M. Jean Bizet. Cet amendement a pour objet de reporter la date d’entrée en vigueur d’une partie de la loi du 23 mars 2019. En effet, les problématiques liées à la Covid-19 ne permettront pas de réaliser un certain nombre d’opérations de numérisation, notamment celles qui concernent la transmission des actes d’huissier de justice aux établissements bancaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ce report de trois mois de l’entrée en vigueur d’une mesure retardée par le Covid-19 me paraît tout à fait justifié. L’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 43 est présenté par MM. Jacques Bigot, Marie et Kerrouche, Mme Lubin, MM. Kanner et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sutour et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes Féret, M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais et Guillemot, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mmes Rossignol et Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 218 est présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 43.
M. Jean-Pierre Sueur. La justice des mineurs est un sujet essentiel. Le débat passionné de ce matin sur la proposition de loi de Mme Costes sur l’enfance en danger le montre.
Madame le garde des sceaux, certaines pratiques ne peuvent plus continuer. Vous nous avez demandé de pouvoir légiférer par ordonnance sur ce sujet immense, énorme, central, très important. Vous avez naturellement assorti cette demande d’un discours indiquant qu’il y aurait un vaste et grand débat au Parlement et que l’on ne ferait rien sans lui.
On peut comprendre qu’il faille recourir à des ordonnances – c’est pourquoi nous avons voté certaines habilitations –, en raison de situations particulières, comme celle que nous connaissons en ce moment, mais, lorsque la rédaction de l’ordonnance prend beaucoup de temps – tellement de temps qu’il aurait été évidemment plus rapide de déposer un projet de loi –, on ne comprend plus…
Je vous signale, mais vous le savez déjà, que votre ordonnance a été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 30 octobre 2019 : avant cette date, aucune concertation avec les parlementaires ;…
M. Jean-Pierre Sueur. … après cette date, aucun débat de ratification, ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat. Je rends d’ailleurs hommage au président Philippe Bas, qui a organisé, au sein de la commission des lois, des débats pour préparer la chose.
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Pierre Sueur. Puisque je n’ai plus le temps de développer, je conclus très simplement. Il faut revenir au bon sens : soumettez-nous un projet de loi, il y aura ainsi un débat parlementaire.
M. le président. Merci !
M. Jean-Pierre Sueur. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’alinéa 4 de l’article.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 218.
Mme Laurence Cohen. Le II de l’article 1er septies reporte l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs. Cette entrée en vigueur, initialement prévue le 1er octobre 2020, est reportée au 31 mars 2021. Un texte de ratification de cette ordonnance aurait dû être présenté au Parlement l’été prochain, mais, en raison de la crise sanitaire que nous connaissons, le Gouvernement a repoussé l’échéance, dans un souci de faisabilité matérielle.
Nous nous sommes déjà exprimés pour dire notre désaccord quant au fond, désaccord d’autant plus important qu’il s’agit d’une refonte du code pénal pour les mineurs par voie d’ordonnance. En réalité, ce que vous proposez, madame la garde des sceaux, c’est de faire davantage avec des moyens absolument indigents pour la justice des enfants, dans le cadre d’une accélération de la répression pénale, au détriment du temps éducatif.
Un collectif de professionnels de la justice et de personnalités a écrit une lettre ouverte aux parlementaires et à vous-même, madame la garde des sceaux, pour dire que la « crise sanitaire que nous traversons est, malheureusement, venue exacerber toutes ces difficultés déjà criantes. Partout, les services de milieu ouvert, en protection de l’enfance comme à la protection judiciaire de la jeunesse, peinent à fonctionner dans des conditions sanitaires protectrices pour tous, professionnels comme usagers, et se trouvent de fait fortement ralentis, voire à l’arrêt dans certains territoires, au détriment de l’accompagnement éducatif des enfants ».
Pour toutes ces raisons, nous demandons, non un report, mais carrément l’abandon du texte.
M. le président. L’amendement n° 44, présenté par MM. Jacques Bigot, Marie et Kerrouche, Mme Lubin, MM. Kanner et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sutour et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes Féret, M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais et Guillemot, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mmes Rossignol et Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer la date :
31 mars 2021
par la date :
1er janvier 2022
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je vais défendre cet amendement, mais je me demande si c’est bien utile, madame le garde des sceaux, parce que je pense que vous aurez été convaincue de la nécessité de changer de chemin. S’entêter, sur un sujet aussi sensible, à faire une ordonnance, dont la préparation va durer très longtemps – plus longtemps que l’élaboration d’un projet de loi –, et nous parler d’un vaste débat pour la ratification, alors que celle-ci n’est pas inscrite à l’ordre du jour, ni à l’Assemblée nationale ni au Sénat, ce n’est quand même pas très sérieux.
J’ai donc confiance, madame le garde des sceaux… Je vous vois sourire, comme si c’était une clause de style – « on peut parler, mais ça n’aura pas d’effet »… –, mais je pense pour ma part que cela pourrait avoir un effet, que ce serait une bonne chose si vous nous disiez ce soir que, par respect pour le Parlement, sur un sujet aussi fort, aussi sensible, on aura un débat parlementaire.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Ce n’est pas Noël !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes là pour ça !
Si vous n’entendez pas ces arguments, je vous propose un amendement de repli.
Je salue notre ami Jacques Bigot, qui est à l’origine de ces amendements, parce qu’il tient à cela, avec son esprit et avec son cœur. Il nous a expliqué que vous comprendriez bien l’enjeu, que vous ne vous défausseriez pas devant le débat parlementaire, que vous ne vous accrocheriez pas à l’ordonnance. Néanmoins, il a prévu, pour le cas où il y aurait quelque 5 % ou 10 % de chances qu’on ne puisse vous persuader,…
M. Jean Bizet. Ce n’est pas impossible ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Sueur. … que vous vous accrochiez à l’ordonnance et que vous vous défaussiez par rapport au débat parlementaire, un amendement de repli.
Voyez comme nous sommes bons, madame le garde des sceaux (Sourires.), nous vous proposons un amendement de repli tendant à reporter cela au 1er janvier 2022 ; peut-être que, d’ici à cette date, vous nous aurez présenté un projet de loi de ratification qui aura donné lieu à un immense débat auquel nous aurons participé.
Cela dit, je le répète, il y a un bon chemin, et vous avez toutes les raisons de l’emprunter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vous aurez saisi que ces amendements visent soit à supprimer le report demandé par le Gouvernement pour l’entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs, soit à repousser la date du report.
Notre collègue M. Sueur et le groupe socialiste ont été bons pour le Gouvernement, mais la commission a été plus généreuse, puisqu’elle a émis un avis défavorable sur tous ces amendements (Sourires.), en maintenant la disposition demandée par le Gouvernement.
Pour autant, je dois le dire, nous avons tous été assez ébranlés par les arguments du président Sueur, parce que nous y adhérons. C’est vrai, si nous avons été d’accord pour que vous puissiez légiférer par ordonnance sur ce sujet essentiel qu’est la justice pénale des mineurs, madame le garde des sceaux, c’était évidemment en contrepartie de l’engagement que vous aviez pris de venir, tant devant le Sénat que devant l’Assemblée nationale, en discuter dans le cadre de la ratification de cette ordonnance. Or, effectivement, si ce projet de loi de ratification a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, il n’a pas encore été inscrit à son ordre du jour.
Cela dit, comme nous ne pensons pas que vous soyez venue jurer devant nous une main sur le cœur et les doigts croisés dans le dos que nous aurons ce débat, nous sommes persuadés qu’il aura lieu, mais, je l’ai indiqué à M. le ministre Fesneau, il serait bon que vous vinssiez avec une date. Avez-vous des éléments à nous apporter de nature à nous rassurer quant à l’exécution certaine des engagements que vous avez pris ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Effectivement, nous demandons le report de la date d’entrée en vigueur de ce code de la justice pénale des mineurs, puisque, telle que vous l’avez adoptée au travers de la loi de réforme pour la justice, cette réforme devait entrer en vigueur au mois d’octobre 2020, c’est-à-dire dans quelques mois. Or la crise du Covid-19 a entraîné une forme de stocks non traités.
Pour que cette réforme puisse entrer en vigueur de manière tout à fait correcte, il importe que nous puissions mettre à niveau l’ensemble des stocks existants dans les tribunaux pour enfants. Pour cela, nous avons pris les moyens nécessaires : au 1er septembre prochain arrivent, dans les tribunaux pour enfants, soixante-dix juges des enfants supplémentaires et cent greffiers supplémentaires. Cela nous permettra de travailler sur les affaires qui restent à traiter.
Par ailleurs, j’ai toujours dit que je souhaitais qu’il y ait, sur ce sujet important, un débat parlementaire, non que les parlementaires n’aient pas été régulièrement tenus informés de la rédaction de l’ordonnance, car j’ai constitué un groupe à cette fin.
M. Jean-Pierre Sueur. Ce n’est pas notre boulot d’être « informé » !
M. le président. Vous n’avez pas la parole, monsieur Sueur !
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Vous avez dit qu’il n’y avait eu aucune concertation ; je vous réponds donc, monsieur le président Sueur.
Ainsi, il y a eu, à mes côtés, un groupe de parlementaires, réuni à sept ou huit reprises, voire plus, qui n’avait pas vocation à être représentatif, mais qui était composé de sénateurs et de députés d’origines diverses – une sénatrice Les Républicains, une sénatrice LaREM, des députés de différents partis politiques –, et nous avons travaillé ensemble à l’élaboration de cette ordonnance.
Je l’ai toujours dit, je souhaite un débat parlementaire sur ce sujet. C’est la raison pour laquelle ce texte, adopté en conseil des ministres, a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale. Reporter de six mois l’entrée en vigueur du texte nous permettra de tenir ce débat parlementaire. Je ne suis pas en mesure de vous donner une date exacte, madame le rapporteur, mais j’imagine qu’il pourra se tenir, si ce n’est en fin d’année 2020, au moins en tout début d’année 2021, car le sujet le mérite effectivement.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 43 et 218.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er septies, modifié.
(L’article 1er septies est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er septies
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié bis, présenté par MM. Bascher et Mandelli, Mme Lavarde, MM. Dufaut, Regnard, Bonhomme et Bonne, Mmes Gruny, Deroche et Eustache-Brinio, MM. Lefèvre et de Nicolaÿ, Mme Duranton, M. Gremillet, Mme Bruguière, MM. Karoutchi, Piednoir, Pierre, Frassa, Cardoux et Cambon, Mme Di Folco, MM. Charon et Chatillon et Mmes Imbert et Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la fin du b du 2° du IV de l’article 25 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2023 ».
La parole est à M. Jérôme Bascher.
M. Jérôme Bascher. Cet amendement a pour objet de modifier la loi Sapin II relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
Vous le savez sans doute, lorsque nous rencontrons des représentants d’intérêts, il faut l’inscrire dans un répertoire numérique national. On a inscrit tout cela en dur dans le droit, mais, une fois que l’on s’est fait plaisir, on s’aperçoit que c’est un peu plus difficile à mettre en pratique que prévu. Ainsi, l’application, qui était prévue pour 2018, a déjà été repoussée au 1er janvier 2021.
La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique – nous venons d’entendre en audition le brillant préfet Pierre Steinmetz, proposé par Gérard Larcher pour appartenir au collège de cette institution – nous indique, dans son rapport annuel, que c’est effectivement problématique. On pense pourtant qu’il faudrait élargir ces obligations aux collectivités locales !
Mme Sophie Primas. Oh là là !
M. Jérôme Bascher. Ce n’est pas prêt aujourd’hui pour les institutions nationales, mais, c’est sûr, ce sera vraiment prêt pour les 35 000 communes de France, y compris pour les villages de 200 habitants… Ce n’est pas sérieux !
Nous demandons donc très simplement un report de deux ans de l’entrée en vigueur de cette loi d’incantation. Il faut d’abord tester l’affaire ; ce n’est pas possible de continuer comme cela.
Donnons-nous un petit peu de temps ; on peut penser que l’idée est juste – en vérité, les ayatollahs de la transparence nuisent parfois à la bonne économie locale –, mais commençons par bien tester l’affaire à l’échelon des parlementaires, à l’échelon national, avant de l’étendre aux collectivités territoriales. Donnons-nous deux ans !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Notre collègue Jérôme Bascher l’a brillamment expliqué, le Covid-19 a reporté la possibilité de faire entrer en vigueur ce texte. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Bascher. Oh !
M. Marc Fesneau, ministre. Je suis désolé de vous décevoir…
Tout d’abord, il s’agirait non d’un premier mais d’un deuxième report. En 2018, le Gouvernement avait entendu les objections émanant des chambres, en particulier de celle-ci, quant aux difficultés à mettre en œuvre cette législation ; on avait donc déjà reporté l’entrée en vigueur à 2021. Vous proposez maintenant de la différer d’encore deux ans, pour des motifs que l’on peut entendre, mais, d’une part, à force, les sujets deviennent, sans vouloir être désobligeant, quelque peu déliés de la situation liée au Covid-19 et, d’autre part, on ne peut pas reporter une mesure de deux ans, sachant qu’on a déjà procédé à un report de trois ans, au motif que nous avons cette crise. À un moment, les lois votées doivent être appliquées. Il s’agit, si j’ai bonne mémoire, d’un texte de 2016 ; cela entraînerait donc un report de sept ans de la mise en œuvre de cette réforme.
Ensuite, le droit actuel prévoit une entrée en vigueur en 2021, mais nous ne sommes qu’en 2020 ; il reste donc quand même un an pour essayer de mettre en œuvre cette règle.
Enfin, si vous me le permettez, ayant une petite expérience d’élu local, il me semble que, au moment où l’on procède au renouvellement municipal, il ne faudrait pas reporter cette entrée en vigueur à une date correspondant quasiment à la mi-mandat d’un certain nombre d’élus municipaux, sauf à dire que le temps donné serait tellement long que cette réforme ne serait jamais appliquée.
Sans être un ayatollah de la transparence – vous me connaissez –,…
M. Jérôme Bascher. Oui, je sais bien !
M. Marc Fesneau, ministre. … il ne me semble pas inconcevable que cette réforme, qui avait des fondements justes, puisse être appliquée.
Le Gouvernement, vous pouvez lui en faire crédit, avait accepté un report en 2018, mais, pour le coup, deux ans de plus, cela me paraît excessif.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. D’abord, une entrée en vigueur en 2021 suppose que, dès 2020, toutes les informations soient recueillies par les représentants d’intérêts pour les faire figurer dans le registre et dans leur rapport annuel de 2021. Cela motive cette proposition de report.
Ensuite, inclure maintenant, dans ce recueil d’informations, les collectivités locales posera un énorme problème à la Haute Autorité, qui le souligne elle-même, à savoir la masse d’informations sous laquelle elle va crouler. Elle a déjà des difficultés à absorber toutes les inscriptions dans le registre qui lui viennent de ces représentants d’intérêts, mais, si l’on ajoute les collectivités locales, cela fera une masse supplémentaire. Nous craignons donc que trop d’information nuise à l’information, puisqu’on ne pourra plus lire les informations intéressantes.
Enfin, cette loi a été prévue pour qu’on puisse tracer l’impact du travail des lobbies sur l’élaboration de la norme. Autant il est normal que l’on suive le travail des parlementaires, des cabinets ministériels et de la haute administration, autant on peut s’interroger sur l’intérêt de tracer les rapports entre les représentants de terrain et les élus locaux pour l’élaboration de la norme, puisque ces derniers sont encadrés par celle-ci et ne participent pas du tout à son élaboration. Ils sont déjà encadrés par tout un ensemble de règles, notamment celles des marchés publics, pour évoquer les choses les plus sensibles, mais également toutes les lois qui traitent du fonctionnement des collectivités.
C’est pourquoi il nous a paru raisonnable de proposer cet amendement, que je soutiens.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. Je déteste les lois d’incantation.
On peut dire que l’on nous a donné du temps et que ce sera le 1er janvier 2021, mais on vient de le voir avec la justice des mineurs : quand il n’y a pas le temps, quand les conditions ne sont pas réunies, il faut savoir se donner un délai pour que la loi soit bel et bien efficace et appliquée. Il ne faut pas dire « ce sera à compter de telle date… » ; cela ne marche pas ! C’est un peu comme si un Président de la République avait dit qu’on reconstruirait la cathédrale Notre-Dame de Paris encore plus belle en cinq ans… On le sait très bien, on ne le fera pas. Ça ne sert à rien de lancer des incantations si on ne fait pas les choses.
Ainsi, nous demandons, très simplement, un report pour pouvoir, justement, faire les choses. Le test n’a pas pu avoir lieu, on ne sait pas si ça fonctionne ni comment. Donnons-nous au moins le temps de voir comment les choses marchent pour les parlementaires. Étendre cette mesure à l’infini n’est pas possible, comme l’a expliqué, encore mieux que moi, Arnaud Bazin, dont la grande sagesse sur ce genre de sujet devrait vous conduire, monsieur le ministre, à réviser votre jugement.
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Il nous semble que les arguments développés par nos collègues auteurs de cet amendement sont les bons. Par conséquent, nous le voterons.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je veux aller dans le même sens que nos collègues.
D’abord, il faut effectivement faire les choses progressivement, pour qu’elles soient bien faites. Si on les fait mal au début, on risque de décrédibiliser l’ensemble d’un processus, qui est pourtant essentiel pour que les citoyens aient confiance dans la vie politique et dans la manière dont les décisions sont prises.
Ensuite, la Haute Autorité est chargée, cette année, de missions nouvelles sur la déontologie de la fonction publique, et elle n’a pas eu les moyens financiers de faire face à l’augmentation de sa charge de travail. Par conséquent, il n’est probablement pas raisonnable de lui demander de faire autre chose sans évaluer la manière dont elle arrivera à faire face à l’augmentation progressive du périmètre de son action.
Il est donc raisonnable, je le répète, de faire les choses par étapes pour les réussir.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Au risque de décevoir M. Bascher, je maintiens ma position.
Par ailleurs, je ne résiste pas, non au plaisir, mais au besoin, de rappeler que cette loi n’a pas été adoptée sous ce gouvernement.
M. Éric Kerrouche. Et alors ?
M. Marc Fesneau, ministre. Vous aviez prévu, en 2016, une entrée en vigueur en 2018, et vous dites maintenant que, 2023, ce serait mieux. C’est intéressant…
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er septies.
Article 1er octies A
(Non modifié)
I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d’outre-mer, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ».
II. – L’article 27 de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du III, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
2° Le IV est abrogé ;
3° Au V, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 ».
III. – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier de la cinquième partie du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5112-1, la date : « 1er janvier 2019 » est remplacée par la date : « 1er juillet 2021 » ;
2° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 5112-5 et du troisième alinéa de l’article L. 5112-6, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 ».
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, sur l’article.
M. Éric Kerrouche. Je souhaite porter la voix de nos collègues ultramarins, notamment Maurice Antiste et Catherine Conconne, pour dire que le groupe socialiste et républicain est favorable à cet article, qui prolonge d’un an l’existence des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en Martinique et en Guadeloupe.
Ces agences n’ont, à ce jour, pas encore mené à bien leur mission, principalement pour des raisons de moyens, sans aucun lien avec la situation actuelle. Ce report est nécessaire, mais, selon nos collègues, il doit également servir à lancer rapidement une concertation forte sur la concrétisation des trois objectifs assignés à ces agences : la résorption du retard caractérisé d’équipements des quartiers et la lutte contre l’habitat indigne, la régularisation des habitations sans titre de propriété construites sur la zone des cinquante pas géométriques et le transfert de la gestion de la zone urbanisée de l’État aux collectivités locales.
Sans cette concertation et sans mesures complémentaires, un report d’un an ne ferait, selon nos collègues, que repousser les problématiques liées à ces zones particulières. Si l’on prend le cas de la Martinique, il y a 7 000 constructions non encore régularisées et il reste à réaliser entre 250 millions et 300 millions d’euros de travaux d’équipement de base, tels que l’assainissement, l’accès à l’eau potable ou les routes d’accès aux quartiers de la zone des cinquante pas géométriques.
Nous demandons, avec nos collègues, une action rapide de l’État sur ce sujet particulier.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er octies A.
(L’article 1er octies A est adopté.)
Article 1er octies B
(Non modifié)
À la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article 35-1 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2022 ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 1er octies B