compte rendu intégral
Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
Mme Agnès Canayer.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Loi de finances pour 2020
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2020, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 139, rapport général n° 140, avis nos 141 à 146).
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
SECONDE PARTIE (SUITE)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Sport, jeunesse et vie associative
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et articles 78 unvicies à 78 tervicies).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne commencerai pas mon exposé en vous abreuvant de chiffres. Tout est déjà dans le rapport.
Permettez-moi plutôt d’insister sur trois points : le premier a trait au soutien au mouvement sportif.
Nous abordons une année de transition qui doit traduire une concrétisation de la nouvelle gouvernance du sport. Il est nécessaire d’activer tous ses rouages dans nos territoires, afin que la nouvelle instance soit pleinement opérationnelle lors des jeux Olympiques et Paralympiques que nous organiserons en 2024.
Madame la ministre, je souhaite lever deux interrogations : la première concerne la façon dont les dépenses relatives aux Olympiades seront honorées sans nuire au soutien du mouvement sportif.
Les versements à la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) augmentent en 2020, et s’amplifieront encore au cours des prochaines années. Jusqu’à présent, vous avez efficacement mobilisé des marges de manœuvre pour amortir l’effet de ces dépenses.
Mais la commission des finances est formelle : cette stratégie ne pourra pas perdurer pour faire face aux 860 millions d’euros de financements complémentaires attendus jusqu’en 2025.
Pouvez-vous malgré cela nous confirmer que ce besoin de financement sera sans conséquence sur le budget dédié au sport pour tous, comme le Président de la République s’y était engagé ?
La seconde interrogation porte sur le cas spécifique de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).
La dotation à l’Agence est stable en 2020, ce qui ne correspond ni au dynamisme de ses dépenses ni à l’ambition du Gouvernement en matière d’éthique du sport. Il s’agit pourtant d’une attente forte de nos concitoyens. Nous devons nous montrer à la hauteur des enjeux de la lutte antidopage mondiale.
Madame la ministre, pouvez-vous également nous confirmer que l’ensemble des dépenses afférentes au déménagement du laboratoire d’analyses seront bien prises en charge par l’État ? Mon attention a été portée sur un montant non compensé en 2020, représentant près de 8 % des ressources de l’Agence. Qu’en est-il ?
Je vais maintenant évoquer un sujet qui, me semble-t-il, intéresse nombre d’entre vous, mes chers collègues : je veux parler du service national universel (SNU).
Monsieur le secrétaire d’État, pour 2020, la grande nouveauté tient à la création d’une nouvelle ligne budgétaire dotée de 30 millions d’euros. Ce dispositif est ambitieux, et tient une place importante dans le projet du Président de la République pour notre jeunesse. Pour preuve, il vous a même demandé, monsieur le secrétaire d’État, d’accélérer sa mise en œuvre : il concernera ainsi 150 000 jeunes en 2021, 400 000 en 2022.
Qu’il en soit ainsi. Mais comment le montant de 1,2 milliard d’euros requis sera-t-il dégagé ? Je connais les inquiétudes de nombre de mes collègues, membres notamment de la commission de la défense, concernant ce montant. Ne sera-t-il pas prélevé également sur les crédits d’autres ministères ?
Je terminerai mon intervention en évoquant le soutien à la vie associative. Nous y reviendrons lors de l’examen de l’article 78 unvecies : le levier de financement que constitue le Fonds pour le développement de la vie associative doit être renforcé.
Il s’agit en effet de conforter le nouveau mécanisme qui doit succéder à la dotation d’action parlementaire, mais dont les montants sont inférieurs de moitié. Il s’agit aussi de répondre au climat d’incertitude qui ronge le mouvement associatif, alors que la générosité des Français a marqué le pas en 2018.
Soutenons donc cette initiative, fruit d’un travail ancien, en particulier de Jacques-Bernard Magner, que je salue.
Pour conclure, j’approuve l’équilibre général que traduit le budget proposé pour 2020. Mes interrogations portent essentiellement sur la trajectoire ultérieure et la façon dont le Gouvernement honorera ses différents engagements. La loi de programmation budgétaire annoncée pour le printemps constituera, à ce titre, un rendez-vous important.
C’est pourquoi, mes chers collègues, sur ma proposition, la commission des finances a émis un favorable sur les crédits de la mission et vous propose de les adopter. (M. Didier Rambaud applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le débat sur les crédits du ministère des sports se présente sous des auspices différents de l’année dernière.
Nous étions alors inquiets d’une baisse des crédits inédite, de 8,1 %, et du flou qui entourait la suppression du Centre national pour le développement du sport (CNDS) et la création de l’Agence nationale du sport (ANS).
L’annonce par le Gouvernement de l’extinction du corps des conseillers techniques et sportifs (CTS) avait également créé un grand trouble.
La situation est aujourd’hui différente : la gouvernance territoriale de l’ANS a été définie dans la loi et l’année 2020 marquera le lancement des projets sportifs territoriaux qui sont attendus par les collectivités locales.
Le budget se compose de deux programmes : le programme 219, « Sport », destiné à financer les actions du ministère et la part étatique de l’Agence, et le programme 350, consacré aux infrastructures des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Le programme 219 se voit doté, à périmètre constant, d’un montant de crédits identique à celui de l’année dernière, soit 312 millions d’euros, et une mesure de périmètre a porté à 434,7 millions d’euros le montant des crédits, en intégrant 120,8 millions d’euros affectés aux dépenses de personnel des CTS.
Je m’étonne de cette mesure, compte tenu du fait que le rapport des tiers de confiance n’a pas été rendu public, et qu’elle semble donc anticiper la confirmation du transfert du corps aux fédérations. Toute déstabilisation des CTS à quelques mois des JO de Tokyo constituerait une initiative périlleuse.
Je dirai un mot sur l’avenir du ministère des sports, qui nous soucie toujours autant. Après la création de l’Agence, le rapprochement de son administration déconcentrée avec les rectorats et la fusion de son inspection générale avec celle de l’éducation nationale et de la recherche, on peut s’interroger sur les missions et les moyens dont dispose encore le ministère.
Le comité interministériel du 4 novembre a renforcé une certaine confusion entre ce qui relève de la politique sportive, y compris au niveau interministériel, et la préparation d’un grand événement sportif international.
La préparation des JO de 2024 suit son cours, et nous sommes heureux de constater que les moyens nécessaires ont été mobilisés. Un point de vigilance concerne cependant le Stade de France, dont l’avenir reste incertain et dont la modernisation doit être à la hauteur de l’événement olympique.
La préparation de nos athlètes constitue la principale interrogation de ce débat budgétaire. Outre l’avenir incertain des CTS, nous savons que l’Agence consacrera 90 millions d’euros à la performance. Mais qu’en sera-t-il de l’organisation du réseau de la haute performance ?
La direction de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep) semble se chercher dans la prise de décision stratégique pour ce secteur. Des travaux récents du Sénat ont indiqué par ailleurs que les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives (Creps) rencontraient des difficultés à fédérer des initiatives locales.
Alors que la préparation de nos athlètes doit constituer une priorité absolue, il ne faudrait pas que la mise à plat des structures constitue un obstacle sur la piste de nos performances.
Même l’objectif de « jeux propres » est aujourd’hui fragilisé, compte tenu des contraintes imposées à l’AFLD. Le nombre des prélèvements est d’environ 8 000, alors qu’il dépasse les 12 000 dans des pays de taille comparable. Si le site de Saclay a été officiellement retenu pour accueillir le nouveau laboratoire, le budget ne comprend pas de crédits de paiement pour financer le déménagement.
Au final, il est difficile de porter un avis sur ce budget pour 2020.
Si les engagements de la France sont tenus concernant la préparation des JO – je veux d’ailleurs rendre hommage aux équipes de la délégation interministérielle aux jeux Olympiques et Paralympiques (Dijop) et de la Solidéo –, les moyens dévolus à la pratique sportive voient se poursuivre leur baisse, engagée depuis 2017.
Par ailleurs, ce budget ne fait progresser ni le sport santé, ni le sport en entreprise, ni le lien très perfectible entre sport scolaire et sport fédéral. Une récente étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a pourtant conclu que 85 % des adolescents français n’avaient pas de véritable activité physique quotidienne.
En somme, nous souhaiterions que le Gouvernement développe, pour les athlètes de haut niveau et pour les pratiquants, la même ambition que celle dont il fait preuve pour les infrastructures olympiques. Dans cette perspective, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis un avis de sagesse sur les crédits de la mission.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (M. Pierre Ouzoulias applaudit.)
M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de la culture a examiné le programme 163, « Jeunesse et vie associative », doté de 663,7 millions d’euros.
Cette année, ce programme comprend une action supplémentaire. Je note avec intérêt cette démarche, qui permet d’identifier les 30 millions d’euros consacrés au service national universel.
Notre assemblée devra toutefois être vigilante concernant l’exécution de ces crédits, afin de s’assurer qu’ils n’empiètent pas sur ceux qui sont alloués à d’autres postes de dépenses de ce programme.
J’espère, monsieur secrétaire d’État, que nous disposerons d’informations précises et régulières sur la mise en œuvre de ce dispositif et sa traduction budgétaire.
En effet, nos questions sont nombreuses sur le SNU. Lors de votre audition, monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué qu’entre 20 000 et 30 000 jeunes seront concernés en 2020. Avec un coût par jeune de 1 500 euros, le budget oscille entre 30 millions et 45 millions d’euros, soit une hausse de 50 %. Pouvez-vous aujourd’hui nous indiquer précisément où les financements supplémentaires seront trouvés si le nombre de volontaires dépasse les 20 000 ?
S’agissant des capacités d’accueil du séjour de cohésion, le Gouvernement semble avoir déjà des difficultés pour loger 20 000 à 30 000 jeunes. Or une classe d’âge représente 750 000 à 800 000 jeunes. Faudra-t-il construire des infrastructures dédiées et spécifiques ? Les infrastructures existantes suffiront-elles ?
Le taux d’encadrement est aussi très élevé, avec un adulte pour cinq jeunes. En 2020, il faudrait 4 500 encadrants pour 20 000 jeunes, et 150 000 pour 750 000 jeunes. Comment les recruter ? Comment les fidéliser ?
Quelle sera, par ailleurs, l’articulation entre le SNU et le service civique, qui – il faut le reconnaître – est aujourd’hui une réussite ? Il permet à de nombreux jeunes en difficulté scolaire et d’insertion professionnelle de remettre le pied à l’étrier.
Le retour sur l’investissement social global du service civique représente près de deux fois l’engagement initial de l’État. Certes, le budget du service civique est en hausse, mais il connaît une nette inflexion : +2 %, contre +12 % l’an dernier et +14 % en 2018. Or le nombre de missions reste insuffisant par rapport au nombre de demandes, avec, dans certains cas, trois ou quatre demandes pour une seule mission.
Cette rupture risque de casser la dynamique du service civique. Si tel était le cas, il serait très difficile et coûteux de la relancer.
Enfin, la phase 3 du SNU prévoit un engagement volontaire de trois mois à un an. Mais une mission de service civique ne peut avoir une durée inférieure à six mois.
Par ailleurs, pour qu’elle soit utile au jeune et à la structure qui l’accueille, les associations nous indiquent qu’une mission ne doit pas avoir une durée inférieure à huit mois. Former un jeune, le rendre opérationnel prend du temps. Or il faut que la structure d’accueil puisse également tirer un bénéfice de cette mission.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous garantir que la mise en place du SNU ne va pas conduire à une pression pour réduire la durée des missions du service civique et, donc, leur coût ?
Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, de nombreuses questions restent en suspens. C’est pourquoi la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis un avis de sagesse sur les crédits du programme 163. (Applaudissements sur des travées du groupe SOCR et RDSE. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Madame la ministre, plus d’un an après votre prise de fonction à la tête du ministère des sports, vous présentez un budget en progression pour 2020.
Cela conforte l’idée que les politiques publiques mises en œuvre dans ce cadre sont un enjeu majeur, notamment en perspective de la grande échéance attendue dans ces prochaines années, à savoir les Jeux de 2024, ou encore du large déploiement, en 2020, du service national universel.
Concernant les programmes 219, « Sport », et 350, « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 », le ministère disposera ainsi de plus de 710 millions d’euros, soit, à périmètre d’intervention constant, une hausse de 9,8 %, représentant un peu plus de 65 millions d’euros, ce qui est tout à fait substantiel.
Ce budget – il faut le rappeler et le souligner avec force – sera le plus important depuis 2006. Certains nous feront peut-être remarquer que l’augmentation du seul programme « Sport », d’un peu plus de 35 % par rapport à 2019, est principalement liée à un changement de périmètre, les crédits de rémunération des conseillers techniques sportifs étant désormais budgétés sur la mission.
Certes, et nous pouvons d’ailleurs nous réjouir de la confirmation du maintien de la totalité des CTS dans leur poste pour 2020. Voilà qui devrait rassurer les fédérations.
Mais au-delà de cette évolution, l’augmentation du budget est bien réelle puisque, à périmètre constant – je le répète –, nous constatons une hausse de 9,8 %.
Un autre sujet de satisfaction pour ce qui nous concerne est la traduction dans ce budget des priorités de la majorité présidentielle pour : d’une part, développer la pratique sportive en concrétisant la nouvelle gouvernance du sport autour de l’Agence nationale du sport, dont la déclinaison territoriale sera progressivement mise en place au cours de l’année 2020 ; et, d’autre part, pour assurer la bonne préparation des Jeux de 2024, en procédant à une montée en charge des dépenses relatives à leurs infrastructures. L’année 2020 constitue en effet une année charnière, marquée par l’engagement des premiers travaux.
Je m’attarderai quelques instants sur le programme 350. Je salue sa montée en puissance, avec un budget en augmentation de 35 % en autorisations d’engagement et de 98 % en crédits de paiement, et l’inscription inédite de crédits alloués à la dimension « héritage » des Jeux, destinés notamment à financer le futur laboratoire de l’Agence française de lutte contre le dopage, qui a vocation à faire rayonner la France au-delà de 2024.
Cette augmentation permettra également la mise en œuvre de mesures nouvelles, au premier rang desquelles la revalorisation des primes aux médaillés olympiques et paralympiques à hauteur de 10 %, venant ainsi compenser la fin de l’exonération à l’impôt sur le revenu de ces primes.
Je veux profiter de cette tribune pour saluer d’un même mouvement les 500 premières collectivités labellisées « Terres de Jeux ». Ces collectivités s’engagent dans l’aventure des Jeux avec leurs habitants ; parmi elles, figurent 17 communes ou intercommunalités iséroises.
M. Michel Savin. Très bien !
M. Didier Rambaud. Ce mouvement de grande ampleur, qui va emmener tout le pays vers cette grande fête du sport, où la France sera au centre du monde, démarre très concrètement sur tout le territoire avec cette annonce de labellisation.
Au-delà du budget du ministère des sports, au-delà des chiffres qui traduisent un engagement important, je souhaitais vivement saluer ces collectivités qui s’engagent pour ces Jeux.
Ce salut que je viens d’adresser serait bien incomplet sans un hommage aux dirigeants et bénévoles des 180 000 associations sportives qui jouent un rôle essentiel auprès de notre jeunesse.
Ces associations trouveront un soutien accru auprès de l’Agence pour promouvoir le développement des pratiques pour tous, partout et tout au long de la vie. L’objectif de 3 millions de pratiquants sportifs affiché par le Gouvernement est ambitieux ; les associations y prendront toute leur part.
Concernant le programme « Jeunesse et vie associative », nous constatons une réelle dynamique des crédits, en augmentation de 8,4 %, ce qui s’explique principalement par le financement du service national universel.
La majorité présidentielle a fait le choix d’investir, en faveur de la jeunesse, dans le déploiement du SNU. Quelque 20 000 jeunes seront concernés en 2020. Ces quinze jours durant lesquels tous ces jeunes vont en côtoyer d’autres venus d’horizons, de quartiers, de territoires différents ne vont pas d’un seul coup bouleverser la société.
Il s’agit cependant d’un pari sur le moyen et le long terme. Cet outil de rassemblement de la jeunesse, ce tremplin pour un engagement, portera ses fruits de manière constructive dans les années à venir.
Nous serons par ailleurs attentifs à ce que ce service national s’articule favorablement avec le service civique, dont l’objectif consiste à toucher 145 000 volontaires en 2020, avec une poursuite de la montée en charge vers l’objectif de 150 000 jeunes. C’est une autre manière d’engager la jeunesse au service du collectif dans la continuité du service national universel.
Le budget alloué à la jeunesse et à l’éducation populaire reste stable, à hauteur de 71,6 millions d’euros. Quant aux fonds attribués à la vie associative, ils bénéficient d’une hausse substantielle : les crédits alloués au développement de la vie associative augmentent de 18,7 %, ce qui permettra, notamment aux dirigeants associatifs, de bénéficier de droits complémentaires pour la formation.
Je saluais tout à l’heure les bénévoles qui s’engagent au sein des associations sportives. Il nous faut également rendre hommage aux 13 millions de bénévoles qui s’investissent au profit des 21 millions d’adhérents du million et demi d’associations, tous types confondus, que compte notre pays. C’est une richesse, qui classe la France parmi les pays les mieux dotés du monde en la matière.
Je souhaiterais conclure sur cette note d’optimisme, en rappelant l’importance de cette mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Ce qui se joue quasi quotidiennement sur tous les terrains de sport, dans les gymnases, dans les maisons des associations, c’est tout simplement l’apprentissage de la citoyenneté au sein d’une cité ; c’est le maintien des liens et de la solidarité au sein d’un village.
Notre majorité est attachée à ce million et demi d’associations, et nous sommes fiers de réaffirmer nos convictions en faveur de la jeunesse, fiers de soutenir, à la fois ces bénévoles du quotidien et, dans le même temps, la réussite du plus grand événement sportif planétaire.
Vous n’en serez pas surpris, c’est donc avec fierté que nous voterons les crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le budget du sport, derrière une augmentation en trompe-l’œil principalement allouée aux dépenses des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 – et d’ailleurs insuffisante pour cet objectif –, traduit une dégradation continue du sport français qui inquiète ses acteurs.
Restera-t-il un ministère des sports dans quelques années, notamment après 2024 ? C’est la première question qu’on est en droit de se poser, non seulement en raison de la nouvelle suppression de 42 postes en son sein, mais aussi du fait de la menace, qui persiste, d’un détachement des CTS vers les fédérations sportives, tout cela dans un contexte où l’Agence nationale du sport prend de plus en plus la place du ministère.
Les crédits de l’ANS atteignent 284 millions d’euros, alors que l’on estime les besoins à 350 ou 400 millions d’euros. Au moment où le sport français est l’objet d’une réorganisation totale, il s’agit d’un très mauvais signal envoyé aux acteurs concernés, notamment aux collectivités, dont les finances sont déjà exsangues et qui gèrent pourtant 86 % des infrastructures sportives de notre pays.
Tandis que nous faisons face à un vieillissement des équipements sportifs, 42 % d’entre eux ayant près de quarante ans, il est impensable que leur renouvellement repose intégralement sur nos collectivités. C’est pourtant bien ce à quoi les budgets successifs du sport risquent de conduire.
Au-delà de la question des infrastructures, le développement concret du sport français, celui de tous les jours, celui des territoires, tient à la bonne volonté des bénévoles, après que les emplois aidés ont été supprimés.
On a donc : d’un côté, un sport de masse à qui l’on demande de faire toujours plus avec moins ; de l’autre, un monde sportif professionnel, en tout cas dans certaines disciplines, où l’argent est bel et bien présent, et même de plus en plus abondant du fait des paris sportifs ou des retransmissions audiovisuelles.
La logique autant que la nécessaire solidarité nationale et le souci d’efficacité voudraient qu’une véritable péréquation ait lieu entre ces deux mondes pour faire en sorte que le premier continue de se développer et d’alimenter le second.
Or, après que le Gouvernement a fait revoter l’Assemblée nationale sur le déplafonnement des taxes, il ne nous est pas même possible ici, au Sénat, d’aborder le sujet pourtant central qu’est celui du financement du sport. Les bénévoles, les élus et les adhérents des clubs sportifs français devraient donc accepter que l’argent provenant du sport ne leur profite plus, ne serait-ce même qu’un peu, alors que ceux-ci voient les conditions dans lesquelles se développe la pratique du sport se dégrader.
Par ailleurs, mon groupe constate l’ambivalence de la décision qui conduira à la rémunération directe des CTS par le ministère des sports. Pour notre part, nous refusons que ce rassemblement administratif contribue à faciliter un futur détachement de ces agents. Nous avons déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises.
Si les perspectives que votre budget trace pour le sport français inquiètent, la situation de la vie associative n’a malheureusement pas grand-chose à lui envier.
Après la brutale suppression des emplois aidés, la politique fiscale injuste de votre gouvernement a enfoncé le clou : de la suppression de l’ISF à la hausse de la CSG, les dons des particuliers ont chuté drastiquement, d’au moins 20 % entre 2017 et 2018.
En parallèle, le désengagement public se poursuit avec une nouvelle baisse, et pas des moindres, des crédits affectés à cette ligne budgétaire. Tout cela dans un contexte où les associations sont davantage sollicitées par les citoyens ou les collectivités, bien souvent d’ailleurs, pour assumer les missions de service public que l’État abandonne.
À cet égard, la suppression de la réserve parlementaire, dont les crédits n’ont pas été intégralement transférés vers le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) conduit à une perte nette pour les associations, à hauteur de 27 millions d’euros.
En outre, on observe une très forte inégalité en ce qui concerne la répartition des fonds, et ce au détriment des territoires ruraux, qui n’ont certainement pas besoin de cette nouvelle forme de discrimination. En la matière, la transparence n’est pas de mise.
Concernant la jeunesse, le service civique concentre toujours la plus grande partie des crédits, sans que le dispositif puisse être réformé pour toucher véritablement son cœur de cible, que ne constituent pas les étudiants diplômés du supérieur à la recherche d’expériences à valoriser, ou pour qu’un véritable contrôle visant à débusquer le salariat déguisé soit mis en place.
Enfin, le service national universel est censé favoriser l’engagement de la jeunesse – cette mission est également assumée par les associations, pourtant malmenées aujourd’hui – et aurait vocation à renforcer la cohésion au sein d’une même génération, dans un contexte où les inégalités s’accroissent, notamment en raison des réformes successives de l’éducation nationale, comme celle du lycée ou de Parcoursup. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette question lors de nos débats, car il y a beaucoup à dire.
Sur ces trois thèmes centraux pour la cohésion nationale, vous comprendrez que notre groupe ne pourra que s’opposer à un budget insuffisant et incohérent ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. - M. Jean-Yves Roux applaudit également.)
M. Franck Menonville. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année encore, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » sont en hausse de manière significative par rapport à l’année précédente : +10,7 % en autorisations d’engagement et +11,6 % en crédits de paiement.
Si l’on est tenté de se réjouir pour ce parent pauvre du budget de l’État, le constat est néanmoins à nuancer, car, tout comme l’année passée, cette augmentation des crédits dédiés au sport s’explique par les besoins de financement liés aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
L’année 2020 verra d’ailleurs l’engagement des premières dépenses pour les infrastructures de cet événement sportif d’envergure, que nous attendons tous, et qui nous permettra de mettre en avant tant notre pays que notre culture du sport.
Mais, pour développer la culture et la pratique du sport sur tout le territoire, il est indispensable de maintenir des financements importants hors jeux Olympiques.
Or, depuis 2017, les crédits qui leur sont affectés diminuent : de plus de 10 % en trois ans. Si de nombreux sites seront construits et rénovés avec les meilleures technologies en vue des jeux Olympiques, avant de profiter aux utilisateurs, les compétitions se dérouleront majoritairement en Île-de-France. Les besoins en matière d’infrastructures sont certes évidents sur ce territoire, mais les autres régions ne doivent pas être oubliées.
Il faut rappeler que la pratique régulière du sport est primordiale en matière de santé et de bien-être. Elle l’est également en termes d’éducation : le sport est une formidable école de la vie. Il favorise et véhicule des valeurs essentielles dans notre République. Nous devons donc y allouer un budget adéquat pour une pratique du sport encouragée et facilitée à l’endroit de tous nos concitoyens et, surtout, sur tous les territoires. Je tiens d’ailleurs à souligner que beaucoup de grands champions ont commencé leur carrière dans de petits clubs.
Dans ce cadre, la vie associative est primordiale. Notre groupe Les Indépendants s’était déjà inquiété l’an dernier de la dotation très insuffisante du Fonds pour le développement de la vie associative. Quand on connaît l’importance du tissu associatif pour la cohésion de notre pays, on ne peut qu’en appeler à un budget plus ambitieux.
Je tiens à saluer la mise en œuvre cette année – enfin ! – du compte d’engagement citoyen, qui permettra de faire le pont nécessaire avec la formation professionnelle. Mais, encore une fois, nous devons être attentifs à son financement. Les 11,5 millions d’euros pour l’année prochaine pourraient ne pas être à la hauteur des engagements pris.
Ce budget prévoit le financement du service national universel, ce qui constitue une autre première. L’objectif de l’exécutif est de développer ce dispositif dans les années à venir pour toucher 400 000 jeunes en 2022. C’est louable. Cette première année sera un test intéressant, afin de calibrer les financements pour les années suivantes.
Je souhaite évoquer la création de l’Agence nationale du sport. Elle marque un tournant dans notre politique du sport, à la fois pour la pratique de haut niveau et pour celle, plus classique, qui touche chacun d’entre nous. Ces pratiques doivent être encouragées.
Concernant les moyens humains, l’inquiétude est toujours de mise à propos des conseillers techniques sportifs. Nous resterons attentifs à leur sort et à la pérennisation des postes.
Je terminerai en évoquant le soutien indispensable aux fédérations. Certains sports sont dans une situation confortable, car ils disposent d’une tribune médiatique et d’une manne financière leur permettant d’appréhender l’avenir. Il y a un réel besoin de financement pour d’autres disciplines moins connues, de sorte qu’elles puissent survivre dans nos territoires. Ils sont généralement mis sous les projecteurs lors de grandes épreuves, comme les jeux Olympiques ou encore les championnats du monde.
Le sport véhicule des valeurs essentielles pour notre République que sont l’engagement, le courage, la persévérance et la tolérance. Il favorise aussi le vivre-ensemble.
Dans sa majorité, le groupe Les Indépendants s’abstiendra sur les crédits de la mission. (Mme Frédérique Puissat et M. Michel Savin applaudissent.)