Mme Esther Benbassa. Cet amendement fait suite à notre précédent amendement visant à introduire la notion de limites planétaires dans notre droit. Il tend à inscrire la définition des limites planétaires dans notre législation afin de garantir le respect de l’équilibre des milieux naturels et le développement durable et juste de l’humanité, conformément au mandat de la Convention citoyenne pour le climat.
Cette définition des limites planétaires repose sur la fixation de seuils au-delà desquels le dérèglement climatique, l’érosion de la biodiversité, les apports en azote et phosphore à la biosphère et aux océans, le changement d’usage des sols, l’acidification des océans, l’appauvrissement de l’ozone stratosphérique, l’usage de l’eau douce, la dispersion d’aérosols atmosphériques, la pollution chimique imputable aux activités sur le territoire national ne sont pas compatibles avec le respect de l’équilibre des milieux naturels, ainsi qu’avec le développement durable et juste de l’humanité.
Je tiens à rappeler, en ce sens, que la France dépasse déjà actuellement six des neuf limites planétaires. Cet amendement est donc une invitation à faire un état des lieux de notre action en matière environnementale, ainsi qu’à remettre en question nos modes de consommation et de production.
M. le président. La commission et le Gouvernement ont déjà émis leur avis, qui est défavorable.
Je mets aux voix l’amendement n° 375.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 372, présenté par Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 69
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 122-2 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque cette requête est fondée sur le caractère insuffisant ou inexact de l’étude d’impact, le juge des référés peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision ou de certains de ses effets. »
II. – L’article L. 521-2 du code de justice administrative est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les droits et libertés consacrés par la Charte de l’environnement de 2004 sont des libertés fondamentales au sens du premier alinéa du présent article. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. La procédure du référé-liberté, telle que définie à l’article L. 521-2 du code de justice administrative, permet une intervention du juge administratif des référés en moins de quarante-huit heures, sous les deux conditions que nous connaissons : la demande doit présenter un caractère urgent et elle doit démontrer que l’intervention du juge est nécessaire « à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ». Ce type de référé s’applique notamment au droit d’asile, au droit de propriété, au droit de grève, au droit syndical, ou encore au droit de mener une vie familiale normale, ces droits entrant tous dans la définition classique des libertés fondamentales.
La question de l’extension du référé-liberté visant à intervenir en urgence pour la prévention d’atteintes à l’environnement n’est pas nouvelle. Ainsi, la mission flash d’information menée par Naïma Moutchou et Cécile Untermaier a permis des avancées concernant le contentieux de l’environnement.
Reprenant ses préconisations, le présent amendement vise, en premier lieu, à ouvrir la voie au juge de faire droit à une demande de suspension de la décision d’approbation d’un projet, en cas d’insuffisance de l’étude d’impact. Il tend, en second lieu, à intégrer les droits consacrés par la Charte de l’environnement de 2004 dans le champ d’application du référé-liberté.
L’importance de la protection de l’environnement justifie un tel amendement. Son adoption assurerait la possibilité de protéger l’environnement dans des situations d’extrême urgence.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 372, qui a reçu deux avis défavorables.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 373, présenté par Mme Benbassa et MM. Dantec, Fernique, Labbé et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 69
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre VII du livre Ier du code de l’environnement est complété par un article L. 173-… ainsi rédigé :
« Art. L. 173-…. – Les délits définis au présent livre sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction.
« Les délits portant atteinte aux milieux physiques et aux espaces naturels définis aux livres II et III sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction.
« Les délits portant atteinte au patrimoine naturel définis au livre IV sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction.
« Les délits portant atteinte à la prévention des pollutions, risques et nuisances définis au livre V sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Comme je l’ai dit précédemment, la volonté du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires est de renforcer autant les moyens du juge en matière de protection de l’environnement que l’arsenal pénal et les sanctions à visée dissuasive… (L’oratrice marque un temps de pause.)
M. le président. Merci, ma chère collègue !
Mme Esther Benbassa. Je n’ai pas terminé, monsieur le président ! (Rires.)
M. le président. Pardonnez-moi, j’ai cru que votre intervention était finie… (Sourires.)
Mme Esther Benbassa. Je sais que c’est un peu rébarbatif, mais c’est important, monsieur le président !
La sanction de la récidive est ancrée dans notre droit pénal à bien des égards. Nous pouvons classiquement citer le cas de l’infraction de vol, assimilée à celle d’escroquerie ou d’abus de confiance au regard de la récidive.
Nous estimons qu’il n’est pas possible de ne pas évoquer la récidive en matière environnementale dans notre droit. De même, celui-ci ne doit pas la sous-estimer.
Le présent amendement reprend, lui aussi, une proposition du rapport de la mission d’information flash, présentée lors de l’examen du texte par l’Assemblée nationale. Il vise à assimiler différentes infractions au regard de la récidive, afin de mieux réprimer les comportements récidivistes en matière environnementale et, ainsi, de renforcer l’effet dissuasif des sanctions proposées.
Ce mécanisme existe d’ores et déjà en droit pénal français. Ce n’est donc pas un non-sens de l’envisager pour la protection de l’environnement. Au contraire, allons jusqu’au bout de la démarche en renforçant notre arsenal juridique face à la récidive en matière d’infractions environnementales !
Mes chers collègues, si vous aviez voté la reconnaissance de l’écocide comme crime, je n’aurais pas à présenter tous ces amendements. (Sourires. – M. Martin Lévrier s’esclaffe.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 373, qui a reçu deux avis défavorables.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 377, présenté par Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 69
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre III du livre II du code de l’environnement est complété par des articles L. 231-… à L. 231-… ainsi rédigés :
« Art. L. 231-…. – Dans le cas où les infractions prévues aux articles L. 231-1, L. 231-2, L. 231-3 et L. 231-4 sont commises à l’étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement ou exerçant tout ou partie de son activité économique sur le territoire français, la loi française est applicable en toutes circonstances, par dérogation au deuxième alinéa de l’article 113-6 du code pénal, et l’article 113-8 du même code n’est pas applicable.
« Art. L. 231-…. – Lorsque les faits décrits aux articles L. 231-1, L. 231-2 et L. 231-3 sont commis, directement ou indirectement, de façon intentionnelle, le maximum de la peine est porté à :
« 1° Cinq ans d’emprisonnement années lorsqu’il est prévu trois ans ;
« 2° Sept ans d’emprisonnement lorsqu’il est prévu cinq ans ;
« 3° 500 000 € d’amende, celle-ci pouvant être portée jusqu’au quadruple de l’avantage tiré de la commission de l’infraction au regard de la gravité de l’atteinte lorsqu’il est prévu 300 000 € d’amende ;
« 4° Un million et cinq cent mille euros d’amende, celle-ci pouvant être portée jusqu’au sextuple de l’avantage tiré de la commission de l’infraction au regard de la gravité de l’atteinte lorsqu’il est prévu un million d’euros d’amende.
« Art. L. 231-…. – I. – Les présidents, les directeurs généraux et les gérants d’une société employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe de sociétés dont la société mère a son siège social en France et dont l’effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros sont tenus de prendre les mesures destinées à prévenir et à détecter la commission, en France ou à l’étranger, de faits incriminés par les articles L. 231-1, L. 231-2, L. 231-3 et L. 231-4.
« Cette obligation s’impose également :
« 1° Aux présidents et directeurs généraux d’établissements publics à caractère industriel et commercial employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe public dont l’effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros ;
« 2° Selon les attributions qu’ils exercent, aux membres du directoire des sociétés anonymes régies par l’article L. 225-57 du code de commerce et employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe de sociétés dont l’effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros.
« Lorsque la société établit des comptes consolidés, les obligations définies au présent article portent sur la société elle-même ainsi que sur l’ensemble de ses filiales, au sens de l’article L. 233-1 du code de commerce, ou des sociétés qu’elle contrôle, au sens de l’article L. 233-3 du même code. Les filiales ou sociétés contrôlées qui dépassent les seuils mentionnés au présent I sont réputées satisfaire aux obligations prévues au présent article dès lors que la société qui les contrôle, au sens du même article L. 233-3, met en œuvre les mesures et procédures prévues au II du présent article et que ces mesures et procédures s’appliquent à l’ensemble des filiales ou sociétés qu’elle contrôle.
« II. – Les personnes mentionnées au I du présent article mettent en œuvre les mesures et procédures suivantes :
« 1° Un code de conduite définissant et illustrant les différents types de comportements à proscrire comme étant susceptibles de caractériser des faits de mise en danger de l’environnement, d’atteinte à l’environnement ou d’écocide. Ce code de conduite est intégré au règlement intérieur de l’entreprise et fait l’objet, à ce titre, de la procédure de consultation des représentants du personnel prévue à l’article L. 1321-4 du code du travail ;
« 2° Un dispositif d’alerte interne destiné à permettre le recueil des signalements émanant d’employés et relatifs à l’existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite de la société ;
« 3° Une cartographie des risques prenant la forme d’une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d’exposition de la société à des risques d’atteinte à l’environnement, de mise en danger de l’environnement et d’écocide, en fonction notamment des secteurs d’activités et des zones géographiques dans lesquels la société exerce son activité ;
« 4° Des procédures d’évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires au regard de la cartographie des risques ;
« 5° Un dispositif de formation destiné aux cadres et aux personnels les plus exposés aux risques d’atteinte à l’environnement, de mise en danger de l’environnement et d’écocide ;
« 6° Un régime disciplinaire permettant de sanctionner les salariés de la société en cas de violation du code de conduite de la société ;
« 7° Un dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre.
« Indépendamment de la responsabilité des personnes mentionnées au I du présent article, la société est également responsable en tant que personne morale en cas de manquement aux obligations prévues au présent II.
« III. – L’Agence contrôle le respect des mesures et procédures mentionnées au II du présent article.
« Le contrôle est réalisé selon les modalités prévues au IV. Il donne lieu à l’établissement d’un rapport transmis à l’autorité qui a demandé le contrôle et aux représentants de la société contrôlée. Le rapport contient les observations de l’agence sur la qualité du dispositif de prévention et de détection des risques mis en place au sein de la société contrôlée ainsi que, le cas échéant, des recommandations en vue de l’amélioration des procédures existantes.
« IV. – En cas de manquement constaté, et après avoir mis la personne concernée en mesure de présenter ses observations, le magistrat qui dirige l’agence peut adresser un avertissement aux représentants de la société.
« Il peut saisir la commission des sanctions afin que soit enjoint à la société et à ses représentants d’adapter les procédures de conformité internes destinées à la prévention et à la détection des risques d’atteinte à l’environnement, de mise en danger de l’environnement et d’écocide.
« Il peut également saisir la commission des sanctions afin que soit infligée une sanction pécuniaire. Dans ce cas, il notifie les griefs à la personne physique mise en cause et, s’agissant d’une personne morale, à son représentant légal.
« V. – La commission des sanctions peut enjoindre à la société et à ses représentants d’adapter les procédures de conformité internes à la société destinées à la prévention et à la détection des faits d’atteinte à l’environnement, de mise en danger de l’environnement et d’écocide, selon les recommandations qu’elle leur adresse à cette fin, dans un délai qu’elle fixe et qui ne peut excéder trois ans.
« La commission des sanctions peut prononcer une sanction pécuniaire dont le montant ne peut excéder 200 000 € pour les personnes physiques et un million d’euros pour les personnes morales.
« Le montant de la sanction pécuniaire prononcée est proportionné à la gravité des manquements constatés et à la situation financière de la personne physique ou morale sanctionnée.
« La commission des sanctions peut ordonner la publication, la diffusion ou l’affichage de la décision d’injonction ou de sanction pécuniaire ou d’un extrait de celle-ci, selon les modalités qu’elle précise. Les frais sont supportés par la personne physique ou morale sanctionnée.
« La commission des sanctions statue par décision motivée. Aucune sanction ni injonction ne peut être prononcée sans que la personne concernée ou son représentant ait été entendu ou, à défaut, dûment convoqué.
« Les sanctions pécuniaires sont versées au Trésor public et recouvrées comme créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions de fonctionnement de la commission, notamment les conditions de récusation de ses membres.
« VI. – L’action de l’Agence se prescrit par trois années révolues à compter du jour où le manquement a été constaté si, dans ce délai, il n’a été fait aucun acte tendant à la sanction de ce manquement.
« VII. – Les recours formés contre les décisions de la commission des sanctions sont des recours de pleine juridiction.
« VIII. – Le présent article entre en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la promulgation de la loi n° … du … portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Dans sa décision du 31 janvier 2020, le Conseil constitutionnel a posé une première pierre dans l’extraterritorialité de la réglementation environnementale, afin de lutter contre la délocalisation des pollutions à l’aide de dispositifs juridiques permettant de sanctionner les entreprises qui profitent de législations moins contraignantes pour commettre à l’étranger des infractions répréhensibles en France.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite adapter les dispositions applicables en matière de corruption à la matière environnementale. Son objectif est de faciliter la poursuite des délits environnementaux commis par des sociétés françaises à l’étranger, en simplifiant les conditions d’engagement des poursuites de ces délits par le juge français ; de suivre l’exemple des infractions de corruption pour la procédure – requête du ministère public, double incrimination, plainte de la victime ou dénonciation de l’État – ; d’étendre l’extraterritorialité aux filiales étrangères des sociétés mères françaises qui commettraient des infractions de façon intentionnelle.
Afin d’améliorer la responsabilité civile des entreprises pour leurs activités à l’étranger, le présent amendement vise à mettre à la charge de certaines sociétés une obligation de vigilance environnementale, sur le modèle de l’obligation de vigilance anti-corruption de la loi Sapin II. Cette dernière obligation est plus contraignante que celle issue de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, mais son champ d’application est plus restreint.
Pour reprendre un adage cher à notre République, je dirai que la planète Terre n’est qu’une et indivisible, et elle nous appartient à tous. Il convient de lutter ardemment contre la pollution de nos entreprises, sur notre territoire et à l’étranger.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 377, qui a reçu deux avis défavorables.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1041, présenté par Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 69
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’impact sanitaire et environnemental de l’utilisation du chlordécone comme insecticide agricole dans les territoires de Guadeloupe et de Martinique et sur les responsabilités publiques comme privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d’une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Comme on dit en anglais, last but not least ! (Sourires.)
En 2011, un rapport parlementaire fait au nom de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a mis en lumière, au niveau national, les conséquences économiques, sanitaires et environnementales de l’utilisation du chlordécone – pesticide organochloré – entre 1972 et 1993 en Guadeloupe et en Martinique, pour lutter contre le charançon du bananier.
Alors que, dès 1966, les dangers pour la santé humaine et animale de ce pesticide étaient connus, son utilisation s’est poursuivie jusqu’en septembre 1993, sur le fondement de deux dérogations successives accordées par le ministère de l’agriculture, à la demande des professionnels du secteur. Il s’agissait là d’un choix politique et de société, un choix productiviste et économique d’autoriser le chlordécone afin d’être encore et toujours plus compétitif.
Ce productivisme à outrance est la cause de nombreuses conséquences néfastes pour l’environnement et pour l’homme : pollution des sols, taux élevé des cancers de la prostate, notamment.
Face à ce que l’actuel Président de la République appelait en 2018 un « scandale environnemental », il revient maintenant au Gouvernement, après les travaux menés par le Parlement, de se pencher sérieusement sur l’urgente question de l’utilisation du chlordécone aux Antilles françaises, pour une appréciation des responsabilités publiques comme privées.
Il s’agit aujourd’hui de sanctionner les dégâts environnementaux causés, que notre groupe qualifie par ailleurs d’écocide. Il s’agit surtout, dès demain, de se pencher sur la question de l’indemnisation des victimes de l’utilisation de ce pesticide.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Cet amendement vise à remettre un rapport au Parlement sur l’impact sanitaire et environnemental de l’utilisation du chlordécone comme insecticide agricole dans les territoires de Guadeloupe et de Martinique. Ses auteurs souhaitent que ce rapport permette de faire le point sur les responsabilités, publiques comme privées, dans la prolongation de son autorisation.
Je ne crois pas qu’un rapport au Parlement soit le meilleur vecteur d’information pour faire la lumière sur ce problème. Cette demande constitue, tout d’abord, une forme d’injonction au Gouvernement. Elle revient, ensuite, à placer l’administration en position de juge et partie, ce qui n’est pas compatible avec la nécessité de bénéficier d’une expertise impartiale.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Barbara Pompili, ministre. Objectivement, nous n’avons pas besoin d’un énième rapport sur l’impact environnemental et sanitaire du chlordécone, qui a déjà fait l’objet d’une littérature très abondante, notamment sur le plan scientifique.
S’agissant de la question de la responsabilité, elle a été examinée en profondeur par le rapport de la commission d’enquête parlementaire qui était présidée par le député Serge Letchimy et dont la rapporteure était Justine Benin. Ce rapport relatif à l’impact de l’utilisation du chlordécone aux Antilles a été présenté en décembre 2019.
Désormais, je crois qu’il faut surtout que l’on agisse pour traiter les conséquences de ces pollutions très graves. Les propositions du rapport Letchimy-Benin ont largement inspiré le plan Chlordécone IV 2021-2027, qui vient d’être adopté et qui est doté d’un budget global de 92 millions d’euros.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1041.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 69 bis (priorité)
La section 1 du chapitre Ier du titre VII du livre Ier du code de l’environnement est complétée par un article L. 171-5-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 171-5-2. – Afin d’assurer l’exercice de leurs missions de police administrative et la constatation des infractions passibles des sanctions administratives prévues à la section 2 du présent chapitre, les agents chargés des contrôles prévus à l’article L. 170-1 peuvent être autorisés à procéder, au moyen de caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote, à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images ainsi que de données physiques ou chimiques lorsque des circonstances liées aux lieux de l’opération rendent particulièrement difficile le recours à d’autres outils de captation d’images ou sont susceptibles d’exposer leurs agents à un danger significatif.
« L’autorisation est délivrée par décision écrite et motivée de l’autorité administrative compétente, qui s’assure du respect des dispositions du présent article. Elle détermine le périmètre à l’intérieur duquel elle est valable, qui correspond au site faisant l’objet du contrôle et à ses abords immédiats. Elle fixe sa période de validité, qui ne peut excéder un mois, ainsi que ses finalités.
« La personne faisant l’objet du contrôle, ou la personne désignée pour la représenter, est avisée de l’utilisation des aéronefs mentionnés au premier alinéa.
« Lorsqu’elles sont mises en œuvre dans l’espace public, les opérations mentionnées au même premier alinéa sont réalisées de telle sorte qu’elles ne visualisent ni les images de l’intérieur des domiciles ni, de façon spécifique, celles de leurs entrées. Hors le cas où les enregistrements sont utilisés dans le cadre d’une procédure administrative, les enregistrements sont effacés au bout d’une période de six mois et au bout d’une période de trente jours lorsqu’ils comportent des données à caractère personnel.
« Les caméras mentionnées audit premier alinéa ne sont utilisées que dans les sites ou aux abords des sites dont la surveillance est rendue nécessaire pour l’accomplissement des missions et la poursuite des infractions mentionnées au même premier alinéa. L’enregistrement n’est pas permanent et n’est rendu possible que dans des cas limitativement énumérés par le décret prévu au dernier alinéa, qui font l’objet d’une doctrine d’usage diffusée par le ministre chargé de l’environnement.
« Les caméras sont équipées de dispositifs techniques permettant de garantir l’intégrité des données ainsi collectées. Sont prohibés la captation du son depuis les aéronefs, l’analyse des images issues des caméras au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale, ainsi que les interconnexions, rapprochements ou mises en relation automatisés des données à caractère personnel collectées avec d’autre traitements de données à caractère personnel.
« Les nouvelles technologies ainsi mises en œuvre sont sans incidence sur l’exercice des droits des personnes concernées prévus par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »