M. Fabien Gay. Vous êtes d’accord avec moi !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Le Gouvernement a bâti un plan d’action que j’ai moi-même présenté ; loin de moi la posture consistant à dire que ce plan serait un bouclier hermétique qui nous protégerait définitivement. Y sont proposées un certain nombre de solutions, dont certaines relèvent de la compétence de la Commission européenne – je pense notamment à une directive européenne qui pourrait nous permettre d’agir sur la qualité des carburants. Je ne sais quelles décisions seront prises, mais nous allons nous atteler à ce dossier sur un plan diplomatique, croyez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, notamment avec nos partenaires allemands.
Monsieur Gay, vous appeliez de vos vœux l’organisation d’un référendum. Mais pourquoi un référendum serait-il nécessaire, alors qu’au deuxième semestre de 2018, si je ne me trompe, le Sénat et l’Assemblée nationale auront à s’exprimer ?
M. Fabien Gay. À moins d’un référendum !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Il n’en est pas besoin, me semble-t-il. Les députés et les sénateurs auront leur mot à dire. Et si d’aventure nos inquiétudes ne sont pas levées, chacun devra prendre ses responsabilités.
D’autres dispositions ont été prises pour réduire notre consommation, par la programmation de la sortie des véhicules thermiques ou par le lancement d’un plan de rénovation des bâtiments.
De toute façon, quel que soit le modèle énergétique que nous développons, chacun a bien conscience qu’il y a une condition du succès : c’est la réduction massive de notre consommation. Coup de chance : on sait le faire ! Coup de chance : nous avons les entreprises pour cela ! Coup de chance : c’est un avantage pour les citoyens ! Coup de chance : c’est un avantage compétitif pour nos entreprises !
Un certain nombre de questions ont été posées. Comme je l’ai dit, je ne répondrai qu’à quelques-unes d’entre elles, non pas pour éluder les autres, mais parce que, compte tenu des dizaines d’amendements que nous allons avoir à discuter,…
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Une centaine !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. … nous aurons l’occasion d’en débattre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez évoqué les usages non énergétiques du pétrole et du gaz, qu’il faudrait exonérer de la disparition programmée. Je vous dis d’emblée, s’agissant de tout ce qui relève des exonérations, des exceptions,…
M. Roland Courteau. … des dérogations !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. … des dérogations, en effet, que nous avons fait en sorte, afin de nous prémunir contre tout risque d’inconstitutionnalité, que ce projet de loi respecte les droits acquis – et je m’en félicite. Ce texte n’est certes pas l’alpha et l’oméga de notre stratégie énergétique, nous en avons convenu ; il s’agit néanmoins d’un dispositif important. Si nous élargissons les trous dans la raquette – pardon de l’expression –, le projet risque, au bout d’un moment, de se vider de sa substance.
Mme Françoise Cartron. Eh oui !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Un tel dispositif d’exonération serait, selon moi, contraire à l’esprit du projet de loi, dont l’enjeu est d’inscrire dans le droit une sortie de la production et de la consommation des énergies fossiles.
Il est très difficile, voire impossible, de faire la différence entre les hydrocarbures qui feraient l’objet d’un usage non énergétique et ceux qui, au contraire, relèveraient d’un usage énergétique. Notre objectif, via ce projet de loi, est bien d’envoyer le signal d’une exigence de transformation, y compris en direction de certains secteurs comme la chimie ou les plastiques, qui doivent eux aussi apprendre à se passer des énergies fossiles. Ça vaut pour tout le monde !
Ce signal doit encourager à trouver des alternatives. Pour avoir visité certaines des entreprises concernées, notamment dans le domaine de la chimie, je ne veux pas, à ce stade, faire de promesses, mais je fais assez confiance au génie humain. Et vous verrez, mesdames, messieurs les sénateurs, les choses arriveront, comme d’un fait exprès, si sont respectés les trois principes qui guident toujours mon action : prévisibilité, irréversibilité, progressivité.
De mon point de vue, l’adoption des amendements qui ont été déposés dans le sens que je viens d’indiquer brouillerait un peu les pistes. Précisément, nous n’enverrions pas les bons signaux aux acteurs économiques, alors que nous disposons, dans ce qu’on appelle la « chimie verte », de véritables champions – je les ai évoqués tout à l’heure – qui innovent et cherchent à trouver des substituts, notamment d’origine végétale.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Françoise Cartron. Nous sommes d’accord !
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. En outre, la chimie fondée sur les hydrocarbures conduit à la mise en décharge de nombreux produits et a donc pour effet de réalimenter le cycle des émissions de gaz à effet de serre. L’avenir, me semble-t-il, c’est donc plutôt l’économie circulaire. C’est là-dessus qu’il faudra miser !
S’agissant des permis en cours, je me permets de le dire, les auteurs de certains des amendements dont nous aurons à discuter aujourd’hui ou demain rament un peu à contre-courant. L’objectif de l’Accord de Paris, c’est bien de sortir des énergies fossiles ; c’est nécessaire si nous voulons atteindre la neutralité carbone et maîtriser le réchauffement de la planète en le limitant à 2 °C. Commençons par fermer les vannes ! Quelques gouttes continueront quand même à passer après 2040, mais si, en plus, nous autorisons les quarante et quelques demandes qui étaient en attente, l’impact sera encore réduit d’autant.
Les permis qui sont en cours d’examen ne disposeront donc pas du droit de suite. Je suis très attaché au droit de suite, parce que le Conseil d’État, avec raison, nous a bien alertés sur ce point. Mais, pour moi, l’intérêt du projet de loi est d’envoyer de bons signaux. Pourquoi accorderions-nous des permis alors que nous savons qu’il va falloir nous passer des énergies fossiles ? Nous mentirions aux acteurs économiques en leur délivrant de nouveaux permis tout en proclamant la nécessité de sortir, un jour ou l’autre, des énergies fossiles. Il faut mettre tout le monde dans une même trajectoire, au service d’un même objectif.
Deux cas se présentent : pour les permis déjà accordés, leurs détenteurs disposent d’un droit de suite et pourront en faire usage ; les permis non encore délivrés, comme je conçois les choses, seront eux refusés.
S’agissant de la recherche, préoccupation légitime évoquée tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, nous n’accorderons pas de permis de recherches sans droit de suite – faire le contraire n’obéirait à aucune logique économique. Personne, en effet, n’investira dans la recherche s’il n’y a aucun droit d’exploration à la clé. Une telle disposition aurait en outre pour conséquence de fragiliser la loi, car les acteurs économiques pourraient ensuite nous mettre sous pression en nous demandant de mettre en œuvre des droits de suite, chose qui aura pourtant été rendue impossible.
Sur le fond, nous sommes confrontés à deux défis. Le premier est celui de la connaissance de notre sous-sol, que certains imaginent perdue sans la recherche des hydrocarbures. C’est faux ! Nous continuerons à chercher et à comprendre ce qui se trouve dans notre sous-sol. Dans le cadre de la transition énergétique en effet, nous aurons besoin d’un certain nombre de ressources, et je serais heureux de les exploiter chez nous plutôt que de les faire venir d’Extrême-Orient. Je ne vois donc pas en quoi nous ne pourrions pas continuer à évaluer les ressources de notre sous-sol, en matière de géothermie notamment.
Deuxièmement, certains s’alarment légitimement de la perte de compétence des ingénieurs et géologues français. Mais ne faisons pas preuve de naïveté : c’est sur les grands gisements que se construit cette expertise ; or 80 % de l’activité des entreprises concernées par la fin de l’exploration – il est important de le rappeler – se fait à l’étranger, et non en France. C’est plus qu’un détail : économiquement, ces entreprises ne sont pas dépendantes de leur seule activité sur le territoire métropolitain, et leurs compétences ne disparaîtront pas, du moins immédiatement, puisqu’elles vont continuer à s’exercer.
Voilà, à ce stade, une première salve de réactions. Pardon de me répéter : je comprends les arguments de chacun. En vous écoutant tous, mesdames, messieurs les sénateurs, je repensais à cette phrase de Bossuet, qui disait : « Nous sommes d’étranges créatures qui nous affligeons des effets dont nous continuons à adorer les causes. » D’une manière ou d’une autre, il faut que nous sortions des énergies fossiles ! Je n’ai pas dit que vous aviez dit le contraire. Certains d’entre vous ont simplement dit que ce 1 % serait peut-être la dernière goutte non utilisée et que, à nous priver en priorité de cette goutte-là, nous augmenterions nos importations. Non ! C’est probablement ce pronostic qui nous oppose. Nous ferons l’un et l’autre : nous allons montrer l’exemple, entraîner d’autres pays, qui feront la même chose que nous – être exemplaire ne signifie pas être unique ! Et nous allons, en parallèle, réduire massivement nos importations.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant au renvoi à la commission.
Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi, par M. Masson, d'une motion n° 133.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer en commission le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement (n° 43, 2017-2018).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la motion.
M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, chers collègues, ce projet de loi est essentiellement une modification fondamentale du code minier. On remet en cause, par ce texte, un certain nombre de principes fondamentaux hérités de plusieurs siècles, puisque le code minier date de Napoléon.
Monsieur le ministre d’État, c’est très bien de légiférer pour dans vingt-deux ans. Mais vous savez ce qu’est la vie publique : on vote des lois et, très souvent, deux ans après, on les modifie ; a fortiori, la probabilité est énorme pour qu’une loi fixant des objectifs à vingt-deux ans fasse l’objet de changements et de rectifications au cours des prochaines années.
Indépendamment de l’intérêt que l’on peut porter à ce que vous nous proposez, quitte à bouleverser le code minier, il y avait d’autres priorités. Vous le savez, le code minier est quelque peu déphasé par rapport à l’évolution des technologies ; il mériterait une sérieuse modernisation. Cette modernisation nous est promise par tous les gouvernements qui se succèdent depuis dix ans ! Au lieu de faire un texte sur l’opportunité duquel je ne me prononcerai pas, mais qui sera applicable dans vingt-deux ans, après tout un tas de changements, je pense qu’il aurait été préférable de prendre en main la réforme d’un certain nombre d’aspects du code minier qui nécessitent de manière urgente des adaptations. Je vais vous donner deux exemples de ces adaptations nécessaires. Le premier est celui de l’orpaillage, le second celui de la gestion de l’après-mine.
L’orpaillage, vous le savez, est une technique d’exploitation de l’or qui pose d’énormes problèmes en Guyane, polluant au mercure des centaines et même des milliers de kilomètres de rivière, empoisonnant les populations qui vivent dans la forêt vierge. Je le dis tel que je le pense : il est quand même plus important de régler ce problème que de spéculer sur notre capacité à sabrer, dans vingt-deux ans, 1 % de la consommation française de pétrole ! (M. Gérard Longuet applaudit.)
Deuxième exemple, encore plus important à mon sens, celui de l’après-mine. À l’époque de l’élaboration du code minier, les mines étaient de petites exploitations plus ou moins artisanales. Aujourd’hui, dans beaucoup d’endroits – c’est ce qui s’est passé notamment avec le charbon et le minerai de fer –, les mines deviennent des entreprises assez gigantesques. Et le code minier ne répond pas du tout aux problématiques de l’après-mine ! Il y a eu dans cette enceinte et à l’Assemblée nationale d’énormes débats sur l’après-mine, notamment s’agissant des mines de fer, secteur dans lequel il y a des problèmes : des affaissements miniers se produisent de manière inopinée sur la surface.
Je voudrais citer un exemple encore plus flagrant et urgent aujourd'hui : le dossier de l’après-mine dans le bassin houiller de Lorraine. Des éléments sont complètement ignorés par le code minier. Dans le cas d’espèce, il s’agit de la remontée de la nappe phréatique. Dans l’ouest du bassin houiller de Lorraine, des exploitations ont conduit à faire descendre la surface d’une dizaine de mètres. Personne ne se rendait compte de rien : tant qu’on exploitait, on pompait l’eau. Et la nappe phréatique avait baissé en même temps que le sol. Simplement, aujourd'hui, on ne pompe plus, et la nappe phréatique remonte. Il y a actuellement des milliers de maisons où la nappe phréatique affleure dans les sous-sols ou dans les caves.
Autre exemple, dans la partie est du bassin houiller, des exploitations en dressant ont conduit à détruire quasiment des communes, notamment celle de Rosbruck. Là encore, rien n’est prévu, me semble-t-il, dans le code minier. Pis, les services de Charbonnages de France, qui sera prochainement remplacé par l’État, essayent de retarder la mise en œuvre de leurs responsabilités, en faisant recours sur recours pour empêcher l’application d’un certain nombre de décisions judiciaires.
Monsieur le ministre d’État, ma question est simple : alors qu’il y a d’énormes problèmes dans le code minier avec des conséquences urgentes, immédiates, est-il pertinent de s’en désintéresser, de ne pas les traiter, de ne pas en parler, comme le font tous les gouvernements successifs depuis dix ans, tout en légiférant pour un hypothétique 1 % de la consommation française dans vingt-deux ans ? C’est, je le crois, une question de bon sens. J’aimerais bien que vous me précisiez votre pensée sur le code minier et sa modernisation.
S’il n’y a pas d’engagement clair sur la réforme qu’on nous promet depuis dix ans, avec des délais de mise en place et de prise en main des dossiers, il est hors de question que je participe, via ce texte, à une opération pour se donner bonne conscience. Nous ne sommes pas là seulement pour nous donner bonne conscience ! Nous sommes aussi là pour régler les vrais problèmes. Or les vrais problèmes du code minier ne consistent pas à se demander si l’on va continuer à exploiter 1 % de la consommation française de pétrole en France ou si l’on va l’acheter à l’Arabie Saoudite ou à tel ou tel autre pays. Certes, c’est sympathique, et cela donne l’impression que l’on s’occupe du climat. Je ne suis pas contre le fait d’avoir la main sur le cœur ; mais on ne peut se le permettre que si l’on traite parallèlement les vrais problèmes !
Or, je vous le dis, que ce soit dans le bassin houiller de Lorraine pour l’après-mine ou en Guyane, il y a des problèmes autrement plus urgents – j’insiste sur l’urgence – que le fait de savoir si on va tirer un trait sur 1 % de la consommation française de pétrole dans vingt-deux ans. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Christine Herzog applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, contre la motion.
M. Daniel Gremillet. Notre groupe ne peut pas voter cette motion tendant au renvoi à la commission : ce serait anéantir tout le travail d’enrichissement réalisé au Sénat.
J’ai entendu l’intervention de notre collègue. Je l’encourage à voter les amendements présentés par notre rapporteur. En adoptant nos amendements sur la recherche et la connaissance des sols et des sous-sols, le Sénat offrira un débouché à ce qui vient d’être exprimé.
M. le ministre d’État l’a indiqué, un texte sur le code minier est en préparation pour le début de l’année 2018.
À nos yeux, il serait dommage de se priver de l’enrichissement et des apports de notre commission des affaires économiques, dont je salue la présidente et l’ensemble des membres, qui ont été obligés de travailler dans l’urgence. Le texte issu de l’Assemblée nationale, lui, prive complètement notre territoire de la recherche, donc de la connaissance pour le futur, un savoir pourtant indispensable pour la balance commerciale de notre pays et pour les économies d’énergie.
En outre, et vous le savez, monsieur le ministre d’État, toutes les entreprises, tous les acteurs économiques sont actuellement en train d’élaborer leur budget. Et, parmi les premiers éléments qu’examine une entreprise qui se respecte pour établir son budget, il y a l’énergie, l’eau, ainsi que le coût de la main-d’œuvre et de la matière. En d’autres termes, les sujets dont nous débattons et les conséquences qui en découlent ne sont pas neutres pour la performance économique de notre pays.
Nous avons besoin d’avancer, en ciblant les éléments permettant de montrer le chemin restant à parcourir pour atteindre la performance économique, mais également répondre aux exigences environnementales et sociétales du futur. Par conséquent, notre groupe votera contre la motion tendant au renvoi à la commission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Notre commission ne s’est pas prononcée sur cette demande de renvoi à la commission. À titre personnel, j’y suis évidemment défavorable. En effet, comme l’a souligné notre collègue Daniel Gremillet, nous avons beaucoup travaillé, et en détail, sur ce texte, malgré des délais extrêmement contraints. Nous avons examiné de nombreux amendements, et nous en avons adopté, je crois, une cinquantaine. La demande de renvoi à la commission ne me paraît donc pas du tout justifiée.
En outre, c’est évidemment au Gouvernement qu’il appartient de se prononcer sur la réforme du code minier. Or il nous a déjà laissé entendre que la réforme était en projet pour 2018.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. Monsieur le sénateur Masson, lorsque vous déclarez vouloir vous occuper des « vrais problèmes », vous insinuez en creux – je vous prie de bien vouloir m’excuser, mais je tenais à réagir sur ce point – que les sujets que nous traitons relèvent de problèmes accessoires.
Certes, les problèmes que vous évoquez au sujet du code minier sont réels. Mais, plutôt que d’opposer les sujets, il faut les conjuguer. Les problématiques que vous abordez seront prises en compte en 2018, en nous inspirant des travaux déjà effectués par Jean-Paul Chanteguet.
Ma responsabilité est d’introduire dans notre champ de préoccupations et dans notre champ de vision un invité un peu surprise au XXIe siècle : le long terme ! Il est vrai que nous avons jusqu’à présent toujours sacrifié l’urgence à l’essentiel. Mais, désormais, l’urgence, c’est aussi le long terme !
N’y voyez aucun mauvais esprit, mais, lorsque vous tournez légèrement en dérision l’objet du projet de loi, c’est parce que vous considérez que c’est un tout. Or ce texte fait partie d’un ensemble de dispositifs. Je pense à la loi relative à la transition énergétique, au plan Climat ou à nos démarches pour essayer de réorienter notre mode de production agricole afin que celui-ci contribue également à la lutte en faveur du climat. Je pourrais également évoquer les transports ou bien d’autres domaines, dans le bâtiment ou le logement… C’est aussi faire abstraction de l’énergie que nous dépensons sans compter en matière diplomatique aux échelons européen et international pour engager les autres États ; et, croyez-moi, ce n’est pas facile !
Nous ne parlons pas d’un petit problème. Il s’agit au contraire d’un énorme problème, qui peut saper tout ce qui a de l’importance à vos yeux, ainsi que je l’ai souligné tout à l’heure.
N’employez donc pas de termes un peu caricaturaux. Pour ma part, je ne caricature pas vos propos, car vous avez raison : le sujet que vous évoquez est important. Nous avons estimé qu’il fallait traiter à part les hydrocarbures et la réforme du code minier, laquelle sera lourde et, si j’ai bien compris, complexe, même si certains ont déjà un peu anticipé sur nos travaux. Le Gouvernement s’y est engagé : la réforme du code minier – comme vous l’avez rappelé, celui-ci date de Napoléon – sera mise en œuvre en 2018.
Je suis évidemment défavorable à la motion tendant au renvoi à la commission.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 133, tendant au renvoi à la commission.
(La motion n'est pas adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l’énergie et à l’environnement
Chapitre Ier
Arrêt de la recherche et de l’exploitation des hydrocarbures dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques en application de l’Accord de Paris
Article 1er A
(Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 57 rectifié bis, présenté par MM. Guillaume, Courteau et Bérit-Débat, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin, Duran, Montaugé et Tissot, Mmes Préville et Cartron, M. Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’ordonnance n° 2011-91 du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier est ratifiée.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à rétablir l’article 1er A, qui a été supprimé en commission des affaires économiques. L’article supprimé visait à ratifier l’ordonnance du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier.
Alors que le présent projet de loi procède à des modifications de la partie législative du code minier, nous considérons qu’il est utile de ratifier une ordonnance portant précisément sur la codification de celle-ci.
Nous tenons à souligner que cet article 1er A était issu de l’adoption par l’Assemblée nationale en séance publique d’un amendement ayant reçu un avis favorable de la part à la fois du rapporteur de la commission du développement durable et du Gouvernement.
Monsieur le ministre d’État, nous savons que vous vous êtes engagé à proposer dans le courant de l’année 2018 un projet de loi visant à réformer le code minier, et nous nous en félicitons. Nous sommes conscients qu’il sera nécessaire à cette occasion de corriger un ensemble d’erreurs et de procéder à diverses adaptations.
Comme vous l’avez vous-même souligné, en ratifiant cette ordonnance, il s’agit de permettre de mettre un terme à l’ambiguïté entourant le statut des articles du code minier issus de la recodification portée par l’ordonnance de 2011 et dont la légalité est parfois encore remise en cause, une ordonnance non ratifiée ne revêtant qu’un caractère réglementaire. Adopter cet amendement nous semble donc utile.
Mme Catherine Procaccia. Heureusement ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. J’ai lu avec attention les propos que M. le ministre d’État a tenus en commission à l’Assemblée nationale. Il a indiqué que cette ordonnance requérait « un important travail de toilettage », que « la ratifier brutalement risquerait de remettre en cause les dispositions adoptées ultérieurement » et que ce travail avait « vocation à être fait dans le cadre de la réforme du code minier ».
Je souscris totalement à ces propos. C’est pourquoi j’ai proposé à la commission de supprimer l’article 1er A. J’ajoute qu’il serait inconséquent d’autoriser la ratification d’une ordonnance sans la modifier tout en sachant que certaines dispositions devraient l’être.
En outre, je ne crois pas que l’on grandisse le rôle du législateur en ratifiant à l’emporte-pièce, sauf si les auteurs de l’amendement peuvent m’assurer avoir examiné avec attention les quatre-vingt-douze pages de l’ordonnance et me confirmer qu’il n’y a pas lieu de procéder à une seule modification…
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Hulot, ministre d'État. J’avais été favorable à l’adoption d’un tel amendement à l’Assemblée nationale. De notre point de vue, cette disposition met un terme à l’ambiguïté qui entoure le statut des articles du code minier issus de la recodification portée par l’ordonnance de 2011 et dont la légalité est malheureusement parfois encore remise en cause.
Le Gouvernement souhaite le maintien de l’article dans le projet de loi. Je suis donc favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Il me semble cohérent de ratifier l’ordonnance portant sur la partie législative concernée, dont le caractère légal peut être questionné. Pourquoi attendre une réforme du code minier pour ratifier une telle ordonnance ? J’ai l’impression qu’il serait préférable de ne pas remettre à demain ce que nous pouvons faire aujourd'hui.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. L’argumentaire avancé pour justifier un tel amendement me semble tout de même un peu court.
Il nous est indiqué que le fait de donner une consécration législative à l’ordonnance permet de sécuriser le dispositif. En d’autres termes, on empêche les gens qui pourraient attaquer telle ou telle disposition devant le Conseil d’État de le faire. Mais cela revient à reconnaître nous-mêmes que telle ou telle disposition figurant dans l’ordonnance n’est pas nécessairement conforme aux principes du droit !
Il ne me paraît pas opportun du tout de faire cela à la sauvette sans discuter du contenu de l’ordonnance. Il faut qu’il y ait un vrai débat. Et je pense qu’il doit avoir lieu dans la logique d’une réforme globale du code minier.
Je ne voterai donc pas cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. L’ordonnance compte effectivement quatre-vingt-douze pages. Compte tenu de l’engagement de la procédure accélérée sur ce projet de loi, il a été complètement impossible à Mme la rapporteur et M. le rapporteur pour avis de rendre une expertise sur le fond.
L’avis défavorable que nous émettons sur cet amendement tient donc à la rapidité avec laquelle nous avons eu à examiner le projet de loi. Encore une fois, l’urgence à légiférer n’est pas avérée, même si le sujet est évidemment important. Nous n’avons pas eu suffisamment de temps pour expertiser ces quatre-vingt-douze pages extrêmement techniques d’ordonnance.