Desailly.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

l’objectif d’absence de toute artificialisation nette des sols, en 2050,

par les mots :

l’objectif de sobriété foncière

Les amendements n° 135 rectifié bis et 588 rectifié ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 658 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. Le projet de loi fixe des objectifs ambitieux en matière de lutte contre l’artificialisation des sols. On ne peut bien entendu qu’y souscrire.

Toutes les études démontrent que l’artificialisation fragilise la biodiversité en détruisant des habitats naturels ou en rompant la continuité écologique. Nous savons également qu’elle dégrade la capacité des sols à absorber l’eau, ce qui peut renforcer le ruissellement et aggraver les inondations.

Les acteurs locaux sont conscients de ce défi. Mme Delattre, qui porte cet amendement, rappelle que, depuis les années 2000, les élus mettent en œuvre de façon volontariste des politiques de sobriété foncière. Ils sont guidés par l’arsenal législatif et réglementaire, qui comporte déjà des exigences en termes de consommation d’espace. L’élaboration des SCoT ou des PLU intègre les problématiques de réduction de consommation de l’espace.

L’urgence climatique impose une nouvelle étape, car si le plan de biodiversité de 2018 a posé le principe d’absence d’artificialisation nette à terme, celui-ci n’a pas de valeur législative.

Le présent article prévoit un double objectif de « zéro artificialisation nette » et une division par deux de l’artificialisation des sols en dix ans. Afin de sécuriser ces objectifs, l’amendement vise à retenir au sein de l’article 47 la notion de sobriété foncière, la notion d’artificialisation nette n’étant pas définie dans le code de l’urbanisme.

M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 1020 rectifié bis.

M. Claude Kern. Pour synthétiser, je dirai que cet amendement tend à remplacer la notion d’absence de toute artificialisation nette des sols par celle de sobriété foncière, qui nous semble juridiquement et techniquement plus claire. En effet, s’appuyer sur une notion d’artificialisation nette non définie dans le code de l’urbanisme pourrait ouvrir la porte à des contentieux portant sur des documents d’urbanisme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Je ne partage pas l’appréciation des auteurs de ces amendements, qui estiment que la notion de sobriété foncière est juridiquement et techniquement plus claire. Elle n’est pas définie par le droit ou par la pratique. Quels seront les indicateurs utilisés pour estimer si un document d’urbanisme est sobre foncièrement ou non ? C’est un vrai nid à contentieux, et je pense qu’il est préférable d’en préserver les collectivités locales – chacun en sera d’accord.

A contrario, notre commission a proposé une définition précise des sols artificialisés à l’article 48, pour compléter celle introduite par l’Assemblée nationale. Cette grille de lecture concrète est plus facile à prendre en main : elle permettra d’objectiver l’atteinte des objectifs. Il est donc plus sécurisant d’un point de vue juridique de se fonder sur la notion d’artificialisation nette que sur celle de sobriété foncière.

Pour ces raisons, je suis défavorable à ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Je partage les remarques du rapporteur pour avis sur la notion de sobriété foncière.

La notion d’absence d’artificialisation nette s’entend comme un équilibre entre des surfaces de terrains qui sont nouvellement artificialisés et celles de terrains renaturés et qui restaurent des sols agricoles naturels et forestiers. La sobriété foncière renvoie, quant à elle, à un modèle d’aménagement durable qui vise à utiliser moins de terrain pour une fonction donnée. C’est l’un des leviers de lutte contre l’artificialisation des sols, mais ce n’est pas le seul.

De plus, supprimer l’horizon temporel de l’objectif, qui est 2050, réduit la portée de cet article programmatique. Cet horizon est structurant pour l’ensemble des aspects de notre politique de transition écologique et pour le respect de nos engagements européens.

Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. Claude Kern. Je retire mon amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 1020 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 658 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1524, présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé, P. Joly, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Tissot, Mmes Harribey et Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

dans les dix années suivant la date de promulgation de la présente loi

par les mots :

à horizon 2035

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Si nous ne souhaitons pas remettre en cause l’objectif de « zéro artificialisation nette », notre amendement vise à différer de 2030 à 2035 la première étape de l’objectif, et seulement celle-ci, c’est-à-dire de reculer l’échéance de cinq ans.

Cette première étape nous paraît essentielle pour prendre en compte l’adaptation de cet objectif dans les différents documents de planification, mais également pour que les élus portent cet objectif dans le débat public et que les citoyens puissent se l’approprier.

L’objectif ZAN implique en effet des changements importants de modèles de vie, voire des ruptures complètes qui requièrent l’adhésion des populations. Il convient donc de prendre en compte une phase de concertation avec les citoyens et l’ensemble des acteurs, pour porter ce débat citoyen et favoriser ainsi l’acceptabilité et les réorientations induites par le ZAN.

Il s’agit bien là d’une souplesse dans la mise en place et en aucun cas d’une remise en cause de l’objectif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à reporter à 2035 l’atteinte de l’objectif de réduction par deux du rythme. Je partage, bien entendu, le constat des auteurs de l’amendement sur l’importance du débat public et du respect du cycle de vie des documents d’urbanisme. Nous avons d’ailleurs modifié en commission l’article 49, qui fixe les modalités de déclinaison dans les documents d’urbanisme afin de laisser davantage de temps pour intégrer les objectifs.

La commission ne souhaite toutefois pas modifier la période de référence de dix ans, c’est-à-dire jusqu’en 2031. D’une part, elle permet d’avoir des données comparables sur la consommation d’espace sur une même durée, avant et après la loi. D’autre part, elle correspond aux échéances prévues par un bon nombre de SCoT. Je rappelle que presque 60 % des SCoT ont déjà inscrit une réduction de la consommation d’espace de 50 % ou plus. Je précise également qu’en commission nous avons apporté des modifications à l’article 49 qui permettront aux SCoT et aux PLU de fixer librement leur trajectoire de réduction.

En conséquence, mon avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. L’objectif à 2030 est, je le rappelle, de réduire non pas l’artificialisation, mais le rythme de l’artificialisation ! Autrement dit, jusqu’en 2030, on continue d’artificialiser ; simplement, on essaie de le faire d’une manière aussi rationalisée que possible, en évitant d’artificialiser là où cela peut être évité.

Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1524.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 716 rectifié ter, présenté par Mme Létard, MM. Levi, Bonnecarrère et Longeot, Mmes Dindar, Billon et Férat, MM. Delahaye, Canévet, Prince et J.M. Arnaud, Mmes Perrot, Jacquemet et Gatel, MM. Cigolotti, Chauvet, Capo-Canellas et Hingray, Mme C. Fournier, M. Duffourg, Mme Morin-Desailly et M. Henno, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer la seconde occurrence du mot :

dix

par le mot :

quinze

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Cet amendement de Mme Létard a pour objet d’allonger la période d’observation de la consommation de l’espace, sans remettre en cause l’objectif de diminution du rythme de l’artificialisation des sols.

En effet, la durée d’observation actuellement prévue dans le texte – dix années – semble courte et avantagera les territoires qui ont consommé le plus d’espace pendant cette période. Ainsi, les territoires les plus précautionneux en matière d’artificialisation seront pénalisés en comparaison, et les plus pénalisés seront les territoires ruraux…

L’adoption de cet amendement, en allongeant la durée d’observation à quinze ans, permettrait de rétablir un équilibre entre les territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Je comprends tout à fait la crainte de voir les territoires qui ont consommé le plus d’espace bénéficier d’une forme de prime, tandis que ceux qui ont été les plus vertueux subiraient une forme de pénalité.

Notre commission a été très attentive à ce que l’approche adoptée dans ce projet de loi ne soit pas punitive pour les collectivités qui ont été pionnières et volontaires. C’est la raison pour laquelle elle a adopté, à l’article 49, plusieurs amendements tendant à territorialiser l’application de l’objectif de ZAN en 2050, afin de tenir compte des spécificités et des trajectoires locales.

Nous avons spécifiquement prévu que la déclinaison de l’objectif devra tenir compte des efforts de réduction de l’artificialisation déjà réalisés par les collectivités au cours des vingt dernières années. Il me semble que cela satisfait l’objectif de cet amendement et que cela permettra d’éviter cette prime aux moins vertueux.

Par ailleurs, il ne me semble pas souhaitable de modifier la période de dix ans ; ce choix permet en effet de disposer de données comparables, c’est-à-dire de même durée, sur la consommation d’espace avant et après la loi.

Enfin, plus la période de référence est allongée, comme c’est le cas avec cet amendement, qui tend à la faire passer de dix à quinze ans, plus le stock de sols artificialisés pris en compte sera élevé, par définition, donc plus l’effort de réduction sur les dix ans à venir devra être sévère et rapide. En un mot : plus la période de référence est grande, plus la marche à franchir en dix ans est haute.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis défavorable !

M. le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 716 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Jean-François Longeot. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 716 rectifié ter est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 1957 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 1526, présenté par MM. Redon-Sarrazy, Montaugé, P. Joly, J. Bigot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Tissot, Mmes Harribey et Bonnefoy, MM. Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Il garantit également aux collectivités et leur groupement les adaptations en termes de fiscalité et de financement, rendues nécessaires pour la mise œuvre de l’objectif du zéro artificialisation nette.

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. L’objectif ambitieux de ZAN ne doit pas peser uniquement sur les collectivités, qui le mettent en œuvre. L’État doit leur apporter son soutien en matière d’ingénierie et prévoir les adaptations – leviers fiscaux, financements – nécessaires à cette mise en œuvre.

Tel est le sens de cet amendement dont l’adoption conditionne l’atteinte sur le long terme de cet objectif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?

M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis. Au travers de cet amendement, on veut rappeler une réalité que nous connaissons tous : la politique de lutte contre l’artificialisation doit s’accompagner de nouveaux moyens, car les collectivités ne peuvent pas porter seules cette charge.

Toutefois, ces dispositions ne me semblent pas avoir leur place dans un article programmatique, qui définit simplement la grande trajectoire en matière de lutte contre l’artificialisation.

Pour ce qui concerne plus spécifiquement la fiscalité, il me paraît préférable que nous ayons ce débat lors de l’examen du prochain projet de loi de finances.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous devons évidemment nous occuper du financement du ZAN.

En matière fiscale, une réforme est engagée pour inciter à une plus grande sobriété foncière, que ce soit par l’adaptation de la taxe d’aménagement ou par les abattements de plus-value immobilière.

En matière de financement, le plan France Relance permet, au travers du fonds Friches, doté de 650 millions d’euros pour 2021-2022, de favoriser le portage d’opérations de recyclage des terres. Dans ce même cadre, une aide en faveur de la densification a été créée : c’est l’aide à la relance de la construction durable, dotée de 350 millions d’euros environ.

Enfin, les établissements publics fonciers (EPF) effectuent également des minorations foncières pour faciliter la sortie d’opérations dont les bilans d’aménagement sont très déficitaires. Ces établissements proposent aussi leur expertise d’ingénierie aux collectivités territoriales, en particulier lorsque les opérations sont complexes, par exemple pour des sites pollués.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.