Sommaire
Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann
Secrétaires :
Mmes Agnès Canayer, Françoise Gatel.
2. Conventions internationales. – Adoption en procédure d’examen simplifié de trois projets de loi dans les textes de la commission
3. Services de paiement dans le marché intérieur. – Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances
M. André Gattolin, au nom de la commission des affaires européennes
Clôture de la discussion générale.
Articles 1er et 1er bis – Adoption.
Amendement n° 2 du Gouvernement. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles 1er ter et 2 – Adoption.
Amendement n° 1 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
compte rendu intégral
Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann
vice-présidente
Secrétaires :
Mme Agnès Canayer,
Mme Françoise Gatel.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Conventions internationales
Adoption en procédure d’examen simplifié de trois projets de loi dans les textes de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen de trois projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.
Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
projet de loi autorisant la ratification de l’accord instituant la fondation internationale ue-alc
Article unique
Est autorisée la ratification de l’accord instituant la Fondation internationale UE-ALC, signé à Saint-Domingue le 25 octobre 2016, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi autorisant la ratification de l’accord instituant la Fondation internationale UE-ALC (projet n° 249, texte de la commission n° 357, rapport n° 356).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
projet de loi autorisant la ratification du protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Article unique
Est autorisée la ratification du protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signé à Strasbourg le 2 octobre 2013, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (projet n° 304, texte de la commission n° 359, rapport n° 358).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille (stcw-f)
Article unique
Est autorisée la ratification de la convention internationale sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille (STCW-F) (ensemble une annexe), adoptée à Londres le 7 juillet 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale sur les normes de formation du personnel des navires de pêche, de délivrance des brevets et de veille (STCW-F) (projet n° 582 [2016–2017], texte de la commission n° 355, rapport n° 354).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
3
Services de paiement dans le marché intérieur
Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l’ordonnance n° 2017–1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur (projet n° 292, texte de la commission n° 349, rapport n° 348, rapport d’information n° 345).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi présenté permet la ratification de l’ordonnance 2017–1252 qui transposait la directive « DSP 2 » de 2015.
La directive européenne n° 2015/2366, dite « services de paiement 2 », met à jour et complète le dispositif européen d’encadrement des services de paiement, en vue d’encourager cette activité dans le marché intérieur de l’Union européenne.
Cette directive constitue ainsi une mise à jour de la directive du 13 novembre 2007 relative aux services de paiement, dite « DSP 1 », qui avait introduit un premier cadre d’activité en complétant la typologie des acteurs bancaires. Cette directive a notamment créé le statut d’établissements de paiement, complété en 2009 par le statut d’établissements de monnaie électronique. La reconnaissance d’un statut spécifique a permis le développement de ces services très usuels aujourd’hui grâce aux paiements en ligne. Ces acteurs bénéficient notamment d’un régime simplifié par rapport aux établissements de crédit.
Quelles ont été les avancées permises par la directive DSP 2, dont nous achevons la ratification par ce projet de loi de ratification présenté aujourd’hui devant vous ?
Premièrement, la directive complète le cadre juridique applicable aux prestataires de services de paiement : supervision des prestataires de services de paiement, droits et obligations des parties à un service de paiement.
Deuxièmement, elle élève les standards de sécurité des transactions, en particulier en généralisant le principe d’une authentification forte pour les transactions en ligne.
Troisièmement, elle apporte une reconnaissance juridique à deux nouvelles catégories d’acteurs : les agrégateurs de comptes, qui offrent un accès pédagogique à l’information financière individuelle tant pour les entreprises que pour les particuliers ; les initiateurs de paiement, dont l’activité d’intermédiaire doit permettre de fluidifier la réalisation des virements.
La traduction dans notre droit de cette directive constitue une opportunité pour la place financière française et s’inscrit pleinement dans les objectifs poursuivis par le Gouvernement : favoriser l’innovation, renforcer la concurrence pour dynamiser la croissance, et améliorer les services rendus aux consommateurs et aux entreprises, tout en assurant un niveau de sécurité maximal des paiements.
La France a toujours été à la pointe de l’innovation en matière de paiements – nous avons ainsi été pionniers dans le paiement par carte à puce. Elle doit le demeurer, et continuer de l’afficher. C’est l’ambition que nous nous sommes donnée au travers de cette transposition.
Aussi le Gouvernement a-t-il souhaité transposer avec plusieurs mois d’avance cette directive, afin de permettre à l’ensemble des acteurs de la place de s’approprier ces nouvelles dispositions, d’asseoir la confiance du marché et d’attirer les innovateurs.
L’ordonnance portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur a ainsi été adoptée le 9 août 2017, avec près de six mois d’avance par rapport à sa date d’entrée en vigueur, faisant de la France l’un des premiers pays à transposer la directive, et le premier à avoir officiellement agréé un agrégateur de compte et initiateur de paiement.
Cette ordonnance a été prise sur le fondement de l’habilitation donnée au Gouvernement par la loi n° 2016–1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
Le projet de loi qui vous est soumis vise à procéder à la ratification de cette ordonnance par le Parlement.
Le Gouvernement souhaite au travers de ce texte compléter le dispositif défini dans l’ordonnance sur deux principaux points : l’accompagnement du nouveau service de remise d’espèces lors du passage en caisse, dit « cashback », et l’accélération de la sécurisation du dispositif issu de la directive.
En premier lieu, l’article 2 du projet de loi qui vous est présenté vise à accompagner le développement de la pratique du rendu d’espèces complémentaires à la demande du client lors d’un achat, plus connu sous l’appellation « cashback ».
Ce service existe chez la plupart de nos voisins, par exemple en Allemagne, en Espagne, en Belgique et au Royaume-Uni. La directive « services de paiement 2 » indique que ce service peut, en théorie, être fourni sans être soumis aux règles prévalant pour les services de paiement. Elle laisse de fait très largement aux États le soin d’en définir les modalités pratiques d’exercice.
Ce service présente de nombreux avantages sur lesquels je souhaite attirer votre attention.
C’est un net progrès pour favoriser l’accès aux services financiers de base pour tous les Français, qui permettra de répondre à l’isolement des territoires les plus reculés, dont les relais d’accès aux espèces sont souvent trop limités ou éloignés. C’est un sujet sur lequel, je le sais, les élus locaux sont très mobilisés.
C’est une opportunité de services nouveaux pour les consommateurs et pour les commerçants : ce service permettra d’attirer davantage de clientèle, par l’ouverture d’un service additionnel. Il offrira un moyen de gérer plus efficacement les encours en caisse pour les commerçants. Les associations de commerçants écoutées sur ce sujet ont souligné leur intérêt pour l’apparition d’un tel service.
Le dispositif que nous proposons dans ce projet de loi permettra ainsi d’offrir un cadre lisible et stable pour les commerçants, afin d’encourager cette pratique, mais également d’assurer la qualité de la circulation de la monnaie fiduciaire sur l’ensemble du territoire et de prévenir les risques de blanchiment en précisant ses modalités, par la fixation de seuils de retrait par voie réglementaire.
En deuxième lieu, le Gouvernement propose de mettre en œuvre sans attendre le dispositif de sécurisation des conditions d’exercice des initiateurs de paiement et agrégateurs de compte.
La directive DSP 2 prévoit que l’essentiel de ses dispositions entre en vigueur au 13 janvier 2018. La directive renvoie toutefois à une norme technique réglementaire, ou NTR, de l’Autorité bancaire européenne, l’ABE, un pan essentiel du dispositif, relatif aux modalités informatiques d’accès aux comptes de paiement par les nouveaux acteurs.
Concrètement, cette norme technique détaille le fonctionnement des interfaces de communication sécurisées, appelées « API », par lesquelles ces acteurs pourront accéder, en pleine sécurité, aux données individuelles de comptes bancaires. Mais cette norme, qui a été publiée tout récemment, n’entrera en vigueur que 18 mois plus tard, soit en septembre 2019.
Il nous semble que cette période transitoire peut engendrer des risques en termes de cybersécurité pour l’ensemble des acteurs, car elle conduit à pérenniser pendant cette durée la pratique actuelle dite du « web scraping », qui consiste, en récupérant les identifiants et mots de passe de l’usager, à accéder pour lui à son compte bancaire en ligne.
Le gouverneur de la Banque de France et le directeur général de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, nous ont alertés sur les risques, lesquels seront maîtrisés une fois les API disponibles et applicables, en vertu de cette norme technique.
Il est donc proposé d’anticiper son entrée en vigueur, afin que, pour les banques prêtes en avance, l’API puisse être testée et rendue obligatoire, et ce dès la fin de 2018, si elle satisfait aux exigences de performance et de qualité définies par la norme technique et qu’elles assurent que les nouveaux acteurs tiers pourront continuer d’exercer leur activité. Cette disposition a pour objectif de garantir la protection des utilisateurs de ce type de service.
Enfin, et pour conclure, nous savons que la transposition de cette directive a suscité des questions sur les modalités d’exercice des nouveaux acteurs tiers, notamment lorsque ceux-ci accèdent aux données de comptes d’épargne.
La directive DSP 2 se limite à encadrer l’accès, par les agrégateurs de comptes et initiateurs de paiement, aux comptes de paiement et ne traite pas de l’accès aux autres comptes – épargne, crédit, ou autres. Les négociateurs européens s’en sont tenus au champ qui avait été identifié par la directive, ce que l’on peut comprendre. Mais l’accès aux données sensibles des comptes tels que les comptes d’épargne ou les comptes titres mérite un cadre aussi sécurisé que celui qui est prévu pour l’accès aux données de comptes de paiement. Le nouvel article 1er ter introduit par le rapporteur et adopté par la commission des finances met le doigt sur cette difficulté.
Le Gouvernement partage la volonté de soutenir les acteurs innovants tout en maîtrisant les risques attachés à leur activité pour ce qui dépasse le champ de la directive DSP 2.
Toutefois, il nous semble que la réponse à cette question passe en premier lieu par une modification des textes européens. Le Gouvernement s’est engagé à lutter contre toutes les surtranspositions du droit européen à l’échelle nationale, notamment pour ce qui concerne le droit financier.
La raison en est simple : alors que nous faisons des efforts importants pour renforcer l’attractivité de notre place financière en vue d’attirer davantage d’acteurs et d’institutions en France, notamment dans le secteur porteur des paiements, il serait peu compréhensible que nous imposions aux acteurs qui se développent chez nous des règles supplémentaires qui n’existent pas ailleurs. Or l’obligation de disposer d’une assurance de responsabilité civile professionnelle ou d’une assurance comparable associée à une obligation d’enregistrement engendre des formalités dont l’impact doit être soigneusement évalué, dans un contexte très concurrentiel au niveau européen.
Ainsi, tout en rejoignant la préoccupation du rapporteur, il nous semble qu’un travail complémentaire est indispensable pour calibrer au mieux les modalités d’encadrement de l’accès aux comptes d’épargne, et sur cette base, pour engager dans les meilleurs délais une modification du droit européen.
Nous devrons en effet réfléchir à une intervention au niveau national, sur la base d’une étude d’impact plus documentée que celle dont nous disposons aujourd’hui. À cet effet, nous engagerons une mission de réflexion pour formuler des propositions adéquates à porter auprès de nos partenaires européens et de la Commission européenne. Cette réflexion pourra, le cas échant, conduire à formuler toute mesure transitoire pertinente à adopter au niveau national. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Sénat est amené à examiner le présent projet de loi qui, transmis par l’Assemblée nationale et faisant l’objet de la procédure accélérée – une procédure qui tend à devenir la procédure normale –, vise à ratifier l’ordonnance du 9 août 2017, laquelle porte elle-même transposition de la directive du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, communément appelée « DSP 2 ».
En effet, cette directive fait suite à une première initiative européenne qui, avec la directive « DSP 1 » du 13 novembre 2007, avait mis fin au « monopole » des banques sur la fourniture de services de paiement.
Cette première directive a ainsi permis, en ouvrant ces marchés à la concurrence, de favoriser l’émergence de nouveaux acteurs ainsi que l’innovation, comme en témoigne l’essor du porte-monnaie électronique Moneo ou encore le Compte-Nickel, qui permettent d’offrir de nouveaux services à des populations qui étaient parfois éloignées des services bancaires traditionnels.
Cette seconde directive, « DSP 2 », vise à prendre en compte les nombreuses évolutions survenues depuis 2007. Pour ne donner qu’un chiffre, 40 % des 1 400 fintech interviennent dans le secteur des moyens de paiement.
Au sein de cette catégorie, de nouveaux acteurs permettent, en particulier, aux clients des banques d’accéder de façon consolidée aux données de l’ensemble de leurs comptes et produits d’épargne, ou encore d’initier des ordres de paiement et – pourquoi pas ? – des placements.
Ces activités d’agrégateurs de comptes et d’initiateurs de paiement se sont développées hors de tout cadre réglementaire, tout en connaissant une croissance très rapide. Nous le disions hier en commission, la pratique en la matière va beaucoup plus vite que le droit : 4 millions de consommateurs ont ainsi déjà eu recours à un agrégateur en France, et 2,5 millions, à un initiateur de paiement.
Dans ce contexte, la directive de 2015 encadre l’activité de ces nouveaux acteurs et améliore le fonctionnement du marché intérieur des paiements. À cet effet, elle poursuit quatre objectifs principaux : reconnaître ces nouveaux acteurs et réglementer leurs relations avec les gestionnaires de compte et les utilisateurs ; renforcer les exigences de sécurité pour l’ensemble des paiements électroniques ; lutter contre le risque d’arbitrage réglementaire ; garantir un meilleur niveau de protection aux consommateurs dans leurs relations avec les prestataires de services de paiement.
L’ordonnance prévoit une transposition globalement fidèle de la directive et fait bon usage des marges de manœuvre laissées aux États membres. Sa ratification ne pose donc pas de difficulté. Les corrections, coordinations et améliorations techniques figurant dans le présent projet de loi étaient nécessaires. La commission des finances les a, je crois, utilement complétées à l’occasion de l’établissement du texte qui vous est proposé aujourd’hui. Ainsi, dix amendements ont été adoptés en commission pour améliorer la cohérence de l’ordonnance avec la directive et procéder à des coordinations ou à des corrections d’erreurs matérielles. Cela ne pose de difficulté ni à la commission ni, je pense, au Gouvernement.
La commission des finances est également favorable aux deux dispositions introduites par l’Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement.
Il est en effet utile que le pouvoir réglementaire puisse fixer les modalités transitoires de communication sécurisée applicables en France jusqu’à l’entrée en vigueur des exigences de sécurités établies au niveau européen, afin d’accélérer la sécurisation des connexions entre prestataires et gestionnaires de comptes. La commission des finances a toutefois précisé que les mesures réglementaires devraient respecter les normes techniques déjà prévues par l’acte délégué de la Commission européenne.
Le projet de loi tel qu’issu de l’Assemblée nationale prévoit, par ailleurs, de permettre le développement en France de la pratique dite du « cashback » – on pourrait traduire ce mot par « possibilité de retrait sur place » –, qui correspond à la possibilité offerte aux commerçants qui le désirent de fournir des espèces au consommateur à l’occasion d’une opération de paiement pour l’achat de biens ou de services.
Largement développée dans d’autres pays européens et permise par la directive, cette pratique peut, à la fois, être une alternative notamment dans des territoires marqués par la réduction du nombre de distributeurs automatiques, je pense à des zones rurales, et permettre aux commerçants d’accroître la fréquentation de leur magasin et d’optimiser la gestion de leurs fonds de caisse.
Le dispositif proposé nous est apparu suffisamment équilibré pour pouvoir être adopté en l’état, notamment en excluant les opérations professionnelles et en prévoyant la fixation d’un plancher appliqué à l’opération d’achat ainsi qu’un plafond maximal pour la fourniture d’espèces, afin de limiter les risques de blanchiment et de mise en circulation de faux billets. Il s’agit de limites raisonnables, fixées par voie réglementaire. Le dispositif nous paraît donc acceptable.
J’utiliserai enfin le temps qu’il me reste dans le cadre de cette discussion générale pour aborder le dispositif que la commission des finances a décidé, à l’unanimité, d’introduire dans le projet de loi à l’article 1er ter A.
En effet, la directive « DSP 2 » fixe des règles strictes pour les agrégateurs de comptes et les initiateurs de paiement, en leur imposant à la fois l’obtention d’un agrément ou de s’enregistrer auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, et de communiquer avec le gestionnaire de compte par le biais d’un canal de communication sécurisé et standardisé. Par ailleurs, en cas de fraude, l’utilisateur peut être indemnisé immédiatement par sa banque, le prestataire tiers devant, à ce titre, souscrire une assurance afin de pouvoir rembourser la banque si sa responsabilité est engagée.
Toutefois, la directive, et donc l’ordonnance qui la transpose en droit français, ne concerne que les comptes de paiement, c’est-à-dire les comptes courants. Il s’agit d’une limite majeure, dans la mesure où les services actuellement offerts aux utilisateurs portent sur l’ensemble des comptes et produits d’épargne, qu’il s’agisse d’un livret A, d’un contrat d’assurance, d’un compte titres ou plan d’épargne en actions, un PEA. Ainsi, 80 % des comptes agrégés ne seraient pas des comptes de paiement.
Il existe donc un vide juridique particulièrement dommageable pour les utilisateurs qui supportent en pratique, souvent sans le savoir, tous les risques en cas de fraude ou de piratage de leurs comptes. Or ces hypothèses sont loin d’être improbables, si l’on en juge par les exemples récents de piratage et de fraude constatés sur des sites internet reconnus et pour lesquels d’importants systèmes de sécurité informatique sont pourtant mis en place. L’actualité immédiate – je pense aux affaires impliquant Facebook et Uber – fourmille de cas d’utilisation non consentie de données personnelles. Malgré les moyens considérables, des milliards de dollars, consacrés à la sécurité informatique par les GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon -, il n’y a pas de pare-feu imparable et le risque juridique est important.
Pour les comptes non couverts par la directive, la banque – il faut que les consommateurs en soient avertis – ne serait pas contrainte d’indemniser l’utilisateur en cas de fraude, dans la mesure où ce dernier a révélé ses identifiants à un tiers. Autrement dit, la responsabilité de la banque ne peut être engagée, puisque ce n’est pas elle qui a transmis ces codes.
La possibilité d’engager la responsabilité du prestataire tiers, qui est dans certains cas exclue par des clauses contractuelles, serait en tout état de cause dépourvue de toute portée pratique, puisqu’il n’existe pas d’obligation d’assurance et qu’une fintech serait probablement incapable de rembourser ses clients avec une exigence de fonds propres de seulement 50 000 euros ! En cas de fraude massive, si les comptes d’épargne étaient siphonnés, une telle société pourrait se retrouver rapidement en cessation de paiement et le consommateur final perdrait l’intégralité de son épargne.
Cette problématique désormais identifiée, notamment par des associations de consommateurs, il nous est apparu comme indispensable de proposer une mesure permettant de protéger ces utilisateurs, qui ignorent les risques qu’ils prennent en recourant à ces services et qui, surtout, ne font pas la différence – il est vrai qu’elle est assez subtile – entre les comptes de paiement et les autres.
Dès lors, trois possibilités s’offraient à nous : interdire l’agrégation des comptes et l’initiation de paiement pour les comptes et produits autres que les comptes de paiement ; étendre les dispositions de la directive à tous les comptes et produits d’épargne ; proposer une mesure de portée plus réduite mais permettant a minima de protéger le consommateur en cas de fraude.
Les deux premières solutions ont été exclues. L’interdiction aurait porté un coup fatal à ces nouveaux services.
Aussi, dans l’attente d’une solution européenne – j’ai échangé avec le cabinet –, la commission des finances du Sénat a adopté un dispositif permettant de garantir a minima la possibilité pour l’utilisateur d’obtenir un remboursement auprès du prestataire tiers en cas de fraude. La responsabilité des prestataires pourrait être engagée, ces derniers devant dès lors souscrire une assurance complémentaire pour les comptes non couverts par la directive. Nous ne faisons pas de la surtransposition : nous sommes « à côté » de la directive.
Cette mesure nous paraît raisonnable, de bon sens. Les fintech concernées ont, elles-mêmes, bien compris l’importance cruciale de préserver la confiance de leurs utilisateurs. Comment pourrait-on comprendre que le législateur décide de ne pas combler ce « vide juridique » et de renoncer ainsi à la protection du consommateur ? On nous reprochera, en cas de survenue d’un problème majeur – et cela arrivera ! –, de ne pas avoir prévu de dispositif assurantiel.
C’est pourtant ce que semble décidé à faire, de façon très étonnante, le Gouvernement, qui présente un amendement de suppression du dispositif introduit par la commission des finances. La commission ne comprend pas cette position : le Gouvernement propose-t-il ainsi d’attendre une éventuelle nouvelle directive, dont la négociation n’a même pas commencé ?
Mme la présidente. Il faut conclure !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, je vous invite, mes chers collègues, à adopter le présent projet de loi tel qu’issu des travaux de la commission des finances, et à rejeter l’amendement présenté par le Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, au nom de la commission des affaires européennes.
M. André Gattolin, au nom de la commission des affaires européennes. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, le 21 février dernier la conférence des présidents a demandé à la commission des affaires européennes d’exercer, à titre expérimental, une veille sur l’intégration des normes européennes en droit interne afin, notamment, d’informer le Sénat sur d’éventuelles surtranspositions.
C’est donc avec cette préoccupation que la commission a examiné, sur le rapport de notre collègue Jean-François Rapin, qui est malheureusement retenu dans son département, le projet de loi ratifiant l’ordonnance de transposition de la directive sur les services de paiement.
La deuxième directive sur les services de paiement, on le sait, entend favoriser l’innovation, la concurrence, l’efficience et la sécurité des services de paiement fournis au sein de l’Union européenne, afin d’élargir et d’améliorer les choix des consommateurs. Elle révise à cet effet les conditions d’agrément et d’exercice de ces services. Elle renforce les exigences de sécurité et de protection des données en imposant des normes techniques rigoureuses, comme l’« authentification forte » des clients, à compter de septembre 2019. Elle améliore les droits des utilisateurs de ces services.
La commission des affaires européennes a formulé dans son rapport plusieurs observations sur la transposition à laquelle a procédé l’ordonnance.
Tout d’abord, elle a constaté que, de manière générale, cette transposition était rigoureuse.
Ensuite, elle a relevé que l’ordonnance avait retenu quelques-unes des facultés ouvertes aux États membres, par exemple l’allégement des conditions d’agrément et des exigences prudentielles auxquelles sont soumis les petits établissements de paiement, dont la moyenne mensuelle de la valeur totale des opérations de paiement est inférieure à 3 millions d’euros.
Elle a également constaté que l’ordonnance faisait usage de la faculté ouverte par la directive d’imposer la désignation d’un point de contact central à tous les établissements de paiement agréés dans un autre État membre qui ont recours en France à des agents en libre établissement ou à des succursales.
Ces points de contact faciliteront ainsi la supervision des activités transfrontalières.
La directive encadre deux services de paiement connexes dits « tiers » : le service d’initiation de paiement et le service d’information sur les comptes, qui fournit au client une vue agrégée d’ensemble sur ses comptes de paiement et soldes disponibles.
Elle soumet ces services à des conditions allégées d’enregistrement et de radiation et leur fait obligation de souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle ou une garantie comparable.
Enfin, elle prévoit de leur ouvrir un accès sécurisé aux données utiles.
Concernant l’agrégation des comptes, la commission des affaires européennes a observé que la directive ne couvre pas l’information sur des comptes autres que les comptes de paiement, en particulier les comptes d’épargne. Cela s’explique par le fait qu’elle ne concerne que le marché intérieur des paiements et les services de paiement.
Or les comptes d’épargne constituent la part la plus importante – à hauteur de 80 %, comme l’a rappelé le rapporteur général – de la situation financière des personnes physiques.
Dès lors, afin de pouvoir également agréger les soldes de ces comptes, les fintech qui dispensent ce service utilisent les données de connexion que leur transmettent les titulaires pour collecter les données par voie de scraping, c’est-à-dire de capture d’écran.
Les risques associés à une telle pratique et l’absence de responsabilité des agrégateurs de ces comptes ont conduit la commission des affaires européennes et la commission des finances à s’interroger sur l’opportunité d’un encadrement de cette activité, et donc d’une extension de certaines dispositions de la directive à l’agrégation des comptes d’épargne.
La commission des finances propose de procéder immédiatement à un encadrement minimal.
Au-delà, la commission des affaires européennes estime que la France devrait porter sans tarder cette question au niveau européen, en concertation avec les teneurs de ces comptes, en particulier pour déterminer les exigences de sécurité et répartir la charge du financement de l’interfaçage.
Cet exemple montre, si besoin est, que toute surtransposition n’est pas condamnable, mais doit être dûment justifiée.
Il y va de la compétitivité de nos acteurs économiques, et la commission des affaires européennes entend être vigilante sur ce point. (M. Roger Karoutchi applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre débat de ce jour est certes nécessaire, même s’il semble bien éloigné des préoccupations du jour, eu égard à la réalité d’un mouvement social multiforme mettant de plus en plus en question la logique gouvernementale à l’œuvre depuis dix mois.
Il s’agit d’assurer la transposition, dans le droit national, de directives européennes relatives aux services de paiement.
Reconnaissons d’emblée à la commission des finances, à ses administrateurs et au rapport finalement produit, d’avoir créé de bonnes conditions de cette transposition, illustrées par les amendements déposés sur le texte transmis par l’Assemblée nationale. Ces amendements s’avèrent, au-delà des dispositifs techniques nécessaires, utiles et n’appellent donc pas d’observations.
Le sujet qui nous intéresse appelle tout de même quelques remarques, car nous sommes dans un univers bien précis : celui des secteurs financiers et de la banque en particulier.
La directive pourrait en effet être limitée, dans la pratique, à une forme de facilitation du commerce en ligne, qui prévoit évidemment des formes de paiement dites « sécurisées » de plus en plus performantes, ou à la possibilité, en même temps qu’un plein d’essence, de pouvoir remplir son porte-monnaie de quelques espèces supplémentaires…
Je dois avouer que, sachant qu’il existe des logiciels de caisse quelque peu incertains, cette possibilité de retrait d’argent liquide en dehors des guichets bancaires et des distributeurs automatiques en fonctionnement laisse quand même certaines questions de sécurité en suspens.
Revenons maintenant à l’essentiel, à savoir que le secteur bancaire a fait l’objet, dans la dernière période, de pressions fortes et que les évolutions s’y annoncent fondamentales.
Prenons les données du problème.
La Société générale a annoncé pour 2017 un bénéfice en baisse, mais s’établissant tout de même à 2,81 milliards d’euros.
Le Crédit agricole, pour 2017, présente un bénéfice en légère hausse de 3,65 milliards d’euros, ce qui montre que la médiocrité du revenu moyen agricole ne semble pas perdue pour tout le monde…
Le groupe Banque nationale de Paris-Paribas, pour sa part, présente un résultat de 7,8 milliards d’euros, en progression d’environ 6,7 % par rapport à 2016.
Le premier groupe bancaire de notre pays, considéré comme hautement systémique, présentait – il faut le dire – un résultat net bancaire de 43,4 milliards d’euros pour l’exercice 2016, somme qui semble prouver que la dette publique n’est pas perdue pour tout le monde…
Pour faire bonne mesure, la banque va distribuer un peu plus de 3,6 milliards d’euros en dividende à ses actionnaires.
Dans le même temps, comme dirait l’autre, au-delà de ces situations financières qui montrent la bonne santé générale du secteur bancaire français, l’ensemble des réseaux est engagé dans un processus de réduction des implantations et des effectifs employés.
Ainsi, la Société générale entend réduire de 300 le nombre de ses agences sur le territoire, la réduction des implantations allant de pair avec celle des emplois correspondants.
De même, le développement de la banque en ligne, évidemment moins mobilisateur de moyens, est privilégié, d’autant que l’opérateur historique des télécommunications s’est lancé dans l’aventure à son tour.
Comme d’habitude, les banques en ligne ne sont jamais très éloignées des têtes de groupe bancaire, puisque B for bank n’est qu’un élément du groupe Crédit agricole, Hello bank, du groupe BNP-Paribas, que Boursorama est rattaché à la Société générale.
Tout se passe donc comme si le produit net bancaire trouvait désormais son origine dans la dématérialisation des opérations, la réduction des réseaux « en dur » et des effectifs allant de pair avec ces réseaux.
Ajoutons-y la facturation sans doute excessive de nombre de frais bancaires, ne serait-ce que ceux qui sont liés à la mise à disposition d’une carte de paiement sécurisée, et une intense campagne permanente en tant que « groupe de pression » pour dégager les marges de manœuvre indispensables à la poursuite de la rentabilité.
Nous en avons d’ailleurs eu l’illustration récente puisque, après plusieurs années de travail sur l’assurance emprunteur pour mettre un terme aux ventes liées de contrats de prêts et de contrats d’assurance, nous avons vu réapparaître dans le texte sur la « société de confiance » la problématique du taux effectif global et celle du taux annuel effectif global.
Sans doute un pur hasard, puisque, dans certains cas bien connus, la déchéance des intérêts a été acquise par des emprunteurs confrontés à l’absence d’indication de ces taux…
Je dois dire que le fait que les préoccupations bancaires aient ému le Gouvernement nous a quelque peu interpellés, surtout dans un texte destiné à rendre plus franches et plus loyales les relations entre administration et administrés.
Je ne peux cependant terminer cette intervention sans revenir sur ce qui constitue, selon nous, la question principale de l’avenir de notre secteur bancaire et financier, en tout cas du point de vue du public.
Que les banques soient amenées à jouer un autre rôle dans l’économie en finançant davantage qu’elles ne le font aujourd’hui les entreprises qui entreprennent, et pas uniquement celles qui montent de coûteux raids de prise de contrôle sur la concurrence, est bien entendu au cœur du débat. Mais il reste et demeure un sujet clef : celui de l’accessibilité bancaire.
Il est grand temps, mes chers collègues, que cette question trouve une solution plus honorable que l’actuelle législation, qui ne règle qu’une partie des questions.
Le code monétaire et financier a sans doute besoin d’une évolution pour rendre effectif le droit au compte qui est, tout de même, essentiel pour éviter des signes d’exclusion sociale. Je pense même qu’il faudrait que la commission des finances se penche quelque peu sur la question. C’est en tout cas l’intention de mon groupe.
Pour le reste, nous n’avons pas d’opposition quelconque à l’adoption de ce projet de loi, somme toute assez technique.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les jours se suivent et ne se ressemblent pas puisque, hier, nous avons passé une grande partie de la journée à débattre des moyens de protéger nos données personnelles alors qu’aujourd’hui nous les ouvrons à grands bras pour ce qui concerne les services financiers. (Mme la présidente sourit.)
Le texte que nous examinons ce matin est technique – cela a été dit et M. le rapporteur nous l’a expliqué. Je ne sais pas si c’est parce que je suis arrivée récemment à la commission des finances ou parce que je suis simplement un citoyen moyen, mais je vous présenterai une intervention qui pourrait s’intituler « La directive marché intérieur pour les nuls ». (Sourires.)
Je vais vous expliquer comment tout cela fonctionne, car le vocabulaire est assez technique et la pratique l’est tout autant. Finalement, si c’est assez simple, quand on y regarde de plus près, ça ne l’est pas tant que cela…
Le mot « fintech » – je ne ferai pas d’interrogation ! – est une contraction des mots « finance » et « technologie ». Seulement 4 % des Français interrogés sont capables de vous dire ce que c’est…
Les services d’agrégation d’information, les AIS ou Account Information Services – c’est encore assez simple –, permettent aux consommateurs disposant de plusieurs comptes bancaires de bénéficier d’une vision consolidée. Nous avons tous cela sur nos portables : si une personne possède trois comptes, au lieu d’avoir trois applications, elle peut n’en avoir qu’une. Ce système est plus simple et permet de n’avoir qu’un seul code, au lieu de trois. Nous avons aujourd’hui tellement de codes à retenir qu’il faudra bientôt se les faire tatouer ! (Sourires.)
J’en viens au prestataire de services de paiement, ou PSP : cela paraît simple, mais c’est celui qui permet à des tiers – marchands, ONG – d’accepter les paiements en ligne, en général par carte bancaire. Le PSP s’appuie sur des banques acquéreurs qui garantissent l’accès au réseau de paiement. D’après le code monétaire et financier, un prestataire de services de paiement est un établissement de crédit ou un établissement spécialisé dans les paiements, ce qui est une bonne chose, car à ce statut sont attachées des garanties et une sécurité.
Les prestataires de services de paiement assurent le transfert des fonds, ce qui est extrêmement important. Ils opèrent essentiellement sur le marché des achats en ligne, qui connaissent – on le sait – une croissance exponentielle. Ils ont profité de l’essor du cross-canal – ce n’est pas la journée de la francophonie, mais ça y ressemble ! –, qui permet à une entreprise d’écouler sa production à travers différents canaux de distribution, comme des magasins physiques ou des sites web.
Les services d’initiation de paiement permettent au consommateur de demander à un intermédiaire de présenter et d’exécuter des opérations de paiements en leur nom auprès de leur banque. Voilà encore un intervenant supplémentaire !
Avec tous ces intervenants, il est nécessaire de prévoir – c’est heureux ! – une double authentification, qui consiste en une double vérification de l’identité du client, lors de chaque achat.
J’aimerais maintenant vous dresser un récapitulatif des obligations de ces intervenants ou intermédiaires en ce qui concerne la conservation des données. Cela n’a l’air de rien, mais lorsque vous donnerez vos identifiants et autoriserez ces entreprises intermédiaires à utiliser vos comptes bancaires, il faut tout de même savoir combien de temps elles pourront conserver les données.
Nous avons évoqué précédemment la fraude et un certain nombre d’autres questions, et il est tout à fait heureux que la commission des finances ait adopté un amendement de protection et d’assurance. Mais, en réalité, avec un paiement unique, la durée de conservation des données court jusqu’à la réception du bien ou l’exécution de la prestation de service, augmentée du délai de rétractation prévu pour les ventes de biens ou de fourniture de prestations de services à distance.
En ce qui concerne les abonnements avec tacite reconduction, la conservation des données peut durer un certain temps. Si l’abonnement ne prévoit pas de tacite reconduction, elle court jusqu’à la dernière échéance de paiement.
Pour les services en ligne soumis à une tacite reconduction, vos données peuvent rester enregistrées ad vitam æternam, ce qui pose un évident problème de sécurité. En effet, on le sait bien, les entreprises subissent des prises de participation, sont vendues, revendues et cédées. Pendant ce temps, l’ensemble de vos données – il ne s’agit pas seulement de données personnelles, mais aussi de données bancaires – est aussi transféré.
En ce qui concerne la gestion des réclamations, la durée de conservation des données est de 13 mois suivant la date du débit ou de 15 mois en cas de carte de paiement à débit différé. Les données ainsi conservées à des fins de preuve peuvent être conservées en archive intermédiaire et n’être utilisées qu’en cas de contestation. Comment vérifier que nos données personnelles sont bien effacées de tous ces registres ? Comment allons-nous faire ? C’est tout de même problématique.
Les intermédiaires que j’ai cités conservent vos données de paiement pour faciliter des achats extérieurs et ultérieurs. Vous pouvez laisser vos données, par exemple, sur Amazon ou sur iTunes. (Brouhaha.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir écouter Mme Goulet, d’autant que son intervention, très pédagogique, permet de décoder des éléments qui intéressent un certain nombre de nos concitoyens, voire un certain nombre d’entre nous…
Mme Nathalie Goulet. Je vous remercie, madame la présidente.
Nous avons tous autorisé, notamment pour des achats ultérieurs, un certain nombre de sites à garder nos données personnelles. Je pense à Amazon, à YouTube, à iTunes et à de nombreux sites, sur lesquels on vous demande d’accepter que vos données personnelles soient conservées. En l’espèce, ils ne pourront les conserver que jusqu’au retrait du consentement ou à l’expiration de la validité des données de la carte bancaire.
Si j’ai un conseil à vous donner, mes chers collègues, lorsque vous achetez en autorisant la conservation des données, vous avez intérêt à donner une carte dont la date de fin de validité est assez proche. Si vous donnez une carte qui est valide jusqu’en 2025, ce site conservera vos données jusqu’à la date d’expiration de cette carte. Cela signifie que nous avons ouvert de façon complètement déraisonnable nos données personnelles.
Le problème qui va se poser est celui du contrôle a posteriori. Comment faire pour garantir la protection des données sur les comptes bancaires ? Tous les intermédiaires, les uns après les autres, doivent respecter un certain nombre d’éléments de sécurité – je pense à l’Autorité des marchés financiers, au fait qu’ils sont liés aux banques, etc. Le contrôle prudentiel est assez sérieux, mais on peut tout de même se poser la question.
Cela dit, nous allons évidemment ratifier la directive dans la version, comme je l’ai déjà indiqué, de la commission des finances, modifiée par l’amendement relatif à l’assurance, dont l’ensemble de mes propos montraient à quel point elle est justifiée.
Je terminerai en évoquant le cashback. Il est tout de même absolument formidable qu’on développe en France cette pratique, alors que nombre de nos voisins européens essaient, quant à eux, de limiter la circulation de cash. C’est peut-être une facilité pour la vie courante – je n’en disconviens pas –, mais cela peut en même temps présenter des inconvénients que l’on ne mesure pas. Là aussi, il faudra voir la pratique qui en sera faite, car il n’est pas du tout évident que le cashback soit très utilisé, même si la loi l’autorise.
Au bénéfice de ces observations, le groupe Union Centriste votera le texte dans sa version de la commission des finances. (Mme Éliane Assassi ainsi que MM. Fabien Gay et François Patriat applaudissent.)
M. Michel Canevet. Quel talent ! Bravo, madame Goulet !
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Claude Raynal. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi dont nous avons à connaître aujourd’hui, qui ratifie l’ordonnance du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux services de paiement dans le marché intérieur, est une étape importante de la construction d’un marché intérieur plus efficace et plus en phase avec la réalité et les perspectives de ce secteur d’activité.
Car si le marché intérieur est une réalité depuis vingt-cinq ans, sans régulation des nouveaux acteurs et des nouvelles pratiques, son existence ne serait qu’illusoire. Cette directive, et a fortiori le projet de loi qui en assure la transposition, cherche à concilier deux impératifs : un niveau de sécurisation des données et des transactions conformes au plus haut standard, et l’ouverture de ce marché aux opérateurs de fintech et à des modes de paiement alternatif.
Applicable au 13 janvier 2018 pour une partie de ses dispositions et en août 2019 en ce qui concerne les dispositions techniques qui seront prises par décret, cette directive prévoit un certain nombre de modifications du droit qu’il est possible de synthétiser ainsi.
Tout d’abord, l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur des paiements modifie la relation classique qu’entretenait la banque avec ses clients. Aujourd’hui, le développement des agrégateurs d’informations ou des initiateurs de paiement a conduit l’Europe à créer un encadrement distinct de celui qui est applicable aux banques. Ces initiateurs de paiement qui servent d’interface entre le client et l’entreprise en supprimant les moyens de paiement classiques que constituent la carte de paiement et le chéquier sont déjà très présents outre-Rhin.
Quant aux agrégateurs d’information, à l’heure du big data, ils synthétisent l’ensemble des informations bancaires sur une interface indépendante des interfaces proposées par les banques.
Le régime juridique de ces deux nouveaux types d’opérateurs se singularise par deux aspects : un régime d’enregistrement simplifié et une absence de contraintes en matière de capital minimal, cette dernière règle s’expliquant au regard de l’absence de détention de capitaux appartenant aux clients par ces organismes.
Par ailleurs, face aux flux transfrontaliers de données bancaires, il est apparu important de renforcer la sécurité des données des consommateurs. En effet, cette directive cherche à limiter les risques d’asymétrie réglementaire, en empêchant du dumping technologique qui favoriserait les entreprises domiciliées dans des États moins-disants en termes de sécurité. Ainsi, elle rend obligatoire l’authentification réputée forte, c’est-à-dire l’authentification à deux facteurs, ou avec un mot de passe à usage unique. De plus, elle permet le développement de la technologie dite « API », qui permettra de davantage sécuriser les échanges d’informations entre les clients des banques et les nouveaux acteurs.
De plus, cette directive prévoit le développement du cashback, comme cela a déjà été excellemment rappelé il y a quelques instants. Très prisée dans les pays anglo-saxons ainsi qu’en Allemagne, cette pratique consiste en la remise d’espèces dans le cadre d’une opération de paiement. Il s’agit alors de « rendre la monnaie » lors d’un paiement par carte bancaire, les chèques étant exclus de cette procédure. Si ce type de pratique peut sembler étrange en France, pays qui a inventé la carte bancaire, elle constitue un mode alternatif de récupération de monnaie pour le consommateur sans passer par un distributeur. Là encore, un décret précisera ce dispositif et fixera un montant minimal de paiement ainsi qu’un montant maximal d’espèces pouvant être récupérées. Ce montant maximal ne peut être, dans notre esprit, qu’extrêmement limité.
La transposition de l’ensemble de ces éléments est prévue par voie réglementaire et une double question reste ouverte en termes tant de rapidité d’accès que de responsabilité.
Concernant la rapidité d’accès, si les entreprises de la fintech souhaitent – on les comprend – la garantie d’un accès rapide aux données des clients, les banques, elles, dépositaires des fonds des clients, souhaitent d’abord renforcer la sécurité, peut-être parfois au détriment de la rapidité d’accès. La position des banques s’explique puisque, en dernière analyse, il leur appartiendra de rembourser leurs clients, à charge pour elles de se retourner ensuite vers l’opérateur fautif.
Enfin, la question du champ d’application de cette directive, aujourd’hui limitée aux comptes courants et dont la surtransposition pourrait amener à l’élargir aux comptes d’épargne et de crédit, est posée par les opérateurs de la fintech qui souhaitent cet élargissement, alors que les banques sont partisanes du statu quo. Ainsi, la transposition de la directive dont il est question aujourd’hui, si elle est nécessaire, ne sera en tout état de cause pas suffisante pour encadrer l’évolution vertigineuse des nouvelles technologies appliquées à la finance.
Pour autant, s’agissant de la transposition de la directive, le groupe socialiste approuve la démarche à la fois rapide et prudente, avec, à ce stade, la seule prise en compte des comptes courants. Avant d’aller plus loin, trouvons d’abord les bons outils, notamment en termes d’information des consommateurs, sur laquelle il me semble qu’il y a encore de nombreux problèmes. Chacun doit comprendre si la fintech à laquelle il s’adresse est agréée ou non, si elle suit les réglementations qui lui sont applicables… Sur ces points, il existera toujours des difficultés ; en tout cas, il va falloir travailler sur cette question de l’information des consommateurs, notamment pour qu’ils sachent quelles sont les fintech agréées par l’ACPR. C’est une bonne chose qu’un tel agrément existe, mais encore faut-il qu’il soit rendu clairement public et qu’il soit visible de tous.
Si nous sommes donc d’accord sur ce point, nous ne comprenons pas pour autant, nous non plus, que les agrégateurs de comptes, dont nombre d’entre eux proposent déjà aux consommateurs des offres de gestion de leur épargne ou de crédit, ne soient pas tenus de contracter une assurance de nature à rassurer le consommateur.
Dans ce domaine, s’en remettre à une future directive européenne nous paraît en tout état de cause – cela a été dit par notre rapporteur général – extrêmement risqué. Si le Gouvernement considère, et on peut parfaitement l’admettre, que l’amendement voté à l’unanimité par la commission doit juridiquement être réécrit ou retravaillé, alors, nous le lui disons tout simplement, qu’il le fasse ! Pour vous y encourager, madame la secrétaire d’État, notre groupe socialiste et républicain votera – nous le regrettons – contre votre amendement de suppression et approuvera le texte tel que modifié par notre commission. (MM. Thierry Carcenac et Jean-Claude Requier, ainsi que Mme Nathalie Goulet applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, le présent projet de loi a pour objet de ratifier l’ordonnance portant transposition de la directive européenne concernant les services de paiement dans le marché intérieur.
En ratifiant cette ordonnance, nous ferons œuvre de modernisation de notre code monétaire et financier pour l’adapter aux évolutions de l’industrie financière et, surtout, à la numérisation de l’économie.
Cette modification de notre droit est nécessaire à la fois pour l’activité des entreprises, mais également dans un souci de protection des consommateurs, de sécurité et de responsabilisation des acteurs financiers.
Cette directive comporte trois dispositions essentielles, qui ont été rappelées.
D’abord, elle pose les bases d’un droit d’accès aux comptes de paiement, en consacrant de nouveaux acteurs dans cette activité.
Ensuite, elle renforce les normes de sécurité des données en rendant obligatoire l’authentification forte et en précisant les modes d’accès du client à son compte de paiement en ligne.
Enfin, elle consolide les droits des utilisateurs de services de paiement et améliore la supervision transfrontalière des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique.
J’ajouterai que cette directive vise également à développer en France une pratique répandue en Europe, celle du cashback, c’est-à-dire la possibilité de retirer des espèces chez un commerçant au moment d’un paiement. Ce service était théoriquement applicable en France mais, à défaut de cadre juridique prévoyant ses modalités d’application, il ne pouvait être mis en œuvre.
Le présent projet de loi, dans sa version issue de l’Assemblée nationale, prévoit ainsi d’autoriser mais aussi d’encadrer cette pratique du cashback, notamment en fixant un montant maximal.
C’est une bonne mesure, mais nous espérons que ce montant sera suffisamment élevé pour préserver l’intérêt du service pour le client, tout en permettant la prévention des risques.
Tous ces éléments techniques sont importants. Ils permettent d’avancer vers un système financier européen et français plus performant et plus sûr. Je voudrais néanmoins évoquer à présent l’enjeu politique de ce texte et, en creux, ce qu’il révèle de la construction européenne.
Nous avançons à grands pas vers l’Union des capitaux. La libre circulation des capitaux et des services financiers est une réalité, perfectible certes, mais c’est une réalité ! Sous la double influence des traités et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, toute mesure nationale dissuadant les mouvements de capitaux entre les États membres est désormais interdite.
Mais qu’en est-il des citoyens européens ? L’Union des travailleurs, l’Union des étudiants, l’Union des artistes, l’Union des chercheurs sont-elles aussi complètes que l’Union des capitaux ?
Les combats menés par la France et par une député européenne française courageuse, Élisabeth Morin-Chartier, sur la question des travailleurs détachés illustre la peine que nous avons à bâtir l’Europe sociale, c’est-à-dire, mes chers collègues, l’Europe des êtres humains.
Je salue ainsi l’accord qui a été trouvé cette semaine sur la directive « travailleurs détachés » au Parlement européen. Nous nous rapprochons du principe élémentaire de justice « à travail égal, salaire égal, sur un même lieu de travail ».
Je salue aussi la proposition de la Commission européenne de créer une « Agence européenne du travail » chargée de mieux contrôler la circulation des travailleurs, pour éviter le dumping social entre les États.
Je salue enfin de manière générale, et mon groupe Les Indépendants avec moi, les mesures qui équilibrent l’intégration économique par une intégration sociale et culturelle. L’une ne va pas sans les autres, sous peine d’alimenter les accusations d’Europe à deux vitesses, Europe pour les élites, Europe pour les marchands.
Je me permets cette digression – je m’en excuse, monsieur le rapporteur, mes chers collègues – sur ce projet de loi éminemment technique, afin de rappeler que, derrière la technique, il y a toujours de la politique, et que la politique consiste à faire des choix.
Notre groupe Les Indépendants choisit un système financier plus sûr et plus moderne : nous voterons donc bien entendu en faveur de ce projet de loi. Mais nous choisissons également une construction européenne plus soucieuse de citoyens que de consommateurs, et moins soucieuse de circulation de capitaux que de progrès social et humain.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, monsieur le vice-président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, après le projet de loi relatif à la protection des données personnelles, dont nous avons débattu hier, nous examinons aujourd’hui un autre texte d’adaptation de notre droit aux évolutions technologiques liées au numérique, en l’occurrence dans le domaine financier.
Notre Haute Assemblée est de plus en plus amenée à légiférer sur ces sujets. Le groupe du RDSE s’y intéresse et il est fier d’apporter, comme dans les autres domaines, sa pierre à l’édifice.
Je me souviens ainsi des riches débats que nous avons eus en 2016, lors de l’examen de la loi pour une République numérique, sur les sujets de l’ouverture de l’accès aux données publiques, de la portabilité des données des consommateurs, de la définition du coffre-fort numérique, que nous mettons désormais en pratique, mes chers collègues, avec l’application JULIA, de la déclaration des revenus des utilisateurs de plateformes, de la réglementation des jeux en ligne… ou encore du passionnant débat d’octobre dernier sur l’intelligence artificielle.
Après les excellentes interventions de mes collègues, que dire de plus, dans le temps imparti, sur la transposition de cette directive dite « DSP 2 », dont le niveau de technicité nous oblige, peut-être plus encore que d’habitude, à nous en remettre à l’expertise des rapporteurs ?
Je m’intéresserai, dans un premier temps, à la procédure de transposition en tant que telle, puis, dans un second temps, au contenu de l’ordonnance et du projet de loi.
L’ordonnance du 9 août 2017, prise sur le fondement de la loi Sapin II de 2016, apporte diverses modifications au code monétaire et financier. Comme l’a indiqué dans son rapport d’information la commission des affaires européennes, la précédente directive, dite « DSP 1 », avait déjà été complètement transposée, si bien que le travail de transposition était cette fois-ci plus limité. De fait, l’ordonnance ne comporte « que » 35 articles, alors que la directive dite « DSP 2 » en compte 117.
Cette ordonnance est entrée en vigueur le 13 janvier dernier, c’est-à-dire la veille de l’expiration du délai fixé. Ce caractère tardif de la transposition est peut-être dû au calendrier électoral particulièrement chargé de l’année dernière. Quoi qu’il en soit, on constate que la moitié environ des États membres, et non des moindres, n’ont pas encore pris de mesure de transposition.
J’en viens maintenant au contenu du projet de loi.
L’article 1er prévoit la ratification de l’ordonnance en tant que telle. Les articles 2 à 6 portent des rectifications, essentiellement techniques, à l’ordonnance.
On ne peut que souscrire, dans les grandes lignes, aux mesures proposées : renouvellement du cadre juridique afin de préciser les conditions d’exercice des services de paiement – les désormais fameux « PSIP », prestataires de services d’initiation de paiement ; et « PSIC », prestataires de services d’information sur les comptes –, renforcement de la sécurité des clients avec « l’authentification forte », pour n’en citer que quelques-unes.
Je salue tout particulièrement l’abaissement de 150 à 50 euros de la franchise payée par l’utilisateur en cas de paiement non autorisé à la suite du vol, de la perte ou du détournement d’un instrument de paiement. Il s’agit d’une mesure de bon sens en faveur de la protection des consommateurs.
L’article 1er bis, ajouté à l’Assemblée nationale, encadre le cashback, dont, je l’avoue, j’ai découvert l’existence et, surtout, l’évolution. Cette pratique, encore peu répandue en France il est vrai, pourrait se révéler utile, à condition d’être correctement encadrée, pour éviter les abus, dans les zones rurales, où les distributeurs automatiques d’espèces sont plus rares et plus éloignés et où l’on aime encore payer en liquide – en « images », comme diraient certains. Je suivrai avec intérêt la publication du décret fixant notamment le montant maximal de retrait.
L’article 1er ter, également issu de l’Assemblée nationale, mais plus technique, concerne les mesures transitoires de communication entre prestataires de services de paiement et gestionnaires de compte.
Enfin, l’article 1er ter A, introduit au sein de notre commission des finances, prévoit l’engagement de la responsabilité des prestataires et établissements initiateurs d’ordres de paiement ainsi que des agrégateurs de données de comptes de placement en cas d’opération non autorisée, d’accès non autorisé ou frauduleux à ces données ou d’utilisation non autorisée ou frauduleuse de ces données. Bien qu’elle sorte du champ de la directive, cette mesure vise également à protéger les consommateurs face à des technologies qui se développent très rapidement. Elle nous paraît tout à fait judicieuse et pertinente.
Après ces quelques considérations, et compte tenu des brefs délais impartis pour l’examen de ces dispositions, particulièrement techniques, les membres du groupe du RDSE voteront en faveur du présent projet de loi de ratification.
M. André Gattolin, vice-président de la commission des affaires européennes. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jérôme Bascher. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, monsieur le vice-président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, ce projet de loi vise à ratifier l’ordonnance adoptée le 9 août 2017 pour transposer en droit français la directive du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite « DSP 2 », en urgence – deux ans et demi montrent une urgence tout à fait relative.
Les directives DSP 1 et DSP 2 visent à supprimer le monopole bancaire dans les services de paiement, la seconde tenant compte des évolutions technologiques intervenues depuis 2007.
Permettez-moi une première remarque : pour que tous profitent du progrès technologique, encore faut-il être parfaitement connecté en 4G ou en 5G et en très haut débit.
Or, comme l’a fait remarquer mardi dernier, lors des questions d’actualité au Gouvernement, notre collègue le président Patrick Chaize, sur ce point, le Gouvernement semble avoir beaucoup reculé, notamment pour les populations les plus isolées. Je ne parle pas pour mon département, qui sera le premier fibré d’Europe à la fin de l’année 2019 – Édouard Courtial et moi-même avons travaillé en ce sens.
Ma seconde remarque porte sur le temps qu’il faut pour légiférer sur les sujets technologiques.
On voit bien que la loi issue des directives européennes, depuis la négociation de celles-ci jusqu’à l’examen parlementaire des textes de transposition – pensez au temps que nous avons passé, mes chers collègues, à transposer, jusqu’à très tard, hier soir, la directive européenne relative à la protection des données personnelles –, est beaucoup trop lente par rapport aux évolutions technologiques. Il est donc important de trouver des moyens rapides de légiférer sur de tels sujets, quitte à passer, parfois, par la voie réglementaire, qui, je le dis clairement, peut paraître plus adaptée.
J’en reviens au texte, qui doit faire avancer nos fintech et protéger nos banques, mais avant tout nos concitoyens. À ce sujet, permettez-moi de dire que, si c’est bien de penser aux fintech, qui incarnent l’avenir, la nouvelle économie du nouveau monde, je crois aussi, pour ce qui me concerne, aux banques, aux concitoyens et aux consommateurs de l’ancien monde. Et je rappelle que, dans la querelle des anciens et des modernes, ce sont les anciens qui, in fine, ont gagné… (Sourires.)
L’essor des nouvelles technologies a favorisé l’émergence de nouveaux acteurs, tant pour l’initiation de paiement que pour l’information sur les comptes. Ces nouveaux acteurs permettent aux utilisateurs d’accéder aux données de l’ensemble de leurs comptes et produits bancaires et, surtout, d’initier des ordres de paiement, y compris sur les moyens d’épargne. Cela permet aussi aux fintech, comme l’ont dit très bien précédemment un certain nombre de mes collègues, d’avoir accès à nos données. L’évolution leur est donc également favorable.
L’Union européenne a encadré ces nouvelles pratiques dès 2007, en permettant aux nouveaux acteurs de trouver leur place aux côtés des acteurs bancaires traditionnels, en particulier en allégeant les contraintes qui pèsent sur eux, les nouveaux services n’impliquant pas de détenir de fonds. Cependant, comme il s’agit d’argent, il faut bien qu’il y ait, à un moment, un tiers de confiance.
La directive « DSP 2 » actualise aussi la directive dite « monnaie électronique » de 2009, qui répondait à la même logique.
Toutefois, s’il faut stimuler la concurrence, je rappelle qu’il faut protéger le consommateur, notamment des risques d’escroquerie. La commission des finances a elle aussi insisté sur ce point. Le nombre d’utilisateurs de ces nouveaux services a connu une croissance rapide, voire exponentielle – c’est la norme en matière de nouvelles technologies ! Comme l’a rappelé notre rapporteur, 4 millions de consommateurs ont déjà eu recours à un agrégateur de comptes et 2,5 millions ont déjà fait appel à un initiateur de paiement. Ce n’est pas rien ! Ce n’est plus un sujet médiocre aujourd’hui. C’est de nos fintech, de notre système bancaire, mais avant tout de l’argent des Français qu’il s’agit.
Ainsi, la directive permet de mettre en place des mesures de proportionnalité pour les acteurs réalisant de petits volumes de transaction et, en ce sens, de diminuer, de 150 à 50 euros, les seuils de franchise qui s’appliquent aux consommateurs subissant un préjudice.
Concernant la protection des consommateurs, elle offre la possibilité de mettre en œuvre un certain nombre de mesures de sauvegarde, que nous voulons renforcer.
Je pense évidemment à la possibilité, pour les autorités de supervision, de faire appel à une autre autorité de supervision de l’Union européenne, mais aussi de suspendre l’agrément de fintech qui, dans un autre pays, agiraient dans des conditions peu conformes à l’intérêt des consommateurs. C’est le minimum !
La directive que nous transposons élève, en outre, les standards de sécurité pour les transactions.
Une obligation d’authentification forte pour les paiements en ligne est ainsi prévue, par exemple en étendant la demande d’indication d’un code reçu par SMS pour valider un paiement en ligne. Cependant, il ne faut pas se mentir : cette solution est un minimum, qui ne répond pas aux risques d’escroquerie, de vol de téléphone portable, voire d’enlèvement. Ceux qui lisent la presse internationale auront en effet appris qu’aujourd’hui, en Ukraine notamment, des rançons ont été exigées en bitcoins à partir du téléphone des personnes enlevées par des procédés extrêmement violents.
Les agrégateurs de comptes et initiateurs de paiement ont l’obligation de communiquer avec le gestionnaire de compte par le biais d’un canal de communication sécurisé et standardisé, afin de préserver la confidentialité des données bancaires et d’obtenir un agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR.
Afin de faire face à d’éventuelles fraudes, une assurance doit être également souscrite par le prestataire, permettant de rembourser la banque si la responsabilité du prestataire est engagée.
Un article a été introduit par nos collègues de l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, afin de permettre et d’encadrer les opérations de « cashback » – pour ma part, j’appelle cela « retrait d’argent liquide », mais peut-être dois-je progresser dans ma maîtrise de la langue française… Il s’agit de la possibilité pour un consommateur venant acheter un bien d’obtenir des espèces au moment où il fait son achat, par exemple dans un tabac ou une station-service.
Cette possibilité vise notamment à pallier la disparition des agences bancaires et des distributeurs dans les zones rurales. De fait, madame la secrétaire d’État, l’éloignement permanent, les fermetures de postes ou de services de l’État dans le monde rural l’y rendent très utile !
En revanche, je m’inquiète de la possibilité d’ouvrir cette possibilité en ville. On ne voit pas l’intérêt du cashback à Paris, Marseille ou Lyon, pour citer les grandes métropoles dont vous êtes friands, où l’on trouve des distributeurs à tous les coins de rue ! Je crains surtout que cela ne donne lieu à du blanchiment d’argent ou à la circulation de fausse monnaie. Je le dis très clairement.
Se pose aussi, de manière importante, la question de la sécurité des commerçants qui vont proposer le cashback. Madame la secrétaire d’État, vous le savez bien : aujourd’hui, en France, on ne braque plus les banques, qui ne détiennent plus d’argent liquide. On braque les stations-service ou les bars-tabac ! Telle est la réalité. Il ne faudrait pas inciter au développement de la délinquance ni la faire arriver dans la ruralité, qui n’a pas besoin de cela.
Certes, vous allez, par voie réglementaire, limiter le montant maximal pouvant être distribué. C’est souhaitable. Ce service reposera, en outre, sur la base du volontariat et ne pourra évidemment pas être imposé à un commerçant.
Enfin, l’Assemblée nationale a adopté, toujours sur proposition du Gouvernement – je tiens à le souligner –, un amendement tendant à ce qu’un décret définisse des modalités transitoires de communication entre les prestataires de services de paiement et les gestionnaires de compte, dans l’attente de l’entrée en vigueur, en septembre 2019, des normes techniques de réglementation définissant les modalités de communication standardisée au niveau européen. On voit donc que le Gouvernement incite parfois les assemblées à prendre des mesures transitoires, lorsque l’Union européenne les a oubliées. Tel était le sens de l’amendement de M. le rapporteur, adopté à l’unanimité des membres de la commission des finances : protéger le consommateur, dans l’attente d’une décision de l’Union européenne.
Vous le voyez, madame la secrétaire d’État, sur ce point, la logique du Sénat ne diffère pas de celle de l’Assemblée nationale ni même de celle du Gouvernement. Je ne comprends donc pas votre revirement sur l’amendement de M. le rapporteur.
Enfin, pour sécuriser la relation entre le consommateur, la banque et le tiers agrégateur, la directive prévoit une authentification obligatoire de l’agrégateur ou de l’initiateur de paiement.
Elle prévoit également que l’accès au compte de paiement devra se faire à travers une interface plus sécurisée que l’interface client, à savoir le recours à la technologie dite « de l’API », ou « interface de programmation applicative », pour être parfaitement technique. Cela dit, comme l’a rappelé mon collègue il y a quelques instants, la loi, c’est de la technique, mais aussi de la politique…
La Commission européenne a pris beaucoup de retard dans l’élaboration de la norme technique réglementaire devant préciser le fonctionnement de ces API. La directive prévoit une entrée en vigueur de ces dernières à l’été 2019 seulement.
C’est la raison pour laquelle l’Assemblée nationale a souhaité que les dispositifs relatifs à la sécurité entrent en vigueur le plus tôt possible, afin de sécuriser ces données. D’ailleurs, tel est exactement le sens de l’amendement de M. le rapporteur général.
Dans l’attente d’une solution européenne, la commission des finances a souhaité garantir la possibilité, pour l’utilisateur, d’obtenir un remboursement auprès du prestataire tiers en cas de fraude, via la mise en place d’une obligation d’assurance complémentaire pour les comptes non couverts par la directive.
La directive ne concerne, en effet, que les comptes de paiement. Or les nouveaux acteurs reconnus par la directive permettent aujourd’hui aux utilisateurs de passer des ordres et d’agréger les données concernant l’ensemble de leurs comptes et produits d’épargne. Les sommes en jeu sont considérables, car les personnes qui possèdent plusieurs comptes en banque ont généralement aussi un peu, voire beaucoup d’épargne. Cela ne concernera pas les personnes modestes, qui ont déjà de grandes difficultés à ouvrir un compte en banque. Lorsqu’il y a beaucoup d’argent, il est nécessaire d’être prudent. Il serait dommage que le progrès mène à la ruine.
Dans ce contexte, pour la commission, s’il n’apparaît pas souhaitable d’étendre les dispositions de la directive à l’ensemble des comptes et produits d’épargne, ce chantier devant être mené au niveau européen, la question de la responsabilité en cas de fraude ne peut être laissée longtemps sans réponse.
Notre groupe soutient cette initiative de M. le rapporteur général et de la commission des finances, qui a préparé cette transposition avec beaucoup de sérieux, en écoutant toutes les parties, madame la secrétaire d’État, et pas seulement celles que l’on veut bien entendre. Je tiens à le souligner, en tant que sénateur récemment élu.
Pour le reste, le texte ne pose pas de difficultés.
Le groupe Les Républicains votera ce projet de loi de ratification, tel qu’il a été modifié par notre commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Jean-Pierre Decool applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour le groupe La République En Marche.
M. François Patriat. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, monsieur le vice-président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, je reviendrai sur l’ensemble des arguments que j’ai entendus ce matin, mais je tiens à dire dès à présent que, pour notre part, nous soutenons, bien entendu, ce texte.
Nous examinons aujourd’hui le projet de loi de ratification d’une ordonnance d’apparence technique, laquelle transpose la directive dite « DSP 2 », relative aux services de paiement dans le marché intérieur.
Ce texte est nécessaire, en premier lieu, parce qu’il régule une activité encore mal encadrée et qui correspond à une demande sociale.
Le premier apport de la directive est, en effet, de reconnaître de nouveaux acteurs qui interviennent entre les banques et leurs clients, qui rendent de nouveaux services et qui facilitent les paiements. Il s’agit des agrégateurs de comptes, utiles pour les particuliers que nous sommes comme pour les entreprises, auxquels ils offrent un accès pédagogique à leurs informations financières. Le client de ces services a ainsi une vision consolidée de ses comptes sur une seule interface.
Il s’agit aussi des initiateurs de paiement, dont l’activité d’intermédiaire doit permettre de fluidifier la réalisation des virements. Ce service est très développé en Allemagne, où le paiement en ligne par carte est moins naturel.
En reconnaissant ces activités, madame la secrétaire d’État, la directive renforce les garanties pour les usagers : elle impose une couverture par une assurance de responsabilité civile professionnelle, mais elle durcit aussi les conditions d’agrément et de supervision des établissements de paiement. Les pouvoirs des superviseurs, comme l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, en France, sont élargis.
La directive renforce également la supervision transfrontalière des établissements de paiement : elle prévoit un mécanisme d’échange d’informations entre les autorités de supervision et accroît les échanges dans le cadre de la surveillance des établissements de paiement. Elle permet ainsi de lutter contre le risque de forum shopping.
Enfin, elle élève les standards de sécurité pour les transactions, notamment en généralisant l’authentification forte, système qui combine plusieurs facteurs d’authentification, pour les transactions en ligne.
Au total, la directive accompagne une évolution sociale et technologique, réglemente un secteur qui se développe et harmonise la réglementation.
Nous pouvons nous enorgueillir que la France fasse le choix d’une transposition rapide pour se positionner en leader sur le marché des agrégateurs.
Au reste, cette transposition rapide se fait sans surtransposition, comme l’ont noté tant la commission des affaires européennes que la commission des finances.
Dans une économie de services où l’activité est facilement délocalisable, l’amendement de la commission des finances sur l’utilisation fraudeuse des données non couvertes par la directive montre le besoin d’une couverture uniforme par des règles européennes.
Je salue la disposition, ajoutée dans le projet de loi par un amendement du Gouvernement adopté par l’Assemblée nationale, qui prévoit l’accompagnement du cashback.
Ce service, qui existe, par exemple, au Canada, en Allemagne ou au Royaume-Uni, permet aux commerçants de rendre du liquide aux clients qui ont payé par carte.
Pour les commerçants, le cashback présente un double avantage : c’est un nouveau service à offrir, ainsi qu’un moyen de gérer plus efficacement leurs encours en caisse. C’est aussi un avantage pour les consommateurs, notamment pour accéder aux espèces dans les lieux trop éloignés des guichets. On sait que le mouvement de suppression des guichets physiques par les banques dans nos territoires est réel !
Certains évoqueront la transposition d’un texte « technique ». À la vérité, il s’agit de ceux qui accusent toujours l’Europe d’être une structure bureaucratique sans âme pour mieux la décrédibiliser… Ils auraient dit la même chose de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, en 1951, alors qu’il s’agissait des conditions de la paix en Europe, une question rien de moins que politique.
Mme Éliane Assassi. Comparaison n’est pas raison !
M. François Patriat. Mon avis est que cette directive est politique.
Elle est politique, parce qu’elle complète l’édifice qu’est le marché intérieur.
Elle est politique, parce qu’elle donne des garanties aux citoyens européens.
Elle est politique, parce qu’elle harmonise des réglementations dans un secteur en plein essor.
Soyons réalistes : beaucoup des critiques adressées à l’Union européenne, sur la concurrence fiscale par exemple, viennent d’un manque d’harmonisation des réglementations au niveau européen qui est le fait non de l’Union européenne en tant qu’entité abstraite, mais des États membres. La taxation des GAFA en est un exemple concret. À cet égard, l’initiative prise par M. le ministre Bruno Le Maire est particulièrement importante.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes parfois un peu seuls dans cette assemblée, même si, aujourd’hui, nous le serons un peu moins. Quoi qu’il en soit, nous sommes fiers d’appartenir à un mouvement politique qui n’accuse pas l’Europe de tous les maux et qui demande plus d’Europe.
Nous soutiendrons le Gouvernement sur ce texte. (Applaudissements au banc des commissions.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du parlement européen et du conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur
Article 1er
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur est ratifiée.
Mme la présidente. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.
Article 1er bis
(Non modifié)
Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code monétaire et financier est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Fourniture d’espèces dans le cadre d’une opération de paiement
« Art. L. 112-14. – I. – Les commerçants mentionnés à l’article L. 121-1 du code de commerce peuvent fournir des espèces à l’utilisateur de services de paiement dans le cadre d’une opération de paiement pour l’achat de biens ou de services.
« II. – Ce service ne peut être fourni qu’à la demande de l’utilisateur de services de paiement agissant à des fins non professionnelles formulée juste avant l’exécution d’une opération de paiement pour l’achat de biens ou de services et dans des conditions conformes à l’article L. 112-1 du code de la consommation.
« Les paiements par chèque ou réalisés par le biais de titres-papiers, d’instruments spéciaux de paiement au sens de l’article L. 521-3-2 du présent code ou de titres spéciaux de paiement dématérialisés au sens de l’article L. 525-4 ne peuvent donner lieu à fourniture d’espèces.
« III. – Afin d’assurer la qualité de la circulation fiduciaire et de limiter les risques de blanchiment et de financement du terrorisme, un décret précise les modalités de fourniture du service mentionné au I. Il détermine :
« 1° Le montant minimal de l’opération de paiement d’achat de biens ou de services dans le cadre de laquelle des espèces sont fournies ;
« 2° Le montant maximal en numéraire pouvant être décaissé dans ce cadre.
« IV. – La Banque de France peut, en cas de menace pour la qualité de la circulation fiduciaire ou d’événement exceptionnel ayant pour conséquence d’entraver de manière significative l’approvisionnement de billets en euros, et après avoir informé le ministre chargé de l’économie, autoriser temporairement un plafond supérieur ou inférieur à celui mentionné au 2° du III et ajuster la liste des instruments de paiement figurant au second alinéa du II. Le ministre chargé de l’économie peut à tout moment mettre fin à ce régime temporaire. » – (Adopté.)
Article 1er ter A (nouveau)
Après l’article L. 522-7-1 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 522-7-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 522-7-2. – I. – Nonobstant toute clause contraire, les prestataires de services de paiement qui fournissent le service mentionné au 7° ou au 8° du II de l’article L. 314-1 et qui, à la demande de l’utilisateur, initient un ordre ou lui permettent d’accéder aux données concernant ses comptes sur livret, ses comptes à terme, ses comptes-titres, ses comptes sur lesquels sont inscrits des titres, avoirs ou dépôts au titre des produits d’épargne mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre II, ses crédits mentionnés au titre Ier du livre III du code de la consommation ou ses bons, contrats de capitalisation ou placements de même nature souscrits auprès d’entreprises d’assurance peuvent voir leur responsabilité engagée à l’égard de l’utilisateur en cas d’opération non autorisée, d’accès non autorisé ou frauduleux à ces données ou d’utilisation non autorisée ou frauduleuse de ces données qui leur est imputable.
« II. – Les établissements de paiement, les établissements de monnaie électronique et les prestataires de services d’information sur les comptes mentionnés au I doivent disposer d’une assurance de responsabilité civile professionnelle ou d’une autre garantie comparable les couvrant contre l’engagement de leur responsabilité et être en mesure de justifier à tout moment de leur situation au regard de cette obligation.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de cette obligation, les critères permettant de déterminer le montant minimal de l’assurance de responsabilité civile professionnelle ainsi que les délais dans lesquels l’indemnisation doit intervenir.
« III. – Les prestataires et établissements mentionnés au II doivent être immatriculés sur un registre unique, qui est librement accessible au public et tenu par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’immatriculation sur ce registre et détermine les modalités de la tenue de ce dernier ainsi que les informations qui doivent être rendues publiques. »
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Le Gouvernement a déposé un amendement de suppression de cet article 1er ter A que la commission des finances a adopté à l’unanimité, comme cela a été rappelé au cours de la discussion générale.
Ce nouvel article introduit une obligation d’assurance pour les initiateurs de paiement et les agrégateurs agissant sur les comptes autres que de paiement et donc non couverts par la DSP 2.
Cet amendement vise à protéger le consommateur. Nous rejoignons bien évidemment la préoccupation de la commission des finances, tout en partageant le souhait de soutenir le développement des fintech.
Le dépôt de cet amendement de suppression reflète la perplexité et les nombreuses questions qu’a soulevées l’examen de cette proposition de nouvel article.
Nous n’avons pas eu le temps d’évaluer l’impact de cette disposition assez innovante, voire très innovante, car elle impose une obligation d’assurance sur un service non réglementé. Il s’agit d’un dispositif encore inédit, à notre connaissance.
Surtout, le caractère imparfait de la protection proposée nous a gênés : certains agrégateurs ne seraient pas couverts, en particulier ceux qui décideraient de ne pas accéder aux comptes de paiement et donc de ne pas demander d’agrément. Ils pourraient alors proposer une agrégation sur tous les autres comptes, sans obligation d’assurance.
De même, les acteurs qui choisiraient de se faire agréer dans un autre État membre que la France sur les comptes de paiement pourraient, assez paradoxalement, nous semble-t-il, agréger des comptes d’épargne en France sans obligation d’assurance.
Techniquement, la sécurisation des comptes de paiement est moindre que dans la solution retenue par le Gouvernement de recourir à la protection forte d’une API.
Tous ces éléments nous ont rendus perplexes. Nous reconnaissons la complexité du sujet et nous n’avons pu, en quelques jours, trouver de solution.
Par ailleurs, et comme certains d’entre vous l’ont souligné, le Gouvernement est réticent à tout élément de surtransposition qui créerait un décalage avec nos partenaires européens. Or il s’agit bien ici d’une surtransposition.
La proposition du Gouvernement vise simplement à accélérer la mise en place des API, normes définies techniquement dans un cadre européen. À l’inverse, la solution technique retenue par votre commission des finances n’a pas été coordonnée au niveau européen.
Nous souhaitons engager une mission de réflexion permettant d’associer les acteurs de façon très précise et technique afin de formuler des propositions à porter auprès de la Commission européenne. Cette mission pourra, le cas échéant, recommander toute mesure transitoire pertinente à adopter au niveau national.
J’insiste sur la complexité du sujet, sur la nécessité d’analyser les impacts industriels que pourraient engendrer l’intervention de ces nouveaux acteurs et le développement de nouveaux modèles économiques dans les segments de l’épargne et sur le fait que cet effort de sécurisation va au-delà du secteur bancaire – les compagnies d’assurance et les gestionnaires d’actifs sont également susceptibles d’être concernés par un dispositif de sécurisation plus large que celui des seuls comptes de paiement.
Il importe donc de mener une mission à la fois technique et industrielle précise.
Cela étant, j’entends les arguments qui viennent d’être présentés. Encore une fois, je souhaitais faire part de la perplexité et des interrogations que ce nouvel article a suscitées.
Je comprends que vous considériez que le temps de la négociation européenne n’est pas compatible avec celui, plus rapide, de l’avancée des usages qu’offre la technologie.
À défaut de partager votre enthousiasme pour la solution technique suggérée, je rejoins votre souci de sécurisation des consommateurs. Aussi, à ce stade de la procédure parlementaire, le Gouvernement retire son amendement de suppression.
M. Jérôme Bascher. Très bien !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je remercie Mme la secrétaire d’État d’avoir retiré son amendement. Je partage quasiment tout ce qui vient d’être dit. Encore une fois, la solution proposée est perfectible.
D’après les informations dont nous disposons, la commission mixte paritaire ne devrait se tenir qu’en juin, ce qui nous laisse le temps de travailler à l’amélioration du dispositif que nous avons d’ores et déjà analysé et qui, selon nous, fonctionne.
Les acteurs français ne seront pas les seuls concernés, madame la secrétaire d’État. Une disposition d’ordre public peut s’appliquer à tous les prestataires qui interviennent en France. Nous nous en sommes assurés auprès de la Commission.
L’obligation d’assurance peut s’appliquer y compris à des activités non réglementées. Le code des assurances prévoit que même pour les véhicules volés il y a une obligation d’assurance, donc même pour des activités illégales. En l’occurrence, il ne s’agit pas d’une activité illégale. Mais ce n’est pas parce qu’une activité n’est pas réglementée que l’on ne peut pas prévoir une obligation d’assurance.
Il existe sans doute d’autres voies. Les Britanniques, par exemple, sont allés plus loin en agrégeant agrégateurs de comptes et agrégateurs de placements.
Si nous avions choisi cette dernière voie, j’aurais compris que vous parliez de surtransposition. En l’espèce, nous sommes à côté de la directive dont les auteurs ont peut-être eu le tort de ne pas voir que la frontière entre agrégateurs de comptes pour le paiement et agrégateurs de comptes d’épargne n’est plus pertinente aujourd’hui.
Cela étant, je vous remercie de partager l’idée selon laquelle on ne peut attendre une nouvelle directive qui interviendra dans un délai que l’on ne peut évaluer aujourd’hui. Le Gouvernement et l’ensemble des sénateurs, tous groupes politiques confondus, ont pour seul souci la protection du consommateur. Il est important de lui offrir un minimum de garanties. Le retrait de cet amendement nous laisse le temps de travailler à une meilleure solution d’ici à la CMP.
Les montants en jeu sont sans commune mesure avec les agrégateurs de paiement. Les soldes de comptes courants ne sont pas toujours très élevés, alors que ceux des comptes d’épargne peuvent être beaucoup plus importants. On pourrait se retrouver, demain, avec des utilisateurs purement et simplement ruinés.
La responsabilité du législateur et celle du Gouvernement est d’assurer un minimum de sécurité à ces utilisateurs, alors que l’ensemble des pare-feu, comme nous le rappelle l’actualité, n’offre pas une garantie suffisante aujourd’hui.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, d’avoir retiré cet amendement. Sachez que la commission des finances est tout à fait disposée à continuer de travailler sur ce sujet important.
Mme la présidente. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.
Article 1er ter
L’article 34 de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du VIII, après la première occurrence du mot : « article », sont insérés les mots : « et sans préjudice des dispositions du VIII bis » ;
2° Après le même VIII, il est inséré un VIII bis ainsi rédigé :
« VIII bis. – Jusqu’à dix-huit mois après l’entrée en vigueur de l’acte délégué adopté en vertu du 1 de l’article 98 de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 susvisée, un décret précise les conditions d’entrée en vigueur et celles suivant lesquelles les prestataires de services de paiement fournissant le service d’initiation de paiement, d’une part, et les prestataires de services de paiement fournissant le service d’information sur les comptes, d’autre part, communiquent de manière sécurisée avec les utilisateurs de services de paiement et les prestataires de services de paiement gestionnaires de comptes, selon des modalités conformes aux dispositions relatives aux normes sécurisées de communication prévues par l’acte délégué susmentionné et permettant aux prestataires de services de paiement fournissant le service d’initiation de paiement et aux prestataires de services de paiement fournissant le service d’information sur les comptes de continuer à exercer leurs activités. » ;
3° Au premier alinéa du XI, les mots : « mentionnée au premier alinéa du VIII du présent article » sont remplacés par les mots : « définie par le décret mentionné au VIII bis du présent article et au plus tard dix-huit mois après l’entrée en vigueur de l’acte délégué adopté en vertu du 1 de l’article 98 de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 susvisée ». – (Adopté.)
Article 2
Le chapitre III du titre III du livre Ier du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-1 est ainsi modifié :
a) Le VI devient le VII ;
b) Le VI est ainsi rétabli :
« VI. – Le présent chapitre ne s’applique pas aux opérations de paiement effectuées entre prestataires de services de paiement pour leur propre compte. » ;
2° À l’article L. 133-2, les mots : « des troisième et quatrième » sont remplacés par les mots : « des deux derniers » ;
2° bis (nouveau) Au deuxième alinéa du I de l’article L. 133-10, les mots : « frais pour » sont remplacés par les mots : « frais proportionnés aux coûts induits par » ;
2° ter (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 133-17-1, les mots : « motivées ou documentées » sont remplacés par les mots : « motivées et documentées » ;
2° quater (nouveau) Au deuxième alinéa de l’article L. 133-21, après les mots : « mauvaise exécution », sont insérés les mots : « ou de la non-exécution » ;
2° quinquies (nouveau) L’article L. 133-22 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa du I, les références : « articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les références : « articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
– à la première phrase du troisième alinéa, les références : « articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
c) Au IV, les mots : « mauvaise exécution » sont remplacés par les mots : « non-exécution, la mauvaise exécution ou l’exécution tardive » ;
3° Au 5° du II de l’article L. 133-28, la référence : « l’article L. 133-23 » est remplacée par les références : « les articles L. 133-20, L. 133-23 et L. 133-23-1 » ;
4° À la fin du 3° du II de l’article L. 133-39, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
5° Au 4° du II de l’article L. 133-40, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
6° Au 1° du III du même article L. 133-40, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
7° Au 3° du II de l’article L. 133-41, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
8° Au 1° du III du même article L. 133-41, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
9° L’article L. 133-45 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le prestataire de services de paiement informe l’utilisateur de services de paiement autre que le consommateur de l’existence ou non d’une instance de règlement extrajudiciaire telle que définie à l’avant-dernier alinéa du présent article. » – (Adopté.)
Article 3
Le livre III du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° À l’article L. 314-5, la référence : « VII » est remplacée par la référence : « I » ;
2° L’article L. 351-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « deuxième, quatrième, cinquième et huitième alinéas du I de l’article L. 312-1-1 et, lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, à l’article L. 314-12 et au II de l’article L. 314-13 » sont remplacés par les mots : « premier, deuxième, troisième et dernier alinéas du II de l’article L. 312-1-1 et, lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, à l’article L. 314-12 et au III de l’article L. 314-13 » ;
b) Au second alinéa, les mots : « au premier alinéa du I, au II de l’article L. 312-1-1, au III de l’article L. 314-13 lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, au VII de l’article L. 314-13 » sont remplacés par les mots : « aux I et IV de l’article L. 312-1-1, au I de l’article L. 314-13, ainsi qu’au IV du même article L. 314-13 lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, ».
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer trois alinéas rédigés :
…° Le II de l’article L. 312-4-1 est ainsi modifié :
a) Le 2° est complété par les mots : « pour les dépôts qu’elles ont effectués en leur nom et pour leur compte propre » ;
b) Les 4° et 5° sont complétés par les mots : « pour les dépôts qu’ils ont effectués en leur nom et pour leur compte propre » ;
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Cet amendement vise à clarifier le fait que les comptes ouverts auprès d’établissements de crédit par les sociétés de financement, les établissements de monnaie électronique et les établissements de paiement autrement qu’à leur nom et pour leur compte propre bénéficient de la garantie des dépôts, à l’instar des comptes ouverts par les entreprises d’investissement.
Ces dispositions trouvent en particulier à s’appliquer dans le cas des comptes de cantonnement ouverts par ces établissements sur lesquels ils déposent les fonds reçus de leur propre clientèle.
Une incertitude existe en effet sur le fait que la délégation conférée au ministre chargé de l’économie au a) du 10° de l’article L. 312–16 du code monétaire et financier de préciser par voie d’arrêté « les conditions dans lesquelles l’ayant droit de tout ou partie des sommes figurant sur un compte, qui n’est pas le titulaire nominal, peut bénéficier de la garantie des dépôts » couvre ce cas de figure, la loi ne prévoyant de dérogation expresse qu’en ce qui concerne les comptes ouverts par les entreprises d’investissement.
Il est important, pour des motifs de stabilité financière, de confiance des utilisateurs de services de paiement et de monnaie électronique et de protection de la clientèle, qu’en cas de défaillance d’un établissement de crédit, ces comptes puissent bénéficier de la garantie des dépôts au même titre que les clients des entreprises d’investissement dont les fonds sont également déposés sur un compte de cantonnement.
Dans l’hypothèse inverse, la défaillance d’un établissement de crédit teneur de compte entraînerait des effets de contagion sur les établissements de paiement, entraînant probablement leur propre défaillance et leur incapacité à restituer à leur clientèle – généralement constituée de particuliers – les fonds qu’ils ont collectés. Cela conduirait à rendre inefficaces les mesures de protection, en particulier de cantonnement des fonds, dont ils sont censés bénéficier au regard des textes applicables, notamment européens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Après les propos tenus sur l’amendement précédent, vous vous en doutez, la commission est évidemment très favorable à cet amendement, qui va dans le sens de la protection du consommateur.
Il s’agit davantage d’une clarification que d’une véritable innovation. En cas de défaillance d’un établissement bancaire, le compte de cantonnement est couvert. Mais le compte de cantonnement n’est pas le compte final de l’utilisateur. Le titulaire d’un Compte-Nickel, par exemple, aurait la garantie, en cas de faillite de la banque, de retrouver ses dépôts.
Il s’agit d’une sécurisation et d’une clarification bienvenues.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Le livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° AA (nouveau) Au 2° du I de l’article L. 521-3, après le mot : « éventail », il est inséré le mot : « très » ;
1° A L’article L. 521-3-2 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« La Banque de France s’assure de la sécurité des services reposant sur des instruments de paiement spécifiques et de la pertinence des normes applicables en la matière. Si elle estime qu’un de ces instruments de paiement spécifiques présente des garanties de sécurité insuffisantes, elle peut recommander à son émetteur de prendre toutes mesures destinées à y remédier. Si ces recommandations n’ont pas été suivies d’effet, elle peut, après avoir recueilli les observations de l’émetteur, décider de formuler un avis négatif publié au Journal officiel.
« Pour l’exercice de cette mission, la Banque de France procède aux expertises et se fait communiquer, par l’émetteur ou par toute personne intéressée, les informations utiles concernant les instruments de paiement spécifiques et les terminaux ou les dispositifs techniques qui leur sont associés.
« Les entreprises mentionnées au présent article adressent à la Banque de France un rapport annuel justifiant de la sécurité des instruments de paiement spécifiques qu’elles émettent et gèrent. » ;
1° Au premier alinéa du I de l’article L. 522-3, la référence : « II » est remplacée par la référence : « III » ;
2° À la première phrase du III de l’article L. 522-8, la deuxième occurrence des mots : « des activités » est supprimée ;
2° bis (nouveau) Le I de l’article L. 522-11 est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Représente une menace pour la stabilité du système de paiement ou la confiance en celui-ci en poursuivant son activité de services de paiement. » ;
3° Le 1° du II de l’article L. 522-13 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
b) À la première phrase du second alinéa, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
3° bis (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 525-5, après le mot : « éventail », il est inséré le mot : « très » ;
4° Au III de l’article L. 525-9, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
4° bis (nouveau) À la première phrase du second alinéa de l’article L. 526-12, les références : « L. 526-8 et L. 526-9 » sont remplacées par les références : « L. 526-8 à L. 526-10 » ;
4° ter (nouveau) L’article L. 526-15 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Représente une menace pour la stabilité du système de paiement ou la confiance en celui-ci en poursuivant son activité de services de paiement. » ;
5° Au deuxième alinéa du II de l’article L. 526-19, la référence : « L. 526-26 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
6° À la fin du I de l’article L. 526-24, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
7° À l’article L. 526-28, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « I » ;
7° bis (nouveau) Au II de l’article L. 526-30, la référence : « L. 522-7 » est remplacée par la référence : « L. 522-7-1 » ;
8° À la fin du 1° ter de l’article L. 561-2, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 ». – (Adopté.)
Article 5
(Non modifié)
Le titre Ier du livre VI du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Le A du I de l’article L. 612-2 est ainsi modifié :
a) Après le 13°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution s’exerce sur l’activité de prestation de services d’investissement des personnes mentionnées aux 1° et 2°, sous réserve de la compétence de l’Autorité des marchés financiers en matière de contrôle des règles de bonne conduite et autres obligations professionnelles. » ;
a bis) À l’avant-dernier alinéa, après le mot : « Autorité », sont insérés les mots : « de contrôle prudentiel et de résolution » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° Au troisième alinéa du I de l’article L. 613-33-3, les références : « aux articles L. 526-25 et L. 526-26 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 526-24 ». – (Adopté.)
Article 6
Le livre VII du code monétaire et financier, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1433 du 4 octobre 2017 relative à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier, est ainsi modifié :
1° A À la section 3 du chapitre Ier du titre V, l’article L. 751-2-1 devient l’article L. 751-2-1 A ;
1° B À la section 2 du chapitre Ier du titre VI, l’article L. 761-1-2 devient l’article L. 761-1-2 A ;
1° L’article L. 741-2-1 A, ainsi que les articles L. 751-2-1 A et L. 761-1-2 A, tels qu’ils résultent, respectivement, des 1° A et 1° B du présent article, sont ainsi modifiés :
a) La deuxième ligne du tableau constituant le second alinéa du I est remplacée par quatre lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-1, à l’exception de son III |
Résultant de la loi n° …du … |
|
L. 133-1-1, à l’exception de son II |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
||
L. 133-2 |
Résultant de la loi n° …du … |
||
L. 133-3 et L. 133-4 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
b) La treizième ligne du même tableau est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-27 |
Résultant de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 |
|
L. 133-28 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
c) Au 3° du II, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
d) Après le même 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Le II de l’article L. 133-1 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.” ; »
e) (Supprimé)
2° La dernière ligne du tableau constituant le second alinéa du I de l’article L. 741-2-1 A et de l’article L. 751-2-1 A, tel qu’il résulte du 1° A du présent article, est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-39 à L. 133-41 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-42 à L. 133-44 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
3° Le 3° du II de l’article L. 751-2-1 A, tel qu’il résulte du 1° A du présent article, est complété par les mots : « ne sont pas applicables » ;
4° La dernière ligne du tableau constituant le second alinéa du I de l’article L. 761-1-2 A, tel qu’il résulte du 1° B du présent article, est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-39 à L. 133-41 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-42 à L. 133-45 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
5° (Supprimé)
5° bis La seconde phrase des articles L. 743-3, L. 753-3 et L. 763-3 est supprimée ;
6° Les mêmes articles L. 743-3, L. 753-3 et L. 763-3 sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 351-1 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
7° Les articles L. 743-7-1 et L. 753-7-1 sont ainsi modifiés :
a) À la troisième ligne de la première colonne du tableau du second alinéa du I, les mots : « et de son II » sont supprimés ;
b) À la douzième ligne de la première colonne du même tableau, la référence : « L. 313-14 » est remplacée par la référence : « L. 314-14 » ;
c) Le 1° du II est ainsi rédigé :
« 1° Le II de l’article L. 314-2 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.ˮ ; »
7° bis L’article L. 763-7-1 est ainsi modifié :
a) À la troisième ligne de la première colonne du tableau constituant le second alinéa du I, les mots : « et de son II » sont supprimés ;
b) À la douzième ligne de la première colonne du même tableau, la référence : « L. 313-13 » est remplacée par la référence : « L. 314-13 » ;
c) Le 1° du II est ainsi rédigé :
« 1° Le II de l’article L. 314-2 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.” ; »
8° Au début du troisième alinéa de l’article L. 745-8, est ajoutée la mention : « II. – » ;
9° Au tableau constituant le second alinéa du I des articles L. 745-8-1, L. 755-8-1 et L. 765-8-1, la sixième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 522-6 à L. 522-7-1 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
|
L. 522-8 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
10° Au b du 1° du III des articles L. 745-13, L. 755-13 et L. 765-13, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
11° Le I de l’article L. 765-13 est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 561-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
b) Au quatrième alinéa, la référence : « L. 561-2, » est supprimée ;
12° Le I des articles L. 746-2, L. 756-2 et L. 766-2 est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 612-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
b) Au début du troisième alinéa, les mots : « Les articles L. 612-2 et L. 612-21 sont applicables dans leur » sont remplacés par les mots : « L’article L. 612-21 est applicable dans sa ». – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je comptais intervenir sur l’amendement n° 2 du Gouvernement, mais il a été retiré, pour aller dans le sens du rapporteur général, même si l’on peut entendre vos arguments, madame la secrétaire d’État.
Il s’agit d’un texte très complexe. La transposition de cette directive concernant les services de paiement dans le marché intérieur peut également être l’occasion de sécuriser l’ensemble des utilisateurs, ce qui va dans le sens de l’intérêt général.
Nous voterons ce projet de loi.
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.
(Le projet de loi est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que ce texte a été adopté à l’unanimité des présents.
4
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 27 mars 2018 :
À quatorze heures trente :
Proposition de loi d’orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles (n° 293, 2017–2018) ;
Rapport de Mme Marie Mercier, fait au nom de la commission des lois (n° 372, 2017–2018) ;
Texte de la commission (n° 373, 2017–2018).
À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.
À dix-sept heures quarante-cinq et le soir : suite de la proposition de loi d’orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures dix.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD