Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à interdire la prise en charge par l’entreprise agroalimentaire qui développe un nouveau produit alimentaire sous MDD des frais liés à la création de ce produit, lorsque ceux-ci ne correspondent pas à des prestations qu’elle a effectuées.
Il vise à rééquilibrer la relation entre l’entreprise qui fabrique des produits vendus sous MDD et le distributeur qui fait souvent supporter à l’industriel des frais complémentaires qui correspondent à des analyses, des cahiers des charges, des audits qu’il n’a pas conduits lui-même, car ces éléments ne participent pas du mécanisme de production.
Intuitivement, l’amendement me paraît frappé au coin du bon sens, puisqu’il tend à ce que l’industriel ne supporte pas le coût de ce qu’il a accompli au titre du développement d’un produit vendu sous MDD.
En même temps, étant donné la rédaction de cet amendement, je ne suis pas persuadé qu’une telle interdiction réglerait totalement le problème et rétablirait nécessairement l’équilibre d’un contrat qui peut, au surplus, être un contrat d’entreprise non soumis à l’article L. 441-7 du code de commerce. Il faut se garder d’enlever toute souplesse dans la façon dont les parties au contrat se répartissent les rôles et les coûts.
La commission des affaires économiques est assez réservée sur l’amendement, sans y être complètement défavorable. À ce stade, elle s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Les négociations commerciales sont l’occasion d’une multitude de discussions qui portent aussi bien sur les coûts, les distances, les réalités contractuelles, que sur les relations entre les différents acteurs, ou encore les territoires… C’est donc extrêmement compliqué !
Aujourd’hui, certains systèmes contractuels dans la grande distribution concernent la viande bovine, par exemple.
Dans le cadre d’une négociation commerciale, il est très compliqué de déterminer les coûts qui vont être pris en charge par le distributeur. Il est donc préférable de laisser une marge de manœuvre. Sinon, nous n’y arriverons pas ! Les auteurs de cet amendement pensent ainsi résoudre le problème, mais on ne fait que le reporter ou plutôt le déporter. De toute façon, il réapparaîtra sous une autre forme…
D’ailleurs, si les distributeurs estiment que ces frais représentent un coût supplémentaire pour eux, ils compenseront d’une autre façon les coûts qu’on pourrait leur imputer. Il faut y faire attention et garder cela en tête.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Au travers de cet amendement, on en revient toujours à la même question, celle de la transparence des coûts, et ce à tous les niveaux, du producteur à la grande distribution.
Pour ma part, je comprends tout à fait l’intention des auteurs de l’amendement.
M. le ministre fait valoir qu’il peut être dangereux de mettre en place une telle mesure dans le cadre de négociations commerciales, car la grande distribution pourrait prendre prétexte des frais mis ainsi à sa charge pour imputer d’autres frais à l’industrie agroalimentaire.
M. Alain Vasselle. Mais quand parviendrons-nous une bonne fois pour toutes à mettre en place une véritable transparence des coûts à chaque niveau, de sorte que la négociation aboutisse à un véritable partage de la valeur ajoutée ?
Il convient d’adopter le présent amendement et de suivre en cela l’avis de sagesse exprimé par M. le rapporteur. Nous verrons ensuite comment nous pourrons en faire évoluer la rédaction en lien avec l’Assemblée nationale.
À ce stade, il est important d’afficher notre volonté et d’indiquer la direction dans laquelle nous entendons travailler !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Il s’agit d’une question de fond. Monsieur le sénateur, je comprends la logique que vous suivez : vous pensez qu’en évaluant les différents coûts de production, on peut automatiquement déduire le prix des produits.
Sachez une chose : le prix, ce n’est pas seulement la somme des différents coûts, c’est aussi une symbolique ! Certains prix symboliques n’évoluent pas. D’autres, en revanche, diffèrent, parce qu’on tient compte de ce que certaines personnes intègrent dans leur raisonnement.
Prenons un exemple basique de marketing : une bouteille de whisky aura un prix plus élevé dans le supermarché d’un quartier populaire que dans le supermarché d’un quartier aisé. En effet, pour les classes populaires, cette boisson est un produit de luxe, alors que pour les classes plus aisées, ce produit s’est banalisé. Les coûts de production du whisky sont pourtant partout les mêmes !
Je comprends qu’on puisse penser qu’il est possible de déduire automatiquement le prix des produits à partir de leurs coûts de production. Pourtant, c’est faux ! Dans le prix des produits, il faut également ajouter une valeur hors coût. Prenons cette fois-ci l’exemple de produits qui bénéficient d’indications ou d’appellations géographiques comme les IGP ou les AOP. On intègre alors dans le prix du produit non seulement un coût, mais une valeur liée à son histoire. Ce qu’achète le consommateur, ce n’est pas qu’un coût, c’est aussi une image ! Comment va-t-on calculer cette valeur ?
M. Alain Vasselle. La valeur doit être partagée !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui, la valeur doit être partagée, mais c’est un autre sujet, monsieur le sénateur. Si vous vous concentrez uniquement sur la question des coûts de production pour déduire la valeur d’un produit, vous vous trompez ! La valeur comporte aussi une dimension immatérielle. C’est cela qui est complexe dans les négociations commerciales et il ne sera, hélas, pas possible de régler cette question par la loi !
Si vous voulez entrer dans ce débat, on ne s’arrêtera jamais. On ne sait pas comment calculer le coût d’un produit. En zone de montagne, les frais de transport sont plus importants qu’ailleurs : pour autant, le prix des produits doit-il être plus élevé ? Peut-être, mais si vous ne tenez pas compte pour ces produits de la valorisation liée à la montagne, les produits considérés seront concurrencés par des produits aux coûts plus faibles ! On verra alors disparaître le lait de montagne, par exemple !
J’ai désormais une solide expérience de ces questions : si le comté se vend plus cher, ce n’est pas uniquement parce son coût de production est plus important que celui des autres fromages, c’est aussi parce qu’il a une certaine image !
M. Alain Vasselle. En effet !
M. Alain Vasselle. Ce doit être l’un des éléments de la négociation contractuelle !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Allez donc demander aux membres du comité interprofessionnel de gestion du comté comment ils déterminent le coût de leur fromage et comment ils négocient ! Vous allez voir : ils vont vous expliquer ! Le comté n’est pas qu’un produit, c’est aussi une image et une stratégie. C’est la raison pour laquelle il est vendu plus cher qu’un fromage banal.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Monsieur le ministre, vous venez de faire la démonstration tout à fait extraordinaire, a contrario de ce que vous souhaitiez, qu’il est primordial de connaître la marge de fabrication des produits. Puisque vous nous dites que le coût est finalement une donnée secondaire et que ce qui importe, c’est de connaître la marge et de la partager ! Voilà l’enjeu tel qu’il est posé !
Cela signifie qu’il faut que l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires fonctionne correctement. Celui-ci doit pouvoir obtenir la composition de la marge d’un produit final. Tant que cette transparence-là n’existera pas, la marge ne pourra naturellement pas être partagée. En effet, personne ne la connaît et vous nous dites de surcroît que le coût de production d’un produit est secondaire !
Je vous rejoins d’ailleurs en partie sur cette approche : le coût de production n’est pas toujours essentiel dans la vente d’un produit. C’est vrai ! Mais c’est parce que c’est souvent la marge réalisée par le distributeur qui compte dans ces cas-là ! C’est fréquemment la marge qui est très forte, alors partageons-la ! Il importe de la connaître et de faire en sorte que l’Observatoire soit transparent et dispose des moyens de fonctionner !
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard César, pour explication de vote.
M. Gérard César. Je partage le point de vue de Daniel Dubois sur le rôle de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires.
Malheureusement, cet observatoire intervient seulement après que les négociations ont abouti. C’est dommage que nous ne puissions pas faire preuve d’un état d’esprit qui corresponde à la réalité, comme vient de le dire Daniel Dubois à l’instant.
Pour nous aider dans les négociations, il serait intéressant de pouvoir nous appuyer sur un observatoire qui puisse exactement nous dire où nous en sommes de la formation de tel ou tel prix.
Personnellement, je soutiens la position de sagesse de M. le rapporteur pour avis.
Mme la présidente. L'amendement n° 345 rectifié bis, présenté par M. Raison, Mme Gatel, MM. Canevet, Bizet, Dallier, Chaize et Carle, Mme Morhet-Richaud, MM. de Legge, Chasseing, Grand, Revet, Lefèvre et Houpert, Mmes Canayer et Primas, MM. Delattre, G. Bailly, Rapin, Laménie, Vasselle, César, Kennel, Milon, Bonnecarrère et Kern, Mmes Férat et N. Goulet et MM. Guerriau, Médevielle, Cigolotti, L. Hervé, Husson, Longeot, Capo-Canellas et Gabouty, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après le 12° du I de l’article L. 442-6 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des pénalités logistiques correspondant au non-respect d’une commande de produits agricoles produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine défini dans le code rural et de la pêche maritime. »
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Les produits alimentaires frais issus de la première transformation et produits sous signe d’identification de la qualité et de l’origine, ou SIQO, sont issus de filières de production longues, sans souplesse de production et soumises aux aléas climatiques.
C’est pourquoi cet amendement vise à interdire l’application de taux de service entraînant généralement l’application de pénalités forfaitaires pour tous les produits alimentaires frais issus de la première transformation et produits sous signe de qualité, comme les produits biologiques, labellisés et certifiés. Sont ainsi notamment concernés les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Qu’un produit sous SIQO soit issu de méthodes de production particulière qui peuvent être plus lourdes à mettre en œuvre, c’est évident !
Pour autant, par ce seul fait, est-il plus périssable et sa saisonnalité est-elle plus marquée que celle d’autres produits de la même famille qui n’ont cependant pas cette qualité ? Je ne le crois pas. Il n’y a pas une différence de situation telle qu’elle justifierait un traitement particulier, étant entendu que le projet de loi, tel que la commission des affaires économiques l’a modifié, renforce déjà les pénalités pour non-respect du taux de service qui ne serait pas du fait du fournisseur.
Cet amendement est déjà en grande partie satisfait. Hier, nous avons en effet traité de la question des pénalités encourues par un fournisseur, alors qu’il n’est absolument pas en cause.
La commission des affaires économiques vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Si l’on crée un régime dérogatoire pour les seuls produits sous SIQO,…
M. Gérard César. Il ne le faut pas !
M. Stéphane Le Foll, ministre. … comment justifier que l’on continue à soumettre les autres produits à des pénalités ? Cette disposition créerait une rupture d’égalité entre fournisseurs. C’est la première difficulté.
Seconde difficulté : cette mesure pourrait même être contraire à l’objectif visé, car la grande distribution se détournera peut-être des produits sous SIQO si elle n’est plus en mesure d’avoir un approvisionnement conforme à ses vœux.
Je comprends bien l’intention des auteurs de l’amendement, connaissant d’ailleurs des personnes qui défendent cette idée dans mon département, mais j’estime qu’il ne faut pas ouvrir un débat qui créerait – je le répète – une rupture d’égalité entre les différents fournisseurs.
Mme la présidente. Madame Morhet-Richaud, l'amendement n° 345 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Patricia Morhet-Richaud. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 345 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'article 31 ter, modifié.
(L'article 31 ter est adopté.)
Article 31 quater A (priorité)
(Supprimé)
Mme la présidente. L'amendement n° 291, présenté par Mme Espagnac, MM. Guillaume et Cabanel, Mme Bataille, MM. Botrel, Camani, F. Marc, Miquel, Sueur, Vincent, Yung, M. Bourquin, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Montaugé, Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'évaluation de l'article L. 441-8 du code de commerce.
La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation a introduit une clause de renégociation pour traiter la question des variations de prix liées à la volatilité des prix des matières premières.
La mise en œuvre de cette mesure s’est révélée compliquée et il n’est pas évident qu’elle atteigne ses objectifs. Une évaluation de son application permettrait d’envisager les ajustements possibles d’un tel dispositif.
Le présent amendement a pour objet de rétablir l’article 31 quater A, supprimé en commission, car celui-ci prévoyait la remise d’un rapport sur l’évaluation de la mise en œuvre de la clause de renégociation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Tout d’abord, je le rappelle, le Sénat n’est guère favorable à la multiplication des demandes de rapports.
En revanche, ma chère collègue, votre amendement soulève une question qui mérite d’être abordée devant M. le ministre.
Un rapport sur l’application de la loi LME a été demandé par M. le ministre Emmanuel Macron aux services du ministère de l’économie et devrait être rendu d’ici à la fin de l’année. Il conviendrait que ce rapport contienne un chapitre sur l’application de l’article L. 441-8 du code de commerce qui a été certes créé après la loi LME, mais qui est l’un des éléments de l’édifice de formation des prix qu’il faut revoir complètement. Évitons d’élaborer des rapports distincts, portant sur chacun des sujets, sans vision d’ensemble.
Je vous interroge donc, monsieur le ministre, sur la pertinence d’intégrer cette demande au rapport qui devrait être prochainement remis à M. Macron.
En tout état de cause, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Le rapport sur l’application générale de la loi LME porte sur la clause de renégociation de la loi relative à la consommation, dite loi Hamon.
Cette loi a créé une obligation de renégocier le contrat conclu entre fournisseurs et distributeurs, lorsque les coûts de production augmentent, alors que les prix des produits stagnent ou baissent : cette situation peut conduire à un effet de ciseaux, puisque les coûts de production peuvent avoir un effet sur la marge.
Or, depuis le vote de cette loi, cette clause de renégociation liée à la hausse des coûts de production n’a jamais été mise en œuvre, car les coûts de production baissent. On aura donc peu de recul par rapport à l’application de cette disposition.
Cela étant, cette question peut tout à fait justifier la remise d’un rapport spécifique. Je n’ai d’ailleurs pas d’opposition de principe sur le sujet. On pourrait tout autant discuter de ce sujet particulier en commission.
Par conséquent, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je rejoins la position de M. le rapporteur pour avis : trop souvent, les rapports s’empoussièrent dans les ministères et ne parviennent pas jusqu’au bureau des assemblées parlementaires. Pour autant, il est juste d’appeler à une évaluation du dispositif.
Mais, madame la présidente, mes chers collègues, quand le Parlement s’engagera-t-il concrètement dans le contrôle et l’évaluation des lois ? Nous ne remplissons pas correctement cette mission. Nous sommes, le plus souvent, en train de légiférer, et nous ne consacrons pas le temps nécessaire à l’évaluation des lois et à leur application.
Il appartiendrait donc à la commission de prendre cette initiative et, ensuite, de revenir devant l’assemblée, plutôt que d’attendre la production d’un rapport, dont on ne verra peut-être jamais la couleur !
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. Je rappellerai simplement à mon collègue que la suppression de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois date du retour d’une majorité de droite au Sénat…
M. François Pillet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Ses compétences ont été transmises à toutes les commissions permanentes !
Mme la présidente. En conséquence, l’article 31 quater A demeure supprimé.
Article 31 quater (priorité)
La deuxième phrase du 1° du I de l’article L. 442-6 du code de commerce est ainsi modifiée :
1° Après le mot : « animation », sont insérés les mots : « ou de promotion » ;
2° Les mots : « ou encore » sont remplacés par le signe : « , » ;
3° Sont ajoutés les mots : « ou de la rémunération de services rendus par une centrale internationale regroupant des distributeurs ». – (Adopté.)
Article 31 quinquies (priorité)
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 292 est présenté par Mme Espagnac, M. Guillaume, Mme Bataille, MM. Botrel, F. Marc, Miquel, Sueur, Vincent, Yung, M. Bourquin, Cabanel, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Montaugé, Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 545 rectifié est présenté par MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier, Vall et Hue.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
À la troisième phrase du deuxième alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce, les mots : « deux millions d'euros » sont remplacés par les mots : « cinq millions d'euros ».
La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l’amendement n° 292.
Mme Frédérique Espagnac. Cet amendement a pour objet de rétablir le renforcement des sanctions susceptibles d’être prononcées en cas de pratiques commerciales abusives, tel que l’Assemblée nationale l’avait adopté.
Vous comprendrez, mes chers collègues, toute l’importance de cet amendement, sur lequel, je l’espère, nous pourrons trouver la même unanimité que celle que nous avons obtenue, hier soir, sur un autre sujet. Il importe, effectivement, que nous puissions envoyer un signal fort sur cette question.
Il est donc proposé de porter le plafond des sanctions de 2 à 5 millions d’euros, un montant plus adapté au chiffre d’affaires des grands groupes industriels.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 545 rectifié.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne vais pas répéter la très bonne argumentation de ma collègue Frédérique Espagnac.
Toutefois, j’ai regretté lors de la discussion générale que ce texte, qui, disons-le, est un peu fourre-tout – et je suis gentil ce matin –, ne constitue pas vraiment un outil de lutte contre les délits financiers. J’ai observé que les délits d’abus de marché sont très peu sanctionnés chez nous, au regard, par exemple, des sanctions appliquées aux États-Unis. Les amendes distribuées par les autorités de régulation vont du million au milliard : voyez la différence, mes chers collègues !
Face à un problème dont la gravité est avérée, l’augmentation des peines sanctionnant ce type de délits me paraît pouvoir amener un peu de raison dans le fonctionnement des marchés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Je rappelle que le montant de 2 millions d’euros a été fixé en 2014 et que de nouvelles modalités de calcul de l’amende susceptible d’être prononcée à l’encontre d’une entreprise dépassant sciemment les délais de paiement autorisés ont été instituées à l’occasion du vote de la loi, dite Macron, du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Je pense, notamment, à l’introduction d’une amende au montant proportionné au chiffre d’affaires, ce qui constitue une arme redoutable.
Mais il semble, à ce jour, qu’aucune peine n’ait été prononcée dans le cadre du nouveau dispositif. Évidemment, la commission des affaires économiques souhaite que les acteurs adoptant, sciemment, une attitude prédatrice à l’égard de leurs cocontractants soient justement sanctionnés. Elle a néanmoins considéré que la palette de sanctions existantes était suffisante et qu’il était prématuré, moins d’un an après sa dernière modification, de changer une nouvelle fois le dispositif.
Appliquons déjà les mesures votées voilà un an, avant d’envisager de modifier la loi ! L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Le Foll, ministre. Je comprends la logique consistant à jouer sur une augmentation des amendes, mais, effectivement, il faut d’abord s’assurer que l’on applique bien ce que l’on vote ! Cela doit être la règle, même si, peut-être, certains renforcements sont à envisager !
Je m’en remettrai donc à la sagesse de la Haute Assemblée. Je comprends, je le répète, la logique du renforcement, mais, de nouveau, nous devons être honnêtes envers nous-mêmes : il faut être extrêmement rigoureux sur l’application des lois que nous votons. S’il est louable de vouloir, chaque fois, en rajouter, cela fait-il vraiment bouger les lignes ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne pense pas que le Parlement soit responsable de la non-application des textes de loi, ou alors c’est une évolution récente !
En tout cas, je constate une fois encore à quel point la tolérance pour les délits financiers est grande. Ce ne sont pas vraiment des délits, diront certains, juste de l’inattention ! Et pendant ce temps-là, tout continue !
Rappelons, dans un autre domaine, les délires auxquels nous avons assisté sur la question des délits à caractère sexuel, avec l’instauration de peines bien supérieures à celles qui s’appliquent aux autres atteintes aux personnes.
Mais, dans le cas présent, tout va bien, il n’y a rien à changer et, bien évidemment, nous luttons contre la corruption !…
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous ne pouvez pas dire que nous n’avons rien fait, monsieur Collombat ! La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, a effectué plus de 70 contrôles ; une enseigne importante de la grande distribution a été perquisitionnée, avec le risque, depuis la loi Macron, d’une sanction représentant 5 % du chiffre d’affaires.
M. Pierre-Yves Collombat. C’est votre travail !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui, c’est le travail du Gouvernement et celui des services de l’État, mais je ne peux pas laisser dire que nous ne le faisons pas ! Entre 2014 et aujourd'hui, nous avons agi et mis en œuvre la loi.
On peut considérer que le montant des sanctions est insuffisant et vouloir le porter à 5, à 7 ou à 8 millions d’euros. C’est un autre débat, sur lequel je m’en suis remis à la sagesse de votre assemblée. Mais je n’accepte pas que l’on puisse laisser penser que l’État n’a pas fait son travail depuis le vote de la loi. Il le fait, et continuera de le faire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.
Mme Frédérique Espagnac. L’État fait son travail, bien sûr, mais je crois qu’il peut faire encore mieux ! J’y insiste, cet amendement est important. J’entends les propos de M. le ministre s’agissant des conséquences réelles, mais il faut pénaliser un certain nombre de comportements. C’est pourquoi je souhaite que le plafond, pour ces sanctions, soit porté à 5 millions d’euros.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 292 et 545 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 31 quinquies demeure supprimé.
Article 31 sexies (priorité)
(Non modifié)
L’article L. 412-5 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation, est ainsi rédigé :
« Art. L. 412-5. – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives à l’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication de l’origine est rendue obligatoire pour le lait, ainsi que pour le lait utilisé en tant qu’ingrédient dans les produits laitiers et pour les viandes utilisées en tant qu’ingrédient dans les produits transformés, à titre expérimental à compter de la publication de la loi n° … du … relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique et jusqu’au 31 décembre 2018.
« Les modalités d’application de l’indication de l’origine mentionnée au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État et conformément à la procédure définie à l’article 45 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission. »