M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. Il est difficile de prendre la parole après Muriel Jourda, car ses arguments m’ébranlent. Il y a un flou par rapport à ce que l’on a appelé le confinement. Je m’apprêtais, comme une grande majorité des membres de mon groupe, à voter en faveur de ces deux amendements. J’ai connu en Essonne durant le confinement des cas épouvantables de jeunes filles qui n’ont pas pu aller avorter. Ce n’est pas de gaîté de cœur que je m’apprêtais à voter ces amendements.
Mais quid de l’état d’urgence et de la fin du confinement ? Oui, l’argument m’a beaucoup touchée : au 10 juillet, la mesure concernerait des enfants qui ne sont pas encore conçus.
Mme Anne Chain-Larché. Absolument !
Mme Laure Darcos. C’est pourquoi je suis davantage favorable à l’amendement de ma collègue Laurence Cohen, qui concerne l’état d’urgence à proprement parler et non les trois mois qui suivent puisque nous sommes sortis du confinement.
Pour autant, n’y a-t-il pas un moyen de trouver une solution ? Vous êtes nombreux à être en province, mais je puis vous assurer que le problème est encore bien réel en Essonne et en Île-de-France. Les médecins et le planning familial nous alertent. Comment trouver un système pour les aider ? Ces enfants à naître, si c’est pour qu’ils soient à l’aide sociale à l’enfance plus tard, cela pose question !
Je n’aurais jamais imaginé parler un jour d’allonger ce délai à quatorze semaines… Nous avons des discussions très riches et passionnées au sein de la délégation aux droits des femmes, et je ne partagerai jamais les positions de certaines d’entre nous. Mais, en l’occurrence, il s’agit de prendre une mesure à titre exceptionnel.
Je ne sais pas ce que l’on peut faire dans les prochaines semaines pour ces jeunes filles qui attendent des enfants non désirés, et cela me perturbe beaucoup. Je ne suis plus très sûre de mon vote…
Nous avons vécu un moment exceptionnel que, j’espère, nous ne connaîtrons jamais plus. Il faut avoir conscience des témoignages de détresse que nous avons pu recevoir.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Quelles que soient nos convictions et notre approche de la détresse des femmes face à une grossesse non désirée, nous pouvons tout de même nous entendre sur le droit. Je rappelle que c’est précisément cette détresse qui a conduit à l’adoption de la loi Veil. Nous en sommes toutes convaincues : une femme qui ne veut pas mener une grossesse à son terme l’interrompra de toute façon, même si la loi ne lui donne pas la possibilité de le faire. Et c’est parce qu’il fallait mettre fin aux avortements clandestins que la loi Veil a été votée !
Au-delà de nos convictions différentes, madame Jourda, je le répète, nous pouvons tout de même nous entendre sur le droit. Notre amendement vise à prolonger le délai permettant de pratiquer une IVG pendant la durée de l’état d’urgence et jusqu’à trois mois après sa cessation. Cela signifie qu’il n’y aura nul besoin de revenir devant le Parlement pour abroger cette disposition : trois mois après la fin de l’état d’urgence, elle ne sera plus valide ; nous fixons sa date d’extinction dans la loi. N’agitons pas des peurs qui n’ont pas lieu d’être ! L’adoption de cet amendement n’entraînera pas une durabilité des dispositions qu’il contient.
Pour répondre à M. le ministre, qui disait ne pas comprendre le délai prévu, je précise que la fin du confinement n’équivaut pas entièrement à la reprise de la vie normale. La situation dans les services hospitaliers étant toujours aussi tendue, en particulier en Île-de-France, des retards s’accumulent pour l’accueil des femmes.
Chaque année, entre 2 000 et 5 000 femmes se rendent dans des pays qui pratiquent des avortements hors délai, ce que notre pays accepte puisqu’il n’engage pas de poursuite à l’encontre de ces femmes. Je préférerais que la fin du confinement ne signifie pas la réouverture des frontières pour celles qui auront les moyens d’aller à l’étranger pratiquer des IVG que la France n’autoriserait pas dans les prochaines semaines.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Le sujet de l’IVG, celui du corps des femmes en général, est toujours difficile à aborder dans cet hémicycle, et nous savons que nous pouvons avoir des divergences de fond.
Au groupe communiste républicain citoyen et écologiste, nous nous prononçons toujours pour la défense des femmes et « profitons » de différents véhicules législatifs pour présenter nos amendements en ce sens, à l’instar de Laurence Rossignol et de nos collègues du groupe socialiste.
Autant je trouve normal que nous ayons un désaccord, madame Jourda, car c’est le débat démocratique, autant j’ai du mal à admettre le prétexte que vous invoquez. Je ne reviendrai pas sur la démonstration faite par Laurence Rossignol, mais, encore une fois, quelque chose me gêne.
Nous sommes dans une période exceptionnelle durant laquelle nous avons été invités à voter des mesures d’urgence, que vous avez adoptées et auxquelles mon groupe s’est opposé. Pour nous rassurer, vous nous avez dit qu’il fallait surtout ne pas nous inquiéter, car ces dispositions valaient pour la seule durée de la situation d’urgence et que tout était bordé.
Hier, lors du débat sur l’application StopCovid, on nous a dit la même chose : « Tout est bien bordé, il n’y aura pas de remise en cause des libertés ; ne vous inquiétez pas, rien n’est pérenne, cela ne s’appliquera qu’à la situation d’urgence ! »
Mme Françoise Laborde. Voilà !
Mme Laurence Cohen. Pour s’adapter à ce temps de l’urgence, des mesures exceptionnelles sont donc prises. Or, quand nous parlons de la détresse des femmes et que nous envisageons un dépassement des délais pour l’IVG du fait de la situation sanitaire de notre pays, vous nous rétorquez que nous voulons faire entrer par la fenêtre un allongement des délais dont vous ne voulez pas !
Il faut être logique et ne pas faire deux poids, deux mesures ! Les dispositions que nous défendons, et qui n’ont pas vocation à perdurer, répondent à la situation de femmes en détresse et en danger dont nous refusons qu’elles soient pénalisées, et qui ne pourront pas se faire avorter à l’étranger parce qu’elles n’en ont pas les moyens financiers ou parce que les frontières ne seront pas encore ouvertes.
Le délai que nous proposons vaut pour la période de l’épidémie de Covid. Ne nous dites pas qu’il sera pérenne ! Pourquoi n’avez-vous pas dit la même chose à propos de toutes les mesures d’urgence que vous avez votées avec allégresse ?
M. le président. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Il faut reconnaître à Muriel Jourda sa rigueur constante. Cela étant dit, il faut faire attention lorsqu’on utilise des arguments d’autorité.
Si l’on considère l’évolution de l’opinion publique de 1975 à nos jours s’agissant de l’IVG, on constate un contraste incroyable.
M. Jérôme Bascher. Même chose pour la peine de mort !
M. Éric Kerrouche. Actuellement, plus des trois quarts des Français sont favorables à l’IVG, sans restriction. En quarante ans, cette évolution a été phénoménale, et elle concerne aussi bien les hommes que les femmes, la seule variable provenant éventuellement des catholiques pratiquants. Mis à part ce cas particulier, il y a dans la société une large tendance à l’acceptation.
J’en viens aux conséquences. Le fait d’avoir un enfant non désiré peut représenter un poids, une détresse dont il faut tenir compte dans le cadre que nous avons circonscrit. Ne faisons pas comme si cette détresse n’existait pas ! Elle existe, et il faut la regarder en face en prévoyant cette dérogation qui ne doit pas, j’en suis d’accord, perdurer dans le temps.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je prends la parole avec beaucoup de précautions, car il s’agit là de sujets humains touchant à la détresse et à l’éthique. J’ai été très sensible aux arguments de Muriel Jourda, mais je suis, pour ma part, préoccupée par un problème de fond, de principe.
Je suis profondément favorable à l’IVG, et je crois que nous devons sans cesse rendre hommage au travail et au courage de Simone Veil. Il est hors de question de revenir, à un moment ou un autre, sur ce droit fondamental des femmes. Je suis aussi sensible à la détresse des femmes qui ont été confrontées à une grossesse non voulue durant la période de confinement, et que vous avez eu raison d’évoquer, madame la ministre Rossignol. Mais nous ne sommes pas en train de proroger un dispositif fiscal ou un logiciel de traçage numérique ! Nous parlons d’un être âgé de douze ou quatorze semaines. Or douze semaines, cela représente un tiers de la vie d’un embryon.
Moi qui suis profondément favorable à l’IVG, je vous le dis avec émotion, je me pose cette question : doit-on encore prolonger ce délai ? Je sais que la période est compliquée, et je respecte votre combat, madame Rossignol, mais il s’agit, outre de la détresse des femmes, d’un être de quatorze semaines.
Bien sûr, madame Cohen, nous devrons avoir ce débat. Je le répète avec sincérité, je m’interroge profondément sur cette durée de quatorze semaines, sur la détresse des femmes, mais aussi sur celle de ces enfants en devenir. Je ne voterai donc pas l’amendement n° 58 rectifié bis.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. J’interviendrai avec beaucoup de calme, après m’être précédemment emballée au mauvais moment…. Pour autant, je ne change pas un mot de ce que j’ai dit.
Le confinement se termine, et le déconfinement se poursuit. Parallèlement ont lieu des viols, des incestes, un certain nombre d’horreurs, car on ne parle pas seulement de femmes « qui n’ont pas fait attention » ! Il est important de le dire et de le redire, car il y a des non-dits…
Je suis favorable au maintien du délai de quatorze semaines durant quelque temps, notamment pour que les médecins, qui ont beaucoup donné d’eux-mêmes, puissent se reposer. Des services ont fermé, et, pour certains hôpitaux, l’IVG n’est pas prioritaire. C’est normal, on a tellement réanimé…
Il faut entendre toutes les détresses. Il y a des moments où il faut savoir faire de la réanimation et aussi des IVG.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. Ce débat touche nos sensibilités individuelles, plus que politiques. Dans cette période exceptionnelle, il était important de soulever cette question : cela peut nous prémunir dans le futur, si une telle situation devait se reproduire.
J’ai entendu les arguments qui tiennent à la situation de fait, cruelle, que nous avons connue : il était très difficile d’obtenir des rendez-vous médicaux, tout le monde était focalisé sur le Covid-19, et des personnes sont décédées. J’ai moi-même perdu un cousin qui ne souffrait pas du coronavirus, mais a été traité comme tel… En tout état de cause, la période était extrêmement compliquée. Des femmes sont ainsi en détresse, car elles ont subi des violences qui les conduisent désormais à envisager l’avortement.
Le fait que cette situation puisse se reproduire justifie la création d’une forme de référentiel pour nous prémunir à l’avenir. Et parce que l’amendement n° 58 rectifié bis prévoit une limitation dans le temps, je le voterai !
Je comprends que l’on puisse s’interroger sur l’allongement du délai de douze à quatorze semaines. Pour autant, nous parlons d’êtres vivants, de femmes qui n’ont pas pu, dans une période donnée, réaliser ce qu’elles souhaitaient intimement faire. Il faut donc accorder ce délai supplémentaire.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 58 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :
Nombre de votants | 336 |
Nombre de suffrages exprimés | 299 |
Pour l’adoption | 143 |
Contre | 156 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 210 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 109 :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 321 |
Pour l’adoption | 133 |
Contre | 188 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 4 rectifié bis est présenté par Mme Laborde, MM. Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Gold, Guérini et Jeansannetas, Mme Jouve, MM. Labbé et Léonhardt, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° 114 est présenté par Mmes Billon, Doineau, C. Fournier et Saint-Pé et MM. Cadic, Canevet, Capo-Canellas, Delcros, Détraigne, D. Dubois, Le Nay, Longeot et Moga.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 200 quindecies du code général des impôts, il est inséré un article 200 sexdecies ainsi rédigé :
« Art. 200 sexdecies. – Ouvrent droit à un crédit d’impôt sur le revenu égal à la totalité de leur montant les dépenses relatives à l’interruption de grossesse, lorsqu’elle a lieu après la douzième semaine de grossesse et jusqu’à la quatorzième semaine, par dérogation aux articles L. 2212-1 et L. 2212-7 du code de la santé publique. »
II. – L’article 200 sexdecies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est abrogé le 30 septembre 2020.
III. – Le I du présent article n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement aurait été justifié si l’allongement du délai de douze à quatorze semaines dans le cadre de l’état d’urgence avait été adopté, ce qui n’a pas été le cas. Craignant de nous voir opposer l’article 40 de la Constitution, nous avions inventé un système de crédit d’impôt afin que notre proposition ne soit pas retoquée.
Cet amendement n’ayant plus lieu d’être, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Michel Canevet, pour présenter l’amendement n° 114.
M. Michel Canevet. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 114 est retiré.
L’amendement n° 164 rectifié bis, présenté par MM. Lafon et Canevet, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé est ainsi modifiée :
1° L’article 2 est ainsi modifié :
a) Le VII est ainsi modifié :
- aux A et B, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 » ;
- au même B, l’année : « 2022 » est remplacée par l’année : « 2023 » ;
b) Au VIII, l’année : « 2021-2022 » est remplacée par l’année : « 2022-2023 » ;
c) Au XI, l’année : « 2024 » est remplacée par l’année : « 2025 » ;
d) Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Pour les étudiants accédant à la première année du deuxième cycle des études de médecine à compter de la rentrée universitaire 2020, les dispositions du code de l’éducation en vigueur antérieurement à la présente loi s’appliquent en ce qui concerne l’accès au troisième cycle des études de médecine par les épreuves classantes nationales. Les modalités de validation du deuxième cycle des études de médecine ainsi que le programme des épreuves classantes nationales sont fixés par arrêté des ministres en charge de la santé et de l’enseignement supérieur. » ;
2° Au 1° du II de l’article 5, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux ans » ;
3° Au II de l’article 13, le mot : « douze » est remplacé par le mot : « vingt » ;
4° L’article 37 est ainsi modifié :
a) Au premier du A du III, le mot : « douze » est remplacé par le mot : « vingt » ;
b) Aux V et VI, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
5° Au III et au B du VIII de l’article 70, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ».
II. – L’article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 est ainsi modifié :
1° Le IV est ainsi modifié :
a) Au A, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
b) Le B est ainsi modifié :
- au premier alinéa, la date : « 1er octobre 2020 » est remplacée par la date : « 30 juin 2021 » ;
- aux deuxième et dernier alinéas, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
2° Le V est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la date : « 1er octobre 2020 » est remplacée par la date : « 30 juin 2021 » ;
b) Au dernier alinéa, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ».
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. La loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé a prévu de nombreuses réformes, qui étaient en cours de discussion avec l’ensemble des acteurs : professionnels libéraux, praticiens hospitaliers, praticiens à diplôme hors Union européenne, ARS, etc. La crise du Covid ayant interrompu toutes ces réformes, l’amendement vise à prolonger les délais y afférents.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à prolonger les délais d’entrée en vigueur de plusieurs chantiers ouverts par loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé.
Le récent bilan de l’application des lois établi par la commission des affaires sociales a fait état d’un faible taux d’application de cette loi, monsieur le ministre : 30 % au 31 mars 2020, soit six mois après sa promulgation, et aucune des onze ordonnances prévues n’a été publiée.
Force est de constater que la crise sanitaire ne constitue pas, depuis le début de l’année, un contexte propice à l’avancée des concertations et des travaux sur de nombreux sujets. C’est la raison pour laquelle la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre. J’ai bien noté votre appel, monsieur le rapporteur pour avis, concernant les ordonnances. Nous aurons l’occasion d’en reparler au mois de juin lors du débat sur le bilan de l’application des lois, puisque c’est moi qui serai au banc du Gouvernement.
Le présent amendement vise à reporter l’échéance de plusieurs réformes importantes prévues dans la dernière loi Santé. Au moment où débutent les travaux du Ségur de la santé, ce report paraît en effet pertinent. L’avis est donc favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er septies A.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
Article 1er septies
(Non modifié)
I. – L’article 109 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du VII, la date : « 1er septembre 2020 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2021 » ;
2° À la fin du IX, la date : « 1er janvier 2021 » est remplacée par la date : « 1er septembre 2021 ».
II. – À la fin de l’article 9 de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs, la date : « 1er octobre 2020 » est remplacée par la date : « 31 mars 2021 ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 3 rectifié est présenté par M. Kennel, Mme Sittler et MM. Reichardt, Jacques Bigot et Kern.
L’amendement n° 215 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 3 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 215 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Le troisième alinéa de l’article 1er septies reporte la date d’entrée en vigueur des dispositions relatives à la mise en place de la juridiction unique des injonctions de payer. Un report est en effet la moindre des choses, mais, plus qu’un report, nous souhaitons un recul, car, selon nous, cette juridiction ne devrait tout simplement pas voir le jour.
La création de cette juridiction va à l’encontre du projet de société que nous portons. Elle favorisera davantage encore les compagnies d’assurances ainsi que les banques, qui émettent d’ores et déjà près de 80 % des requêtes en injonction de payer. Elle marginalisera, en contrepartie, des personnes aux faibles moyens financiers. Ces « petits litiges », pour les premiers, représentent pour ces dernières des sommes considérables et peuvent parfois ruiner des vies entières, le tout dans une logique purement gestionnaire.
Rappelons que nous nous étions déjà opposés à cette création lors de l’examen du projet de loi de réforme pour la justice de Mme Belloubet. Nous souhaitons que le Gouvernement revienne sur cette mesure, a fortiori dans le cadre de la situation sanitaire catastrophique que nous connaissons.
J’y insiste, la dématérialisation intégrale des petits litiges nécessite la comparution physique de personnes qui disposent souvent de moyens financiers limités.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. La réforme en question n’est pas tout à fait celle que dépeint Mme Cohen, mais peu importe… L’alinéa 3 de l’article reporte son entrée en vigueur au motif que celle-ci n’est pas prête – Mme le garde des sceaux nous en dira sans doute plus –, ce que je peux aisément comprendre.
Il ne me paraît pas anormal de reporter les effets de cette réforme si nous voulons qu’elle entre en vigueur dans de bonnes conditions. L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Sans revenir sur le débat que nous avions eu lors de l’examen de la loi de réforme pour la justice, je rappelle que cette juridiction unique des injonctions de payer que nous envisagions de créer reposait sur deux éléments : un outil numérique, afin de traiter ces dossiers de manière plus cohérente et harmonieuse, et la localisation de la juridiction à côté du tribunal de Strasbourg.
La mise en place de cette juridiction suppose, bien sûr, de libérer des locaux, mais aussi de mobiliser une cinquantaine ou une soixantaine de greffiers. C’est un peu compliqué… Nous ne sommes pas en retard s’agissant de l’outil numérique, qui vient d’être mis en place. Il est plus difficile, en revanche, de réunir tous les greffiers requis dans le contexte actuel de sortie de crise du Covid.
Nous avons besoin de quelques mois supplémentaires, au plus tard jusqu’en septembre 2021, mais il me semble inutile d’aller au-delà. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 19 rectifié est présenté par MM. Reichardt, Houpert, de Nicolaÿ, Mandelli, Grand et D. Laurent, Mmes Deroche et Duranton, M. Gremillet, Mme Billon, MM. Kern, Daubresse, Lefèvre, Regnard, Savin, Milon, Frassa, Cardoux et Danesi, Mme Lassarade, M. Segouin, Mme Puissat, M. Brisson, Mme Vullien, M. Cuypers, Mmes Deromedi, Vermeillet, Raimond-Pavero et Thomas, MM. Louault, Charon et Kennel, Mme N. Goulet, M. Chatillon et Mme Renaud-Garabedian.
L’amendement n° 74 rectifié bis est présenté par MM. Bizet, Bascher, Bazin, Bouchet et Calvet, Mme Bruguière, MM. Cambon et Chaize, Mme Chauvin, MM. Dallier et de Legge, Mme Dumas, M. B. Fournier, Mme Gruny, MM. Huré et Laménie, Mme Lamure, MM. Longuet et Magras, Mme M. Mercier, MM. Paul, Piednoir, Pierre, Rapin et Sido, Mme Troendlé et MM. Vaspart et Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… Au VI, la date : « 1er janvier 2021 » est remplacée par la date : « 1er avril 2021 ».
L’amendement n° 19 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean Bizet, pour présenter l’amendement n° 74 rectifié bis.